Amon Amarth : Maintenir le cap vers des terres métallifères (Entretien avec Olavi Mikkonen, guitariste)
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Amon Amarth : Maintenir le cap vers des terres métallifères (Entretien avec Olavi Mikkonen, guitariste)

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Pourquoi changer une formule qui a fait ses preuves ? Est-ce que Coca-Cola a obtenu du succès lorsque la compagnie a décidé de créer le nouveau Coke ? Aucunement ! Dans le domaine musical, c’est un peu la même chose. Les artistes qui se dénaturent et qui tentent de nouveaux horizons musicaux risquent souvent de se perdre en route en plus de perdre leur public. Ce n’est pas donné à tous les artistes d’avoir les mêmes capacités artistiques que David Bowie. Ce caméléon a toujours été capable de visiter différents styles tout en gardant son intégrité. Dans le métal, quelques groupes ont tenté des escapades vers d’autres contrées musicales. Pensons à Celtic Frost avec Cold Lake ou Judas Priest avec Turbo ! En ce qui concerne des groupes comme Cannibal Corpse ou AC/DC, on comprend rapidement que la recette musicale se doit d’être respectée ! Et pour Amon Amarth ? Les Suédois sont de la même école de pensée et j’ai pu en discuter avec Olavi Mikkonen, (dernier sur la photo en noir et blanc) le guitariste d’Amon Amarth. Fier de leur nouvel album Jomsviking, nous avons parlé de ce premier album-concept pour le groupe en plus des différents changements qui sont survenus dans le groupe.

Vous avez annoncé que Jomsviking se voulait un album de type concept. Ce fait provoque des attentes de la part de vos fans. Que peux-tu nous dire au sujet de ce concept ?

C’est la première fois que nous tentons l’expérience de l’album-concept. La décision de faire ce type d’album a été prise il y a très longtemps. Nous avons approché cet album comme si c’était un film. C’était comme le script d’un film et nous devions en faire la trame sonore. C’était notre ligne directrice. Cette idée de concept flottait sans vraiment savoir de quoi nous allions parler. Johan Hegg, notre chanteur, est arrivé avec cette histoire des Jomsvikings. Ce sont des mercenaires qui combattaient sans merci au nom du plus offrant. C’était une bande de mercenaires assez violents. Johan a donc construit son histoire autour des Jomsvikings mais avec un personnage principal. Nous trouvions tous que son histoire était intéressante et crédible. C’était construit comme un scénario de film. Nous avons donc découpé son histoire pour en faire des chansons. Nous devions visualiser le tout en trouvant quel type de musique pouvait bien aller avec tel bout de l’histoire, les paroles de Johan et sa vision.

Parlant de Johan Hegg, étant donné qu’il se retrouve derrière les paroles et le concept, est-ce que sa participation au film Northmen- A Viking Saga pourrait-être la bougie d’allumage face à tout ça ?

Oui, c’est possible. Effectivement. Il a fait le film après l’enregistrement de Deceiver of the Gods. En revenant du tournage, il nous demandait déjà de quoi nous allions parler sur le suivant. Le fait de faire un album de type concept est probablement lié avec le fait que Johan a joué dans ce film. Ce film a été une inspiration pour lui, une nouvelle façon d’écrire ses paroles. Tu sais, même pour nous, c’était une façon différente au niveau de l’écriture. Je me demande bien si nos fans vont s’en apercevoir ! Hahhha ! Nous avons eu énormément de plaisir à le faire mais en même temps, Jomsviking est l’album qui nous a permis de passer le plus de temps ensemble. Nous devions nous parler beaucoup plus. Nos séances de brainstorming se voulaient plus longues et intenses. Nous étions dans un chalet, dans le nord de la Suède. Il n’y avait personne, pas un seul voisin, rien. Nous n’avions que nous et un chalet immense. Nous passions la moitié de la semaine à écrire et l’autre, à lancer des idées. J’ai l’air de me plaindre mais non. C’était vraiment cool. C’était comme si nous mettions en place les pièces d’un scénario de film. C’était inspirant. C’est l’album le plus plaisant auquel nous avons contribué, étant donné la façon avec laquelle nous l’avons travaillé.

Donc, votre périple dans ce chalet, est-ce que c’était uniquement pour l’écriture ou bien vous aviez de l’équipement pour enregistrer ?

