La mort des ravesArrival
La mort des raves
Le mouvement rave s’est inspiré d’un principe de contre-culture. Mais aujourd’hui, il ne met plus de l’avant comme avant, l’absence d’idéologie et l’éclatement des idées préconçues. Ceci incommode beaucoup DJ Neerav (trance) qui a vu naître le mouvement montréalais. "Quelle scène rave? Y a-t-il une scène rave à Montréal aujourd’hui?", lance-t-il sur un ton ironique. Et puisque la récupération du mouvement rave s’opère à l’échelle mondiale, pourrait-on carrément affirmer qu’il n’existe plus de scène rave sur la planète? "Qu’est-ce qu’un rave?", ajoute-t-il en rigolant.
Cette rhétorique résume bien le malaise que vivent plusieurs acteurs de cette scène aujourd’hui. S’agirait-il simplement d’un écart entre générations?
Mad Max (house minimal) ne veut pas revivre les expériences du passé, mais il préfère les musiques difficiles d’accès, "qui existaient au début de la scène rave". Il se rappelle un de ses premiers raves, July 22nd, au Palais des congrès et d’une salle expérimentale très populaire. "Même si ce n’est pas mon genre de musique, j’ai l’impression que les jeunes plus trancy sont ceux qui ont encore le plus de fun aujourd’hui", souligne-t-il.
De moins en moins de monde fréquente les petits raves underground (majoritairement trance) renchérit Sébastien Nepveu, mieux connu sous son nom de D.J., ANTI-g et par sa participation aux Productions Mini-Tank (aujourd’hui dirigées par son frère). "Je trouve que les petits raves ressemblent de plus en plus aux gros: c’est un effet de mode. On ne peut plus y essayer des choses trop bizarres: on risque fort de provoquer une réaction sévère. L’avenir se situe plutôt dans les événements quasi-privés qui permettent ce genre d’expérimentation." Et, fataliste, il ajoute: "je ne crois plus vraiment à la scène rave." Jusqu’à dernièrement associé uniquement aux clubs et au circuit partys, le culte de l’image envahit maintenant l’underground.
Fondateur du site Internet très prisé technodium.net, Étienne Marcotte des Productions DB5 pointe du doigt la prolifération des partys, qui banalise forcément chaque événement. "Depuis 2001, on dirait que ça dégringole à Montréal. Les promoteurs de la scène underground ont perdu beaucoup d’argent à la fin de 2000 et ils n’ont pas produit de party majeur depuis. Cette année, il n’y a que des petits partys, et en trop grand nombre. C’est rendu une business. T’as les petits partys spécialisés dans un genre particulier (le happy-hardcore, le new-NRG, etc) et t’as les méga-party des 514. Il n’y a plus rien entre les deux. Ça fait longtemps qu’il n’y a pas eu un bon party de semi-underground. Le dernier en lice, Utopia s’est tenu le premier juillet dernier. Il devait avoir lieu en plein air, mais il s’est finalement tenu dans un lieu surutilisé, le karting." Étienne compare la situation montréalaise à celle de Québec, dont la scène est bourgeonnante et extrêmement dynamique. "Moins fréquents, les partys, se transforment systématiquement en happening", souligne-t-il.
Même son de cloche du côté de G. O’Brien, probablement le meilleur D.J. trance montréalais. "Disons que la scène rave a pris beaucoup d’expansion." Tout comme Neerav, il remet en question la définition du "rave": "On peut plus appeler ça des raves parce que les gens y vont juste pour sortir. Il n’y a plus d’ambiance mystique comme lorsqu’il n’y avait qu’un seul rave par mois." Il donne en exemple la région de Sherbrooke, où les raves occasionnels deviennent tous des événements. "À Montréal, le monde sait à quoi s’attendre. Comme dans un bar, il va y avoir des habitués et un type spécifique de clientèle. Aujourd’hui, la scène s’est séparée en gangs: le monde est tombé dans sa petite bulle. Il y a la gang hardcore, la gang trance/new-NRG et la gang trance à Psychotrop. Que tu sois dans n’importe quelle gang tu vas retrouver tout le temps les mêmes personnes. Avant on appréciait la différence. On allait dans un rave parce que les préjugés y tombaient, la mode y tombait, tout tombait, quoi! Mais par la suite, on en a fait une mode. J’aimerais y voir arriver des gens complètement freak sans que ça soit mal perçu."
Plusieurs croient que, comme ce fut le cas en Europe, la répression policière forcera peut-être le milieu à se réinventer: créer des événements aux frontières normatives illimitées, dans des environnements à taille très réduite. La créativité au pouvoir!
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Et puis? Correcte. Organisation sans faille, bon D.J., ambiance honnête et endroit plaisant. Ni plus, ni moins.