Revenons sur cette chronique de mon collègue David Desjardins, rédacteur en chef du Voir de la Vieille Capitale.
Je dis "Vieille Capitale" par pure provocation. Oui, car Régis Labeaume, sieur de la cité fortifiée, en a soupé de ce vieillot surnom. Aussi entend-il rajeunir l'image de Québec, et ce, grâce à l'embauche récente d'un expert international en image de marque. Un dénommé Clotaire Rapaille. J'adore le nom. Je le faxe sans délai à Victor-Lévy Beaulieu.
Toujours est-il que, puisque je méprise souverainement les faiseurs d'image de tout acabit, en particulier ceux payés par des deniers publics, je m'engage à perpétuer l'appellation "Vieille Capitale". Qui m'aime me suive.
Mais revenons à Desjardins, du Voir de la Vieille Capitale.
Dans sa chronique du 26 novembre, il éructait une diatribe vinaigrée à propos de la tendance aux albums de duos. L'ex-Bottine souriante Yves Lambert y aura spécialement goûté. Je résume: Desjardins a trouvé choquant que Lambert justifie son disque de duos en invoquant une forme de "solidarité entre musiciens en temps de crise". Il aurait préféré entendre l'artiste admettre qu'il s'agissait là d'une astuce marketing pour vendre des records.
Le soir même du jour de la publication de la chronique, l'Yves Lambert en question, dans une entrevue à RueFrontenac.com , envoyait ledit Desjardins "manger d'la marde".
Et, tant qu'à avoir une tribune, le chansonnier en a profité pour inviter les journalistes (en général) à un "examen de conscience". Selon ses propos rapportés par RueFrontenac.com , les journalistes devraient se "donner la peine de réfléchir" et "travailler leur sens de l'analyse au lieu d'être une gang de ti-culs incompétents".
Message reçu. J'ai donc tenté d'analyser l'épiphénomène Yves Lambert vs les médias, de le situer dans une perspective plus large. Que s'est-il, au juste, passé le 26 novembre 2009?
D'abord, Yves Lambert est un artiste apprécié du public, du milieu. De lui et de sa démarche, je n'ai toujours entendu que de bien belles choses.
Or, il s'est subitement retrouvé devant une nouveauté: une critique négative. Et une coriace.
C'est cette stupéfaction devant l'inédit qui, spéculé-je, a provoqué de la part de l'artiste le pétage de coche susmentionné.
Sans être le premier, David Desjardins s'est attaqué à ce qu'il est convenu d'appeler un intouchable.
Il se trouve, au Québec, nombre d'artistes à propos desquels il ne faut répandre que du positif.
Il y a les gentils. Ces artistes avenants, volontaires, toujours prêts à embrasser une cause. Je pense à Judy Richards. Et, jusqu'à la semaine dernière, Yves Lambert me donnait l'impression d'entrer dans cette catégorie.
Il y a les vieux. Janette Bertrand, Michel Tremblay, Louise Forestier, Denise Filiatrault, et j'en passe… On les critique sur le pilote automatique. On les aime, évidemment!
Il y a les jeunes prodiges. Prenons notre Riquet à la houppe, Xavier Dolan. L'été dernier, il a forcé les critiques de cinéma à inventer de nouveaux superlatifs. Fiez-vous à moi, les mêmes critiques vont attendre son deuxième film dans le détour.
Il y a bien sûr les morts. Intouchables. Gilles Carle vient de décéder. Un pionnier s'est éteint. Ce n'est pas ici, pas aujourd'hui, que vous lirez quelque moquerie que ce soit à propos de la scène épique de son film La Postière, où Michèle Richard se fait baiser doggy style… costumée en chevreuil.
Il y a les artistes émergents. Certains émergent d'ailleurs depuis une éternité. Pas de panique, tant qu'ils restent dans l'émergence, foin de mauvaises critiques!
Il y a ceux qui font rayonner le Québec à travers le monde. Simple Plan commet du pop rock d'un quelconque intégral. Mais c'est des p'tits gars d'chez nous.
Et il y a les membres de la famille qu'ô grand jamais on n'osera critiquer, même s'ils produisent ce qu'Yves Lambert a suggéré de manger à David Desjardins. Oui, Quebecor, je regarde dans ta direction…
En additionnant ces intouchables et en soustrayant la somme du total des artistes québécois, on obtient un tout petit nombre d'artistes que l'on se permet de critiquer librement.
