Il y a de quoi s’inquiéter devant le projet de loi C-30. Sous prétexte de protéger vos enfants contre les pédophiles, l’État et ses tentacules, notamment les corps policiers, pourraient, sans mandat, savoir qui vous êtes et où vous êtes, votre adresse et votre nom, alors que vous naviguez paisiblement sur le web.
Remarquez qu’un policier peut, à tout moment, entrer votre numéro de plaque d’immatriculation dans son ordinateur alors que vous circulez, en voiture, sur la voie publique. Sans aucun mandat, il saura à qui appartient le véhicule que vous conduisez et ses coordonnées.
Et c’est ça que le web est devenu, justement. Une voie publique. Une autoroute virtuelle qui, aux yeux de plusieurs, devrait même être considérée comme un service public, voire un service essentiel, au même titre que l’eau courante, les égouts, l’électricité, etc.
Le web n’est pas un simple trottoir où il fait bon se balader tranquillement entre amis, pas un bucolique sentier en forêt… C’est une autoroute à grande vitesse que nous empruntons tous les jours parce que ça va plus vite… Se rendre à pied serait sans doute plus sécuritaire pour notre vie privée. Lorsque vous marchez sur les trottoirs, vous n’avez pas de plaque d’immatriculation dans le dos. Les policiers ne peuvent savoir, à votre insu, qui vous êtes… S’ils veulent vous identifier, ils doivent vous demander vos papiers et, surtout, vous expliquer pourquoi. Mais pas en voiture. Vous êtes de facto identifiés.
Vais-je ici comparer le web à une autoroute et vos multiples cossins numériques, à des voitures? Eh oui… Je vais effectivement soutenir cette idée. Non pas pour défendre le projet de loi C-30, mais simplement pour mettre en relief l’utopie sous-jacente à son opposition.
Vous caressiez vraiment le rêve naïf que le web allait demeurer éternellement un îlot sauvage autorégulé par les seules volontés individuelles et privées de ceux qui y prennent part?
Vous m’étonnerez toujours.
À partir du moment où vous êtes branchés sur le web, vous n’êtes déjà plus dans votre «vie privée»… Vous êtes sur la voie publique. Vous avez déjà abdiqué votre intimité au bénéfice de la haute vitesse des communications en temps réel.
Mais il y a plus encore…
Il faudra bien méditer, un jour ou l’autre, de quelle manière le lien qui lie l’individu à sa communauté, et éventuellement à l’État, a pu se détériorer au point qu’il puisse nous sembler désormais normal que de grandes corporations stockent dans des bases de données à peu près tout ce que nous faisons sur le web, mais qu’il nous apparaît totalement inadmissible que nos autorités puissent savoir notre nom et notre adresse.
Faut-il que cette utopie soit très forte.
Pour la plupart d’entre nous, Google, grâce à Gmail, peut lire nos courriels. Il en va de même pour à peu près tous les services de courriel en ligne. Facebook peut lire toutes nos conversations privées et publiques. Ces géants emmagasinent notre vie privée à la vitesse grand V. Ceux qui ne sont pas encore des géants le deviennent tranquillement à mesure que nous leur donnons ces droits. Vous ignorez qui ils sont, vous n’avez aucune idée de qui fait quoi exactement au sein de leurs entreprises, quels employés ont accès à quelles informations vous concernant et avec qui ils ont des liens d’affaires. Vous cliquez sur «j’accepte» le plus vite possible, sans même lire les conditions d’utilisation, sorte de contrat social auquel vous prenez part en vous inscrivant… L’essentiel est d’aller vite, le plus vite possible, pour habiter ce qui n’est plus un village global, mais bien une mégapole totale.
Remarquez bien ce paradoxe: plus nous sommes branchés, plus nous acceptons de miner la base même de la distinction public/privé. Les plus motivés vont même jusqu’à affirmer que nous sommes désormais, tous autant que nous sommes, des médias, des émetteurs-transmetteurs, tous unis dans un grand réseau. Autrement dit, nous serions tous des maillons de ce «service public essentiel» qu’est devenu le web. Or, plus nous prenons part activement à cette médiatisation de nos individualités, plus nous rechignons à laisser l’État s’insérer dans cette nouvelle sphère publique.
