Mon dernier billet sur la démocratie étudiante a suscité de vives réactions chez quelques lecteurs, de même que chez mon ami Étienne, qui me répond ici. Ne serait-ce que pour éviter tout malentendu, je revisite la question.
Un des problèmes dans ce débat (et j’en suis coupable, autant sinon plus que les autres), c’est l’utilisation de grands mots comme « démocratie », « libéralisme », « collectivisme », « individualisme », « liberté », « dissidence », etc. Ces mots ne sont pas dépourvus de sens, et ils sont parfois nécessaires, mais il arrive aussi qu’ils prennent tellement de place — parce que chacun peut y projeter les nuances qu’il veut — qu’on finisse par perdre l’essence ou la portée d’un texte. Je vais essayer de ne pas les employer ici.
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Imaginez que vous invitiez 20 amis à bruncher dans un restaurant pour célébrer la naissance de votre fils. Vous réservez une salle spéciale pour l’occasion. Tout le monde se pointe à l’heure. Au moment de faire un toast, vous annoncez triomphalement que votre fils s’appellera Ringo.
Vos amis sont consternés par ce choix. Ils considèrent que votre fils sera raillé toute sa vie pour son nom ridicule.
Vos 20 amis entament donc des discussions structurées autour de la table. Ils débattent de propositions. Après une heure, ils votent sur trois options retenues par le groupe. L’assemblée décide finalement, à la majorité, que votre fils s’appellera Gaston.
Cette décision peut-elle vous être imposée? Bien sûr que non. Pourquoi? Parce que vous n’avez pas consenti à ce qu’on vous retire le droit de nommer votre fils pour le confier à une assemblée de vos amis. Et parce qu’aucune loi ou règlement ne donne à votre groupe d’amis le pouvoir de refuser le nom que vous avez choisi pour votre fils, voire d’en choisir un autre à votre place.
Peu importe que vos amis appliquent le Code Morin, que tous soient entendus, et que les votes se tiennent à main levée ou par bulletin secret, le groupe n’a tout simplement pas le pouvoir de choisir pour vous le nom de votre enfant, même s’il vote à l’unanimité contre vous.
L’État, lui, peut refuser le prénom de votre enfant, si le directeur de l’état civil le juge “inusité, prêtant manifestement au ridicule, ou susceptible de déconsidérer l’enfant”. Il peut le faire parce que c’est l’État, qui s’impose à tous.
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ll va sans dire que, contrairement à une assemblée de 20 amis au resto, plusieurs groupes ont, dans les faits, le pouvoir d’imposer leurs décisions à leurs membres: des syndicats, des ordres professionnels, des syndicats de copropriétaires, etc.
Mais ce pouvoir ne sort pas de nulle part. Il n’apparaît pas simplement en vertu du droit fondamental d’association, conjugué à un quelconque pouvoir de toute majorité de conscrire la minorité.
Le droit de certaines associations d’imposer leurs décisions découle soit d’une loi (comme pour les ordres professionnels), soit de dispositions du code civil (comme pour les syndicats de co-propriétaires) ou alors du consentement des parties, via un contrat auquel elles choisissent d’adhérer et qui définit les droits et les pouvoirs de chacun.
Considérant leurs pouvoirs, un ordre professionnel, un syndicat de copropriétaires ou une assemblées d’actionnaires peuvent-ils décider du nom de votre enfant? Bien sûr que non, encore une fois. Leurs pouvoirs sont définis et limités par la loi ou par contrat.
Et si rien dans la loi ou le contrat n’indique que ces associations n’ont pas le pouvoir en question, faut-il conclure que la situation est ambiguë?
C’est ici qu’intervient la citation (comique) de Winston Churchill contenue dans mon dernier billet: « En Angleterre, tout est permis, sauf ce qui est interdit. En Allemagne, tout est interdit, sauf ce qui est permis. En France, tout est permis, même ce qui est interdit. En U.R.S.S., tout est interdit, même ce qui est permis. »
Les deux premières phrases de Churchill présentent deux régimes politiques opposés: un où les gens sont libres jusqu’à preuve du contraire, et l’autre où ils sont « prisonniers du groupe » jusqu’à preuve du contraire.
