Métal et bizouillage électronique vont de pair. Par contre, si certains le font de main de maîtres, d’autres ne maîtrisent pas très bien les subtilités que présentent l’amalgame sonore qui est offert par les composantes électroniques. Il faut une certaine expertise pour pouvoir marier les deux styles et c’est ce qu’ÖGENIX parvient à faire. Avec un premier album à paraître dans quelques semaines, un petit entretien se voulait de mise avec deux membres du groupe, Gabriel Duceppe à la voix et l’électronique (GD) en plus de Jérémie Martin (JM) le bassiste. Entretien avec ÖGENIX!
Tout comme lorsque l’on présente notre nouvelle copine aux parents, c’est ici le temps de nous décrire ce qu’est Ögenix ?
GD : ÖGENIX est un groupe dont le style est assez difficile à catégoriser mais je crois que l’étiquette « Électro-Métal » nous définit assez bien.
JM: « Électro-Métal » Même si la vaste majorité des métalleux vont être effrayés par l’étiquette électro, c’est important de l’inclure car ça représente notre musique. C’est ce qui fait qu’on est différent, les synthétiseurs sont omniprésents dans nos pièces, sans être envahissants. Comme le Seigneur qui veille sur nous constamment sans qu’on puisse le voir…
Les éléments électroniques inclus dans votre musique sont plutôt particuliers, on sent qu’il y a une recherche derrière tout ça. Autrement dit, ce n’est pas juste un membre du groupe qui a décidé d’en ajouter en achetant un clavier chez Comptant.com. Que pouvez-vous nous dire face au travail des éléments électroniques de votre musique, de la façon avec laquelle vous vous y prenez pour monter cet amalgame sonore qui se frotte au métal le plus virulent?
GD: En fait, on a acheté le clavier au Dollarama sur la rue Ste-Catherine dans le village, hahaha ! Sans blague, c’est une observation très juste que tu nous fais-là. Disons que l’électronique chez ÖGENIX est une partie intégrale, et tout aussi importante, de notre musique que la guitare, la basse, la batterie ou la voix. Mon idée initiale, lorsque j’ai fondé le groupe, était de métisser l’électronique avec le métal d’une façon qui n’avait pas encore été faite, de rendre chaque élément interdépendant les uns des autres. Donc souvent l’électronique et le reste viennent en même temps. Du moins pour les sections principales, ensuite je peux raffiner les sons au fur et à mesure que la chanson se développe. Il faut par contre préciser aussi que j’utilise principalement un synthétiseur modulaire, qui est un instrument analogique donc, où il est impossible de sauvegarder tes sons ou tes réglages ; ce qui veut dire que tu enregistres ce que tu dois enregistrer mais tu ne seras jamais capable de reproduire ce que tu viens de faire de façon identique. D’ailleurs, je trouve ça assez déplorable de voir comment tant de groupes utilisent l’électronique de façon si générique et non inspirée. Ça sent le « pré-set » de reason ou du dernier clavier « pseudo-analogique » et « cheapo » de Korg à plein nez ! Donc bref, je trouve que c’est souvent fait sans réelle inspiration et qu’à la longue, ça dévalorise ce type de sonorités. Est-ce qu’un guitariste médiocre avec une mauvaise guitare, des mauvais pickups et un mauvais amplificateur serait acceptable pour l’exécution d’un solo de guitare ? Alors pourquoi est-ce que c’est acceptable pour les bouts qui contiennent de l’électronique pour tant de groupes relativement établis ?
JM: Gab est le malade en arrière de tout ça. C’est un monde assez complexe que je ne connais pas beaucoup. Il m’a montré un peu comment ça marche, je suis capable de faire tourner des boutons et faire des sons de radio. C’est vraiment beaucoup de travail, beaucoup de temps et de patience. Mais à la fin, le son qui en sort est vraiment meilleur. Et puis, si vous écoutez attentivement, on se rend compte que l’électro en tant que tel n’est pas un synthétiseur qui fait une mélodie en solo. C’est beaucoup de couches de sons d’ambiance, qui ne sont pas nécessairement des notes en particulier, mais plutôt des fréquences. C’est un autre langage musical que l’on mixe avec le système de musique occidentale. C’est ce qui rend le projet intéressant.
