Du haut de la King

Sherbrooke, ville mode?

Sherbrooke serait donc une «ville mode», c’est la phrase que tout le monde a à la bouche ces jours-ci, non? On la claironnait récemment jusque pendant le très crédible Téléjournal Estrie de Michel Bherer, ce n’est pas rien. Et le Sherbrooke mode essaime: la jolissime boutique Kitsch ouvrait à Québec une deuxième succursale il y quelques semaines. Ce week-end, le sous-sol de la Basilique-cathédrale Saint-Michel fourmillait d’une kyrielle de jeunes et moins jeunes fashionistas venus regarnir leur garde-robe pendant le premier Salon de la mode de Sherbrooke. Léa Garcia, qui officiait au kiosque de la boutique Piosa, commençait à peine à reprendre son souffle quand je suis passé samedi en fin d’après-midi; elle avait vissé des centaines de chaussures aux talons d’une centaine de nouvelles clientes. «Est-ce que tu viens à notre événement quatrième anniversaire mardi?», me demande-t-elle. «Il va y avoir des filles, des souliers et je vais porter des leggings en cuir pour la première fois de ma vie», m’annonce-t-elle. Je sentais le piège se refermer sur moi en même temps que je voyais se profiler l’occasion idéale d’enquêter sur ce Sherbrooke mode avec lequel on me rabattait les oreilles.

Chic: l’adorable Catherine Sheehy, propriétaire de Piosa, à la fois provocante et élégante en ce soir de fête dans son bustier noir et sa jupe fleurie, m’avait réservé une place au pied du catwalk (un rêve), juste à côté de celle de la très distinguée chroniqueuse mode de La Tribune, Laura Martin (un rêve, bis). Assise à ma table: Gaëlle Leroyer, figure de proue de la blogosphère mode et pom-pom girl de l’Estrie en général (Sherbylove!). Gaëlle arbore un crop top coupé maison, une jupe à imprimés fleuris (décidément) et des chaussures glam Steve Madden, question de se distinguer des centaines de filles perchées ce soir sur des escarpins, me dit-elle. Quelques centaines de filles qui hurleront à plein poumon, dans ce Théâtre Granada plus rempli que lors de bien des concerts auxquels j’ai récemment assisté, lorsque l’animateur de la soirée prononcera le nom d’un certain Michael Kors (c’est un designer de shoes, les boys). Avoir su, j’aurais apporté les bouchons que je me fourre dans les oreilles lorsque je vais me les faire défoncer pendant des shows métal.

Je vous l’annonce en primeur les amis (Voir Estrie dissipe les ténèbres de l’ignorance): les filles se baladeront avec de tabarouette de belles chaussures ce printemps et cet été. Des fermetures éclairs ornementales garnissent la plupart des nouveaux modèles de bottillons, souliers plateformes et autres godasses qui ont défilé sous mes yeux ébaubis (je n’avais jamais vu autant de souliers de fille d’aussi près de toute ma vie). Des godasses que l’on portera avec des vêtements métalliques (style Normand Brathwaite dans le vidéoclip Larmes de métal) ou striés de rayures (style Alakazou); ce sont les tendances de la saison (merci Gaëlle d’avoir éclairé ma lanterne). Les couleurs à surveiller: saumon, pistache et corail.

Sherbrooke est-elle une ville mode? En sortant du Granada, le chroniqueur culturel revenait à lui-même – on n’émerge pas indemne d’un si capiteux tourbillon de douces sensations – et il n’avait plus la tête à trancher une telle question d’intérêt public. Dehors, les filles faisaient déjà la file devant Piosa pour une séance de shopping de fin de soirée (rien de tel que de magasiner avec quelques verres dans le nez). Je suis allé manger une pointe de toute garnie chez Mivan. On est glamour ou on ne l’est pas.