Angle mort

La course destination Loft

Rappelez-vous La Course destination monde. Chaque dimanche, des jeunes nous transportaient aux quatre coins du globe grâce à leurs petits films.

Or, si La Course… était encore de ce monde, on l'aurait mise dans la catégorie des "téléréalités". Si, si.

En février 2004, la revue littéraire L'Inconvénient consacrait un numéro à la téléréalité. L'auteur Yannick Roy y allait d'une analogie assez surprenante entre La Course destination monde et… Loft Story. Selon lui, entre les deux, il n'y a qu'un pas.

Ce qui intéressait Yannick Roy dans La Course… n'était pas vraiment "l'immensité du monde" mesurée chaque semaine par les concurrents. "Mon intérêt s'expliquait davantage par l'identification romanesque de ma destinée à celle des jeunes vidéastes, écrivait-il, dont le rôle importait bien plus que celui des personnages et des contrées exotiques sur lesquels portaient leurs films." En bref, les coureurs le fascinaient plus que la course.

La grande différence, entre la course et le loft, selon Roy, c'est le motif.

Depuis toujours, les artisans de la télévision ont cette intention – naïve – de montrer à l'écran des choses dignes d'intérêt. Un motif. En nous faisant découvrir le monde, La Course… avait un motif.

Dans la téléréalité moderne, c'est parce que quelque chose passe à la télévision que c'est digne d'intérêt. Le motif, c'est du passé. C'est la télé qui se nourrit d'elle-même.

Or, toujours selon Yannick Roy, retirez de La Course… le "motif" (le monde), ne conservez que les jeunes concurrents, enfermez-les à double tour et filmez leurs réactions. C'est Loft Story.

Sauf qu'il y a une autre différence entre le loft et la course que Yannick Roy n'a pas notée. Un des producteurs d'Endemol – la boîte néerlandaise qui a inventé Loft Story – l'a soulignée la semaine dernière en disant que les participants à Loft Story ne devaient pas être trop intelligents; cela deviendrait ennuyant.

Ah oui? Imaginons un instant que les lofteurs aient été choisis parmi les ex-concurrents de La Course destination monde. Il y aurait François Parenteau (Les Zapartistes), Ricardo Trogi (Horloge biologique), Manon Briand (La Turbulence des fluides), Denis Villeneuve (Maelström), Hugo Latulippe et François Prévost (Ce qu'il reste de nous)…

J'ignore de quoi ils causeraient pendant neuf semaines. Mais j'ai comme l'impression que leurs discussions iraient au-delà d'une sauce à spaghetti ou d'une tente à cul. Et que ce serait tout sauf ennuyant.

Loft Story II, à compter du dimanche 29 janvier, 18h, à TQS.

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