Il s’en trouve même pour vous raconter que publiciser les détails les plus banals de votre vie intime est désormais une manière de marketing. Et vous les croyez. Il faut bien soupeser le sens d’une telle affirmation: les conversations de tous les jours sont désormais une mise en marché du produit que nous sommes. Comment peut-on, ensuite, espérer quoi que ce soit comme protection de la vie privée. Au sein de la mégapole totale du web, vos vies sont des panneaux-réclames.
Vous avez raison. Il y a une différence majeure entre le projet de loi C-30 et les conditions d’utilisation des grandes corporations du web: dans le premier cas, les règles vous sont imposées alors que dans le second, vous avez le loisir de cliquer sur «j’accepte».
…Or, justement. C’est ça qui est intéressant. Vous acceptez.
Il y a de quoi s’interroger. Nous pouvons bien faire ce choix. Nous pouvons même revendiquer le discours utopique de l’autodiscipline de ce nouveau tissu social numérique. Mais ce faisant, nous devons être bien conscients de ce que nous affirmons: nous préférons retirer à l’État une de ses fonctions régaliennes fondamentales, assurer la sécurité intérieure et extérieure, en misant plutôt sur l’autorégulation des libertés individuelles. Pire encore, nous acceptons explicitement, en cochant une case et en cliquant sur «OK», de privatiser ces prérogatives politiques. En somme, nous faisons plus confiance à Google et Facebook qu’à ceux qui nous représentent.
Je ne sais si vous prenez vraiment conscience des limites de l’ultralibéralisme et du minarchisme que nous atteignons ici: nous préférons privatiser une fonction de l’État en misant sur l’autorégulation des règles du marché de nos intimités…
…Tout cela, en nous opposant à un gouvernement que nous jugeons trop à droite.
Il y a de quoi s’étonner.
Et il y a de quoi s’inquiéter, surtout, de l’état lamentable du lien de confiance qui devrait normalement unir les citoyens et leurs représentants. À ce titre, justement, le projet de loi C-30 est peut-être plus un symptôme qu’un remède…
c’est que l’état m’a souvent trahi, par le passé. j’espère ne pas devoir te faire une liste. facebook et google pas encore… c’est donc normal que je me fie plus à ces corporations qu’au gouvernement.
de plus, quand je me confie à une corporation, je peux encore espérer que le gouvernement vienne à mon secours, en cas d’abus, avec une belle loi. quand mes choses se retrouvent sur l’ordinateur du premier ministre, c’est terminé, je n’ai pas de recours si on me baise.
évidemment, je pourrais être plus nuancé. ou est le véritable pouvoir? qu’est-ce qu’un abus? etc etc. mais tout de même, je crois que c’est de cette façon que nos petits cerveaux font la paix, à notre insu, avec la contradiction que tu évoques.
Ce qui est inquiétant, c’est la motivation derrière une telle loi. Le lobying fait par de grandes corporations qui poussent pour des régulations plus sévères sur le droit de propriété et qui espèrent ainsi pouvoir poursuivre n’importe quel citoyen pour des sommes faramineuses. Que gagne-t-on vraiment avec cette loi?
Ce qui est à pleurer, c’est que Bell ou les autres seront dans l’obligation de renseigner à grande échelle. Et que tout cela ne sera pas fait gratuitement. Ce sera soit l’état soit nous via la facture qui devront financer cela. Tout cela sous de faux prétexte de protéger des grands méchants loups qui veulent se cacher.
La vraie raison de cette loi est des sociétés privées qui veulent récupérer leur argent et donnent des injonctions et l’état qui obéit bien sagement.
Il suffit de voir ce qui s’est passé en France où cela à commencer également comme cela pour finir sur une loi (Hadopi) qui coute près de 16millions à l’état et qui n’a encore trainé personne en justice. Seulement des convocations à comparaitre et des amendes de près de 4000$ quand ils se font repérer à toucher à des oeuvres protégées par le droit d’auteur.
On dit chercher les grands méchants loups mais ce seront les cochons payeurs qui feront leur boulot : PAYER.
Elle est pas belle la vie??? :D
En effet, je le dis toujours, la vie privée, ça n’existe plus depuis longtemps – non, ce qui me tracasse, c’est le contrôle exercé. Oui oui, les grosses méchantes entreprises nous demandent de cliquer OK pour prendre nos infos, mais justement, j’ai le choix de cliquer. De plus, en échange, j’ai un service qui répond à mes besoins. Par ailleurs, les informations prises sont gérées par une politique de confidentialité et si et seulement si je commets une infraction, ces renseignements pourraient être remis dans les mains de corps policiers.
