Immolation : Expiation métallique (Entretien avec Ross Dolan, bassiste et chanteur)
BloguesChanceux comme un Quêteux

Immolation : Expiation métallique (Entretien avec Ross Dolan, bassiste et chanteur)

L’image de dur qui accompagne la réputation des musiciens qui œuvrent dans le domaine métallique ne colle pas. Et pour être franc, elle ne collera jamais! J’imagine qu’en 1984, c’était possible mais avec le temps, nous nous sommes rendus compte que derrière chaque métalloïde se cachait un bon gars, un vrai. C’est le cas avec Ross Dolan d’Immolation. Ce gaillard a l’air d’une brute. Sur scène, avec sa chevelure aussi longue que celle de Raiponce, il impressionne grandement! Lorsque tu prends le temps de parler avec lui, il est d’une générosité sans limites. Avec la sortie du nouvel album Atonement, j’ai pris le temps de discuter avec Dolan (deuxième sur la photo) juste avant leur départ pour une tournée avec les Frères Cavalera. Entretien avec Ross Dolan, chanteur et bassiste.

Lorsque j’ai reçu l’album il y a quelques semaines, j’ai été surpris par le fait que vous étiez de retour avec votre ancien logo. De plus, j’ai remarqué que le personnage de l’ange faisait lui aussi, un certain retour. Comme dans le temps! Est-ce quelque chose que vous aviez en tête ou c’est tout simplement arrivé comme ça?

En fait, ce n’est qu’un joyeux accident! La façon dont le tout est arrivé est du domaine accidentel, pour être franc. Nous étions à la fin des sessions d’enregistrement quand nous nous sommes finalement décidés d’utiliser le titre Atonement comme titre pour l’album. C’était déjà un titre de chanson sur l’album. C’est une pièce qui traite de l’extrémisme religieux. Il était clair que nous devions l’utiliser comme titre pour l’album. L’inspiration pour la couverture de l’album provient de quelques lignes des paroles de la chanson. Nous avons utilisé quelques lignes comme plan de base et nous avons construit l’idée à partir des paroles. Nous avons ensuite dressé un portrait global de ce que nous voulions à Par Olofsson, l’artiste derrière la couverture de l’album. Lorsqu’il a commencé à travailler sur le projet, il nous envoyait des esquisses et autres brouillons, question de voir vers quoi nous nous dirigions. La couverture prenait vie et nous avons remarqué que Par se dirigeait de plus en plus vers les albums qui représentent le début de la carrière d’Immolation. Un genre de salut dans un sens mais en même temps, ce n’était pas intentionnel de sa part. C’est juste arrivé comme ça! Nous avons décidé d’utiliser notre vieux logo car lorsque nous faisions le montage de la couverture avec le nouveau et l’ancien logo, c’était le logo antique qui ressortait le mieux au niveau esthétique. Il donnait à la couverture cette sensation plutôt sinistre, beaucoup plus ténébreuse que notre nouveau logo. Notre nouveau logo n’amenait rien de très intéressant à la couverture d’Atonement. C’était mieux ainsi et nous sommes très fiers d’avoir utilisé notre vieux logo.

Cet album aurait pu paraître beaucoup plus tôt. Je crois que vous avez eu quelques problèmes au niveau interne. Votre guitariste Bill Taylor a quitté le groupe et votre batteur, Steve Shalaty, s’est blessé sévèrement. Donc, vous aviez quelques détails plutôt importants à régler avant tout. Peux-tu nous raconter comment tout s’est arrangé pour le groupe?

