Quand j’étais recherchiste à TVA, j’ai dû me battre bec et ongles pour inviter Louis-Jean Cormier. On me disait que c’était un nobody. L’animatrice l’avait présenté comme Jean-Louis Karkwa. Live-to-tape. Diffusé tel quel. Ça m’avait fait tiquer en s’il-vous-plait.
Le voir gagner trois prix au Gala de l’ADISQ d’hier soir, ça m’a fait du bien. L’effet d’une revanche. J’ai envie de croire que les temps changent dans l’industrie de la musique au Québec. Que son triomphe soit symptomatique d’une plus grande ouverture chez les médias grand public. À TVA, oui, mais aussi chez les radios commerciales qui ne jouent pas Peter Peter sous prétexte que c’est « trop sombre ». Oui, on me l’a déjà servie celle-là.Et, d’ailleurs, il était où lui au vrai gros Gala de l’ADISQ? Il a écrit, composé le plus réjouissant album depuis des lustres au Québec. Un album en phase avec son époque. Une version améliorée de la tristesse, c’était assez neuf pour être classifié Best new music sur Pitchfork. Assez neuf pour percer par-delà la barrière linguistique. Et il me semble qu’on aurait pu le célébrer comme il se doit chez lui. À la hauteur de sa plume poétique si singulière et ses arrangements néo new wave qui auraient de quoi faire pâlir bien des émules de M83.
Quoi qu’il en soit.
Au gala d’hier, Les Soeurs Boulay ont gagné le prix Révélation de l’année. Une victoire prévisible mais non moins méritée. Reste plus qu’à espérer qu’elles ne soient pas des étoiles filantes comme j’ai l’impression (à regret) que Lisa Leblanc s’avère à être.
Mais en montant sur scène – et en plus de brailler – Mélanie Boulay a fait tout un statement. Grosso modo, elle a demandé aux radios commerciales de faire confiance à leurs auditeurs. De leur laisser, à elles et leurs pairs de la scène indie, la chance de jouer sur leurs ondes. Elle l’a fait avec élégance, entre deux larmes de joie qui coulaient (surement) sur sa belle robe Ève Gravel. Une déclaration importante. Une prise de parole qui devait se faire depuis trop longtemps.
Faire confiance aux auditeurs? Oui mais c’est eux qui élisent Marc Dupré interprète de l’année et qui sacrent sa chanson Nous sommes les mêmes comme la meilleure de l’année. De quoi comprendre les si frileux directeurs musicaux qui ne se risquent pas à jouer Peter, les p’tites Boulay ou Keith Kouna. C’est dur de changer les habitudes alimentaires de quelqu’un qui a toujours manger du junk food.
D’un sens, ceci dit, je me sens mal de condamner les calories vides, le manque de substance et le côté gnangnan ultra convenu des compositions de Marc Dupré. Genre de Julio Iglesias de la radio québécoise. Le gars est sincère, il met ses tripes sur la table avec ses textes même si au final ça donne le même effet en bouche qu’une gomme balloune Bubble Tape mâchouillée trop longtemps. Reste que Karim Ouellet méritait de gagner pour L’amour. C’était écrit dans le ciel et le renard est reparti les mains vides. Déception sincère. Et oui, c’est un peu par chauvinisme. Mais surtout parce qu’il est le seul – avec Amylie et Les filles – qui a su transcender les créneaux médiatiques. Plaire à l’underground comme au mainstream.
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Mention spéciale au duo Boogat et Marie Mai à mi-parcours, toujours au Gala de l’ADISQ d’hier soir. C’était déconstruit, avant-gardiste, étonnant. J’ai eu l’impression d’écouter une compil’ de Kitsuné. Marie Mai a pris une sacrée grosse dose de street cred à mes yeux, et moi, je veux ça sur mp3 pour l’écouter chez nous. Pour vrai.
Tu plantes Marc Dupré mais il est dans une bonne équipe et aussi les jeunes savent pas qu’il était humoriste. Toi aussi tu en a écouter du pop quand tu étais jeune et la jeunesse est vieille comme le monde.
Sois plus douce quand tu plante quelqu’un. J’aime pas le pop, mais je respecte quand même!
« Sois plus douce quand tu plante quelqu’un. »
Auriez-vous écrit pareille chose à un homme?
»Une prise de parole qui devait se faire depuis trop longtemps. »
Ce »statement » se fait à toutes les éditions du gala de l’adisq… De Plamondon au 83(rap) au soeurs Boulay etc etc…
La diffusion ne se fait plus par les radios. Ce temps tire à sa fin. Ce combat est terminé. Anyway, pourquoi vous n’acceptez pas qu’une radio ou media fasse ce qu’il veux? A ce prix là, faut-il qu’on milite pour que cism ou cibl ou espace musique passe du Marc Dupré ou du Marie-Mai? Chacun son créneau, acceptez-le.
Et en passant, Louis-Jean Cormier, c’est aussi conventionnel que la pop sucré de Marc Dupré, du moins, avec une petite esthétique montréalaise en plus.
«Louis-Jean Cormier, c’est aussi conventionnel que la pop sucré de Marc Dupré, du moins, avec une petite esthétique montréalaise en plus.»
Juste une petite minute de votre temps pour porter à votre attention ces deux textes qui, à mon avis, résument bien pourquoi L-J Cormier est un auteur-compositeur interprète d’immense talent et pourquoi Marc Dupré va rester à jamais un interprète de pop sucrée.
(Louis-Jean Cormier)
Par dessus les kamikazes
Les tricycles abandonnés
Les bouquets de masques à gaz
Dans les mariages arrangés
Même au dessus des ouragans
Des banquises bouillantes en dedans
Comme dans le ventre
Quand la faucheuse remplie la salle d’attente
ET cela
(Marc Dupré)
Nous sommes les mêmes
Toujours prêt à tout pour se dire je t´aime
Assez pour
Assez pour atteindre l´extrême
Assez pour
Assez pour que le feu reprenne
Nous sommes les mêmes
Toujours prêts à tout pour se dire je t´aime
Assez pour
Assez pour atteindre l´extrême
Assez pour
Assez pour que le feu reprenne
Ohhhh ohhh ohhh X6
(ouf)
Et pourquoi on ne devrait pas militer pour que Marc Dupré et Marie-Mai aient leur temps d’antenne à CISM ou Espace Musique ? Parce que les radios commerciales leur proposent déjà une immense machine. Déjà que Louis-Jean Cormier est trop mainstream pour CISM, il ne lui reste pas grand chose sauf Espace Musique qui a une portée limitée. Au moins, il a eu une reconnaissance cette semaine.
»Déjà que Louis-Jean Cormier est trop mainstream pour CISM, il ne lui reste pas grand chose »
Ouais, pas grand chose, genre Québecor…
»Parce que les radios commerciales leur proposent déjà une immense machine »
Donc, si je comprends, vous voulez que toutes les radios soient à peu près pareils, et qu’elles offre toutes la même chose. Effrayant.
Ps( En passant, bien que c’est malhonnête de prendre deux bouts de textes que vous avez choisi comme argument, les deux sont assez mauvais.)
Simplement rappelez que la critique si j’ai bien compris est beaucoup plus envers l’auditoire que Marc Duprès …
Et juste clarifier quelques choses ; une petite esthétique montréalaise …
Vous dénoncez le fait de vouloir uniformisé les radios…alors que vous uniformiser vous même les artistes … J’apprecirais la signification d’une esthétique montréalaise peut-être …