Si on adopte comme principe que les gens sont fondamentalement libres de leurs actions et de leurs décisions — à moins qu’une loi ne précise explicitement une limite, ou que ces mêmes gens aient librement consenti à renoncer à leur liberté par contrat — il s’ensuit que toute « ambiguïté » sera résolue en faveur de la liberté des gens et contre le contrôle du groupe. C’est pourquoi tout le monde sait très bien qu’une assemblée de copropriétaires ne peut pas nommer vos enfants: tout ce qui n’est pas inclus dans ses pouvoirs échappe nécessairement à sa gouverne.
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Comment tout ceci s’applique-t-il aux associations étudiantes?
Elles sont constituées par la loi et détiennent certains pouvoirs. Pour tout ce qui relève de l’exercice des pouvoirs en question, personne ne doute qu’elles soient compétentes et qu’elles puissent faire appliquer leurs décisions.
Mais le droit de déclencher une grève ne fait pas partie de ces pouvoirs. Et même si le droit de grève n’est pas « explicitement exclu », il faut résoudre cette ambiguïté en appliquant le même principe qu’ailleurs: toute liberté qui n’est pas spécifiquement retirée aux individus et confiée au groupe demeure par défaut avec l’individu. (Le principe inverse m’apparait désastreux.)
En essayant de déclencher une grève et de la faire appliquer, incluant par des blocages de campus, les assos étudiantes outrepassent leur mandat, s’arrogent des pouvoirs qu’elles n’ont pas et empiètent sur la liberté des étudiants qui veulent assister à leurs cours.
Le gouvernement et les universités — comme ils l’ont fait à maintes reprises par le passé — peuvent décider, pour un temps, de tolérer ces actions et de discuter avec les assos étudiantes, pour éviter d’envenimer les choses. Mais rien ne les oblige à le faire.
Évidemment, rien n’empêche les étudiants de militer pour obtenir un droit de grève en bonne et due forme. Ils peuvent tenter de faire reconnaître leur droit devant les tribunaux. Il peuvent investir les partis politiques. Québec solidaire propose d’ailleurs de leur accorder ce droit (point C-(5)(a) de sa plateforme). D’autres partis s’y opposent. C’est normal.
Comme je l’écrivais en réponse à un commentaire sur mon dernier billet: La plupart des gens sont prêts à reconnaître le droit de grève aux travailleurs de Molson, mais à peu près personne n’accorderait un droit de grève à des élèves de 5e année. Entre ces deux pôles, il y a place à beaucoup de débats, idéalement constructifs.
Pour reprendre un des commentaire du billets précédent, il y a la question de tradition ici. Depuis que le monde est monde au Québec, donc depuis les années 60′ ;), les étudiants font des votes de grèves et impose leur choix à la minorité. C’est vrai dans les deux sens, tout le monde va en classe quand les grèves sont levé.
Votre point de droit est intéressant, mais il occulte le fait que Charest à décidé de changer la façon habituelle de faire en parlant de boycott et en encourageant les étudiants à ne pas obéir à leur majorité. Avec le résultats (prévisible) de détériorer le climat et d’exacerber les tensions.
M. Jérôme Lussier,
C’est le billet le plus intéressant, produit depuis le début 2012.
J’ai accroché à l’étallement des ; faits, observations, réalités, évidences.
Vous avez été honnêtement en profondeur et j’ai apprécié et aimé.
ben c’est ça.
récapitulons.
notre soi-disant droite, depuis février, supporte une augmentation de taxe de 82%.
ensuite, notre soi-disant droite a appuyé l’imposition d’une loi qui brime la liberté des gens.
enfin, jérome tu nous l’annonce aujourd’hui, notre soi-disant droite forcera le québec à alourdir son kit de lois en ajoutant un chapitre sur les grèves d’étudiants. et pourquoi? ben pour faire en sorte que ces grèves, à l’avenir, se déroulent comme elles se sont toujours déroulées: démocratiquement et solidairement! bref, de la bureaucratie inutile et nos beaux impôts gaspillés.
bravo la soi-disant droite!
vous notez le coté paradoxal de vos jérémiades, j’espère?
Cher @Calinours
Quelques points:
1) L’augmentation des droits de scolarité universitaire n’est pas une augmentation de taxe — c’est une hausse de tarif. C’est assez différent au plan politique. Je pense que vous le savez. Par ailleurs, cette hausse ne date pas de février dernier mais du budget de 2011.
2) La loi 78 était effectivement « illibérale » d’inspiration. Personne n’aime cette loi. Mais les libéraux (au sens philosophique) vous diront qu’elle était nécessaire parce que certaines personnes semblaient avoir oublié que la liberté des uns s’arrête là où celle des autres commence.
