Un nouveau venu mais qui n’est pas un imposteur. Richie Faulkner a joint les rangs de Judas Priest en sachant fortement que les souliers qu’il se devait de remplir étaient gigantesques. Après tout, ce n’est pas à tous les jours que l’on te propose de remplacer un homme qui a forgé le son du métal pendant plus de 30 ans. C’est avec brio que ce jeune homme a pris sa place avec Judas Priest. Nous l’avons vu sur scène s’exécuter sur des chansons qui n’étaient pas les siennes mais avec le nouvel album, du nom de Redeemer of Souls, on sent que Faulkner(quatrième sur la photo) devait s’abreuver à la même source que ses idoles de jeunesse car sa contribution est juste… parfaite. La semaine dernière, avant que le groupe ne quitte pour la tournée qui les amène ce soir au Centre Bell, j’ai eu la chance (pendant mon heure de diner au travail) de discuter avec le guitariste. Entretien avec Richie Faulkner, guitariste de Judas Priest.
Chaque fois qu’un groupe lance un nouvel album, les membres du groupe racontent qu’ils sont plutôt fiers de ce dernier. Ils racontent que l’album sort de l’ordinaire et que le public pourra encore l’écouter dans 10 ou 20 ans. Redeemer of Souls n’est pas seulement un nouvel album du Judas Priest, c’est aussi le genre de disque que l’on pourra mettre dans notre Top 5 des albums favoris venant du groupe. Est-ce que tu sens que tu as vraiment laissé ton empreinte sur quelque chose de très important?
Je crois que c’est une excellente question. Quand tu entres dans un processus de création de ce genre, tu essaies de donner le maximum de tes capacités. Tu veux partager tes idées face aux sensations qui se dégagent de cette nouvelle production. Il arrive souvent que des albums soient vraiment conçus de la mauvaise façon, on ne peut rien y faire. Parfois, c’est le contraire et c’est construit de façon méthodique. Le but reste très simple quand on y pense : Il faut faire de notre mieux. Les albums deviennent des classiques parce que les amateurs le décident. Tout est en relation avec l’accueil face à l’album et comment ce disque va passer le test du temps au travers des années. Tu ne peux pas entrer en studio en te disant que ton album va devenir un classique instantané car cette décision ne t’appartiendra pas lorsque l’album sera disponible. C’est une question de passion face à ta musique quand tu y réfléchis bien. Les gars du groupe sont passionnés et ils pensent qu’il faut sortir de bons albums pour garder l’esprit du groupe bien vivant. Et je le crois aussi, avec Priest ou tout autre projet avec lesquels j’ai participé car tu te dois de garder cet esprit bien vivant. Les membres du groupe le font depuis des décennies quand même. Mais la réponse finale demeure entre les mains des amateurs, ce sont eux qui ont la réponse finale face aux nouvelles parutions. Pour ce qui est de ce disque, les premiers chiffres que nous avons reçus face aux ventes ont été astronomiques, si l’on prend en considération le marché d’aujourd’hui. La réaction a été forte, partout sur la planète. Nous le devons aux amateurs de métal sur le globe et comme tu le dis, il sera intéressant de voir dans quelques années comment les gens vont percevoir ce disque après tout ce temps. J’espère que nous avons réussi à créer de nouveaux classiques avec cet album.
Les amateurs ont l’impression que tu es arrivé dans le groupe comme un sauveur. Tu as injecté une bonne dose de sang frais dans le groupe. Nous avons l’impression que tu gardes la foi bien vivante! Est-ce que tu trouves ce genre de commentaire exagéré?
