Rap local : Les Sozi, David Lee, Berger La Rose et Da-P
Chaque semaine, cette chronique vise à mettre en lumière les plus récentes sorties rap québécoises et à faire un étalage non-exhaustif des prochains shows hip-hop à ne pas manquer.
Les Sozi, une histoire de contexte //
Inspirés par l’aventure Northsiderz, un collectif à huit têtes dont ils font partie avec Shoddy et Souldia, les jumeaux Sozi rappliquent avec Bêtes de foire.
«On dirait que les Northsiderz nous ont donné un coup de pied dans le cul», affirme au bout du fil le rappeur L Nino, originaire du quartier Limoilou à Québec. «En temps normal, on sort un album aux 3-4 ans, mais on se rend de plus en plus compte qu’en faisant ça, les fans ont tendance à nous oublier. Faut toujours les tenir en haleine.»
Trois ans après Roses & sombrero, un troisième album en duo, et à peine six mois après Fils de l’anarchie, premier album des Northsiderz, L Nino (Éric Pelletier) et L Parano (Frédéric Pelletier) s’amènent avec un quatrième album aux influences hardcore et west coast.
«C’est sûr qu’on a été influencés par le hardcore shit des Northsiderz et de nos amis proches, mais reste qu’on garde encore notre touche west coast. On est toujours très inspirés par la culture du lowrider», explique Nino. «On aime les grosses images, les gros beats, les grosses paroles. Si t’écoutes ça ben chill avec ta femme dans le ride, tu vas comprendre l’idée.»
Produit par Ray Ray, Bêtes de foire est somme toute moins uniforme que Parksville, deuxième album du duo paru en 2009 et produit par le tandem Claude Bégin/Mash. Au lieu d’uniquement cerner un style (le west coast en l’occurrence), le duo a eu envie de brouiller les frontières musicales. «Quand on fait une chanson, l’important, c’est le beat et le contexte», résume le rappeur de 35 ans. «On recherche une ambiance qui nous représente.»
À cet effet, le premier extrait Carte blanche, une dose de trap crue et incisive, vise dans le mille. Réalisé par Carl Méthot, le clip de la chanson montre l’envers du décor de la ville touristique de Sosua (en République Dominicaine), en mettant l’accent sur les armes, la drogue et, même, les combats de poules.
«On est débarqués avec la caméra dans les quartiers plus chauds. On a fait des wassup aux gens, et rapidement ils ont embarqué dans nos affaires. Nos tatous, c’était un peu comme des hood pass», se rappelle L Nino. «Pour le reste, on se promenait dans la rue avec Carl et on shootait tout ce qui passait. C’est comme ça qu’on a pogné le plan de la poule attachée.»
Dans un tout autre genre, la chanson La lettre (en primeur au bas de la page) raconte le périple torturé des Sozi dans le rap jeu québécois, ponctué de plusieurs déceptions, d’amertume et de passages en prison. Durant le refrain, L Nino nous confie qu’il écrit la chanson au 500 rue de la Faune, adresse du centre de détention de Québec, situé à Charlesbourg.
«Je ne l’ai pas vraiment écrite en prison, mais c’est tout comme», nuance le rappeur, remis en liberté depuis la fin 2014. «En prison, je suis complètement bloqué, amorphe. Et quand je reviens en liberté, je me sens encore comme ça, pendant un mois ou deux. C’est en plein à ce moment-là que je suis capable d’écrire des affaires que j’feel en profondeur. En dedans, j’ai essayé, et ça marche pas. Le temps est long, et tu penses juste à sortir de là…»
Figure emblématique de la scène rap underground de Québec depuis 2001, année où il a joint les rangs du défunt collectif Limoilou Starz, le duo est plus que jamais conscient de la portée de ses paroles. «C’est certain qu’on est conscients qu’on a de l’influence chez les jeunes. Moi, j’ai une fille de 13 ans et je le sais qu’elle écoute mes albums», dit L Nino. «Je ne me suis quand même pas trop attardé à ça, mais je sais que mon frère, lui, y pensait souvent. Dans tous les cas, on évite de se censurer et on dit les vraies choses, de la manière qu’on veut les dire.»
Bêtes de foire, en vente le 13 mai. Lancement au HMV de la Place Laurier le même jour.
Nouveautés d’envergure //
David Lee, l’acolyte/coloc de Rymz, délaisse momentanément le hip-hop boom bap minimaliste de son plus récent Dead End pour flirter avec un R&B touffu et planant. Produite par l’excellent Gary Wide, For Me profite d’un clip simple tourné au Newspeak.
Le producteur hip-hop lavallois High Klassified donne une couleur house funky à Pale Rose, la plus récente charge pesante de theMIND.
Originaire de Verdun, Berger La Rose poursuit ses expérimentations R&B/hip-hop avec panache sur Fairy, un premier EP dans le même ton que la dernière parution de son groupe Yen Collective.
Après nous avoir fait découvrir le dépanneur Lydia la semaine dernière, le rappeur montréalais CeasRock nous emmène au Billy Geez, fast food de son quartier Notre-Dame-de-Grâce.
Actuellement en Europe pour une mini-tournée, le producteur blainvillois Da-P (membre du collectif Alaiz avec High Klassified et cie) sort les basses TRÈS pesantes sur No Kissing, nouvelle pièce parue sur sa page Soundcloud.
Également d’Alaiz, le rappeur lavallois Green Hypnotic se joint à bb-boy pour LVL Touchdown, premier extrait de la compilation The Link Up, qui inclura «quelques-uns des meilleurs rappeurs et beatmakers montréalais».
La webstar Gab Joncas et le rappeur Jemcee, autoproclamés «les snap kings de l’est», ont frappé fort dans les derniers jours avec le clip Snap Queen, qui dépasse déjà les 30 000 visionnements. À surveiller : de pertinents caméos de Charlie Shulz et Vinny Bombay.
Top 3 shows //
Poirier, notre représentant électro/hip-hop/dancehall à l’international, sera en première partie de l’incomparable producteur reggae Lee Scratch Perry, à Montréal pour souligner le 40e anniversaire de Super Ape.
Club Soda (Montréal), 13 mai (19h)
Afin de terminer en beauté sa grosse vente, le magasin Kapara Vintage organise un gros show avec Alaclair Ensemble en tête d’affiche.
35 rue Saint-Jacques (Saint-Jean-sur-Richelieu), 14 mai (19h)
1 : The Posterz
Les shows du trio anglo-montréalais The Posterz sont reconnus pour être survoltés. Avec les Torontois Tre Mission et Kayo en première partie, disons que le potentiel de brassage attendu se décuple.
Belmont (Montréal), 13 mai (22h)