Ce que le C-30 propose, c’est pas un service en retour, ni une politique de confidentialité – c’est l’accès direct et constant de surveillance pour nous prendre la main dans le sac.
On dira bien ce que l’on veut de Google et ses yeux cybernétiques, mais ces renseignements ne visent pas à me faire juger comme un terroriste ou à me mettre en prison ou à me faire payer des amendes – au contraire, il cherche à mieux me comprendre et me faire dépenser d’avantage! Suis-je d’accord avec ceci? Pas nécessairement, mais en échange, j’ai des services utiles qui s’améliorent en raison de mon utilisation, et ils sont protégés.
Y’a quand même une grosse différence ici. Les entreprises ont pas encore le pouvoir de super-sociétés que l’on voit dans les films – oui, elles ont du poids, mais pas le pouvoir de me mettre en tôle pour une connerie.
mon cul que la loi c-30 nous protège des fous sur le web
L’État c’est le détenteur du monopole de la force physique dite légitime en société.
C’est le levier de la justice qui détermine si nous sommes coupables et condamnables ou innocents et libres de nos personnes.
L’État est aussi le lieu d’une démocratie existante ou possible, le moyen de la souveraineté populaire et nationale.
L’État est de fait le lieu du pouvoir d’une collectivité aussi individualisée qu’elle soit et il se trouve que l’État peut déraper dans la dictature ou le totalitarisme vers le pouvoir d’un seul, d’une caste ou d’une secte politique ou religieuse fondamentaliste.
Les conservateurs d’Harper se rapprochent du totalitarisme ou de sa tentation pour être modéré dans le propos à travers ce projet de loi. Le C-30 c’est plus que du marketing de surveillance.
En effet, M. Bouchard.
Quand le vérificateur général a mentionné son inquiétude vis-à-vis ce projet de loi, le ministre lui aurait répondu ; « Ou bien vous êtes pour ça, ou bien vous êtes pour les pédophiles. » Or, cette tactique de ne laisser que deux choix à son interlocuteur est un moyen bien connu de contrôle mental. Oui, un gouvernement peut déraper. Est-ce que la population est équipée pour voir arriver le dérapage ? Souhaitons-nous que oui !
Plusieurs questions peuvent se poser par rapport à cette loi: Déjà la notion d’anonymat sur le net: Non, on ne peut pas savoir ce que je fais sur le net à tout instant, y compris avec mon IP. Si je me connecte à un site, il ne peut pas nécessairement savoir qui je suis, je peux tout à fait camoufler mon IP ou utiliser d’autres méthode (je ne vais pas tout détailler ici, je met un lien à la fin) De même, une communication, ça peut se chiffrer. Oui, mon fournisseur va la voir passer mais elle ne sera pas lisible puisqu’elle sera déchiffrer sur mon pc auquel mon FAI n’a pas accès. Par exemple, si je me connecte au réseau de mon entreprise depuis chez moi pour travailler, la communication est totalement chiffrer que ça soit pour mon FAI ou pour un pirate qui irait écouter cette communication. La question: Sera-t-il légal que mon FAI ou la police essayent de déchiffrer ma communication, en plus sans l’approbation d’un juge? Car en plus de poser un gros problème éthique, cette loi risque de poser d’autres problèmes juridiques. En passant, la police aura-t-elle les moyen financier et humain de déchiffrer toutes les communications de ses suspects si tout le monde se met à chiffrer ses communications dès qu’ils naviguent sur Internet pour se protéger de son propre gouvernement? (pour en savoir sur l’anonymat sur internet http://free.korben.info/index.php/Anonymat )
L’autre point, c’est le nombre d’information que nous fournissons à Google et autres Facebook. Oui, c’est un problème, c’est même un problème important qui fait que l’internet d’aujourd’hui n’est en rien l’internet qui a été pensé à la base. Normalement, si nous étions réellement sur un réseau internet, rien ne serait centralisé. Nos courriels seraient hébergé chez nous et non sur les serveurs de google, nos profils « facebook » serait hébergés chez nous (d’ailleurs, il y a une alternative à Facebook où là votre profil est bien hébergé chez vous, il s’agit de Diaspora), idem pour les blogs, il ne devrait pas être un blogger ou un autre blog hébergé chez un éditeur de blog mais hébergé chez soi (et il existe énormément d’alternative à ça, wordpress est la plus connue et la plus utilisée). A ce sujet, je conseille l’excellente conférence de Benjamin Bayard http://video.google.com/videoplay?docid=169589780372642064&hl=fr
Sinon, j’avoue avoir un très gros doute sur la mise en place d’une telle loi. Si le gouvernement Harper trouve le registre des armes coûteux, ça ne sera absolument rien comparé au coût faramineux auquel pourrait revenir une telle loi.
