Roadtrip, bad(?)trip.

Du Pétro-Canada près d’Henri-Bourrassa jusqu’au nord du lac-saint-jean, je vous concocte une fable de Noël basée sur deux portraits qui ont marqué mon épopée. Peut-être qu’une troisième personne fera partie du conte. C’est le genre de chose qui peut arriver quand on vit une histoire pendant qu’on l’écrit à mi-chemin, quelque part entre Sainte-foy et la Gare du Palais.

Parce que je ne suis pas Jean de la Fontaine, je vous offre la morale avant l’histoire. Ça commence mal… Un peu d’adversité qui se transforme en curiosité. De là, on passe par l’écoute, pour mieux comprendre le sens du mot respect. Bref, le genre d’attitude essentielle pour saisir ce que les Indignés ont à dire, surtout quand ça dérape. Pour ce faire, deux exemples:

Le premier anime à Radio X en Abitibi.Malgré mes gros préjugés contre cette station, j’ai pas rouspété quand il s’est assis à côté de moi dans l’autobus. Il était sympathique, le genre de gars qui est trop de gauche pour ceux de la droite et trop de droite pour ceux de la gauche. Quelqu’un d’intègre. Il me parle d’éthique, de féminisme et des Nordiques. Comme quoi, faut pas tous les prendre pour des Jeff Fillion.

Une rencontre née au hasard d’un siège double d’Intercar alors que je m’étais levée à 5h en pensant dormir dans l’auto pendant que quelqu’un me co-voiturait jusque chez moi… Et ben non.

La deuxième est une dame. Ses yeux sont cross-sided, elle se parle à voix haute pour se dire de se calmer et que ça va bien aller. Mes problèmes du jour me semblent subitement futiles comparés aux siens. Bonjour Madame! Je la salue, hésitante. C’est dur de savoir à qui elle s’adresse, elle ne regarde personne. C’est là que j’aperçois sa canne d’aveugle et que je me trouve particulièrement conne d’avoir eu cette réflexion. Elle me parle un peu de Noël et de famille avant de lâcher: Je vais vous donner 2,25$! Allez me chercher un café, deux crème, un sucre, avec un peu d’eau froide dedans pis pas trop plein, au 3/4. C‘est vraiment une des commandes de café les plus spécifiques que j’ai jamais entendues. Et j’en ai eu des commandes fuckées, foi de barista! Je me répète en boucle ses préférences en attendant mon tour pour commander son café, pour être sûre de rien oublier.

Ma B.A. est faîte, je pourrais très bien m’éloigner pour éviter de devoir communiquer avec elle. Mais j’ai envie de l’entendre. En plus, j’ai le temps: le gars de Radio X m’offre un lift, on attend sa blonde. Je lui retourne ses questions sur la famille, Noël, etc. Quand elle apprend que je suis journaliste, elle est toute énervée: Connais-tu Claude Poirier!?! Pas personnellement que je lui dit, même si je lui ai serré la main une fois. (vraiment random: j’allais défiler pour Jean Airoldi à TVA, jadis…) Reste que je l’ai rencontré et ça semble magique pour cette dame: ses cheveux sont de quelle couleur? Est-ce qu’il est grand? Ou gros? Est-ce qu’il se choque quand quelqu’un l’appelle dix fois pour qu’il le sorte de prison? Je suis pas sûre d’avoir la réponse à toutes ses questions. Reste que la dame est marginale. Un étudiant en socio m’a déjà glissé que la marginalité dépend des critères fixés par la société; ça définit ce qui est normal.

Si tout le monde avait les yeux cross-sided et trippait sur Claude Poirier, c’est moi qu’on pointerait en riant avec mes yeux réguliers et ma préférence pour Isabelle Richer.

J’hésitais encore aujourd’hui à recopier texto mon entrevue d’indignés, j’avais peur que vous les pointiez du doigt en riant de leur marginalité. J’espère que ma fable vous permettra de mieux saisir comment je les perçoit. Les deux rencontres dépeintes ci-haut me semblent nécessaires pour mieux comprendre, peut-être que j’ai tort pis que vous savez déjà tous ça, mais bon, c’est dit! Pour être complètement à l’anti-thèse des fables de la Fontaine, laissez moi terminer sur le début de l’histoire:

J’ai attendu en vain Amigo Express ce matin. L’art d’acheter un départ à 6h du mat, vendredi le… 6 janvier. Départ d’Henri-Bourrassa jusqu’à Chibougamau en passant par le lac st-jean; à qui la chance?