Dans le précédent épisode de Du haut de la King, le sémillant auteur de ces lignes se désolait que la Wellington Sud, jadis un oasis de gros fun noir, se soit métamorphosée en paradis du local vacant et du bâtiment délabré. Cri du cœur qui n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd. «Dominic, téléphone-moi quand tu auras du temps, j’ai une nouvelle pour toi», m’écrivait jeudi dernier Jacques-Philippe Lemieux-Leblanc, grand manitou de La Petite Boîte Noire, ce loft transformé en intime salle de spectacles qui avait pignon sur la rue Albert (un trognon de macadam perpendiculaire à Well Nord). Je l’ai rappelé dans la seconde. Sa nouvelle: La Petite Boîte Noire renaîtra rue Wellington Sud (pas de joke!). Mon Narcisse intérieur allait cependant être vite déçu d’apprendre que sa petite chronique n’y était pour rien: Jacques-Philippe et son partenaire Julien Fortin ruminaient en catimini ce retour depuis plusieurs mois déjà.
Jacques semblait soulagé de m’annoncer cette nouvelle sonnant la fin de l’incessant harcèlement que je lui fais subir depuis la fermeture obligée de La PBN en décembre 2011 (quelques concerts avaient ensuite été présentés à l’Antiquarius). Chaque fois que je le croisais dans un bar, dans la rue ou à l’épicerie, je me faisais un point d’honneur de l’asticoter en lui redemandant si sa salle connaîtrait une deuxième vie, question qu’il s’empressait d’essuyer du revers de la main comme on renie son ex-blonde en jurant ne plus jamais – ô non jamais, je te le dis mon chum – penser à elle. Le désir d’une Petite Boîte Noire n’avait pas encore déserté la caboche et le cœur de Jacques, c’était l’évidence même.
Située dans un ancien atelier de tatouage (au 53, rue Wellington Sud), la nouvelle Petite Boîte Noire, dans laquelle j’ai mis les pieds lundi en fin d’après-midi, affrontera des défis de taille. Il faudra d’abord vaincre la mauvaise réputation de la rue où elle a trouvé refuge, puis pallier l’absence de murs en briques et de plafond haut, ingrédients consubstantiels au succès de la première incarnation de la salle chaleureusement hip que les artistes de passage louaient immanquablement au micro. À vue de nez, La PBN 2.0 réunit les conditions propices à la création de véritables rencontres entre artiste et public. Et puis laissez-moi vous dire que le zinc est vraiment pas mal beau, à part de ça.
Entre le Bar Le Magog, le Bar Le Saloon, le Woodstock Bar (trois fiefs de la musique assourdissante) et le Boquébière (presque chasse gardée du Théâtre Granada, qui y présente les stars de l’émergence), La Petite Boîte Noire comblera un vide dans l’offre de concerts au centre-ville. Les quelques noms déjà au programme – Caïman Fu (le groupe d’Isabelle Blais), The Lemming Ways (rock d’ascendance brit), Noem (prog-folk local), Will Driving West (folk-pop) et Young Rival (rock indé ontarien) – dressent un portrait fragmentaire, mais juste je crois, de la direction que prendront Jacques-Philippe et Julien.
En résumé: c’est La Petite Boîte Noire qu’il faudra blâmer dans cinq ou six ans quand Wellington Sud entrera dans sa première phase d’embourgeoisement. Du moins, c’est tout ce qu’on souhaite.
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La Petite Boîte Noire célèbre sa réouverture le 30 novembre dès 20h en invitant les mélomanes estriens à venir assister gratuitement aux spectacles de Bruno Green et de Daran.
Ceci est une grande nouvelle!!! la petite boîte noire est morte, vive la petite boîte noire!!!