Ceux-là, à mon avis, sont les plus chanceux.
Ils ont d'abord la chance de ne pas se nourrir d'illusions. Mais surtout, leurs ouvres suscitent ce dialogue entre l'artiste, le critique et le public. Ce qu'ils proposent ne provoque pas seulement des bravos oiseux, mais peut-être un débat. Leurs ouvres existent donc au-delà de leur aspect purement commercial.
C'est pour cette raison qu'on devient artiste.
Le 26 novembre dernier, mon collègue de la Vieille Capitale a sorti Yves Lambert de la caste des artistes intouchables.
Un jour, peut-être, saura-t-il l'apprécier…
Pingback depuis Twitter Trackbacks for Les intouchables – Angle mort [voir.ca] on Topsy.com
Dans un précédent billet, j’avais justement sondé les lecteurs et lectrices à propos de ces intouchables et il semble y avoir consensus à ce sujet à la lumière de ceux qui sont nommés dans votre texte monsieur Proulx.
http://www.voir.ca/blogs/joelmartel/archive/2009/07/31/foutre-la-merde.aspx
j’ai envie d’en nommer un autre, intouchable.
Peut-on parler de Richard Desjardins? Vous avez vu, comme moi l’entrevue qu’il a accordé à Patrick Lagacé.
Nous sommes nombreux en Abitibi à avoir sursauté à plusieurs reprise pendant cette entrevue. Il a parlé de cette ambiance presque soviétique ou des « gens de la mine » semblent rôder dans le village et pointent les faiseurs de trouble. Ils encouragent la délation. Il se serait fait demander ce qu’il faisait là…
N’importe quoi! On nage en plein délire cinématographique! Toute ma famille est à Val d’Or. La famille de ma blonde est à Malartic. Le KGB peut dormir tranquille, la compétition ne viendra pas de l’Abitibi. Je vous jure qu’on est loin de la Sibérie (ben géographiquement, pas tant que ça, mais ça c’est une autre histoire).
Mais là ou il est allé trop loin, c’est quand il affirme qu’une mine peut aller poser sa drille dans ta cours pour creuser, sans te le dire.
Patrick, incrédule: y’ont pas à demander quoi que ce soit?
M. Desjardins, convaincu: Pas un coup de téléphone.
Il en rajoute: C’est arrivé ça y’a pas longtemps.
Et ben c’est faux m’sieurs Desjardin, vous êtes un menteur:
http://tinyurl.com/yjfp9nx
Il n’a pas fait un lapsus. Il n’a pas été cité hors contexte. On ne l’a pas mal compris. Il a dit des choses alors qu’il savait qu’elles étaient fausse. Il a menti. Il est documentariste et il a menti. Quelle putain de crédibilité peut-il avoir après ça?
Patrick Lagacé n’a jamais vérifié. Il aurait pu demander qui était cette personne qui s’est fait forer dans sa cours! Imaginez l’entrevue si ça avait été vrai! La caméra fixée sur le trou, les enfants traumatisés. Le jardin de madame parti. Minou qui s’est sauvé. Jamais revenu. La totale!
Et voici ce qu’il (Richard Desjardin) dit des gens de Malartics dans le Voir (entrevue faite le 19 nov 09)
http://tinyurl.com/yhqrjq8
« Les rares critiques me viennent des populations concernées, comme celle de Malartic, qui voit la mine comme une solution au chômage récurrent. Les habitants de la ville ont vu passer trois mines et deux moulins à scie. C’est quoi, ce développement-là? Pourquoi sont-ils toujours aussi pauvres? Dans ce contexte, les gens ne veulent pas trop qu’on parle en mal de la mine. Quand tu lances un steak au milieu d’une meute de chiens affamés, c’est certain qu’ils ne vont pas chialer… On est revenu au principe d’une company town. »
Que peut faire le sauveur de la veuve et de l’orphelin quand ceux-ci lui demandent de leur crisser patience? Il les traite comme les Anglais traitaient les pauvres Africains au temps du colonialisme. Les infantiliser.
Pas de leur fautes.
Faut les sauver contre eux-même.
Et pourquoi sont-ils aussi pauvre? Faudrait lui rappeler une règle très simple. Quand on travaille, on gagne des sous. Quand on travaille pas, on gagne pas de sous. Pourquoi devraient-ils avoir de l’argent quand la mine ferme? Une fois que les primes de départs sont données que devrait-il y avoir de plus? C’est quoi le raisonnement, exactement?