Nous avons débuté le processus d’écriture pour Atonement au début de l’année 2015. Au milieu de cette même année, nous avions toute la musique d’écrite pour trois chansons. Nous pratiquions les trois chansons, chacun de notre côté. Soudainement, Bob (Vigna, guitariste) s’est retrouvé en perte d’inspiration. Il a frappé un mur dans un sens. Il s’est retiré du projet et il a dû prendre quelques mois de repos face au processus d’écriture, question de laisser le temps à l’inspiration de revenir le frapper de plein fouet. Malheureusement, lorsque le syndrome de la page blanche te frappe, la seule chose à faire est de se retirer du projet pour un bout et d’attendre que l’inspiration te rattrape. Lorsque Bob a retrouvé son inspiration au mois de septembre, c’est Steve qui s’est retrouvé dans le pétrin. Il s’est brisé la cheville à trois endroits. Les dommages étaient si sévères qu’on a dû lui insérer des implants métalliques, question de bien maintenir sa cheville en place. Après la chirurgie, Steve a suivi des soins en réadaptation sur une période de 6 mois. Il devait retrouver toute sa motricité au niveau du pied. Il a dû réapprendre à utiliser correctement son pied. Je n’ai pas besoin de te confirmer que cet incident est la raison majeure face à ce retard quant à la sortie d’Atonement.  Mais en même temps, quand on y repense, cet incident nous a permis de prendre encore plus notre temps pour fignoler l’album. Nous avons pris le temps de bien analyser les tonalités que nous recherchions. Nous avons pu les amener là où nous voulions les amener. Nous sommes bien heureux du résultat en ce qui concerne l’album et comment nous avons maîtrisé la situation. C’est le point positif qui ressort de cette série de malheurs qui se sont abattus sur nous alors que nous tentions de finaliser Atonement. C’est aux alentours de juin 2016 que nous avons pu finalement terminer l’album en studio. Ironiquement, le départ de Bill (Taylor, guitariste) n’est survenu que plus tard alors que l’album était déjà enregistré. Son départ n’est donc pas en relation avec le retard.

Je voudrais te parler de la chanson Atonement, la chanson-titre de l’album. Je trouve que c’est celle qui ressort un peu plus du lot. Tu parlais du fait que vous avez eu le temps de fignoler certaines pièces, je me demandais si celle-ci était dans les premières écrites pour l’album? 

Non, c’est la 9e que Bob a écrite pour l’album. Nous étions à la fin du processus d’écriture rendu à cette étape. Atonement, Destructive Currents et Epiphany sont les trois dernières chansons que nous avons ficelées pour finir l’album. Atonement est une chanson sombre qui possède un rythme plutôt invitant au départ qui prend l’auditeur par la main pour l’amener vers une section plus explosive, plus rapide. Par la suite, c’est un moment plus hypnotisant avec un climat de hantise. C’est ce bout bien précis qui a servi d’inspiration pour la création de la couverture de l’album. Après, on se dirige vers la fin de la chanson avec une direction vers les ténèbres musicales qui demeurent lourdes et plutôt épiques. C’est ce qui rend cette chanson si diversifiée, elle est riche musicalement. Ce sont des éléments que l’on retrouve tout au long de l’album. Au niveau des paroles, cette chanson parle de l’extrémisme au niveau de la religion. Nous ne parlons pas d’une religion en particulier, nous ne faisons que commenter le côté plus inquiétant qui nous vient de la part des fanatiques alors que certaines idées en relation avec la religion ne sont pas interprétées convenablement, tout en ajoutant les agissements qui viennent avec cette interprétation fautive.

Je ne veux pas aller trop profondément dans le domaine politique mais est-ce que tu crois que votre pays est période d’expiation (traduction pour Atonement) avec l’avènement de votre nouveau Président?   

Je crois que cet album va atteindre directement nos fans car il traite de ce qui se passe dans le monde d’aujourd’hui. Cet album se veut pertinent car il traite de toutes les couches les plus sombres de notre réalité. Il parle de choses que nous pouvons voir aujourd’hui mais qui en réalité, existent depuis des siècles. Que cette noirceur se manifeste par la politique, la religion ou tout simplement par l’esprit malin qui caractérise l’humanité, c’est une constance dans notre monde. Les ténèbres se montrent le visage de temps en temps. Lorsque cela arrive, nous devons faire face à ce qui se passe, coûte que coûte. C’est la base de cet album, c’est le thème majeur d’Atonement et à bien y penser, c’est le thème récurrent de chacun de nos albums. J’ai toujours essayé de me tenir loin de la politique car je n’en suis pas un amateur, pour être honnête avec toi.

immolation-atonement_4000px

Bien souvent, les groupes travaillent avec un producteur le temps d’un album ou deux et ensuite, ils en essaient un autre. Vous, vous travaillez avec Paul Orofino depuis Failures for Gods. Cet album est sorti en 1999, cela fait presque 20 ans! Que peux-tu nous dire face à votre relation avec Paul?

