J’ai eu besoin de l’album Kairos pour faire la paix avec l’incarnation moderne de Sepultura, celle qui propose l’absence de Max Cavalera, ce qui veut aussi dire le chant de Derrick Green. J’ai vraiment redonné une chance au groupe lors de leur dernière présence à Montréal, en 2012, lors de la tournée de Kairos. Lors du concert, l’impact aux percussions du nouveau batteur Eloy Casagrande m’a étonné et le second souffle offert aux classiques du groupe m’a satisfait. Même les nouvelles pièces de Sepultura, que je boudais depuis une longue période, possédait une certaine vigueur.
J’étais ressorti de là convaincu. Si le dernier album du groupe, The Mediator Between Head and Hands Must be the Heart, se veut sombre, je me demandais comment le groupe allait s’en sortir pour nous pousser les nouvelles pièces.
Surprise de taille par contre car Sepultura se veut aussi en tournée pour célébrer son 30e anniversaire. Le groupe avait donc promis une tournée qui se voulait une rétrospective de la carrière de la formation brésilienne au lieu d’une tournée afin de promouvoir le nouvel album uniquement.
Comment Sepultura allait-il présenter le matériel antique sans trop le dénaturer? Après tout, les chansons qui proviennent des albums comme Arise, Roots et Chaos AD possèdent cette touche moderne qui colle encore au style préconisé par Sepultura. Il fallait être là hier soir pour constater ce qui allait se passer avec le matériel de Schizophrenia, par exemple.
Concert marathon avec 5 groupes, il faut comprendre que c’est un vendredi ensoleillé. La foule se veut plutôt mince lorsque j’entre au Club Soda. L’amateur ne se présente pas très tôt car il profite des premiers balbutiements du soleil. Si la terrasse des Foufs est garnie de métalleux, le Club Soda se veut plutôt désert avant le concert de The Last 10 Seconds of Life.
Formation américaine plutôt nouvelle, leur attrait se situe face à une exécution du style deathcore de façon plutôt intéressante. Quelques touches dans le jeu du groupe me rappelaient le premier album de Korn(?) avec une main mise sur le son plus moderne d’un groupe comme Emmure ou Thy Art is Murder pour ce qui est de l’angoisse musicale que le groupe affiche. Avec la guitare bien lourde, répétitive et les breakdowns, la foule de la vielle école semblait un peu perdue pour être bien honnête. Par contre, l’habile ninja qui se laissait aller pendant leur tour de chant a été capable de nous démontrer ses derniers tours de la discipline du domaine des arts martiaux. Un 20 minutes sur scène qui a semblé interminable pour de nombreuses personnes par contre…
Arsis, lorsque je dois le décrire à quelques amateurs, sonne environ comme une version sans clavier de Children of Bodom ou tout simplement, comme Revocation. La question que je me demandais à la base était face à la présence de James Malone, chanteur et guitariste du groupe, étant donné que par le passé, il a manqué quelques tournées. En me promenant aux comptoirs de marchandise, il était derrière celui de son groupe avec le même t-shirt de Morbid Angel qu’il porte sur les photos promotionnelles de son groupe. Pas de doute, Malone allait hurler sur scène et jouer de la guitare!
L’enthousiasme était palpable et le faciès des membres du groupe nous prouvait que les musiciens du groupe prenaient leur pied à Montréal. Après We Are the Nightmare, James Malone a confirmé que la soirée de Montréal était la meilleure de la tournée selon ses standards étant donné la réponse excessivement positive de la foule face aux chansons de son groupe. Il faut dire qu’Arsis possède une sonorité plutôt explosive en plus de ne pas lésiner sur la technicité sans négliger l’impact métallique de leurs chansons. Sur les planches, les musiciens se promènent et ça se brasse la pilosité en plus de gueuler à l’unisson. Arsis est monté sur scène avec des attentes raisonnables hier soir mais le groupe est probablement reparti avec une panoplie de nouveaux fanatiques grâce à son métal enivrant qui a su bien préparer la table pour Destruction.
