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Les amours de voyage

Je les appréhende. Déjà que partir de Montréal, c’était compliqué… J’ai de la misère à me faire à l’idée que je vais devoir quitter cette végétation exotique qui borde les fenêtres de cet appart dans le Nord de Sydney. On rencontre et on oublies. On aime et on s’en va. C’est pour ça qu’à Paris, j’avais écrit quelque chose comme ça à un philosophe argentin qui m’avait sorti souper, canard et champagne, dans un resto bâti dans la maison de Victor Hugo:

Bonsoir Léo,
Je sors du cinéma et j’ai pas pu m’empêcher de t’écrire. Je sais pas comment commencer… Je suis allée voir El secreto de sus ojos et voilà Buenos Aires et l’espagnol, j’ai évidemment pensé à toi.

Je me demandais pourquoi on ne se voit plus. Peut-être que je ne suis qu’une fillette un peu trop fleur bleue et naïve. Mais voilà, il y a deux choses :

1- Je n’aime pas rappeler les gars. Ma maman me disait quand j’étais petite que si un garçon ne te rappelle pas c’est qu’il n’est pas intéressé. Moi et ma mère, on s’entend pas du tout, sur absolument rien. Mais sur ça… Je la crois. Alors, c’est pour ça que je n’ai pas insisté.

2- Dans le film, ils sont sur le point de s’embrasser et il ose ne pas le faire, simplement la frôler, avant d’embarquer dans le train et de faire semblant de l’oublier pendant 25 ans.

Tu sais bien, tu l’as vu ce film. Et puis moi, en train de manger une glace citron-chocolat, je me demande si un jour, je ne vais pas me remémorer ce moment en pensant à toi. Comme il dit dans le film « Cessez de vous remémorer sinon vous aurez mille passés et pas de futur. »

J’ai peur qu’un jour je regrette. Alors je lance une perche avant que notre histoire se termine et qu’elle ne devienne qu’un détail dans le tourbillon de nos vies.

C’est ridicule, je sais, parce que d’abord on sait même pas si on s’aime.

Et en plus, on a pas vraiment le temps d’essayer… Je pars mercredi midi pour la Grèce, l’Italie, la Croatie et le Monténégro en roadtrip avec ma cousine. Ça va être intense!

Mais sache que je n’oublierai pas mon premier baiser parisien à la lueur d’un réverbère sur l’île Saint-Louis tout près de la Seine.

Et voilà, je t’écris que pour ça. Parce que j’ai vu un film qui m’a profondément touchée. Parce que je suis sûrement un peu trop fleur bleue. Parce que j’ai envie de grandiose et de romantisme et que nous deux ça a si bien commencé… Parce que je ne sais pas dire au revoir,
simplement.

Parce que j’ai peur de me souvenir de nous dans 25 ans et de réaliser que j’ai passé à côté de toi. Et que peut-être que je serai mariée et que j’aurai des enfants et que je serai heureuse. Mais peut-être qu’il me manquera un petit quelque chose. Alors, je le dis maintenant. Sans trop me soucier du résultat.

Sache seulement qu’hier soir, j’ai beaucoup pensé à toi.

Dans le petit matin australien, je relisais ces mots en me demandant ce qu’il était devenu. Les amours de voyage, c’est juste la preuve que l’âme soeur n’existe pas. Un homme qui m’attend à chaque aéroport? Tant mieux. Je crois que le bonheur est possible partout, impossible de se tromper.

Suffit de choisir? Le problème, c’est que ce verbe rime avec buffet chinois. Même devant les lampes chauffantes de Tomas’Tam, j’arrive jamais à me décider. J’imagine qu’un jour, mon plat préféré va finir par se manifester.