Excellente lecture de l’actualité. Un texte brillant qui fait réfléchir. Bravo!
Des commentaires bien intéressants, mais la différence entre le C-30 (ainsi que d’autres projets de loi) et les activités de réseautage chez des fournisseurs comme Google et Facebook est la différence entre la surveillance permanente par l’état et le partage (parfois indiscret) de ses habitudes avec le monde en générale.
Dire sur Facebook que vous aimez les chats, le chocolat ou les BD permet aux annonceurs de vous ennuyer. On a toujours le droit de ne pas utiliser son réseau ou de ne pas dire tout dans ce lieu assez publique (meme si on emploi une configuration plus ou moins privé).
Mais dans le monde actuel nous sommes presqu’obligés d’utiliser Internet pour nos communications et nous y attendons la même liberté que nous avons en envoyant une lettre par la poste ou en faisant un appel téléphonique conventionnel. Dire que n’importe quelle personne autorisée par le ministre peut accéder aux détails personnels chez le FAI et demander que ce dernier copie et retienne tout sur nous pour faciliter la tâche des policiers ou des agents de sécurité si on décide un jour que nous sommes des ennemis de l’état–c’est tout autrechose. Surtout quand le gouvernement qui propose ces mesurs a déjà calumnié les écolos, les aboriginaux, les amateurs d’animaux et les utilisateurs d’Internet comme des menaces à la sécurité canadienne.
Comme a été remarqué autrepart, c’est vraiment bizarre que le gouvernement Harper si convaincu que le registre de fusils et le census invahissaient trop la vie privée veut acquérir de plus en plus la capacité de surveiller la vie quotidienne de tout le monde. Les policiers ont déja les pouvoirs nécessaires à demander les détails de compte et 95% des gros fournisseurs d’accès ou de services Internet accèdent à ses demandes. Le texte de C-30 n’a rien à faire avec la protection de l’enfance (dans laquelle ce gouvernement n’a manifesté pas beaucoup d’intérêt à date) malgré le nouveau titre appliqué à la dernière minute. C’est plutôt une manière d’autoriser ce qu’on appelle en anglais un ‘fishing expedition’–cad., fouiller dans la vie personnelle de quelqu’un qu’on n’aime pas, dans l’espoir de trouver quelquechose pour l’intimider ou l’incarcerer.
C’est parce que cette approche est d’assumer la culpabilité et non l’innocence de n’importe qui que les canadiens anglophones ont réagi si rapidement et avec autant de persévérance. On parle beaucoup dans les médias francophones de Vikileaks30 (qui n’a fait rien de criminel) mais beaucoup moins de la campagne #tellVicEverything (#toutdireaVic) par laquelle des milliers de messages ont signalé que les canadiens n’aiment pas cette vision de notre société.
Cependant, je n’ai trouvé que tres peu de francophones dans cette vague de messages sur Twitter. Nous nous demandons pourquoi et nous vous invitons de nous joigner.
Protéger nos enfants relève de NOTRE DEVOIR , pas celui de l’état . En tant que société , et surtout en tant qu’être humain , nous avons tous le devoir d’éduquer nos enfants et par le fait même , de les protéger . Au fil des années , la société s’est soustrait à ses obligations morales en laissant cette tâche aux gouverments ,qui eux , en ont profités pour prendre le controle de nos vies .
Il est grand temps que la société reprenne les devoirs moraux qui lui incombe et reprenne le controle de « sa » vie .
Le respect , la tolérance , la responsabité , l’honneteté , sont des valeurs que nous semblons avoir oubliés …..
En tant que société , nous avons des devoirs . Arrêtont de rejeter ces devoirs vers les gouvernements . SOYONS RESPONSABLE !!!!!!
Voici une capsule sur le projet de loi c-30, qui était au paravant la loi c-52, qui avant â était la loi c-11…
À Suivre :
http://www.youtube.com/watch?v=lbXV5Xhy1AY&list=UURkA51bOGtNVKNFUbXdqMtQ&index=6&feature=plcp
lesaltercitoyens.com