Je ne peux pas prendre tout le crédit pour ça. Ce groupe est le résultat de la passion qui émerge de cinq individus. Ils aiment ce qu’ils font et ils le font depuis une quarantaine d’années. Mais je comprends ce que tu veux dire. Lorsque Scott Travis est arrivé avec le groupe lors de Painkiller, les amateurs disaient justement le même genre de commentaires. L’arrivée d’un nouveau membre change la dynamique, peu importe le groupe. Ça peut être bon comme ça peut être très mauvais. C’est très vivifiant pour un groupe qui roule depuis si longtemps, de se permettre de faire ce qu’ils font sans perdre l’essence même qui était présente à l’origine. Lorsque l’un des fondateurs décide de se retirer, tu te dois de prendre une décision et Judas Priest a décidé de continuer. Comme je te disais, je ne peux pas prendre tout le crédit car tout le monde est gonflé à bloc et plein d’énergie. Je suis bien fier de pouvoir laisser mon empreinte avec le groupe car à la base, je suis un fan de Priest. Je me devais de respecter l’héritage du groupe tout en prenant la responsabilité de ne pas me mentir à moi-même et d’être vrai face à ce tout nouveau défi qui m’était présenté. Le groupe est en cure de jouvence je te dirais et je suis bien heureux d’être là avec eux.
Sur cet album, on retrouve certains titres plus lourds et rapides comme Metalizer, Battle Cry et Dragonaut. Je voulais savoir si tu étais celui qui se voulait responsable face à l’écriture des chansons que je viens de t’énumérer?
Moi, Glenn (Tipton, guitariste) et Rob (Halford, chant) sommes ceux qui ont écrit les chansons de l’album. Dragonaut est une chanson qui vient d’une idée que Glenn avait depuis un certain temps. Il n’avait que le pré-refrain et un couplet. Je suis donc arrivé avec le refrain. Ce sont donc des efforts combinés. Parfois, quelqu’un présente le squelette de ce qui va devenir une chanson. Par la suite, nous y ajoutons quelques parties additionnelles jusqu’à ce que le tout soit à notre goût. Metalizer est une chanson qui a bourgeonné dès que je suis arrivé dans le groupe. On la regardait, portion par portion en se demandant ce que l’on pouvait apporter de plus pour l’améliorer. Lors du premier jet, le couplet ne fonctionnait pas vraiment. Je suis donc arrivé avec le riff qui est devenu celui que nous avons utilisé finalement. Il arrive parfois qu’une idée toute fraîche arrive en studio. Redeemer of Souls est un travail d’équipe avant tout.
Une de mes chansons préférées sur l’album est Crossfire. Elle demeure très bluesée dans son approche. On pourrait pratiquement s’imaginer des danseuses nues faire leur tour sur scène sur cette chanson. C’est aussi une chanson qui se veut une collaboration?
Si nous devons faire un vidéo pour cette chanson, nous allons garder ton idée! Hahhahha! Nous recueillons beaucoup de réactions face à cette chanson. Nous aimons vraiment cette chanson mais jamais nous ne pensions qu’elle attirerait autant d’attention. C’est une chanson qui vient justement des racines les plus éloignées de Priest, d’où le groupe vient vraiment. C’est une pièce de blues avec une certaine progression. C’est ce qui a donné le heavy métal à la base. Dans un premier temps, j’ai présenté le riff aux autres membres du groupe. C’est un riff vraiment inspiré par Hendrix. Ça sonne très bien et ça représente l’héritage du groupe. C’est certain que nous sommes loin du speed métal de l’album Painkiller avec Crossfire mais c’est un genre de clin d’œil face aux débuts du groupe. Nous pensons même l’ajouter à la liste de chansons que nous allons jouer sur la prochaine tournée. Pas celle-ci par contre.
Certains doivent se dire que tu n’es qu’avec Priest que pour jouer ce que tu dois jouer, que tu dois faire ce que l’on te dit de faire. Un peu à l’image du film Rockstar avec Mark Wahlberg justement. Avec ce disque, tu prouves justement que tu n’as pas été engagé dans le groupe uniquement parce que tu ressembles à KK Downing lorsqu’il avait 25 ans. Tu nous as confirmé en plus que tu es membre de l’équipe d’écriture. Là-dessus, j’aimerais savoir comment se produit le travail d’écriture avec Judas Priest? Est-ce en studio, dans un endroit particulier ou bien vous vous faites parvenir des fichiers audio?