Entre Arsis et Destruction, je peux te l’avouer, c’était un peu trop long. Les techniciens ne chômaient pas, loin de là mais il faut comprendre que les exigences venant de la formation allemande doivent être précises en tous points.
Un homme à la chevelure noire, aux allures de Don Juan deMarco s’affairait à monter la batterie. Plus frêle que le colossal Vaaver, c’est à ce moment que je me suis rappelé que le Polonais n’était pas sur cette tournée avec Destruction mais c’est plutôt Randy Black (un ancien de Primal Fear et d’Annihilator) qui tape les casseroles avec le groupe pour ce périple nord-américain. Ce n’est pas que Vaaver soit exclus des projets du groupe, c’est plutôt qu’il a préféré rester auprès de son épouse pour la naissance de son deuxième enfant.
À la fermeture des lumières du Club Soda, la ritournelle habituelle qui se veut l’intro de Curse the Gods, se retrouvait dans nos chastes oreilles. La résonance vocale de la foule donnait l’impression que nous en étions au programme final de la soirée. L’accueil fut chaleureux étant donné que le groupe a eu l’audace de commencer avec un classique au lieu d’y aller avec une pièce du dernier album.
Je ne sais pas si la présence de Randy Black aux percussions exige que son impétuosité doive être remarquée beaucoup plus que celle de tout autre percussionniste mais il me semble que sa batterie se voulait excessivement puissante dans le mix sonore de Destruction. Les coups assénés pendant Thrash Till Death et Nailed to the Cross avaient la puissance du marteau-piqueur sur tes bottes à cap.
Une image qui se veut pratiquement intemporelle est celle de Mike de Destruction qui se brasse la tignasse pendant que Schmier se promène de microphone en microphone, question d’être vu et entendu par chaque personne de la salle. Habile et à l’écoute de son public, le groupe a su aligner les classiques du thrash teutonique comme Mad Butcher, Eternal Ban, Bestial Invasion et Invicible Force pour que cette soirée demeure indélébile dans l’esprit des métalloïdes.
Destruction possède sa horde d’amateurs ici à Montréal et les thrasheurs de tous âges ont su démontrer une fois de plus qu’il n’y a rien de plus chaleureux qu’un accueil montréalais. Schmier a fait remarquer que Montréal représente une deuxième maison pour lui car le groupe se sent chez lui ici, étant donné que c’est ici que Destruction a débarqué la toute première fois qu’il est venu jouer en Amérique en… 1985!
Le plancher du Club Soda n’a pas été en mesure de garder une certaine dose de tranquillité lors de la présence de Destruction. C’est seulement lorsque le groupe a fait sa version de The Damned, du groupe The Plasmatics et qui se retrouve sur le mini-album Mad Butcher, que le tout a retrouvé un certain calme. Jamais jouée ici, cette chanson était le seul faux pas de la soirée d’hier. J’aurais plutôt préféré Release from Agony, Antichrist ou Life Without Sense.
La toile en arrière-scène nous montrait le logo de Sepultura, celui avec lequel nous sommes le plus familier avec le lettrage très lisible, en plus du S tribal. Dans une portion plus décorative et écrite en cursive, nous pouvions voir l’inscription abrégée« Established in 1984 », question de bien comprendre le but de cette tournée car nous ne retrouvions pas la couverture du dernier album.
Il faut que le chiffon soit bien passé sur le passé pour apprécier le groupe, c’est évident. Quelques personnes ne comprennent pas l’absence des Cavalera sur cette tournée anniversaire mais que voulez-vous, quand ça ne fonctionne plus, ça ne fonctionne plus!
En préparation pour ce concert, je me suis retapé les albums post-Roots tout au long de la semaine et je me suis rendu compte que l’album Against est beaucoup plus agréable en 2015 que lors de sa parution originale, en 1998. La preuve que la mouture « nouvelle » de Sepultura vieillit bien… mais je ne peux en dire autant de l’album A-Lex.
