Première véritable tournée en tant que tête d’affiche pour Goatwhore. Après tout ce temps et des années à ouvrir pour tous les groupes inimaginables, Goatwhore peut enfin se permettre de longer les routes nord-américaines en amenant avec lui, d’autres formations en guise d’additifs qui supportent cette machine déjà bien huilée.
Pour ce qui est du concert montréalais, rien ne pouvait tomber plus à pic qu’un vendredi soir. Le centre-ville fourmille d’activités, des gens se baladent avec leur cape pour se rendre au Comic-Con, une myriade de filles excitées qui carburent aux « Oh my God ! » se rend au concert d’Imagine Dragons pendant que d’autres curieux iront tester les scènes pour le Festival de Jazz.
Les plus assombris se vautrent aux Foufounes pour le concert de Goatwhore. Cette visite de Goatwhore se veut un mini-festival en tant que tel étant donné qu’un grand total de 6 groupes usera les planches de plywood de la salle montréalaise. La tournée propose 4 groupes à la base et le promoteur local a décidé d’ajouter 2 autres formations d’ici, question de t’en donner encore plus !
Trop même ? Ça dépend de ton point de vue et de ta capacité à emmagasiner les décibels.
Cette quantité industrielle de groupes amène un côté intéressant pour ce qui est des découvertes. En théorie, tu paies pour voir la tête d’affiche ou le groupe juste avant, ce qui te permet, parfois, de faire de belles trouvailles en ouverture.
Mais d’un côté plus pessimiste, ça implique aussi que le retard va se pointer le nez lors de certaines occasions et que la balance de son risque de souffrir pour quelques formations. La tâche devient titanesque pour le technicien (lire ici technicienne pour les Foufs) de son de la salle, celui qui est employé par le bar. N’ayant jamais travaillé avec les groupes, il faut qu’il fasse « son gros possible » pour acclimater chaque formation qui laisse sa destinée musicale entre les mains de cette personne à la console.
De mon côté, et je le répète souvent, je ne suis pas un maniaque face à la perfection sonore sauf que vendredi, il y a eu quelques lacunes. Beaucoup même. Trop de basse, trop de grosses caisses de la part des percussions, manque de puissance au niveau de ce qui doit sortir pour la voix et la guitare. Il fallait prendre le temps de bien se positionner pour être capable d’entendre correctement certains groupes.
The Wild Hunt est de Montréal. J’ai bien pris le temps d’écouter le matériel du groupe sur leur page Bandcamp car je voulais confirmer que ce groupe n’était pas un hommage à Watain, étant donné que le groupe possède un album qui souligne ce titre. Sur scène dès 19h00, j’ai effectué mon entrée aux Foufs vers 19h30, ce qui veut dire que je n’ai pas pu voir et entendre leur death métal mélodieux sur scène.
De grâce, j’étais là pour Canceric. Le groupe effectuait son lancement de EP lors de ce concert. Quelques jours auparavant, Canceric avait mis en ligne une première chanson du nom de Cemetery of the Living, provenant de ce mini-album, et le tout se voulait prometteur. Mon pedigree métallique prend racine dans les belles années du thrash donc d’avoir un groupe d’ici qui propose une sonorité qui rassemble vigoureusement Slayer, Vio-Lence et MOD avec des trucs plus contemporains comme Legion of the Damned, The Haunted et HateSphere, mes pelletées métalliques se voulaient combles !
Malgré les pépins techniques, la foule a su apprécier l’agilité musicale qui découlait de Canceric. La balance sonore, face à leur prestation, nous moulait dans une sphère sonique remplie de basse. Pour cette raison, il était très difficile, voire impossible, de bien entendre les subtilités face aux nombreux riffs croustillants et les solos. Ce sont des chansons du EP, comme Rot in Pieces , Religous War et Confusion, qui se sont retrouvées dans nos oreilles vendredi, des cantiques de défonce qui s’agitent vivement grâce à une interprétation honnête et une passion véritable pour le genre.
Theories de Seattle semblait avoir le goût de tout, sauf d’être à Montréal. Leur death grind crusté n’a pas vraiment touché la foule qui venait de se donner énormément pendant Canceric. Le changement de genre n’était pas la raison de ce manque d’entrain, c’est juste que le tout ne semblait pas coller. Il manquait l’étincelle qui se veut essentielle entre le groupe et la foule. Même si les musiciens se veulent habiles, il faut comprendre que l’absence d’enthousiasme de la part de Theories a pesé fort dans la balance. Le chanteur du groupe, Rick Powell, n’avait vraiment pas l’air dans son assiette. Malgré son allure qui rappelait un jeune Randy Blythe, on ne peut pas dire qu’il possédait ne serait-ce que 10% de la hargne de Blythe en ce vendredi soir. De plus, le groupe ne jouissait pas d’une balance sonore enviable, la parcelle qui compose la basse prenait encore plus de place qu’à l’habitude.
