Lamb of God : Tout simplement passionné… et vivant! (Entretien avec John Campbell, bassiste)
Je me gardais cet entretien avec John Campbell pour plus tard, vraiment plus tard dans l’année. L’entrevue a été enregistrée en juillet mais je me devais de la garder pour cette période plus festive. Festive car John (premier à gauche sur la photo) parle surtout de la vie, aussi simple que ça. Étant donné que le groupe n’était pas vraiment en promotion face à un nouvel album, nous avons pu bifurquer des sujets habituels. Vu que leur mini-album The Duke est en relation avec le combat d’un homme face à la leucémie, nous avons abordé ce sujet, dès le début de l’entrevue. Du sérieux mais une touche d’humour avec ce bassiste extrêmement amical! Entretien avec John Campbell, bassiste de Lamb of God.
Tu sais, je parlais avec des amis en disant que j’allais avoir un entretien avec John Campbell, de Lamb of God.
Et ils t’ont dit : « Oh non, pas le bassiste! »
Hahhha! Non, pas du tout! En passant, vous avez sorti un nouveau mini-album du nom de The Duke.
Oui, nous avions quelques chansons qui n’ont pas pu se retrouver sur l’album. La compagnie a voulu que nous sortions un mini-album avec le matériel qui restait en plus d’y ajouter du matériel enregistré en concert.
Il y a une histoire derrière ce mini-album qu’est The Duke. Te sens-tu capable de nous en parler?
Ce serait plus à Randy (Blythe, chanteur) de le faire. Je vais m’y essayer quand même. Cette chanson du nom de The Duke est une chanson que Randy a écrite pour souligner la vie d’un homme. Son nom était Wayne Ford. Randy l’a rencontré après l’un de nos concerts. Il souffrait de leucémie et il combattait férocement. La chanson tourne autour de cet homme et Randy nous propose son point de vue face à lui.
La leucémie, un cancer féroce. Et en ce moment vous êtes…
Oui, en tournée avec Behemoth. Nergal a souffert de la leucémie, effectivement. Mais nous avons aussi quelqu’un de notre entourage qui en a souffert. Notre responsable de la vente de notre marchandise, Evie, a souffert de cette maladie, elle aussi. Elle est décédée en 2008.
Donc, la leucémie est une maladie avec laquelle vous aviez déjà eu un certain contact car elle a frappé très près de vous.
Exactement. Par la suite, nous étions en train d’enregistrer Sturm und Drang. Randy a reçu des nouvelles de Wayne. Il était mal en point et il en était dans les derniers moments, c’était inévitable. Il s’était battu pendant les cinq dernières années avec ce cancer. Randy et lui ont discuté, échangé des courriels, textos ici et là, jusqu’à ce qu’il rende l’âme.
En fin de compte, ce mini-album a un message plutôt clair à passer.
De profiter de la vie, dans un premier temps et ensuite, de signer la liste qui fera de vous un donneur de moelle osseuse. C’est un moyen qui peut permettre à ceux qui souffrent de la leucémie de s’en sortir. Que pouvons-nous faire dans des cas aussi particuliers? Randy a décidé de s’impliquer, à sa manière. Il l’a fait de son plein gré et non pas à la demande de la famille ou des amis.
Étant donné que vous, les membres de Lamb of God, êtes des artistes de renom partout sur Terre, vous devez recevoir toutes sortes de demandes? Du genre : j’ai un ami malade, peux-tu l’appeler? Autographier tel ou tel album? Lui faire une vidéo personnalisée?
Oui, ceci arrive. Mais pour des situations comme celle qui a donné The Duke, non. Mais de rencontrer des gens en fin de vie, qui veulent te rencontrer. Oui. Je crois que nous étions en tournée avec Slipknot. Il m’est arrivé quelque chose, justement. Ce n’était pas Rêves d’Enfants car la fille était trop âgée pour ça mais… C’était plutôt une série de personnes qui avaient décidé de s’unir pour réussir à réaliser le vœu d’une fille. Elle aimait conduire des motos. Ils savaient que moi et Jim Root de Slipknot étions des amateurs de motos. Ils ont demandé si nous pouvions nous organiser pour aller faire un tour de moto avec elle. Nous l’avons fait. Elle n’avait que 17 ans, elle souffrait d’un cancer. Une fille charmante. Nous nous retrouvons dans ce genre de situations assez souvent. C’est l’une de… comment pourrais-je le dire… Je me rends compte que parfois, le simple fait de prendre une photo avec quelqu’un d’inconnu ou de lui signer un autographe, ça apporte beaucoup plus de joie que je ne peux me l’imaginer. Même si parfois je dois prendre du temps que je n’ai pas, que je sois pressé et que dans un sens, ce soit un inconvénient face à mon horaire, je me rends compte que ce petit temps offert peut vouloir dire beaucoup pour certaines personnes. Car ce ne sont pas tous les gens qui nous racontent leur réalité, ce qu’ils vivent quotidiennement, leur chagrin ou leur état de santé. Sérieusement, je me sens excessivement privilégié d’avoir ce genre de pouvoir qui permet à d’autres de pouvoir se sentir mieux. J’en retire une satisfaction immense de savoir qu’un geste aussi simple peut apporter autant de joie pour une personne. Et qu’est-ce que je reçois en retour?
Hum, je te laisse le dire!
Un sourire! C’est suffisant!
Est-ce satisfaisant de savoir que tu as changé la vie de quelques personnes?
Je ne prendrais pas autant de mérite. Ça nous permet de réaliser que ce groupe est devenu plus gros que ce que nous espérions. À la base, nous ne voulions que faire de la musique, partir en tournée, revenir. Faire un album et répéter le processus. De savoir que des gens sont grandement touchés par notre musique, ça replace tout en perspective. De savoir que nous pouvons amener autant de joie et de bonheur aux gens, c’est excessivement satisfaisant.