3) Je ne vois pas de quoi vous parlez concernant le « chapitre sur les grèves d’étudiants ». La loi actuelle est claire: il n’y a pas de droit de grève étudiante. Je n’ai pas de doute que c’est ce que les tribunaux conclueront. Les universités et le gouvernement peuvent, s’ils le veulent, négocier avec les étudiants protestataires pour éviter un aggravement de la crise, mais rien ne les oblige à le faire. Si quelqu’un veut « ajouter un chapitre » au « kit de lois », ce sont les partis qui proposent un droit de grève pour les étudiants. La proposition est recevable et discutable, mais il ne faut pas l’imputer à la « soi-disant droite » pour autant.
@jérome
1) « C’est assez différent au plan politique »
non je vois pas la différence. taxe, impôt, tarif, ponction, tribut, gabelle, contribution, tout pareil: ça me coute plus cher.
la soi-disant droite, qui plaide l’éradication de toutes ces choses, appuie une augmentation de 82%! et ce, comble de l’absurde, alors que plusieurs études prouvent que la gratuité scolaire est rentable pour l’état!
2) « Personne n’aime cette loi. »
faux. jean charest aime cette loi liberticide, francois legault aussi. et un paquet de nonos pour qui la liberté est supposément une valeur fondamentale tripent sur cette loi. t’as juste à lire le blog de joanne marcotte si tu me crois pas. ou le tien des fois.
3) « Je ne vois pas de quoi vous parlez concernant le « chapitre sur les grèves d’étudiants ». La loi actuelle est claire: il n’y a pas de droit de grève étudiante. »
je sais. c’est pourquoi j’ai conjugué au futur. c’est hypothétique, mais c’est dans cette direction que ton raisonnement nous porte:
« La proposition est recevable et discutable, mais il ne faut pas l’imputer à la « soi-disant droite » pour autant. »
certainement qu’il le faut! si la soi-disant droite, ses héros tels laurent proulx et arielle grenier, encouragés par les larbins libéraux et autres renards intéressés, n’avaient pas remis en doute la légitimité de la grève, québec solidaire n’aurait pas aujourd’hui à proposer de nouveaux chapitres à notre loi pour protéger les étudiants contre ses excès.
pour résumer, si la soi-disant droite gagne cette manche, s’instruire coutera plus cher, notre liberté sera contrainte, le code civil épaissira, les recteurs continueront à s’allumer des cigares avec des cent piasses et gabriel nadeau-dubois, le jeune idéaliste de 20 ans que charest a choisi comme épouvantail à banlieusard fera du temps en prison. et en contre-partie? rien.
encore bravo!
@Calinours
1) Il y a pourtant une différence importante entre les taxes/impôts et les tarifs. C’est la notion de « quid pro quo » — l’idée que, dans le cas d’un tarif, vous payez pour un bien/service que vous utilisez personnellement — par rapport à un impôt ou un taxe qui n’est relié à aucune mission particulière de l’État. Ça fait des mois que je veux écrire là-dessus. Vous me donnez envie de m’y mettre rapidement. Il me fera plaisir de lire vos commentaires.
2) Je n’ai entendu personne dire que cette loi était un idéal. Éric Duhaime n’était pas contre, d’ailleurs? L’esprit de cette loi était liberticide. Ceux qui l’ont appuyé l’ont fait parce qu’ils considéraient que les grévistes/manifestants menaçaient davantage la liberté que la loi en question. Mais c’est un débat légitime. Je ne m’immolerai pas pour défendre cette loi.
3) Je ne suis pas d’accord. Il n’y a jamais eu de droit de grève étudiante au Québec. Par le passé, les conflits se sont réglés sans qu’on ait à se prononcer sur la question de fond. Cette fois-ci a été différente. Certains disent que c’est la faute du gouvernement; d’autres disent que c’est la faute du mouvement étudiant qui est allé trop loin. Pas clair pour moi qu’on puisse clairement blâmer un côté plus que l’autre.
@jérome
1) et il y a une grosse ressemblance. si l’argent vient pas d’une taxe il peut venir d’une augmentation de tarif. ces deux trucs si différents selon toi sont totalement interchangeables. si on veut pas augmenter l’impôt on augmente le tarif et si on veut pas augmenter le tarif on crée une nouvelle taxe ailleurs. les vases sont communicants.
2)je peux te sortir des citations de tes confrères réactionnaires tantôt si tu veux. là j’ai pas le temps faut que je me grouille le devoir m’appelle.