Mais bon, M’sieurs Desjardins peut très bien se promener d’une tribune à l’autre, dire son lot de fausseté, rendre la vérité aussi souple qu’une quenouille abitibienne, il fait parti de ces gens de qui on ne peut dire de mal. Il a cet hâlo mystique qui le rend intouchable. Dans le royaume des ressources naturelles, Me Desjardins est Roi. Il peut aller à n’importe quelle émission, on ne vérifie pas ses dires, on le met « On Air » tout confiant…
Ce projet est loin d’être parfais. Mais calvaire, il a le mérite de redonner de la fierté à un coin de pays qui était en train de mourir.
Quand le Tigre Géant d’une ville ferme, on est pas loin de la clé dans la porte.
Fautes d’orthographes impardonnables, je sais. Désolé. Écrite d’une traite, pas assez relu. Pas d’excuses.
Tiens ça me fait penser à Aznavour qui vient de sortir son album Jazz…. Tout le monde n’en dit que du bien à date… en fait, ils disent du bien de l’artiste. Parce qu’à 85 ans, wow, il faut être respectueux et bien mielleux… quel parcours, oulà, quelle carrière!!!
N’en demeure pas moins que depuis le dernier album, on retouche la voix d’Aznavour avec Auto-tune et que l’effet est assez mauvais. Personne n’en parle… chuttt!!!
@Émanuel: Aznavour sur l’auto-tune? Jay-Z tripperait ben raide.
@Lemay: Desjardins est chanceux d’être un intouchable. Je m’arrête là.
Monsieur Lemay, d’abord vous dire que vous écrivez fort bien, et d’une traite, ce qui éloigne les calculs et les postures. Les fautes d’ortographe, c’est pas grave, c’est comme quand le Rocket scorait ses plus beaux buts avec des bâtons fêlés.
Richard Desjardins est un menteur,ET ÇA SE VOIT MÊME DANS SES PLUS BELLES CHANSONS. Vous m’avez devancé,car je me proposais bien d’aller lui crisser une volée de mots verts, après celle administrée aux théâtreux de Montréal.
Son Erreur Boréale est un montage d’approximations et d’images habilement montées qui en dit long sur la style du chansonnier. Et pourquoi pensez-vous qu’il est allé s’acoquiner avec Lagaçé, l’idole de beaucoup de journalistes de la génération X ?. Parce qu’il savait fort bien qu’avec lui, ça allait passer comme du beurre dans la poèle. À quand une critique en règle du petit bonhomme Lagaçé, par des journalistes,dans VOIR??
Desjardins est en maudit après l’industrie depuis que les papatières sont allé couper sur la terre de son père. Fort bien, mais aurait-il agi ainsi si c’avait été celle de son voisin? J’ai des doutes.
Toute cette surenchère venue des Hauts Plateaux de Montréal contre le développement industriel, voilà ce qui est en train de tourner toutes les régions du Québec contre Montréal, bien plus que les scandales et les immigrants.
Cet été, en passant en bateau, en Gaspésie, pour aller aux Îles, j’ai pu voir le désastre causé par le développement anarchique des éoliennes, encore une sinistre patente imposée par les écolos de la métropole. Quand c’est rendu que c’est plus seulement les jeunes qui quittent les régions, mais aussi les vieux , la mort dans l’âme, qui ne peuvent plus regarder les montagnes de leur enfance, poignardées qu’elles sont, nos Chic-Chocs, par ces ostis de poignards éoliens, qui tuent des rapaces, et dérèglent l’ouie des chauve-souris, quand c’est rendu extrème, comme démission, me semble qu’on devrait y aller voir avant d’écouter nos chanteurs de mauvais charme. Dans l’cul, Desjardins, les trous, c’est dans les rues de Montréal, que ça se creuse,et c’est pas demain la veille que Desjardins écrira une chanson la dessus.
Vous avez raison, monsieur Lemay, sur toute vos lignes. Je vous salue.
Ce n’est jamais agréable de recevoir une critique négative, qu’on soit artiste ou non. Qu’est-ce qu’il y a de si pire au fait qu’Yves Lambert ait répliqué – peu élégamment j’en conviens – à David Desjardins? Pourquoi les artistes devraient-ils encaisser une critique négative sans dire un mot? Après avoir investi temps, coeur et argent dans un projet, ça doit être vraiment plate de se le faire rabaisser dans un journal. J’ai déjà lu des critiques qui me faisaient mal pour le créateur concerné.
