Il y a de ces découvertes qui vous laissent une drôle d’impression. Vous vous dites que cela ne peut pas être vrai, mais vous ne trouvez pas non plus de raison pour lesquelles elles seraient fausses.
C’est le cas d’une observation du professeur Ermanno Borra et de son étudiant Éric Trottier de l’Université Laval, qui vient d’être acceptée pour publication par la revue PASP, et qui pourrait être interprétée comme un signal lumineux en provenance de civilisations extraterrestres. Entre vous et moi, cela fait quelques années que cette découverte a été faite et ce n’est que maintenant qu’elle a été publiée parce que cela a été long de convaincre un comité de lecture.
J’ai personnellement suivi cette recherche depuis quelques années. Ermanno Borra est un de mes anciens professeurs à l’université et j’ai gardé une bonne relation avec lui. Alors, parfois quand on se croisait au hasard au centre d’achat, je lui posais une question sur cette recherche tout en soumettant des hypothèses plausibles pour ses observations.
L’idée d’utiliser des lasers comme moyen de communication entre civilisations interstellaires a été proposée pour la première fois par Charles Townes et Robert Schwartz en 1961. Dans le cas présent, on parle d’impulsions dont la durée serait de l’ordre de la femtoseconde (10-15 s). Ces impulsions sont si courtes qu’elles sont essentiellement de la lumière blanche. De plus, elles seraient émises en train périodique rapproché dans le temps, ce qui donnerait un motif périodique dans le domaine spectral. Ce motif pouvant être aisément détecté par une analyse simple des spectres stellaires intégrés, et ce même avec un petit télescope.
L’histoire ne s’arrête pas là. En examinant 2,5 millions de spectres du Sloan Digital Sky Survey, l’équipe de chercheurs québécois a trouvé 234 étoiles présentant ces oscillations périodiques, principalement de type F2 à K1 donc pas très différentes du spectre solaire, et jamais sur des galaxies. Ce signal est aussi observé pratiquement toujours à la même fréquence temporelle et correspond à quelques cent millièmes de la puissance de l’étoile (10-5).
L’explication la plus plausible est un effet instrumental. En effet, n’importe quel type d’interférence produit des oscillations périodiques. La difficulté de trouver une source probable vient du fait que le phénomène est observé que chez une étoile sur dix mille, pas toujours au même endroit dans le champ de vue et pas toujours sur les mêmes fibres qui transportent la lumière et en plus sur les deux bandes de longueurs d’onde (bleu et rouge) du spectromètre. Optiquement, cela ne peut donc venir que d’une composante optique de ~250 μm d’épaisseur commune aux deux bandes spectrales et donc situées en amont du spectromètre. Le problème est que le train optique étant relativement simple, il n’y a pas vraiment de composante qui pourraient expliquer cela.
Les fibres elles-mêmes sont des sources potentielles. Historiquement, les spectromètres à fibre présentaient beaucoup de franges d’interférences. Dans le cas présent, elles ont un diamètre de 120 mm, ce qui semble inadéquat. De plus, la rareté du phénomène pose des problèmes si l’on suppose un défaut avec les fibres. L’autre problème est que c’est la préférence pour les étoiles possédant certains spectres, ce qui complique encore les choses comme me là fait remarquer le professeur Borra en communication privée.
L’hypothèse extraterrestre présente aussi son lot de difficultés. En effet, pourquoi utiliseraient-ils toujours la même fréquence ? Par ailleurs, il faudrait qu’ils nous visent avec leur laser parmi une multitude d’objets.
Avoir à parier, je miserais sur un effet bizarre d’interaction optique au niveau de la tête des fibres. Il est probable qu’un effet spatial soit en jeu, car le phénomène n’est pas observé pour les galaxies qui sont une source étendue. Cependant, ma connaissance des fibres optiques est trop limitées pour aller plus loin dans cette hypothèse.
Évidemment, la façon la plus simple d’en avoir le cœur net est de prendre des spectres de ces étoiles avec un autre instrument et de voir si le signal est présent. Il ne reste plus donc que de remplir une demande de temps de télescope ou de rechercher les archives pour voir si ce signal existe réellement.
Ajout à 15:52 le 12 octobre
L’équipe du Berkeley SETI research center a ajouté quelques étoiles repérées par les chercheurs québécois à son programme de recherche avec le télescope Automated Planet Finder dont le spectromètre possède des caractéristiques semblables à celles du Sloan Sky Survey,. Il devrait donc y avoir une vérification indépendante bientôt.
Cher Monsieur Dutil,
Votre suggestion est la meilleure, pour trancher, il faut observer avec un autre appareil. Si le phénomène persiste, on pourra toujours s’énerver un peu…
En effet, plutôt que de chercher un problème avec un appareil d’observation complexe, il serait avisé de répéter l’observation avec un autre appareil et si possible avec un appareil d’observation d’une conception différente ou d’une plus récente génération.
On ne peut que souhaiter bonne chance au professeur Borra dans sa quête!
En fait, l’instrument est simple, mais le signal est faible. Alors, la cause peut ne pas être évidente, car ce signal n’a jamais été étudié auparavant.
On devrait en avoir le cœur net assez rapidement avec les observations de Berkeley.
Bonne fin de journée, les gens de Québec et tout le monde;
il me parait normal que plusieurs rayon laser pointe vers la Terre, car des civilisations avancé a moins de mille années lumière de la Terre, ont certainement vu notre atmosphère avec leur télescope équipé de filtre pour masqué la lumière du Soleil, une fois que les Terriens auront des filtres stellaires suffisant, ils pourront voir l’atmosphère des exoplanètes et on aura qu’a pointé aussi nos lasers sur les planètes les plus prometteuses.
Possible, mais vous pouvez envoyer des signaux dans le vide pendant des centaines de millions d’années.
Ce qui est embêtant aussi, c’est que la fréquence est la même. À moins d’avoir un club galactique, cela ne fait pas de sens.
Merci pour ce compte-rendu très utile. Voilà une énigme intéressante et une explication rationnelle. Je suis heureux de constater qu’un scientifique auteur d’un message SETI appuye l’hypothèse des parasites proposée par les auteurs même de l’article. C’est une façon bien concrète et compréhensible par tous de taire les rumeurs relatives aux éventuels extraterrestres propagées par certains rédacteurs en manque d’imagination et ayant une propension à ignorer et biaiser les informations scientifiques qu’on leur fournit. Affaire à suivre.
Un article sur le sujet en anglais dans Space.com: https://www.space.com/34541-alien-life-search-possible-seti-signals.html