Cette année, nous n’avons pu voir et entendre Entombed à Montréal mais nous avons vu Black Breath, ce qui offre un léger baume sur la plaie. Première visite à Montréal pour ce groupe, leur son rappelle le death métal suédois de la vieille école mais avec une voix un peu plus hardcore que gutturale. Le mélange se veut donc, parfait ! Dès la première chanson, la différence sonore s’est fait entendre. C’était beaucoup plus clair, plus huileux et étincelant au niveau de la balance, ce qui fait que nous avons pu apprécier pleinement l’expérience Black Breath.
Le guitariste de Theories prenait place avec le groupe en tant que second archer. De passer d’un death grind à un son plus lourd ne semblait pas lui nuire et il s’est acquitté de sa tâche avec brio. L’attaque s’est faite avec des pièces comme Feast of the Damned, Home of the Grave et Sentenced to Life. Le groupe semblait avoir un malin plaisir sur scène et la foule a su participer activement avec eux, même pendant la nouvelle chanson Sail Beyond Death (il me semble que c’était le titre) qui se retrouvera sur le prochain album du groupe, qui sera lancé en octobre.
Ringworm a pris sa place comme il se doit sur scène. Les vétérans de la scène hardcore/métal n’ont laissé personne indifférent car l’assaut se voulait vicieux et sans merci. Quand tu vois un groupe de ce genre arborer des t-shirts de groupe métal mais avec un son hardcore, tu sais que tu vas en manger une salée. Ce fait a encore été prouvé car lorsque tu te retrouves avec un bassiste qui joue avec une Rickenbacker tout en portant un t-shirt de Mastodon, deux guitares Les Paul tandis que l’un des guitaristes porte un t-shirt de Voïvod, il est évident que ça va torcher ! De plus, ajoute à ça un chanteur aux mêmes proportions que Danzig pour la forme mais le hurlement du chacal pour la voix, le vent vire de bord et te propulse dans le pit.
Certains laissaient entrevoir certaines inquiétudes face au passage du groupe pour traverser les frontières canadiennes. Le dossier bien réglé, le groupe a pu se présenter au Canada aisément après une absence de quelques années. Donc, d’avoir Ringworm vendredi aux Foufounes nous donnait l’impression de voir ce groupe de Cleveland comme une tête d’affiche et ils ont passé le balai de façon professionnelle. L’intensité n’est pas descendu d’un seul iota, autant pour les pièces du nouvel album Hammer of the Witch que pour le matériel plus antique.
La barre était donc très haute pour Goatwhore étant donné l’accueil et la vitalité lors du concert de Ringworm. Goatwhore a entamé son tour de chant avec un nouveau bassiste qui remplace James Harvey sur cette tournée et quelques problèmes de son au début de Poisonous Existence in Reawakening. Est-ce que le tout a semblé déranger le chanteur Ben Falgoust ? Aucunement! Le nouvellement barbu a continué de tirer la langue tout en faisant son air guitar habituel sur son micro. Ayant leur propre ingénieur de son, le groupe a pu bénéficier d’une sonorisation plus majestueuse que les autres groupes, les oreilles nous saignaient. La guitare de Sammy Duet transperçait l’air sur des chansons comme In Deathless Tradition, FBS (chanson dédiée aux jolies filles du Québec, nombreuses en cette soirée métallique) et Baring Teeth for Revolt.
Cuir, jeans et studs font partie intégrante de l’attirail de Goatwhore, cet accoutrement métal nous démontre que le groupe ne fait pas que le jouer mais les musiciens le vivent à 100% lors du concert. Avec une participation active de la foule, le groupe n’avait qu’à continuer de se brasser la tête tout en gardant le cap sur des chansons aussi vigoureuses que méthodiques.
L’heure fatidique de minuit a été dépassée. Généralement, les Foufs demandent de couper le tout vers les premiers coups de minuit mais cette fois-ci, l’élan s’est poursuivi jusqu’aux alentours de 12h30 lorsque Goatwhore a vissé la dernière vis de ce cercueil métallique avec Apocalyptic Havoc.
Goatwhore est sur l’échiquier métallique depuis un bon nombre d’années et j’ai vraiment senti que le tout a vraiment porté fruit pour eux vendredi. Une bonne quantité d’amateurs, dans la jeune vingtaine, souhaitait parler avec Ben Falgoust, prendre une photo et obtenir son autographe. Des commentaires élogieux fusaient de partout, Falgoust prenait le temps de remercier tout le monde malgré la sueur qui lui ruisselait du visage et la hâte d’une douche suivie par un changement de vêtements.
Une question est demeurée dans la tête de bien des gens à la fin du concert par contre : Est-ce bien Zombie Boy qui était dans le pit tout le long du concert de Ringworm et de Goatwhore ?
J’pense bien que oui.
Toutes les photos: Mihaela Petrescu