Je me demande pourquoi cette histoire vous a fait écrire un billet et une chronique. Vous semblez piqué au vif par « l’examen de conscience » prôné par Lambert. Il a critiqué le travail des journalistes, selon sa perception, comme David Desjardins l’a fait pour son album.
Vous écrivez: «Leurs œuvres suscitent ce dialogue entre l’artiste, le critique et le public. Ce qu’ils proposent ne provoque pas seulement des bravos oiseux, mais peut-être un débat». Justement. Les propos d’Yves Lambert suscitent un débat, mais envers le travail des journalistes. Car qu’est-ce qui justifie qu’on devienne un jour critique dans un média?… Les qualifications sont, on ne peut plus, floues.
@Emmanuel Champagne: J’ai entendu une mauvaise critique du CD d’Aznavour à C’est bien meilleur le matin.
@ Èlise Giguère: Quand un artiste se fait critiquer par un journaliste, envoyer manger de la marde à ce même journaliste n’est peut être pas la meilleure façon d »établir un dialogue.
Bien à vous
Je pense qu’il n’y a aucun artiste intouchable au Québec, tant et aussi longtemps que nous achèterons des billets de spectacles et que l’épaisseur de leurs steaks dépendra de notre volonté à goûter ce qu’il ya de meilleur en eux…
Si un artiste fait de la M….. avec un grand M, il ne faut surtout pas crier au génie, plutôt penser cryogénie! Le pire service qu’on pourrait lui rendre est d’encenser cette même M…, ce qui perpétuerait un diarrhée artistique des plus douloureuses! (j’ai de bons exemples en tête!)
À l’inverse, je dirais que de s’acharner sur ceux qui travaillent fort et obtiennent du succès, n’est pas trop « fair play » et que dix commentaires ne vont pas y changer grand-chose…
Hola m’sieurs Bourbonnais! Vous avez extrapolé ma pensée!
D’abord, merci pour vos bons mots sur mon écriture, c’est très apprécié!
Mais vous faites erreur en m’associant aux anti écolos et j’ai beau chercher, je ne vois pas ce qui a pu vous donner cette impression!
Mon bac de recyclage est bien mis sur le trottoir chaque semaine et tant qu’une véritable étude scientifique n’aura pas démontré que les éoliennes sont dommageable à la faune, je serai pour leurs implantation (mais il doit y avoir moyen de le faire en dehors de zones habitées… j’avais entendu dire qu’il y avait un vent constant le long des lignes hydro-électrique qui viennent de la Baie James et que ce serait un bon endroit où planter les bébelles).
Et devinez quoi, j’habite drette sur le Plateau. Vos préjugés contre les gens du Plateau sont aussi insensés que toute autre forme de préjugés. J’aimerais bien que le Plateau ai autant de pouvoir que vous semblez le prétendre. Je pourrais sûrement en profiter. Mes plans de carrière incluent la domination mondiale, alors…
Mon cri n’était pas anti écolo. Il était anti démago. On a beau défendre une cause noble, ça permet pas de dire des conneries ou de déformer la réalité. C’est toute la crédibilité du messager qui en souffre, et au final, sa cause.
De la même façon que Falardeau était, de mon point de vue, le pire ennemie de la souveraineté de par toutes les conneries qu’il vomissait dès qu’il en avait l’occasion, M. Desjardins nuit à la crédibilité des régions en véhiculant de fausses informations.
C’est tout!
Pingback depuis P45 Magazine » Blog Archive » P45 hebdo
Voyez comme c’est bien, monsieur Lemay, nous nous entendons sur l’essentiel et nous divergeons sur le détail sans nous envoyer manger d’la marde. L’été, quand je vais me promener en vélo, rien ne me plaît plus que d’éviter le traffic( et l’abominable piste cyclable Rachel, la plus dangereuse de Montréal) ,en allant pédaler dans les ruelles du Plateau. C’est propre, bien entretenu, et je vois le génie des habitants de cet arrondissement dans l’imagination qu’ils mettent dans l’aménagement de leur arrière-cour. Pas d’autos, dans les allées, de la verdure en masse, et des petites musiques parfois, qui calment mon coup de pédale. Et le patrimoine bâti, dans les rues transversales, est un des plus varié en Amérique du Nord.