Sous le chant au nom du groupe, Sepultura a fini par prendre place pour une bonne heure et quart de métal qui se veut, groovant. La batterie se veut tellement primordiale avec le groupe, les coups de Casagrande sont précis et sa fluidité offre à Sepultura une plus grande latitude face au matériel. Andreas Kisser demeure la pièce centrale dans le groupe étant donné que tout Sepultura tourne autour de lui et Derrick Green appose sa voix très hardcore sur le matériel du groupe, du plus ancien au plus récent. Et le bon vieux Paulo Jr à la basse? Il suit la cadence et il est de retour avec une tignasse plus longue, teintée de poivre et sel!
Le premier trio de chansons proposé hier soir se voulait un combo qui alliait The Vatican, du nouvel album avec Kairos de l’album du même nom en plus de Propaganda. Cette dernière se veut de l’époque médiane du groupe, étant donné qu’elle remonte à l’album Chaos AD.
Avec cette première proposition, on pouvait déjà comprendre où le groupe allait nous amener. Sur les trois, c’est Propaganda qui a su attirer le plus de réactions mais on remarquait aisément que les gens présents connaissaient même le matériel plus récent du groupe. Donc, ce n’est pas une question de nostalgie face au vieux matériel mais plutôt une passion inconditionnelle face au groupe, surtout lorsque Manipulation of Tragedy du nouvel album, Mind War de Roorback et Convicted in Life de l’album Dante IX ont été jouées!
La nouvelle chanson Under my Skin a été proposée hier. Cette chanson de Sepultura sera disponible sous peu en téléchargement et elle se veut un hommage aux amateurs du groupe qui vont jusqu’à se faire tatouer des éléments du groupe, de là le titre! Elle possède une certaine hargne et le public l’a bien accueillie mais en général, il faut comprendre que le public a bien fait son travail hier soir soit en sautant, en criant ou en hurlant les refrains.
Un moment que la Sepulnation appréhendait se voulait la version très moderne de From the Past Comes the Storms. Chanson de l’album Schizophrenia, on comprend que la cure de jouvence qu’elle a reçue se voulait intéressante mais le puriste pourra te dire que rien ne peut battre l’original. Que dire de la poigne offerte sur Bestial Devastation? Encore une fois, le tout dépend de ton point de vue mais selon ce que j’ai entendu hier, les versions 2015 des deux pièces ont un certain charme quoiqu’une version Soulfly m’aiderait à mieux comparer. Pour ce qui est d’Arise, je ne peux que donner mon approbation face à la force directrice de la pièce.
Lors de l’interprétation de Refuse/Resist, Paulo à la basse a eu un pépin. Lequel? Tandis que quelqu’un parlait d’un bris d’équipement, un autre me racontait qu’il avait tout simplement oublié un punch à faire sur son instrument. Le groupe a donc arrêté de jouer, les musiciens se sont moqués de lui et ils se sont élancés sur Orgasmatron de Motörhead.
Au rappel, j’attendais Ratamahatta comme indicateur face à mon départ. Sachant que le groupe allait fort probablement terminer sa soirée avec le doublé qui comprend cette chanson en plus de Roots Bloody Roots, je me devais de quitter étant donné mon incapacité de réentendre les deux chansons mentionnées plus haut. Ce n’est pas que je considère les deux pièces comme de piètre qualité, c’est plutôt qu’en tant qu’ancien DJ dans un bar métal/alternatif, je les ai vraiment trop entendues!
Et non, aucune chanson de l’album Beneath the Remains n’a trouvé son chemin vers le concert!
Une réunion avec les deux frères Cavalera serait un immense cadeau pour les fans mais pour avoir lu le livre de Max Cavalera, tu comprends rapidement que si le groupe finit par le faire, ce ne sera pas pour les bonnes raisons. Il faut juste vivre avec et je te le dis, si tu n’as pas fait ton deuil du départ des Cavalera, tu te dois d’aller voir et entendre la « nouvelle »version de Sepultura qui roule sa bosse depuis presque 20 ans en passant…
Toutes les photos : Mihaela Petrescu
NB : En relation avec une entrevue avec Andreas Kisser de Sepultura, qui sera disponible très bientôt ici même, je n’ai pu assister à la prestation de Starkill.