Je me souviens d’avoir vu Lamb of God ouvrir pour Cannibal Corpse et Dimmu Borgir. C’était en 2001.
Oui, je me souviens de cette tournée.
Depuis ce temps, on comprend que vous avez réussi à bâtir votre carrière comme on monte, un château de cartes. Étape par étape!
Oui, et c’est aussi solide qu’un château de cartes! Tu ne sais jamais ce qui peut t’arriver, même à la fin de ta journée. Il nous est arrivé certaines choses qui auraient probablement détruit un bon nombre de groupes. Mais nous ne prenons rien pour acquis. Le travail et une bonne discipline, c’est ce qui tient le groupe en place.
Je me demandais ceci. Comment on se sent lorsque notre agent nous appelle pour nous dire : « Salut John. Donc, voici le plan pour la prochaine tournée. Anthrax et Testament ouvriront et vous êtes en tête d’affiche! » Comment doit-on se sentir lorsque nos héros, nos influences, se retrouvent en ouverture de notre propre groupe?
Nous avons vraiment travaillé fort pour en être là où nous sommes présentement. On se sent bien. Je sais que nous méritons tout ce qui nous arrive car nous n’avons absolument rien volé à qui que ce soit. Mais je dois avouer que ça donne tout un coup à ton égo, je ne m’en cache pas. Et il faut être très prudent avec ça. Quand nous avons débuté en ’94, nous voulions jouer lors de partys et si l’occasion allait se présenter, dans un club! Ça, c’est ce que l’on considérait comme un succès à l’époque. C’est très satisfaisant de savoir que des groupes de ce calibre ouvrent pour ton groupe. Nous sommes chanceux.
Mais comme tu as dit, vous avez travaillé excessivement fort.
Oui, mais il y a de nombreux musiciens excessivement talentueux qui n’auront jamais la chance de goûter au millième de ce que nous avons fait. Certains ne vont que jouer dans des clubs ou même, dans leur salon. Il y a une question de timing, de chance et de travail dans tout ça. Nous avons su profiter des opportunités qui se sont présentées devant nous et pour la plupart, elles étaient très bonnes. En fin de compte, ça prend beaucoup plus que du travail acharné.
Dans le même ordre d’idées, peux-tu me dire depuis quand vis-tu de la musique?
En 2004, le bar pour lequel je travaillais a fermé ses portes. C’était bien. Je veux dire d’y travailler, pas qu’il soit fermé! J’étais barman. Je pouvais partir en tournée quelques semaines, revenir complètement cassé et au retour, je retournais au bar. Je faisais quelques semaines pour me renflouer les poches, remplir le réfrigérateur et repartir en tournée par la suite. Lorsque le bar a fermé en 2004, c’est la même année où nous avons signé avec Epic/Sony. J’ai arrêté de travailler à ce moment. Au début, ce n’était pas facile mais j’ai développé un style de vie qui me convenait avec les ressources que je possédais. Mais j’estime que c’est vraiment depuis 2005 que Lamb of God est vraiment devenu mon emploi et ce, à temps plein.
Tu dis que tu travaillais dans un bar. Est-ce que c’était le genre de place comme les Foufounes à Montréal. C’est-à-dire une place plutôt métallique où les gars de Municipal Waste ou GWAR pouvaient aller prendre une couple de bières?
J’ai travaillé dans quelques bars. J’ai travaillé à un endroit où le public qui y trainait tard en soirée était plutôt punk, métal et des gens avec des tatouages. Mais en début de soirée, c’était plutôt pour des gens ordinaire. J’ai aussi fait des apparitions, en tant que barman invité, au GWARBar. C’est une place qui appartient au groupe GWAR, à Richmond. Je l’ai fait lors des deux dernières années. C’est vraiment une place où les gars de Municipal Waste se tiennent. Ryan Waste, le guitariste de Municipal Waste, est parfois invité comme DJ.
Il doit jouer beaucoup de métal de la vieille école.
C’est un fait! Si vous allez à Richmond, en Virginie, vous devez absolument aller au GWARBar. C’est très beau comme endroit.
Tu n’as pas de side-project.
J’ai deux enfants! Hahhha! Toi aussi je crois.
Eh oui, comment le sais-tu?
J’ai vu la photo de tes enfants sur ton cellulaire tout à l’heure!
Hahhhaha (rires collectifs)
C’est plus facile maintenant pour les musiciens en tournée, de rester en contact avec la famille.
Oui, grâce à Face Time et Skype. Je dois t’avouer que c’est difficile par contre. Mon cœur de père en prend un bon coup car je ne serai pas présent pour la rentrée des classes. C’est très difficile.
En tant que père, je peux te comprendre mais pour le reste, mes enfants vont à la même école où je travaille, donc c’est plus facile.
Tu es très chanceux.
Donc, pour en revenir au side-project! D’autres membres de Lamb of God en ont, ou en avaient. Lorsque Chris Adler vous a dit qu’il allait prendre quelques mois pour aller jouer avec Megadeth, j’imagine que la réaction devait être un mélange entre la joie et l’inquiétude, non?
Quand Chris me l’a annoncé, j’étais vraiment très heureux pour lui. Je lui ai dit que c’était comme si sa vie entière avait été construite de façon à ce que cet évènement lui arrive. Tu vois? Mais Lamb of God, je sais que c’est sa priorité donc pas d’inquiétude avec ça. Je ne lui aurais pas dit la même chose pour Nitro par contre. Hahhha!
John Campbell, un immense merci!
Merci à toi, Yanick!
http://www.lamb-of-god.com/