À quand remonte la dernière fois que vous êtes allé voir un film québécois anglophone? Outre Jacob Tierney (The Trotsky), pouvez-vous nommer un réalisateur d’ici tournant dans la langue de Mordecai Richler? Ne trichez pas en nommant Denys Arcand (Love and Human Remains) ou Léa Pool (Lost and Delirious). Bashar Shbib (Silent Men), Philipe Spurrell (The Descendent), Darrel Wasyk (The Girl in the White Coat), ça vous dit quelque chose?
Ne soyez pas gêné puisque, comme le rappelait Charles-Henri Raymond dans un article paru dans Urbania, le cinéma québécois anglophone, qui représente 15% de la production annuelle des longs métrages de fiction, souffre d’une visibilité restreinte.
Qui donc blâmer? Les institutions, les médias ou les spectateurs? Rare journaliste anglophone, sinon le seul à faire le pont entre nos deux solitudes culturelles, Brendan Kelly de la Gazette répond spontanément ceci: «Les producteurs anglophones se plaignent du fait qu’il n’y a pas de mandat pour produire des films en anglais au Québec, l’argent allant à Toronto, à Vancouver et à Halifax. Ce n’est pas la faute à Téléfilm ni à la SODEC, mais le focus est vraiment sur les films francophones, et c’est normal.»
Kelly poursuit: «Je ne suis pas convaincu que les institutions en font assez pour la production québécoise anglophone, comme si celle-ci n’était pas sur le radar. Honnêtement, je ne crois pas non plus que les Canadiens s’intéressent à notre cinéma anglophone – à part peut-être celui de Jacob Tierney.»
Chez Téléfilm Canada, Douglas Chow, gestionnaire du département des communications externes, explique: «Globalement, les budgets de Téléfilm Canada sont toujours alloués selon le ratio 2/3 pour les projets de langue anglaise et 1/3 pour les projets de langue française, selon notre entente avec Patrimoine canadien. En 2012-2013 pour le Québec, il y a eu 170 demandes de financement en production au total, dont 137 en langue française et 33 en langue anglaise.»
Qu’en est-il du côté de la SODEC? Voici ce que dévoile Isabelle Melançon, directrice des communications et des relations institutionnelles: «Il n’existe pas de quotas à la SODEC pour les productions anglophones, on parle ici de longs métrages destinés aux salles de cinéma. Il est prévu que pour l’aide sélective, c’est-à-dire pour les projets qui ont été retenus après évaluation, 20% de l’enveloppe peut être versée à des projets québécois anglophones.»
Ce pourcentage pourrait-il augmenter? «Lorsqu’on regarde les chiffres et les montants alloués, il est très rare que ce 20% soit atteint, essentiellement parce qu’il y a peu de projets anglophones déposés à la SODEC; de sorte que parler d’une augmentation de ce 20% est totalement abstrait pour le moment», croit Isabelle Melançon.
Il y a quelques décennies, Robert Lantos et Victor Louis, prospères producteurs montréalais, ont transporté leurs pénates dans la Ville Reine, tandis qu’Yves Simoneau tentait sa chance au pays de l’Oncle Sam. Serait-ce la solution pour nos cinéastes anglophones de se tailler une place dans le monde merveilleux du cinéma?
«C’est certain que c’est naturel de vouloir aller à Toronto, pense Brendan Kelly. C’est le problème général dans le milieu anglophone: que tu sois acteur, scénariste, réalisateur ou producteur, c’est beaucoup plus difficile de faire sa vie et sa carrière ici qu’à Toronto ou Vancouver ou même aux États-Unis. Les artistes francophones peuvent le faire aussi, même s’il y a la barrière linguistique.»
C’est notamment le cas des Jean-Marc Vallée (Dallas Buyers Club), Philippe Falardeau (The Good Lie), Denis Villeneuve (An Enemy): «Ce n’est pas qu’ils choisissent de tourner en anglais, nuance le journaliste, mais si on leur offre un beau projet, c’est naturel qu’ils l’acceptent. Tous les cinéastes majeurs le font parce qu’ils ont eu beaucoup de succès avec leurs films en français.»
