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Non, on n’a pas trouvé des extra-terrestres!

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Depuis quelques jours, ma boîte de courriels se remplit de messages de mes contacts portant sur l’éventuelle découverte d’une civilisation extra-terrestre. Voici en gros l’histoire.

Il y a quelque temps on a découvert une étoile au comportement bizarre dans les données de la mission Kepler. Cette mission utilise un télescope pour observer un grand nombre d’étoiles à la recherche de minuscules fluctuations d’intensité lumineuse. Ces fluctuations permettent d’ausculter les étoiles en utilisant la technique de l’astérosismologie ou encore de détecter le passage de planètes devant l’étoile. Une mission couronnée de succès, car elle a jusqu’ici détecté 1030 planètes.

Or, dans les 150 000 étoiles observées par Kepler, il y en a une particulièrement bizarre : KIC 8462852. (C’est pas très poétique, mais je vous met au défi de trouver des noms géniaux à des milliards d’étoiles!) Il s’agit d’une étoile légèrement plus chaude et lumineuse que le Soleil qui serait tout ce qu’il y a de plus ordinaire sauf que sa luminosité change de façon brutale (20 %) et de façon erratique. Il est à noter que ce sont des astronomes amateurs participants au projet de science citoyenne Planets Hunters qui les premiers ont noté son comportement exotique.

L’explication la plus simple serait des nuages de poussière qui bloquent de temps à autre la lumière, mais ces derniers devraient émettre de la lumière dans l’infrarouge, ce qui n’est pas observé. Dans leur article, les chercheurs concluent que la cause la plus probable est des nuages de comètes. Des observations complémentaires devraient suivre dans les prochains mois pour éclaircir ce mystère. Histoire à suivre donc.

Cependant, l’histoire ne s’arrête pas là. En voyant les courbes, Jason Wright, astronome à l’université de Pennsylvanie, a songé à l’hypothèse qu’il pouvait s’agir d’un exemple de technologie extra-terrestre. Il est d’ailleurs à écrire un article scientifique et une demande de temps de radiotélescope pour examiner plus en détail cette étoile. C’est de là qu’est partie la panique.

Pour mettre les choses en contexte, il faut savoir que lorsque l’on parle de civilisation extra-terrestre, on essaye de garder l’esprit le plus ouvert possible. Toutes les possibilités respectant les lois connues de la physique sont donc acceptables comme hypothèse de travail. Ceci fait partie donc de la démarche scientifique normale.

Dans le cas présent, on cherche la signature d’une supercivilisation extra-terrestre. En 1964, l’astronome soviétique Nikolaï Kardashev, a proposé une échelle pour décrire le niveau de développement technologique des civilisations. D’abord, il y a le niveau I, des civilisations qui contrôlent l’ensemble de l’énergie de leur planète. Au niveau II, elles contrôlent l’ensemble de l’énergie de leur étoile et au niveau III, l’ensemble de l’énergie de leur galaxie. On peut imaginer des civilisations de niveau IV qui contrôlent l’ensemble de l’énergie de l’Univers. L’astrophysicien américain Carl Sagan a imaginé une échelle continue répondant à la formule K=(log10 W – 6)/10, où K est le niveau de Kardashev et W la puissance consommée en W. En 2014, la consommation mondiale d’énergie était de 13 045 Mtep, soit 5,5 x1020 J ou 17,3 TW. Ce qui veut dire que nous sommes une civilisation de niveau 0,72 selon cette échelle.

Échelle de Kardashev
Échelle de Kardashev

Les effets de la croissance exponentielle étant ce qu’ils sont, il suffit de quelques siècles de croissance soutenue pour atteindre le niveau I et quelques millénaires pour atteindre les niveaux II et III. Par conséquent, si des civilisations avancées poursuivent leur croissance, elles devraient avoir des activités dont les effets sont directement détectables par les observations astronomiques.

Au cours des années, les astronomes ont imaginé toutes sortes de signatures de telle civilisation. Par exemple, on pourrait détecter des traces de signatures chimiques artificielles (ex : des déchets nucléaires) dans l’atmosphère des étoiles ou des planètes. Des traces de signaux laser pourraient aussi être détectées, comme l’utilisation de réflecteurs solaires géants pour éclairer la nuit. À l’autre extrême, Hubert Reeves a imaginé que les civilisations avancées pourraient modifier leurs étoiles pour en augmenter l’espérance de vie. On pourrait aussi détecter la signature des moteurs de vaisseaux spatiaux ou même la trace de sonde interstellaire dans le système solaire.

Dans le cas présent, on pourrait observer la signature d’une sphère de Dyson partielle. Décrire en 1960, par le physicien Freeman Dyson, il s’agit d’une sphère entourant une étoile pour collecter son énergie. Une sphère rigide n’est pas possible, mais une multitude de petits collecteurs solaires pourraient avoir le même effet. Une sphère de Dyson partielle pourrait aussi être utilisée par des extraterrestres imaginatifs et ayant beaucoup de ressources pour attirer l’attention sur eux!

Ne reculant devant rien, plusieurs chercheurs ont déjà cherché de telles sphères sans succès. Il y a même eu des recherches visant à détecter des civilisations de niveau III en partant de l’hypothèse qu’une civilisation galactique aurait énormément de ces sphères, ce qui augmenterait les émissions infrarouges aux dépens des émissions visibles. Encore là, pas de détections concluantes. On pourra dire ce que l’on voudra, les astrophysiciens ne sont ni bornés, ni n’ont peur du ridicule.

Advenant l’improbable conséquence qu’il s’agisse réellement de la signature d’une civilisation extra-terrestre, on peut faire quelques déductions supplémentaires. D’une part, comme elle se trouve à 454 parsecs de la Terre (1500 années-lumière), cela veut dire que dans une sphère de 50 000 000 d’étoiles, on trouve deux civilisations technologiques. Or, il y a entre 200 et 400 milliards d’étoiles dans notre galaxie, ce qui revient à dire qu’il y aurait jusqu’à 16 000 civilisations extra-terrestres. Les civilisations de niveau II étant beaucoup plus faciles à détecter, le nombre total de civilisations technologiques seraient donc énormément plus grand et la majorité des civilisations étant beaucoup plus jeunes et moins puissantes. Par conséquent, nos plus proches voisins ne seraient pas très loin.