Nous avions tout l’équipement nécessaire pour enregistrer l’album, pas seulement des démos. Nous ne faisions aucun bruit en tant que tel. Nous avions une console de mixage et chaque musicien avait son casque d’écoute. Aucun bruit n’était audible. Si tu faisais une balade près de notre chalet, jamais tu n’aurais pu dire qu’un album d’Amon Amarth était en train de se créer. Nous étions en mode travail toute la journée, c’était sérieux mais le soir, c’était un BBQ bien arrosé !

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Lorsque l’on fait ce genre d’album, est-ce que l’on doit écrire une grande quantité de chansons pour ainsi pouvoir piger dans le lot ou bien on doit se concentrer sur les paroles et suivre la ligne directrice face à l’histoire?

À la base, Johan avait créé toute l’histoire. Nous n’avions plus qu’à découper son histoire pour créer les chansons. Johan a vraiment dû nous aider sur certains passages où il a dû se réinventer, pour pouvoir suivre la trame musicale. Quand tu as une histoire, il y a des moments que tu ne dois pas répéter et c’est la même chose avec des chansons. Il y a une certaine discipline au niveau des structures d’une chanson avec des refrains et des chœurs qui seront répétés. Il faut simplifier aussi. Nous avons travaillé énormément sur ce genre de petits détails. Nous avons donc décidé de découper son histoire en 11 parties, ou plutôt 10 car ça dépend de la version de l’album que tu possèdes. Nous nous sommes arrêtés à ce nombre et nous avons travaillé sur cette quantité.

Donc, cet album présente l’histoire d’un homme qui  est en amour avec une femme mais celle-ci doit épouser un autre homme. Sur la chanson A Dream that Cannot Be, vous avez Doro Pesch. On connait cette grande dame face à son travail avec Warlock et avec son propre groupe. C’est donc elle qui joue le rôle de la femme dans l’histoire, celle qui est désirée par le personnage principal. Ce n’est pas un autre personnage clé de l’histoire comme une sorcière ou une diseuse de bonne aventure?

Doro joue bel et bien le rôle de celle qui est désirée par le personnage principal. Elle possède cette voix qui se marie à la perfection avec le personnage. Cette chanson est au sujet du héros. Il devient un mercenaire, un Jomsviking. La première chanson First Kill propose sa première offrande face à son cheminement de mercenaire. Il tue cet homme car il va épouser celle qu’il aime. Par la suite, il doit se sauver. Il doit quitter pour ainsi, pouvoir survivre. On le retrouve vingt ans plus tard. Il est le Jomsviking le plus rude et le plus malsain. C’est un dur à cuire. Il retrouve cette femme qu’il a tant aimée. Il veut la ravoir fortement mais elle, elle est rendue ailleurs !

Pourquoi la chanson Vengeance is my Name est-elle considérée comme une chanson en bonus sur le digipak ? Est-elle une partie entière de l’histoire ou pas ?

Elle est une partie intégrante de l’histoire et du concept. Cette chanson est au sujet de notre gars, le héros de l’histoire. C’est au moment où il reçoit son épée, son épée porte ce nom qu’est Vengeance. Ce qui arrive c’est que de nos jours, les compagnies de disques demandent toujours aux artistes des satanées chansons pour mettre en bonus sur les éditions spéciales. Nous ne voulions pas ruiner notre concept en ajoutant une chanson en extra qui n’a aucun lien avec le reste des autres chansons. C’est comme lorsque tu vois un film et qu’après le générique, ils rajoutent des séquences additionnelles. Toi, tu es déjà sorti de la salle. Cette pratique ruine le film. Cette chanson fait partie du concept mais elle ne parle pas de l’histoire ou du personnage, elle est au sujet de son épée. C’est pour cette raison que nous avons décidé de l’étiqueter comme étant en bonus sur la version spéciale de l’album. Elle n’est pas sur la version normale mais rien n’empêche l’auditeur de bien suivre l’histoire.

Et pour ce qui est de Raise your Horns, est-ce une chanson à boire ?

Oui ! Et cette chanson parle justement de la célébration face à un bon combat. Elle souligne aussi le fait que le personnage a gagné son combat et que ceux qui sont tombés au combat iront au Valhalla.

Est-ce que vous buvez encore sur scène avec vos cornes ?

