La somme plus importante que les parties
La somme plus importante que les parties
C’était au petit club miteux Saturn 6, à l’angle des rues Sainte-Catherine et Sanguinet, à l’hiver 1992. Robert De La… Gauthier poussait les vinyles et Jimmy Lakatos, à peine sorti de l’Université de Montréal en arts visuels, décida d’y apporter son projecteur. Le premier visuel dans une soirée avait enfin atteint les côtes montréalaises.
Quelques mois plus tard, Solstice – que plusieurs considèrent comme le premier rave montréalais – a été le théâtre de la première installation vidéo dans un party. "J’ai rencontré Louis Veillette, qui faisait déjà des projets d’installations dans ses cours, et on a décidé de se préparer pour ce gros party, raconte Lakatos. Les Anglais avaient déjà une approche de l’image très classique avec des films en boucle et des diapositives, mais il n’y avait jamais eu de vidéo. Ce party a changé ma vie." Ainsi s’est créé le mythique trio Synergie (avec Yves Labelle). Et à l’époque, l’innovation se nommait simplement (sic) lasers, vidéo et artistes scéniques…
C’est dans ce contexte qu’est apparue en 1993 la soirée Dimanche techno des Foufounes électriques, dont on célèbre le dixième anniversaire ce dimanche. Pendant deux ans, la soirée a réuni les trois membres de Synergie et du Vitamin DJ Team (Martin Dumais, Sylvain Ferland et Sylvain Houde). "C’était une époque assez fébrile, continue Lakatos. On ne projetait pas des images aléatoires, on prenait position sur beaucoup d’enjeux. Au même moment, le film Manufacturing Consent de Noam Chomsky est sorti et on en a piqué plusieurs extraits…" Ce mélange chaotique de politique et d’art permit à Synergie de connaître ensuite un succès médiatique impressionnant, surtout grâce à Laurent Saulnier, qui décidait d’en faire la page couverture de Voir en avril 1994.
Les installations dans les partys ont beaucoup évolué et les membres de Synergie ont fait éclater la formule vers d’autres formes d’art. Lakatos fait aujourd’hui de la direction technique, pour Mutek, entre autres. "La grosse raison pour laquelle j’ai arrêté de faire du visuel pour des événements, c’est le fait que les gens étaient trop gelés pour porter attention aux visuels! On avait même parfois l’impression de déranger le trip des gens…"
Étonnamment, il n’y a presque jamais eu de V.J. à Mutek. Cette décision reflète pourtant la position de Lakatos: "Avec le développement des outils, il se crée une panoplie de tapisseries visuelles. C’est tellement facile de projeter des images qu’il faut qu’il y ait une raison de le faire. La notion de VJing est intéressante en termes de recherche et développement, mais dans des événements, il reste encore certaines lacunes. Le résultat n’était pas beaucoup mieux à l’époque mais c’était au moins tout à fait nouveau." De la bétacam au laptop, le VJing évolue et c’est plutôt dans la vidéo-scénographie que Lakatos voit l’avenir, c’est-à-dire dans l’intégration des supports de projection dans l’environnement. "C’est une question de temps pour que la relation image-son devienne magique…"
Aussi à surveiller:
SAMEDI 10 MAI
– La méga-star du house Roger Sanchez passe par le Stéréo.
MARDI 13 MAI
– Avec l’arrivée du printemps, les mardis Rockdeep reviennent à une formule hebdomadaire et vous invitent cette semaine à une petite grillade sur la terrasse du Saphir aux sons du D.J. japonais Who-Z et de ses grands succès hip-hop d’une autre époque. Information: rockeur_tuesdays.tripod.com.
Top 3 – Christelle
1. LCD Soundsystem – Losing my Edge [DFA]
"Cette pièce pourrait être un cours intitulé: Le vinyle et ses sectes; Histoire et société. Sur fond de breakbeat électro gras et sale, voici un extrait: "…I heard you have a compilation of every good song, ever made by anybody…" Danser, s’éduquer et sourire (même jaune), ça devrait être obligatoire!"
2. Ursula Rucker – Digichant [!K7]
"Rucker interroge la conscience humaine relativement à la technologie. Une voix simplement robotisée avec un refrain hypnotique: "Realize it or become IT". Cette grande poétesse contemporaine nous offre une proposition d’équilibre dont on ne ressort pas indemne."
3. Zero 7 – Truth and Rights [Kinetic]
"Un morceau que l’on veut sur CD. Ne plus revenir pour la huitième fois vers l’aiguille. Juste appuyer sur repeat. Et, à chaque écoute, le même sourire rêveur et serein. Par cette production aux teintes pastel rappelant les années 70 (mais qui sonne résolument troisième millénaire!), on se rappelle que le monde pourrait être encore jeune…
DJ Christelle est au centre de la dernière soirée présentée ce samedi dans les locaux actuels de la SAT (avant la réouverture fin mai, boulevard Saint-Laurent). Les D.J. reflètent une belle variété avec Soul Sista, Champion (avec cinq guitaristes!) et Pfreud, en plus des visuels par la gang du Mix_Sessions (10 $).