C’est lorsqu’on débouche sur Mont-Royal, ou sur St-Denis, que ça se gâte. Boutiques et restaurants à gogo, gentrification à outrance, faune d’airs bête tendance avec chiens-chiens et enfants-rois hystériques, tout ça qui finit par aller dégueuler dans des bars où le naturel s’enfuit au galop. Rien qui vous ressemble, vous de Val D’Or. Je ne vous demanderai pas ce que vous faites sur le Plateau, car ce n’est pas celui que vous habitez et que vous pensez à tort que je n’aime pas. Et votre sortie contre le démago Desjardins me réjouit car il m’annonce que vous n’avez pas coupé vos racines. C’est ça qui compte. L’hiver, ça serait bien si les ruelles du Plateau servaient de pistes de ski de fond…Je dis ça comme ça, en passant par chez-vous…
Evelyne de la Chenelière, dans sa pièce L’Imposture à l’affiche du TNM, pose cette question de l’artiste intouchable au Québec, en la mettant en parallèle avec le complexe d’infériorité culturelle des Québécois, qui les poussent à encenser le premier venu pour se rassurer sur l’existence et la valeur de notre culture. On en discute sur un autre blogue de voir.ca – venez faire un tour. http://www.voir.ca/blogs/tnm_l_imposture/archive/2009/11/23/l-imposture-de-la-culture-qu-233-b-233-coise.aspx?CommentPosted=true#commentmessage
En tant que beau-frère et admirateur du dit chroniqueur, mais surtout en tant que faiseur d’image professionnel, j’ai été plutôt irrité par un passage-coup-de-gueule-gratuit sur les «faiseurs d’images de tout acabit» :
« Aussi entend-il rajeunir l’image de Québec, et ce, grâce à l’embauche récente d’un expert international en image de marque. Un dénommé Clotaire Rapaille. […] Toujours est-il que, puisque je méprise souverainement les faiseurs d’image de tout acabit, en particulier ceux payés par des deniers publics, je m’engage à perpétuer l’appellation « Vieille capitale ». »
Irrité, pas tant parce que j’en suis un, mais plutôt parce que, dans les faits, ledit chroniqueur a le jugement sélectif, ayant lui-même recours à ces faiseurs d’images lorsqu’il est question de vendre ou de rendre plus attirants ses propres romans, par exemple. Voilà ce qui me turlupine. Que ce soit par le graphisme, le visuel d’une page couverture de livre, une carte postale promotionnelle ou une annonce publicitaire montrant la face d’un auteur accompagnée de mots flatteurs, les fabrications d’images aident à faire vendre l’oeuvre auquelle elle est rattachée.
Suis-je obligé de comprendre que ledit chroniqueur méprise aussi ceux qui l’aident à bâtir son image d’auteur ou celle de ses romans dans le but de les rendre plus «intéressants» à de susceptibles acheteurs ? Si ledit chroniqueur n’inclut pas dans sa méprise ces derniers faiseurs d’images, peut-on affirmer que ce Steve bien aimé avec qui je souperai ce soir familialement a la méprise sélective; gentil avec les faiseurs d’images qui l’aide, lui, et méprisant envers les autres ?
Il faut aussi rappeler que ledit chroniqueur, avant de devenir ce qu’il est aujourd’hui, fût jadis un concepteur web, bref, un faiseur d’images électronique. Mais peut-être ne considère-t-il pas la création de pages web comme une des facettes de la création d’image.
Fabriquer une image, ce n’est pas seulement faire vendre à tout prix. C’est aussi choisir et mettre de l’avant, par différents moyens, les forces et les attraits d’un sujet donné. Ce procédé est normal et s’applique à toute chose. Montréal, par exemple, tente avec l’aide de fabricants d’images de contrer l’exode des familles montréalaises vers la banlieue. Je n’entends pas beaucoup de critiques là-dessus, que cette campagne publicitaire soit faite avec l’argent de la ville ou non. Lorsque nous choisissons un vêtement plutôt qu’un autre, par exemple, on contribue à bâtir une image de nous-mêmes. Même chose pour la fabrication d’image d’une oeuvre culturelle, d’un produit commercial ou d’une vieille capitale.
Il est malheureux que Régis-Québec ait décidé de confier la fabrication d’une image locale à quelqu’un d’extérieur alors que le pays québécois foisonne de créateurs de marque talentueux, mais il serait quand même plus judicieux d’attendre le résultat avant de cracher dessus maintenant. Alors, nous pourrons critiquer ou applaudir le résultat plutôt que la démarche, qui elle est tout à fait normale. Il est difficile de reprocher à quelqu’un la volonté d’être plus attirant.