Quoi faire pour garder nos Anglos chez nous alors? «Nous préférons miser sur une discussion positive et proactive, assure Douglas Chow de Téléfilm, le succès du cinéma canadien repose sur l’engagement de l’industrie quant à une meilleure promotion. Notamment, le Fonds des médias du Canada (FMC), Téléfilm Canada et le CRTC ont annoncé la mise sur pied d’un groupe de travail à la suite de commentaires reçus des chefs de file de l’industrie pendant le Symposium sur la promotion du cinéma et de la télévision canadiens au pays et à l’international.»
«Des représentants de la production anglophone ont rencontré la SODEC afin de faire part de leurs inquiétudes sur l’avenir de la production anglophone au Québec, tout particulièrement en ce qui concerne la production télévisuelle. La SODEC a offert sa collaboration», conclut Isabelle Melançon.
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Le journal VOIR trouve que le français se porte tellement bien qu’il a décidé d’appuyer les artistes anglophones.
Aux employés du journal VOIR, nous disons: « GREAT JOB! »
gilles thompson
C’est une blague ou quoi cet article? Vous vous inquiétez vraiment pour la culture ANGLOPHONE au Québec? Vous vivez dans quel monde, vous?
Voyons donc! On entend 1 chanson par heure en français dans les radios francophones et peut-être 1 par semaine (si on est chanceux) dans les lieux publics le moindrement achalandé. Et si par malheur un endroit est considéré comme touristique, là c’est 1 chanson par année en français qu’on entend.
Et vous, vous vous inquiétez pour la culture ANGLOPHONE qui réduit presqu’à néant n’importe quoi d’autre. Bon sang! A quel point faudrait-il être anglicisé pour que vous soyez content?
Là je parlais de chanson mais pour notre cinéma, c’est la même chose. On a strictement aucun appui pour notre cinéma alors que le cinéma anglophone lui peut faire des fortunes et ce, même si c’est un film bien moyen. Nos films dépassent difficilement le cap du million et ce, même de très bons films.
Là avant de s’inquiéter du sort de la minorité la mieux traitée au monde, il faudrait peut-être encourager davantage notre culture bon sang. La culture anglaise prend déjà beaucoup trop de place, s’il faut en plus lui en donner davantage, un moment donné, aussi bien dire adieu à tout ce qui n’est pas anglophone
Et quand est-ce que la communauté anglophone s’intéresse un tant soit peu à la culture francophone? JAMAIS. On ne se fait pas assez envahir comme c’est là avec la culture anglo-saxxonne, il faudrait en plus s’intéresser au cinéma anglo-Québécois.
Eh là. On voit quasiment juste des films américains et on entend 95% de chansons anglophones partout au Québec et mme ici présente s’inquiète pour la culture ANGLO-QUÉBÉCOISE.
Est-ce que ce serait possible de laisser un petit micromètre d’espace à la culture de chez nous des fois au lieu de s’inquiéter du sort de la minorité la mieux traitée au monde? S’inquiéter pour la culture anglaise, eh là c’est vraiment n’importe quoi. On entend juste ça tout le temps. Si une culture n’a pas de problème de visibilité, ce sont bien eux.
Chère madame, je crois aussi que vous êtes déconnectées. Près du tiers des films diffusés à Super Écran sont des films canadiens de langue anglaise traduits pour nous. Une partie du financement favorise au Fmc les films de langue anglaise dit en milieu » minoritaire ». La Sodec finance largement les documentaires de langue consulter les résultats des deux dernières années. La téle spécialisée ne se gène pas également. Voyez à Série plus Sophie Parker une version anglaise traduite en français de Sophie Paquin! Les séries anglo du Canada occupent près de la moitié des chaines Astral. Take it cool!