3) « les conflits se sont réglés sans qu’on ait à se prononcer sur la question de fond. »
exact, le droit de grève, par le passé, était implicite, et c’était très bien comme ça: confiance et solidarité face à une force contre qui l’individu ne peut rien.
la « question de fond », dans tout cette affaire, jérome, n’est pas de savoir si les étudiants ont le droit de grève ou pas mais bien, est-ce que la hausse des frais, dans le présent contexte, est justifiée ou pas.
Tiananmen 1989 a commencé par une manifestation étudiante. N’ayez crainte, le Parti communiste chinois a depuis interdit les grèves étudiantes.
Monsieur Lussier termine sa réponse a Calinours en mentionnant :
» Par clair pour moi qu’ on puisse clairement blâmer un côté plus que l’autre »
De Quossé ????
Mais Monsieur Lussier TOUTES vos interventions sur le sujet ont pour but de DÉNIGRER et de BLÂMER les étudiants en grève depuis le début !
Arrêtez votre démagogie SVP ! Sous des apparences de gars qui essai de comprendre nous avons compris que nous avons affaire au gars qui ne veut que faire de la propagande anti-syndicale .
Je vous le demande une seconde fois ! A quand un billet sur cette » odieuse » Formule Rand ? Vos amis Duhaime et Martineau serait fier de vous !
M. Jérôme Lussier,
Vous avez le mérite de ne pas laisser vos participants(es) de votre blogue, en plan, en ayant la rigueur d’argumenter avec eux.
Nous reconnaissons chez vous, la libre pensée rationnelle dans son impartialité, ce qui n’est pas reconnue à tous les chroniqueurs de blogues.
Bravo et, continuez ainsi.
Monsieur Lussier,
un bémo, quant à votre exemple : vous parlez du prénom de «votre enfant». Effectivement, vos amis auraient beau faire une fronde contre vous pour vous obliger à changer d’avis, c’est VOTRE enfant.
Votre exemple serait beaucoup plus approprié dans le cas de la grève étudiante si vous disiez plutôt que dans votre assemblée regroupant vos 20 amis, vous décidiez unilatéralement de prénommer LEURS enfants Ringo.
Car c’est de cela qu’il s’agit. Les étudiants manifestent leur désaccord avec une décision qui non seulement ne faisait pas partie d’un programme électoral (et donc pas explicitement entérinée par la population comme faisant partie du mandat pour lequel le gouvernement a été élu, bien que le «mandat» implicite d’une campagne ne limite pas les actions d’un gouvernement pendant la durée de son règne) mais dont ils sont aussi les principaux interpellés. Toutefois, ils ne sont pas les seuls affectés puisque la totalité de l’augmentation s’appliquera alors qu’ils auront vraisemblablement terminé, ou presque, leurs études. Reste que, et c’est bien heureux, dans notre société, certains ne se préoccupent pas uniquement de leur nombril, sinon, on serait dans une dictature de la majorité.
Mais en mettant tout ceci de côté, vous comparez donc l’absence du droit de grève de votre assemblée d’amis à celui des étudiants. Et en cela aussi votre exemple est boiteux. En effet, vos amis, même si aucun droit en cela ne leur est reconnu, pourraient décider de faire la grève de VOUS, soit en ne vous fréquentant plus. C’est leur seul levier pour vous faire bouger, reste à voir s’il est suffisant. De même, les étudiants, n’étant pas une force économique de par la nature même de leur occupation, ni une masse démographique, n’ont d’autre choix que de déranger le quotidien par des manifestations et de chambouler le flux estudiantin par leur débrayage (on voit en ce moment tout le chaos que ça a engendré, et ça aurait pu être pire si la grève se poursuivait partout). Et cet effet est réel et indéniable. Et il aurait beau être littéralement illégal, ils pourraient tout de même avoir cet effet. Comme d’autres l’ont dit avant moi, les mouvements de pression de travailleurs n’ont pas attendu d’avoir le «droit» de faire la grève pour le faire (et subséquemment obtenir ce droit). Certains y ont même laissé leur vie. Personne n’est mort dans le conflit étudiant jusqu’à maintenant (heureusement) mais certains ont perdu oeil, dents et conscience.
J’en conclus donc que votre entêtement à réclamer qu’un droit de grève en bonne et due forme soit obtenu par les voies traditionnelles est non seulement un déni de l’histoire qui a mené à l’existence même d’un droit de grève reconnu à quel groupe que ce soit mais également une malhonnêteté intellectuelle certaine.