Oui, c’est un rituel que nous apprécions encore. Nous aimons la bière

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Je sais que Johan Hegg (chant) et Ted Lundström (basse) aiment les bières fortes, celles des microbrasseries par exemple. Ils détestent les bières plus légères des grosses compagnies. Toi, es-tu un amateur des bières plus fortes et celles des microbrasseries ? À moins que tu préfères les bières comme notre Molson, la Coors Light ou la Budweiser ?

Je ne suis pas un amateur de bières de haut calibre, de bières recherchées. C’est beaucoup plus le domaine de Ted et de Johan, justement. Je n’aime pas les bières comme Coors ou Budweiser. Je préfère les produits européens. Ted et Johan brassent leur propre bière maintenant. Ce sont de véritables connaisseurs comparativement à moi.

J’ai écouté l’album à deux ou trois reprises hier soir. J’en suis venu à cette conclusion, une fois de plus: Amon Amarth évolue encore, album après album mais tout en restant le même groupe. Est-ce que tu trouves mon argument trop sévère ou au contraire, juste ?

Oui, ce que tu dis est vrai. Tu sais, nous avons trouvé ce que nous voulons faire musicalement. Nous avons une sonorité qui se veut unique tandis qu’il y a d’autres groupes, et je ne veux pas nommer de nom, qui tentent de se réinventer tout en perdant leur public de base. Oui, il faut tenter des choses mais sans se dénaturer. Lorsqu’un groupe aux racines métal essaie de devenir un groupe de rock régulier ou tente d’incorporer une touche très 70’s, ça devient difficile à suivre. Nous aimons ce que nous faisons, c’est notre passion en plus de notre travail, je ne vois pas pourquoi nous devrions changer étant donné que ça plait à des milliers de gens. Nous avançons et des gens nous suivent ! En même temps, nous en sommes conscients et c’est pourquoi nous tentons de ne pas nous répéter. Nous ajoutons des petits éléments ici et là, des trucs qui demeurent subtils, qui permettent de trouver un nouvel angle mais ce sont des éléments qui nous permettent d’évoluer sans perdre l’essentiel. Nous ne voulons pas réécrire la même chanson deux fois mais ça reste que c’est le style que nous voulons faire. C’est pourquoi ton commentaire est en plein dans le mille. Je n’ai pas encore entendu de groupes qui sonnent vraiment comme Amon Amarth. Il peut y avoir des similitudes mais ça s’arrête à ça. Nous sommes plutôt uniques car dès que tu entends notre musique, les premières notes ou un riff, tu sais que tu es en train d’écouter Amon Amarth. C’est notre signature alors, pourquoi la changer ? Nous parlions de Raise Your Horns. Cette chanson possède un riff métal très traditionnel. C’est comme un vieux riff d’Accept mais plus costaud. Sur On a Sea of Blood, le rythme nous remet l’époque plus métallique de Judas Priest. Nous cherchons toujours cet élément de fraicheur.

Je lisais dernièrement que vous ne voulez pas aller plus en détail en ce qui concerne le départ de votre batteur, Fredrik Andersson. Dans un sens, ça ne fonctionnait plus avec lui et vous deviez continuer d’avancer, c’est ça ?

Oui, ce serait ça. Nous en sommes venus à la conclusion que la séparation était ce qu’il y avait de mieux pour tous. C’était plus intéressant pour lui et plus intéressant pour nous aussi car nous pouvions tous continuer à avancer dans nos projets respectifs. Il n’y a pas de chicane, ni de haine ou de rancœur. La relation ne fonctionnait plus, nous y avons mis un terme. C’est aussi simple que ça. C’est la vie, c’est fait ainsi et parfois, il faut que la séparation se passe pour pouvoir continuer d’avancer au lieu de s’entêter à continuer. Comme un mariage dans un sens. Lorsque ça ne marche plus, il faut prendre des décisions. Après tant d’années, c’est une décision qui ne se veut pas facile mais chacun y a trouvé son compte. Nous avons commencé à écrire le nouvel album immédiatement après cette séparation. Nous voulions avoir quelqu’un qui allait s’impliquer. C’est pourquoi nous avons choisi Tobias (Gustaffson, qui joue aussi avec Cut Up et God Macabre) tout en sachant qu’il n’allait pas rester avec le groupe. Sur le coup, il nous a aidés et en ce moment, nous avons un nouveau gars que nous allons utiliser en tournée. C’est batteur puissant et fantastique. Nous allons voir comment les choses vont se passer avec lui sur la route. Ensuite, nous pourrons prendre une décision plus éclairée face à lui. Si ça marche, tant mieux. Sinon, nous allons continuer les recherches.  Ce qui est le plus difficile, c’est au niveau de la chimie personnelle, en ce qui concerne la vie avec nous sur les routes. Tu peux avoir un gars avec qui le tout clique au niveau technique. Les répétitions vont à merveille mais dès que tu te retrouves dans le bus de tournée après deux jours, ça ne clique plus. C’est cette portion qui est la plus stressante. Peu importe qui sera derrière la batterie, le plus important est la chimie avec les autres membres du groupe. De nombreux batteurs ont la capacité d’avoir le poste avec nous mais est-ce que le tout va fonctionner avec nos caractères ?