Comme tu dois te douter, c’est un groupe de la vieille école et qui fonctionne de la façon de la vieille école. Quand tu es dans le groupe, tu es dans le groupe et ton opinion compte. Tu présentes des idées et les autres t’écoutent. C’était l’atmosphère que j’ai retrouvée et ce, dès le premier jour. Nous travaillons dans un studio pour écrire. Priest a toujours eu le même noyau pour ce qui est de l’écriture des chansons, ce qui se résume à Glenn, Rob et KK ( Downing, ancien guitariste du groupe) mais maintenant, c’est avec moi. Les deux guitaristes et le chanteur, ce qui est resté intact pour cet album car le groupe fonctionne ainsi. Mais il y a des choses qui ont été différentes pour eux. Avant, Judas Priest n’écrivait pas en tournée. J’ai l’habitude d’avoir avec moi de l’équipement pour enregistrer certaines idées que je peux avoir car on ne sait jamais ce qui peut arriver au niveau de l’inspiration. Peu importe où tu es sur la planète, quand tu sens que tu as une bonne idée, tu ne veux pas la perdre. Lors de la tournée précédente, j’avais donc de l’équipement et j’enregistrais des riffs ici et là. Rob arrivait, il ouvrait ma porte pour voir ce que je faisais. Il se demandait ce qui se passait et proposait des idées à son tour. Glenn faisait de même. Il s’échauffait avant un concert et une idée faisait son chemin. Il venait me voir ensuite pour que l’on puisse enregistrer son idée de riff. Le processus d’écriture pour l’album a donc vraiment commencé en tournée. Par la suite, tout le monde est retourné à la maison. Chaque membre accumulait des riffs et des idées en prévision d’une rencontre éventuelle pour mettre le tout ensemble. En échangeant nos idées, nous pouvions sentir une dose d’énergie qui se propageait dans la salle de répétition. Avec toutes les idées accumulées par l’équipe d’écriture, nous mettons le tout ensemble pour que ce gros casse-tête de heavy métal puisse enfin avoir du sens. Ce qui était un riff ou une idée bien banale devient Metalizer ou March of the Damned à la fin de la journée. C’est plutôt impressionnant de sentir que ce que tu avais en tête, cette petite idée banale, va devenir une pièce qui sera chantée par des milliers de personnes. Ce sera sur un disque qu’un gars va écouter le matin pour se rendre au travail. C’est fascinant!
Donc, tu dis que tu amènes de l’équipement en tournée pour enregistrer les idées. C’est une preuve additionnelle, en plus de l’album, que Judas Priest n’est pas un groupe nostalgique qui ne fait que surfer sur le vieux catalogue de chansons. Le groupe est encore pertinent. Avec ce que tu viens de me dire, on peut pratiquement dire qu’il y aura un autre album de Judas Priest dans un futur pas si éloigné?
Je crois que oui. On ne sait jamais ce que le futur nous réserve, n’est-ce pas? En théorie, on ne devrait pas mais si je me fie à l’énergie créatrice qui émane du groupe, je peux te dire qu’il y aura un autre album de Judas Priest. Regarde Redeemer of Souls, il y a 18 chansons en tout. Tu en retrouves 13 sur la version régulière et 5 de plus sur l’édition spéciale. Si je me fie uniquement à l’énergie qui était présente lors de la création de Redeemer of Souls, je ne dis pas non à un autre album. Même les autres membres pourraient te dire la même chose. Donc, c’est possible.
Tu étais membre du groupe de Lauren Harris, qui se veut la fille de Steve Harris d’Iron Maiden. Tout d’un coup, bang! Tu te retrouves avec Judas Priest. Peux-tu nous résumer les grandes étapes qui t’ont amené vers Judas Priest?
C’est un ami commun qui a fait les démarches dans un sens. C’est Pete Friesen. Il a déjà joué avec Alice Cooper, Bruce Dickinson en mode solo et le groupe The Almighty. J’ai joué avec Pete dans un groupe où on faisait des interprétations de chansons d’autres groupes. On se produisait dans des clubs à Londres. À la base, c’est lui qui a eu l’appel pour joindre Judas Priest. C’est un guitariste de blues, il ne sentait pas qu’il avait sa place dans Judas Priest. De façon très respectueuse, il a mentionné qu’il n’était pas l’homme de la situation. Il a refusé l’invitation de manière très polie. L’équipe de Priest lui a demandé s’il avait des recommandations à faire. Il a donc proposé mon nom. Ils ont demandé de voir des clips où je joue avec Lauren, des autres projets auxquels j’ai participé et ils m’ont contacté. J’ai rencontré Rob et Glenn. Ils voulaient entendre des chansons de Priest qu’ils voulaient inclure sur la tournée Epitaph, ils voulaient entendre comment je me débrouillais avec les chansons et comment j’interprétais les chansons. Ils m’ont réinvité par la suite et me disant que j’avais le poste de guitariste avec Judas Priest.