Question qui se veut généralement un guide pour que l’auditeur puisse se sentir interpellé par votre groupe. Quels seraient les influences majeures du groupe, autant pour ce qui est de la facture des guitares que pour le fait d’incorporer des éléments électroniques ?
GD: Je dirais que c’est un peu n’importe quoi ! À la base, on y retrouve beaucoup de sonorités hardcore, punk et thrash. L’électronique vient ensuite confondre le tout ! Mais s’il faut nommer des groupes, on va y aller avec un croisement fait en laboratoire entre Sepultura, Prodigy, Meshuggah et Nine Inch Nails. On brasse le tout dans une éprouvette punk/hardcore et voilà ! Oh j’allais oublier de mentionner Pumping Blood de Lou Reed & Metallica!
Il y a un nouvel album, votre premier en tant que tel, qui s’en vient. Que pouvez-vous nous dire face à ce dernier ?
GD: Depuis quelques années, nous avions des démos et des EP qui flottaient ici et là. En 2013, l’album éponyme est sorti, un album dont la production était correcte mais correcte, dans le sens DIY, si tu vois ce que je veux dire? Après l’enregistrement du single USB, Robotic Pestilence au studio The Grid avec Chris Donaldson et Marc-Olivier Fréchette, on s’est dit : « Pourquoi ne pas réenregistrer l’album avec notre batteur actuel, Gabriel Harvey? Il s’est joint à nous en 2013 et nous pourrions vraiment profiter de la production de béton du studio The Grid pour ainsi avoir un CD qui capte vraiment notre énergie chaotique et représente plus notre identité en tant que groupe « live »? Du coup, ça risque aussi de convaincre des promoteurs qui n’osaient jamais nous booker car ils avaient seulement écouté les démos ou bien la première version de l’album. Donc celui-ci va sortir le 7 Novembre et nous le considérons comme le premier album officiel d’ÖGENIX d’où son nom: -01-.
JM: Ca donne un second souffle aux anciennes pièces, que je ne trouvais pas bien représentées dans l’ancien album. C’était bien, mais depuis que nous avons Gab H au drum, ce n’est plus du tout la même chose. De plus, nos performances live vont être beaucoup plus en phase avec le produit final. C’est là que l’énergie du groupe prend tout son sens, et je crois qu’avec Chris et Marc-O, on va pouvoir transmettre cette même énergie sur disque.
Vous avez déjà un enregistrement de disponible sous la forme d’une clé USB. Un choix de médium plutôt intéressant. Que pouvez-vous nous dire au sujet de ce format et de la réception face à ce mini-album plutôt, non-conventionnel ?
GD : Je crois que les supports numériques à usages multiples ainsi que le vinyle sont pas mal ce qui représentent l’avenir du support physique musical. Ceci étant dit, notre clé USB est une bonne idée en tant que tel et je compte bien tenter à nouveau l’expérience mais j’ai l’impression que le Québec n’est pas encore prêt pour ce type de distribution à une plus grande échelle mais aussi, l’auditoire type du métal ne comprend pas encore ce que ça représente. Il y a ceux qui veulent retrouver l’authenticité que l’on peut qualifier de perdue, dans les cassettes et les autres qui m’ont souvent dit : « J’aime mieux avoir la « vraie affaire » parce qu’un CD sonne mieux ». J’ai beau expliquer que sur la clé USB, tu y trouves des MP3, des FLAC et des .WAV à 44.1kHz / 24Bits donc qui sont de meilleures résolutions qu’un CD car celui-ci est à 16Bits, il n’y a rien à faire. Il reste encore une gros travail d’éducation à faire auprès du consommateur de musique car la « très complaisante » industrie de la musique, au lieu d’être proactive envers les nouvelles technologies, a manqué le bateau au tournant du millénaire et n’a pas encore réussi à le rattraper réellement.
JM: « 20 $ !! C’est donc ben cher, j’peux m’en pogner une à 5$ au Wal-Mart !» C’est pourquoi la scène s’achète des cassettes ou des « sweatband » avec un logo de band brodé dessus. Ça ne se vend plus nulle part, donc c’est unique, ce qui fait que le métalleux est content d’être le seul à l’avoir. On devrait simplement mentionner « Édition limitée 666 copies ».