Cette question nous est posée bien souvent mais elle est toujours la bienvenue étant donné que j’adore souligner à quel point Paul est un être exceptionnel. Il a toujours été bon avec nous. Il compte beaucoup pour Immolation, autant en tant qu’ami qu’en tant que producteur. Paul est devenu un ami très proche pour nous tous. Avec les années, nous avons su développer un bel esprit de camaraderie et à ce point de notre carrière, nous pouvons même dire qu’il est un membre de la famille. Ses talents sont insondables. L’atmosphère qui règne au Millbrook Sound Studios est invitante. Tu te sens comme chez toi, c’est très relaxant de s’y retrouver. Son studio nous englobe, il nous permet de nous développer encore plus et nous pouvons mettre l’accent sur la créativité et la productivité. Paul est une personne unique, un être d’exception. Il est accueillant et fera toujours de son mieux pour que tout puisse être à l’avantage de ses invités.  Depuis l’album Majesty and Decay, nous avons combiné le talent de Paul avec l’expertise de Zach Ohren qui possède une approche plus moderne. Les résultats sont fantastiques et nous croyons que ce duo a réussi à produire nos albums qui possèdent les sonorités les plus précises.

J’aime aussi la pièce The Power of Gods. J’aime la structure de cette chanson. Elle est diversifiée et bien montée. J’aimerais savoir si cette chanson est liée directement (ou même indirectement) avec Failures for Gods, dans le sens qu’il y a peut-être eu des changements pour ces Dieux?

Bien content que tu apprécies cette chanson! C’est la 4e chanson qui a été composée pour l’album. Je dois avouer qu’elle est plutôt dynamique. Elle possède quelques détours et changements de structure mais sans perdre le contrôle. Au niveau du sujet, c’est différent de Failures for Gods. Sur cet album, nous soulignions le fait que les religions organisées avaient échoué avec les années. La chanson The Power of Gods parle plutôt des mains dites invisibles qui prennent les décisions et dictent les politiques qui régissent notre monde et notre existence. C’est au sujet des gens qui mènent vraiment le bal et qui tirent les ficelles derrière les rideaux, derrière cette illusion nommée démocratie.

En 2015, vous avez participé au Festival Obscene Extreme America qui s’est déroulé ici, à Montréal. Pour être franc, cet évènement n’a pas été un succès, malheureusement. De mon point de vue, je ne crois pas que l’idée se voulait très lucrative de tenir un festival métallique deux semaines après le Heavy Montréal, qui se veut le plus gros festival métal dans notre coin de pays. Que peux-tu nous dire au sujet de cette expérience?

Nous avons eu du bon temps lorsque nous avons joué pour l’Obscene Extreme Festival à Montréal. Nous avons fait la version européenne, en République Tchèque, il y a quelques années. Une expérience unique pour nous, vraiment. De pouvoir jouer notre musique devant une foule immense et si enthousiaste, c’était du jamais vu. Quand l’organisation nous demandé de participer à l’édition de Montréal, nous étions très heureux de revenir au Canada. Je comprends que le timing du festival n’était pas à point, vraiment. Ce spectacle s’est bien déroulé pour nous. Les groupes et les amateurs qui ont participé au Obscene Extreme ont eu du bon temps, il n’y a pas de doute. C’était un bon évènement malgré l’achalandage plutôt faible. Les organisateurs ont fait du bon travail et ils ont tout tenté face au fait d’amener l’esprit d’un festival européen en Amérique du Nord.

Et ma dernière question, est-ce que nous pouvons nous attendre d’avoir Immolation à Montréal bientôt?

Nous sommes en tournée avec les Frères Cavalera pour leur célébration face à l’album Roots de Sepultura. Nous serons en Europe au mois d’avril avec Vader. Nous espérons pouvoir faire une tournée par la suite et visiter le Canada. Nous voulons visiter le plus de places possibles pour que nos fans canadiens puissent apprécier ce que nous allons leur offrir!

Ross Dolan, merci beaucoup!

Merci à toi! Bonne entrevue en passant!

L’album Atonement est disponible!

www.facebook.com/immolation

[youtube]dJDMVRMYgfI[/youtube]