… Les travailleurs n’avaient pas le droit de faire la grêve lors des premières grèves. Et que fait-on des autres grêves étudiantes passées?!? Argument complètement invalide.
Encore un bon billet, Monsieur Lussier. Et très méritoire car le sujet de ce billet suscite toujours de vives réactions de part et d’autre. Pas commode d’écrire sur une question qui divise autant.
Grève étudiante ou boycott, qu’importe. En bout de ligne, il s’agit en pratique de refuser d’assister aux cours pour protester.
Depuis le tout début du conflit – qui semble vouloir perdurer chez certains pour des raisons qui leur sont propres – je suis d’avis que chacun a fondamentalement le droit de suivre ses convictions.
Si on préfère sécher ses cours pour protester, soit. Mais, pour le cas où l’on opterait plutôt pour poursuivre ses sessions, cela se devrait d’être un choix possible. Personne ne devrait s’arroger le pouvoir d’empêcher quelqu’un d’autre d’exercer ses droits.
De la sorte, ce qui aurait été correct, ça aurait été que les étudiants ayant opté pour le carré rouge sortent protester – et que les autres puissent aller en classe. Une avenue qui aurait ainsi été acceptable pour tout le monde, car tout le monde aurait alors pu voir ses opinions respectées.
Hélas, ce n’est pas ce qui s’est passé…
La grève n’est pas une façon de protester, c’est un moyen de pression pour forcer le gouvernement à négocier (ce qui différencie d’ailleurs la grève d’un boycott). C’est dans la rue et sur les piquets de grève que les étudiants ont protesté.
@Claude Perrier: Donc, si je suis votre logique, les employés qui sont insatisfaits de leurs conditions de travail n’ont qu’à arrêter de travailler pour protester et laisser travailler ceux à qui ça convient et tout ceux qui pourrait vouloir leur emploi à ces conditions? Après tout, il faut respecter l’opinion de tous et n’enlever à personne le droit de gagner leur vie non?
Il me semble qu’il y a un mot pour ça…
Apparemment, votre «logique» ne correspond pas à la mienne, Mme Bouchard.
Sans négliger le fait qu’entre des «étudiants» et des «travailleurs», il y a toute une marge dont il faut tenir compte.
Même si des associations étudiantes peuvent, jusqu’à un certain point, s’apparenter à des syndicats professionnels (assujetis à des normes strictes), en bout de ligne il s’agit de deux types de regroupements distincts.
Et puis, même si ça pourra paraître «simpliste», quel mal y aurait-il à permettre à des étudiants qui voudraient poursuivre leurs cours à le faire, tandis que des protestataires (sincères) préféreraient pour leur part sécher leurs cours en espérant mieux ce faisant?
La coercition des uns par d’autres ne m’a jamais particulièrement plu.
Bonne journée malgré tout, Mme Bouchard.
(Je reconnais que mon commentaire ici s’avère largement insatisfaisant mais, j’ai tellement écrit sur le sujet ces derniers mois que je m’abstiens de me répéter encore et encore…)
claude!
tu rejettes l’analogie avec les travailleurs parce qu’entre les deux groupes « il y a toute une marge » et aussi parce qu’ « il s’agit de deux types de regroupements distincts. »
malheureusement pour toi claude, ces deux (oh! que je suis magnanime!) arguments ne sont pas suffisants pour invalider l’analogie d’andréanne.
sa conclusion demeure donc: tout le sucre que tu casses sur le dos des étudiants, tu dois aussi le casser sur le dos des ouvriers, si la cohérence t’importe.
désolé.
Je respecte – beaucoup plus que d’autres – les étudiants. Ils sont en stade de formation pour leur avenir.
Or, «calinours» comme toujours là à chercher à détricoter tout, la majorité – eh oui! la majorité! – de ces étudiants a souvent été prise en «otage» par une minorité visant davantage la «résistance» que la poursuite d’études ne les intéressant possiblement pas tellement…
Mme Bouchard, dont je ne doute aucunement de la sincérité lorsqu’elle s’estime justifiée de critiquer mon intervention, ne perçoit manifestement pas la situation pour ce qu’elle est dans les faits.
Plein de ces votes à main levée, avec souvent un peu d’intimidation, a fait en sorte que des assemblées étudiantes en arrivent à décréter la grève de tous.
Quelques bouts de carton dont on aurait aisément pu faire des isoloirs auraient fort probablement permis d’éviter qu’une réelle majorité d’étudiants ne soient bloqués dans la poursuite de leur formation.