Pour tenter de départager la bonne fabrication d’image de la mauvaise, on pourrait juger le résultat de la façon suivante : est-ce que je perçois le résultat comme authentique ou non ? Sans être un grand dogme ou une règle reconnue, le baromètre de l’authenticité peut permettre de juger un résultat de façon honnête.
Avec tout l’amour fraternel que j’ai pour lui, la prochaine fois que ledit chroniqueur sera tenté par une phrase à l’emporte-pièce, j’espère qu’il tournera sont clavier d’ordinateur sept fois avant d’écrire, sinon, j’aurai tendance à penser, que parfois, ledit chroniqueur utilise la technique de la formule-choc pour fabriquer sa propre image de chroniqueur. Chroniqueur d’ailleurs qui par ses écrits et sa réputation, participe avec ses collègues chroniqueurs activement à la fabrication de l’image du média auquel il est rattaché.
Vive la Vieille capitale ! (pour ma part j’aime bien le terme Capitale nationale)
Simon Beaudry,
directeur artistique de l’agence Bos et collaborateur au magazine Urbania
Parmi cette pléthore d’intouchables, ils ne sont pas nécessairement très nombreux à être «touchants» ou vraiment talentueux ou bouleversants.
Il va falloir que de nombreux journalistes prennent conscience de cette «quasi-intouchabilité» de certains «artistes» et qu’ils se décident à assumer le risque de mécontenter un certain nombre de petits créateurs incapables de comprendre que certaines critiques peuvent les stimuler et leur rendre un service éventuellement très utile. Le journalisme est un «métier» essentiel et il est essentiel que les journalistes ne soient pas des couillons ou des pleutres.
Avant de terminer je me permets de présenter un petit exemple partiellement personnel. Il y a quelques mois, la SRC présentait la télésérie VIRGINIE pour la mille cinq centième fois. Pendant toute une journée Fabienne Larouche a participé à une pléthore d’émissions presque toujours flatteuses et elle ne cessait de ronronner d’autosatisfaction. Comme je suis sociologue des médias, on m’a appelé pour me demander si je ne pourrais pas commenter, sévèrement si possible, cette télésérie bourrée d’invraisemblances. Cela dans le cadre de l’excellente émission «Maisonneuve en direct». Le problème, c’est que je parlais au téléphone et que la Larouche était là, en studio. Dès que je me suis mis à analyser avec une certaine sévérité cette débiloïde télésérie, la Larouche m’a interrompu et ne m’a pas laissé parler. Je disais (ou j’essayais de dire) que j’avais enseigné au collégial pendant 37 années et la Larouche me disait qu’elle se fiait à sa mère qui, elle, avait enseigné au secondaire pendant 36 ans. Maisonneuve était pantois et impuissant. Il est clair que Fabienne Larouche a dû travailler très fort pour écrire tant d’émissions. Mais pour moi il est clair que la plupart des petites histoires présentées dans VIRGINIE sont d’une invraisemblance abyssale. Mais il est interdit de le dire!
Il faut cesser de se taire face aux arts et à la culture, face aux artistes immatures qui n’attendent que des éloges et de la veule flatterie!
JSB
Je tombe sur ce commentaire et je ne peux m’empêcher d’y mettre mon gain de sel. J’arrive d’aller voir la pièce de Robert Gravel au Rideau Vert et que voila donc un autre intouchable. J’avancerais même que le théaâtre au Québec est un intouchable.
Il s’agit à mon avis d’un texte non fini, non travaillé , belle idée assurément, mais rien n’est approfondi. Vous me direz à quoi s’attendre du roi de l’impro, que j,ai moi-même admiré et suivi de près dans sa carrière.
Or, pas une critique n’a été négative, peut-être aurait-il fallu lire entre les lignes, mais personne n’a osé parler d’amateurisme. La mise en scène et le jeu des acteurs bien dirigé, arrivent à sauver la mise, mais sans plus. J’en ressors très déçue. C’est bien beau rendre hommage à un défunt, mais ce texte réussit plutôt l’inverse. On sort de la pièce et on se dit Robert Gravel , qui ça ? Parce qu’on ne s’y fera pas prendre une autre fois. Dommage, très dommage. Au moins saura-t-on qu’en matière de théatre au Québec, les critiques ont les mains et les poings liés. Le théatre serait-il un intouchable au Québec?
CL