Dans le livret, c’est inscrit que l’album a été enregistré au Royaume-Uni sans donner de détails face aux studios d’enregistrement. Peux-tu nous dire pourquoi?
Dans mon esprit, j’ai toujours perçu Priest comme étant un groupe qui proposait un élément de mystère. Ils ne mettent pas tous les éléments habituels devant les yeux du public. De nos jours, tout est du domaine public. De maintenir l’élément de mystère du groupe est encore un point que je considère important. De savoir que l’album a été enregistré au Royaume-Uni tout en gardant le nom du studio en secret est un élément mystérieux qui plait au groupe. Ce n’était pas un studio grandiose où nous aurions pu mettre le nom de cet endroit, question d’épater un peu plus les gens. La musique doit parler d’elle-même après tout.
Nous avons quelques lecteurs geeks. Nous avons des amateurs du Seigneur des Anneaux, de Dracula et de Star Wars donc, que peux-tu nous dire face à ton expérience sur l’album de Christopher Lee?
Très bonne question. C’est effectivement un homme qui a travaillé sur tout ce que tu viens de dire. Même s’il est populaire auprès des plus jeunes comme étant le Comte Dooku ou Saruman, il demeure, pour les plus âgés, le comte Dracula. Malgré son âge, c’est un homme très éveillé et qui se tient au courant de tout ce qui se passe aujourd’hui. C’était un honneur de prendre part à ce projet, vraiment. C’est un album en l’honneur du Roi Charlemagne. Il semblerait que Christopher Lee serait un descendant de Charlemagne. De son côté, il faisait de la narration, quelques bouts chantés et beaucoup de portions narratives qui racontent l’histoire. Ils avaient quelques idées de base pour des pièces en mode classique mais moi, je devais transformer le tout pour que ce soit métal, avec de la guitare et de la batterie. D’entendre la voix de Christopher Lee sur le système de son étant magistral. Il a tellement une voix que l’on reconnait facilement et qui te frappe. C’était bien intéressant à faire et il est très sympathique.
Pour la prochaine tournée, vous devez déjà avoir une liste de chansons qui est prête. Étant donné que vous avez ce nouvel album à promouvoir et les classiques à jouer, j’aimerais que tu nous donnes quelques indices face à ce que l’on pourra entendre le 6 octobre à Montréal. Des surprises, du très vieux matériel?
La ligne de base pour cette tournée est que c’est le quarantième anniversaire de Rocka Rolla. C’est l’anniversaire de Priest en tant que groupe qui enregistre car le groupe existait avant. De plus, c’est le trentième anniversaire de Defenders of the Faith. Nous allons revisiter cet album en plus d’y aller avec Breaking the Law, Living After Midnight mais il y aura une bonne balance avec le nouveau matériel. Nous n’allons pas jouer le nouvel album au complet, quoique nous aimerions le faire. Il faut bien balancer le tout et c’est ce que nous allons faire.
Dernière question maintenant. Est-ce possible que Lady Gaga se joigne à Judas Priest à un moment donné lors de la tournée?
Hahhahha! On ne sait jamais! Rob est un fan fini de Gaga. Que tu aimes sa musique ou non, tu dois respecter qu’elle demeure intègre dans ce qu’elle fait et respecter ses positions. En fin de compte, ce sont les mêmes idées que celles que l’on retrouve dans la fraternité du métal. Nous sommes passés à un cheveu que le tout se produise. Elle tournait un clip à Londres et Priest jouait sur un festival. Elle devait sortir sur la motocyclette avec Rob. Les horaires de travail de Gaga et de Priest ne pouvaient pas se joindre. Mais ça pourrait arriver, Rob pousse souvent ce genre d’idées!
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