Les protestataires auraient été plus dignes de s’en tenir à eux-mêmes et de ne pas obliger les étudiants pensant différemment à perdre leurs sessions.
Dans un contexte de travailleurs syndiqués, pareil façon d’agir n’aurait pu être tolérée. Les syndicats, les vrais syndicats qui fonctionnent démocratiquement, respectent des règles. Des règles dont ont fait trop souvent fi certaines associations étudiantes. Avec pour résultat que beaucoup, à mon avis une solide majorité, d’étudiants ont été lourdement lésés.
Voilà comment je perçois la situation. Et ça, depuis le tout début du conflit.
Monsieur Perrier,
vous vous permettez visiblement de présumer de beaucoup de choses à mon sujet en disant que je ne comprends pas la situation pour ce qu’elle est. S’il faut donc que j’étale mon CV pour appuyer mon argument à vos yeux, je m’exécute. J’ai 28 ans, je suis salariée pour une entreprise privée, j’ai deux enfants et j’ai complété un baccalauréat en 2007, en histoire si je dois le préciser, domaine avec peu de débouchés rémunérateurs mais extrêmement formateur pour la pensée critique et le regard sur la société, son histoire, son évolution, ses fondements. En 2005, alors que moi-même, dû au salaire supposément trop élevé de mes parents, je n’avais pas droit au régime de prêt et bourses (et pourtant, originaire d’une région éloignée, à 10 000$ par an uniquement en dépense de logement et de nourriture, je suis ressortie de mon bac avec une importante dette d’études). Et donc, malgré mon inadmissibilité au régime, malgré le fait que retarder ma formation engendrait pour moi des coûts faramineux, malgré tout cela donc, j’étais en avant de la plupart des manifs de la grève étudiante de 2005 (qui portait je vous le rappelle sur une transformation de 108 millions de $ de bourses en prêts, sans autre modification au régime de prêts et bourses et sur lequel le gouvernement de M. Charest a reculé je vous le rappelle), et j’ai participé à toutes les assemblées générales de ma faculté, aux piquets de grève, etc. J’ai donné de mon temps, de mon argent, de mon âme à ce conflit qui ne me concernait concrètement en rien et qui ne pouvait que me nuire personnellement si ma session y passait, pour la simple raison que je crois en des principes d’égalité des chances, d’équité entre les générations, de la formation de l’individu plutôt que du futur travailleur. Et c’est pour cela MONSIEUR, aujourd’hui, parce que je suis certaine d’avoir assisté à BEAUCOUP PLUS de ces assemblées générales, supposément anti-démocratiques, que vous, alors que la boîte à vote en métal cadenassée qui datait des années 1940 était utilisée à la seconde où un participant réclamait le vote secret, où les AG étaient remises lorsque le quorum n’était pas atteint, alors que nous invitions TOUS les étudiants de ma faculté, peu importe leur point de vue, à venir se faire entendre à l’AG plutôt que de grogner dans les couloirs, à cause de tout cela monsieur, je me permets de prendre ÉNORMÉMENT offense de votre commentaire et d’à mon tour en conclure que vous êtes plein d’ignorance et de préjugés et que vous jugez une situation sur ce que vous en entendez dire sans prendre la peine de vérifier quoi que ce soit par vous-même. Je vous serai gré à l’avenir de ne commenter que mes propos sur la base de leur valeur argumentaire et de cesser de tenter de les discréditer en faisant des suppositions sur qui je suis, ce que j’ai vécu et ce que je connais.
Je n’ai jamais le moindrement douté de votre sincérité, Madame Bouchard.
Je l’ai même écrit en toutes lettres.
Et si, malgré ce que je considère avoir exprimé dans la plus grande décence et respect – ce qui n’est pas tellement ce que j’avais initialement perçu de votre première réplique me concernant – j’ai malgré tout pu vous offusquer (d’une manière que je peine à déceler), je m’en excuse très sincèrement.
Contrairement à certains intervenants ici qui ne carburent qu’à tenter de mettre le feu aux poudres, je vise plutôt à la remise à l’heure des pendules… Ça dérange, je le sais.
Je n’exprime en fin de compte que des opinions que je considère valides.
Votre désaccord est tout aussi légitime – et je vous saurais gré de ne pas me prêter d’intentions ou de quoi que ce soit d’autre qui sombrent dans la malveillance. Car la malveillance n’a jamais fait partie de mes défauts…
Bonjour M. Jérôme.