GD : Sans oublier que tu as ta clé ÖGENIX en main lors d’un concert. T’as qu’à passer à la table de merch et on te refile notre musique la plus récente au prix d’un téléchargement, directement dessus !
JM: Blague à part, ça nous permet d’offrir un produit réutilisable pour le fan, d’y inclure plusieurs formats de musique, des photos, vidéos…Ce qu’un cd ou toutes les autres plates-formes ne peuvent offrir.
Dans votre « trailer » pour votre nouvel album, on peut lire une citation de Dave Brockie, qui était mieux connu sous le pseudonyme d’Oderus Urungus de GWAR. Il dit que vous lui avez brassé la cabane et pas à peu près ! Est-ce pure fabulation, question de mousser votre album ou c’est plutôt véridique ?
GD : C’est 100% véridique ! En fait la consécration est arrivée lors de notre performance au concours, « En Route Vers Heavy Montréal 2013», où il était juge. Il a commencé ses commentaires par cette citation-là: Tonight I haven’t had my balls ripped off until I saw you guys et il a terminé en disant qu’il nous avait adoré, que ça fait plus de 30 ans qu’il joue du métal, qu’il est de plus en plus difficile de trouver des groupes qui amènent quelque chose de nouveau et qu’il peut apprécier. Vous pouvez le chercher, c’est sur Youtube. Petite anecdote. Dave était accoté sur mon moniteur de scène durant presque tout le show, ça m’a pris un bon moment pour me rendre compte « C’était qui le vedge saoul qui prenait de la place sur MON moniteur? » On a pas mal jasé avec lui après le spectacle et à un moment donné, il nous a dit : « Ok ! Où est-ce que je peux boire de la bière pas trop chère et rencontrer des filles?» Je lui ai dit d’aller aux Foufs, c’est juste à côté car nous étions aux Katacombes, alors il me donne un gros hug de métalleux, me donne son courriel en me disant : « On garde contact, je veux être au courant de tout ce que vous faites, vos nouvelles, vos CD, vos shows, etc! » et il est parti aux Foufs! Par la suite, on a gardé une correspondance occasionnelle mais malheureusement, on s’est manqué au VIP du Heavy MTL et finalement ce qui est arrivé cette année arriva. Une belle rencontre et de beaux souvenirs !
JM: C’est vrai. Je ne me suis pas rendu compte que c’était lui qui poussait le monde en avant, et qui renversait accidentellement sa bière sur des filles avant qu’ils nous disent au micro qu’il nous avait adoré. C’était cool de voir un vieux de la vieille aussi terre à terre.
L’idée des trémas sur le O, est-ce un salut à Motörhead ou Mötley Crüe ?
GD : Non! LŸNŸRD SKŸNŸRD!
JM: Le vrai nom du band est « Eugenix ». Dans les langues scandinaves, le Ö se prononce EU. Ainsi, on est un peu black métal!
Il y a un lancement pour le nouvel album. Ce n’est pas un événement régulier car vous allez vous greffer à une panoplie d’autres groupes dont The Agonist, c’est bien ça ?
GD : Exactement! C’est le 7 Novembre aux Foufounes Électriques. J’ai produit des sons électroniques pour leur dernière tournée. Vous allez entendre tout ça aux Foufs lors du concert ainsi que pour le nouvel album. Ce sera une bombe qui devrait sortir bientôt, si je ne me trompe pas. Malgré que nous sommes des groupes vraiment différents, je crois que nos philosophies envers la musique et la création se rapprochent énormément car nous avons aussi un souci du détail et de la performance en tant que groupe, pas seulement de l’exécution de la musique. Donc en spectacle, nous avons notre propre petit kit de lumières qui sont préprogrammées avec la musique, ce qui amène un élément des grosse production dans les plus petites salles comme les Foufs ou les Katacombes. Mais pour en revenir au spectacle du 7 novembre, ça faisait un petit bout de temps qu’on parlait de faire un spectacle ensemble à Montréal. C’est arrivé un peu par surprise car nous étions en train de commencer à préparer un spectacle de lancement dans une autre salle lorsque tout ça s’est pointé!