Tu nous dis que vous avez un nouveau batteur mais j’imagine que tu ne peux pas nous donner son nom, c’est ça ?

Hahhha ! C’est ça ! (NDLR : L’entrevue a eu lieu le samedi 19 mars. Amon Amarth a annoncé le nom de son nouveau batteur le 22 mars. Il s’agit de Jocke Wallgren de Valkryja et October Tide )  Pas encore. Nous allons dévoiler le nom avant la tournée.

Ce n’est pas Martin Lopez ? (NDLR : Lopez est l’ancien batteur d’Amon Amarth mais il s’est fait connaitre avec Opeth)     

Non. Dans un sens, ce serait plutôt possible mais ce n’est pas lui. J’aime vraiment ce gars mais non, ce n’est pas lui.

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Dans le numéro d’avril de Decibel, Jeff Walker de Carcass ne se montre pas très tendre avec Amon Amarth. Est-ce une blague ou est-ce qu’il n’est pas vraiment fan de ce que vous proposez ?

Qu’a-t-il dit ?

Il participait à la rubrique Call & Response. L’équipe du magazine lui fait entendre des chansons sans nommer le groupe. Il se rend compte qu’il écoute Amon Amarth et il dit à votre sujet : « Amon Amarth ? Vraiment ? Ce sont des posers, de faux Vikings ! Ils sont encore sur le marché ? Ugh… » Connaissant son sens de l’humour, est-ce possible qu’il vous taquinait ? 

Hahhha! On ne sait jamais avec lui! Hahhhaha! Je suis plutôt certain qu’il blague mais d’un autre côté, je suis certain qu’il essayait d’être le plus sérieux possible! C’est un type très rigolo!

Pour la prochaine tournée, allez-vous avoir la même scène que dans le clip pour First Kill avec tout l’attirail viking et les portions avant des drakkars?

Non, c’est beaucoup trop gros. Ce type de décor est utilisé lors d’un festival ou lorsque nous jouons dans des amphithéâtres. C’est trop massif mais nous allons avoir autre chose, c’est certain. Ce sera fait en fonction de la tournée nord-américaine. Je peux déjà te confirmer que ce sera notre décor de scène le plus grandiose pour une tournée en Amérique. La production sera plus grosse et il y aura même des moments plus théâtraux. Ce sera génial! Nous sommes tous très excités, nous n’avons pas fait de tournée depuis une bonne année environ.

Et parlant de choses géniales, vous allez avoir avec vous Entombed AD en ouverture. Est-ce que nous pouvons nous attendre à la présence de Lars-Goran Petrov, sur scène avec vous, pour une version de Guardians of Asgaard?

Hahha! Nous lui laissons le tout entre les mains! S’il veut venir la faire avec nous, nous serons prêts! Il sera le bienvenu!

Dernière question maintenant. Est-ce possible qu’Amon Amarth revienne faire une série de dates avec la formule « Une soirée avec Amon Amarth » après cette portion de tournée? Cette façon de faire où vous étiez seul sur scène a bien fonctionné à l’époque.

Ce n’est pas prévu car l’album n’est même pas encore sorti, les dates de la première portion de la tournée sont disponibles et c’est très loin pour nous. Jomsviking est un album-concept et il serait intéressant de le jouer au complet sur scène. On ne sait jamais!

Olavi, merci beaucoup!

De rien, Yanick!

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Le nouvel album d’Amon Amarth, intitulé Jomsviking, est maintenant disponible. Mon analyse se retrouve juste ICI!

Amon Amarth sera en concert (avec Exmortus et Entombed AD) le jeudi 28 avril à l’Impérial de Québec et le vendredi 29 avril au Metropolis de Montréal. C’est ICI pour les billets de Québec mais juste ICI pour ceux de Montréal!

http://www.amonamarth.com/