Félicitation pour votre analyse. Ça fait du bien de lire des propos qui s’appuient sur des fait et des données.
J’ajouterais que les étudiants ont conservé totalement leur droit de boycott avec la loi 78. Les asso peuvent aussi percevoir leurs cotisations. C’est le blocage des accès qui est interdit au nom d’un «droit à l’éducation».
Bon, et surtout pertinent, commentaire Monsieur Robert.
Sans surprise je ne suis pas d’accord et ça ne me donne rien d’en rajouter une couche, plusieurs vous ont déjà bien répondu.
L’épaisseur d’un code de loi nous démontre seulement comment notre société est dégénérée. C’est un peu comme les mises en garde que l’on retrouve partout. Pourquoi indiquer que le contenu d’un gobelet de café est chaud ou qu’un box à chien ne doit pas servir pour des enfants?
Dans votre exemple, vous démontrez l’absurde de la situation actuelle. Il y a une loi non-écrite ( je l’espère ) qui dit que le nom d’un enfant ne peut être choisi que par ses parents, c’est un consensus de société que personne ne questionne et c’est pourquoi l’histoire que vous faites est irréaliste. En fait, votre groupe de 20 amis se comporte comme le gouvernement l’a fait.
Sans surprise – pour vous citer… – vous avez à fois raison et tort.
Autant des tas de «mises en garde» peuvent frôler le gros ridicule, autant les «mises en garde» du gouvernement visaient, pour leur part, à préserver des droits.
Des droits de l’ensemble de la société ainsi que des droits d’une majorité d’étudiants prise en «otage» par une minorité plus intéressée par la «résistance» qu’à la poursuite de leurs études…
« toute liberté qui n’est pas spécifiquement retirée aux individus et confiée au groupe demeure par défaut avec l’individu. »
Des libertés individuelles par défaut est un concept qui n’existe pas. En accordant des droits à un groupe on ne retire pas les libertés individuelles, elles coexistent. C’est l’équilibre entre les droits du groupe et celui de l’individu qui doit être pris en considération.
En acceptant d’être membre d’une association, il se forme une obligation conventionnelle de se soumettre à la décision majoritaire. Cette décision lie tout le monde même les dissidents. Donc, lorsque la décision prise majoritairement de cesser de fréquenter ses cours, il y a un renoncement à son droit (contractuel) de fréquenter ses cours, qui s’applique à tous les membres de l’association. Il est donc faux de prétendre à un droit auquel on a renoncé même si cette renonciation est tacite.
Ce que vous écrivez laisse assez perplexe, Monsieur Sauvageau…
Car aucun étudiant n’accepte volontairement d’être «membre d’une association». Il est dans les faits contraint d’en faire partie.
Et si, lorsque cela peut se produire – et s’est hélas effectivement trop souvent produit – une «décision majoritaire» résulte d’une procédure peu démocratique (telle que celle de votes à mains levées dans une ambiance où de l’intimidation rôde), cet étudiant ayant été malgré lui contraint d’être membre se trouve lésé dans ses droits.
À la rigueur – et encore… – on pourrait arguer qu’il devrait se plier à une décision majoritaire. Mais seulement si cette décision majoritaire avait résulté d’un processus véritablement démocratique. Sinon, ses droits sont brimés. Ce qui devrait être de la plus grande évidence pour quiconque considère la question de bonne foi.
Pensez-y un peu. Apprécieriez-vous être dans la position de cet étudiant?
Je me permets d’en douter…
@ Claude Perrier
Les étudiants sont libres de sortir de leur association (art. 26§4). Le fait d’y rester est un accord tacite. Votre procédure peu démocratique selon vous, est édictée par le code civil du Québec: art. 351ccq . « Les décisions de l’assemblée se prennent à la majorité des voix exprimées. Le vote des membres se fait à main levée ou, sur demande, au scrutin secret. »
Selon vous, quand on vote une grève, elle est antidémocratique, mais lorsqu’on vote pour un retour en classe de la même façon là, c’est démocratique. Quand on vote une grève c’est par intimidation, quand on vote pour le retour en classe l’intimidation disparaît soudainement, c’est de l’encouragement sans doute! Et parlant de bonne foi sachez que la bonne foi se présume toujours : art. 2805 ccq. « La bonne foi se présume toujours, à moins que la loi n’exige expressément de la prouver. » Ceci s’applique aussi aux associations étudiantes.
Aucun vote n’est à priori antidémocratique, Monsieur Sauvageau.