JM: Le timing était parfait pour notre lancement et pour nous, ce sera une belle opportunité de jouer devant un public différent. Un line-up mixte comme celui-là, c’est le best. The Agonist est un groupe très populaire, ça donne la chance à des plus petits bands d’avoir une foule de curieux venue voir leur groupe favori.
GD : Il ne faut pas oublier de mentionner Nick et Michelle de Dungeon Works et Mat et Corinne de Xtrem qui sont pas mal les seuls promoteurs qui osent nous booker dans leurs événements.
Et sur scène, est-ce que vous portez le même attirail que celui que vous portez dans le clip pour Robotic Pestilence ?
GD : Oui ! Ça faisait déjà deux ans que nous avions commencé à avoir des vêtements de scène officiels pour en venir à de vrais costumes qui définissent l’image du groupe en tant que groupe et non les styles vestimentaires individuels de ses membres. Par contre, lorsque nous ne pouvons pas installer nos lumières pour des raisons techniques ou lorsqu’on fait notre set « hommage à Sepultura », nous jouons en civils.
JM: Ça définit le groupe. Les éléments visuels doivent être présents, live. Ça crée le moment. Lumière, costume, violence !
Parlant du clip, et n’ayant jamais visité les toilettes de filles des Foufs étant donné que je suis un barbu, est-ce bien à cet endroit qu’il a été tourné ?
GD : Oui ! C’est en plein ça ! Peu de gens ont reconnu les Foufs. On a tourné ça en environ 6 heures au mois d’avril.
JM: Un peu partout dans les Foufs, oui.
Avec qui avez-vous travaillé là-dessus ? J’estime que ça vaut la peine d’en parler car ce clip est de qualité au niveau visuel et sonore !
GD : Le clip a été filmé, réalisé et monté par Chris Kells, qui est entre autres, bassiste du groupe The Agonist. Depuis peu, il s’est lancé dans la vidéo et il fait du travail remarquable. Il va justement réaliser notre prochain clip. D’ailleurs, si vous connaissez le groupe The Catalyst, c’est lui aussi qui est derrière leur clip. Un jeune réalisateur à surveiller de près. Il ne faut pas oublier de mentionner le travail exemplaire de Steven Henry à l’éclairage, de Tamsen Rae au maquillage. Aussi les acteurs, Marie-Luc Tellier et Alex Laurier ainsi que de la photographe Deepti Suddul, qui a beaucoup travaillé avec Chris et moi pour le développement initial du concept ainsi que des photos qui documentent la préparation du tournage.
JM: On travaille fort pour le faire paraître sur VHS prochainement.
GD : Les cassettes ça fait plus VRAI !!!!
Sinon, pour ce qui est de 2015, car 2014 tire déjà à sa fin, sur quoi allez-vous vous concentrer ? Il y a l’album en tant que tel mais en ce qui concerne votre présence sur scène, par exemple ?
GD : La première chose que je veux dire c’est que 2014 n’est pas terminée! Nous prévoyons sortir un vidéo environ un mois après la sortie de l’album. Ensuite, au début 2015, un single de deux chansons avec des surprises et finalement, si tout va comme prévu, un album officiel de remix électro hard/Drum and Bass. Un truc spécialement pour les DJs, en collaboration avec un label européen assez gros et certains de ses artistes qui œuvrent dans ce créneaux-là ! En étant quelque part entre l’optimisme et le réalisme, je crois que nous serons prêts à commencer à enregistrer l’album -02- vers le mois de mai pour viser une sortie à l’automne. Sur le nouvel album, il va falloir s’attendre à beaucoup de « featuring » de divers autres artistes dont quelques surprises. Et oui ! Beaucoup plus de spectacles !!
JM: Beaucoup de petits releases à venir. Je travaille de mon côté pour avoir un guest vocal très intéressant. Ça va en surprendre plus d’un si tout fonctionne comme prévu!
*Pour les détails face au lancement de l’album avec The Agonist, cliquez ICI!