Vous vous amusez à tenter de faire dire à mes propos ce qu’ils ne disent pas…
Au fond, pourquoi toutes les assemblées générales étudiantes n’ont pas eu la décence de procéder par vote secret, hum? Cela aurait alors permis de valider légitimement les résultats. Alors, pourquoi ne pas avoir procédé de la sorte?
Cette grève ou boycott n’a jamais vraiment réflété l’humeur de la majorité.
Et plein d’étudiants désireux de poursuivre leurs études ont été pris en otages par ce manque flagrant de respect du droit de tous. Des plus «militants» ont ainsi imposé à l’ensemble leur position marginale.
J’ai tort? C’est pourtant l’appréciation que je fais de tout ce gâchis.
@ Marc Sauvageau
Comme mentionné dans un commentaire précédent sur le billet initial concernant la démocratie étudiante, nombre d’étudiants ne sont pas membres de l’association de laquelle ils dépendent. Pour rappel, comme exemple, les étudiants qui préparent un certificat, une mineure, ou qui sont dans un programme bi-disciplinaire n’ont pas le droit de voter pour des cours qui pourtant les concerne, puisque pas membres de l’association. Profonde injustice à la base, cela concerne quand même un nombre important de personnes qui auraient pu faire pencher la majorité étant donné les votes serrés qu’il y a eu parfois.
Deuxièmement, ceux qui, au vu des derniers votes des Cégeps, avancent le point que « c’est drôle, on ne conteste pas la légitimité des AG lorsque le vote est en faveur d’une reprise de cours », ceux-là oublient une distinction importante.
Un étudiant qui veut étudier se voit forcer de ne pas assister à son cours. Un étudiant qui ne veut pas étudier mais pour qui les cours reprennent dû à la nouvelle décision majoritaire, et bien, on n’ira pas le chercher dans son lit, on ne va pas le forcer, s’il ne veut pas aller à son cours et si ses convictions sont « pour la grève ».
Sur votre premier commentaire, ce sont des cas d’exceptions et ce n’était pas l’objet de mon propos.
Quant à votre deuxième commentaire, je vous conseil de relire mon commentaire sur la dissidence. L’étudiant a une obligation conventionnelle de se plier à la décision de la majorité et ce faisant il abdique à son droit de retourner suivre ses cours. S’il insiste, il subira les conséquences. En ce qui concerne le vote, on ne peut dire qu’il est antidémocratique, lorsque la grève a été voté et dire ensuite que le vote est démocratique, lorsqu’on décide du retour aux études, quand les même procédures ont été suivies.
Ce que vous dites est… hum… faux, Monsieur Sauvageau.
Car aucun étudiant n’accepte «volontairement» d’être membre de son association étudiante.
Il y est contraint – et sa cotisation à ladite association est automatiquement prélevée des ses frais d’études.
Cet étudiant ne devrait-il pas au moins avoir le droit de pouvoir s’exprimer démocratiquement lors d’un vote mettant en péril la poursuite normale de ses études?
Revoyez votre vision de la situation, Monsieur Sauvageau. Vous faites fausse route de toute évidence.
Contrainte dites-vous ? Il y aurait de la contrainte si l’étudiant n’avait pas la possibilité de sortir de son association. Or, il a ce choix. art. 26(4) de LAFAEE.
Vous êtes silencieux sur le vote de retour en classe. Était-il démocratique ? Pourtant on y a procédé de la même façon.
Votre vision est basée sur des mythes, des préjugés, du ouï-dire et de l’ignorance crasse.
M. Sauvageau,
Est-ce que les étudiants manifestants auraient laissés passés des étudiants non-membres aller en classe? Non. Il n’y avait pas de kiosque où on validait si oui ou non un étudiant était membre ou non de l’association. C’est donc impertinent de discuter de la possibilité de sortir de son association – personne n’avait le droit de rentrer à cause des lignes de picketage (nonobstant leur validité ou leur justificatif).
@ Jonathan
M. Perrier me rappelait que les étudiants étaient contraints d’appartenir à une association, ce à quoi j’ai répliqué.
Vous mentionnez le piquetage qui est autre chose. Le piquetage «serré» qui empêche les gens de circuler est illégal et ne doit pas être encourager. D’ailleurs les associations étudiantes ont mis en garde leurs membres à ce sujet. Exemple ici : http://www.faecum.qc.ca/ ( milieu de la page.)
« Un étudiant qui veut étudier se voit forcé* » pardon pour la faute.