Au lendemain de l’attentat de Boston, notre premier ministre Stephen Harper, toujours prêt à passer à l’action, a spontanément proposé de ne pas demeurer «assis à tenter de rationaliser le tout» pour «trouver les causes profondes» qui poussent certains individus à commettre de tels gestes inadmissibles.
Il y a cependant un revers à la médaille de «l’action pour l’action» comme l’envisage Stephen Harper; si on ne tente pas de comprendre les causes profondes, on devra assurément se contenter de n’envisager que les effets de surface.
Il y a, dans cette avancée de notre premier ministre, l’exact condensé d’une politique des apparences. Un déversement pétrolier? Pompons vite le mazout et envoyons quelques barbus nettoyer les goélands. Des délinquants? Construisons des prisons. Des gens font sauter des bombes? Arrêtons-les morts ou vifs qu’on n’en parle plus. On navigue ainsi de désastre en désastre en se contentant de passer le balai, à chaque fois, question que ça ait l’air propre, forts d’une seule certitude: que ça se reproduira tôt ou tard.
Car ça, on le sait. Ça va se reproduire. Tant qu’on n’acceptera pas de se pencher sur les causes, les effets perdureront. De ça, nous pouvons être certains.
En refusant de «rationaliser le tout», selon sa propre expression, le premier ministre semble nous inviter à abandonner les voies de la raison pour nous en remettre au pur réflexe. Ce qui passe pour une action — poursuivre et arrêter les coupables — n’est en fait qu’une réaction. Ne me demandez pas de réfléchir, ça me pique, je me gratte. Et voilà, on se gratte, on se gratte. Finalement, on se rend compte que c’est une foutue grosse hémorroïde que nous avons dans le fion! Ah! Si j’avais su!
Notre faute? Ce serait trop court. Je n’ai guère de sympathie pour l’autoflagellation à l’occidentale, qui consiste à nous accuser nous, citoyens de la société des loisirs, pour ces actes de terrorisme.
Pas notre faute, non… Notre rôle plutôt. À réfléchir sur la nature du terrorisme, nous sommes inévitablement renvoyés à nous-mêmes, à la place que nous occupons dans cette vaste mosaïque sociale que nous appelons l’humanité. Une bombe qui explose, c’est un signe, ou un message qui s’adresse à nous. On en connaît les grandes lignes: Vous me faites chier et je veux vous faire peur, voire vous anéantir.
Il ne s’agit pas de trouver des excuses à ces gestes gravissimes. L’enjeu est de tenter de les comprendre et de les expliquer et, pour cela, oui, n’en déplaise au premier ministre, il faut se remettre en question, convenir à tout le moins que sur l’échiquier de la politique mondiale, les pions qui posent des bombes ne sont qu’une pièce dont la position n’a de valeur que lorsqu’elle est en relation avec celles des autres.
Certains dénonceront cette forme de relativisme pour s’en remettre à des certitudes et marteler qu’il suffit de comprendre que les terroristes sont des désaxés en marge de l’humanité. On peut bien le dire… Pour ce que ça change…
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À cette politique des apparences, répondent, comme une image en miroir, les diverses théories du complot qui pullulent sur d’innombrables sites internet. Des amateurs à la petite semaine, qui n’ont que leur ordinateur branché au web comme outil d’observation, se confortent dans des analyses rocambolesques. Pas de doute, selon eux, on nous ment et les efforts combinés des détectives 2.0 analysant des «preuves» devraient pallier cet obscurantisme.
Bien qu’elle soit en complète rupture avec l’attitude des gouvernements — puisque ceux-ci sont soupçonnés d’être à l’origine d’une immense machination qu’il faudrait décrypter — la théorie du complot n’en demeure pas moins, elle aussi, une observation en surface, mais à l’autre extrémité, si on peut dire les choses ainsi; pour le complotiste, les causes profondes du terrorisme sont elles-mêmes des effets d’une cause unique plus profonde encore, soit le complot. Ainsi, la situation géopolitique du monde, la disposition des pièces sur l’échiquier, sont un voile, une fiction organisée, qui cache quelque chose d’autre.
Il s’agit là d’une autre manière confortable de considérer la triste réalité, à savoir que des individus et des groupes, retranchés dans une haine furieuse, nous en veulent au point de faire sauter des bombes dans les lieux publics. Pour le complotiste, il est inutile de comprendre les causes de cette animosité radicale puisqu’il s’agit d’une vaste mise en scène dans laquelle il refuse de jouer un quelconque rôle.
Entre les discours des complotistes pour qui les causes sont des effets et celui du politicien pour qui les effets se suffisent à eux-mêmes, le citoyen téléspectateur doit trouver sa voie. Deux versions du réel s’offrent à lui tentant de détourner le rôle qu’il joue en société et le message envoyé par la bombe qui explose. D’un côté, on lui dit de ne pas se poser de questions, de l’autre on lui dit de regarder ailleurs. On lui souhaite bonne chance, il en aura besoin, car à ce jeu, c’est son rapport à l’autre qui demeure occulté. Et gageons que cet autre se trouve déjà quelque part à fabriquer une autre missive explosive qui demeurera incomprise.
Et le projet de loi S-7 est maintenant officiellement adopté. http://www.radio-canada.ca/nouvelles/Politique/2013/04/24/006-projet-loi-s-7-adoption-lutte-terrorisme.shtml
Misère…
Bonne réflexion Simon, entièrement d’accord avec vous. Et ce projet S-7 pour lutter contre le terrorisme plutôt que de le comprendre va fort probablement coûter très cher, diminuer les libertés et donner un semblant de sécurité. Car, ce que veut la population c’est de la sécurité avant tout. Donc les politiciens doivent donner l’impression d’y travailler.
Pour Harper, la rationalisation est inutile car c’est la volonté de Dieu qui agit. Ces fanatiques ne croient pas en l’homme. Au mieux, ils prient ; au pire, ils s’ingénient à se prémunir de la colère de Dieu ou de Satan.
Avec un gouvernement comme celui d’Harper,se poser des questions sur le pourquoi des événements,c’est beaucoup trop forçant. Après tout quand, on pense avoir le vrai »bon dieu » de son bord, cela va de soi qu’il faut réagir à la violence par la violence et la cohacition. En bon gouvernement opportuniste, il tente de se faire du capital politique façilement et rapidement sans »penser » aux conséquences de ses prises de positions et décisions sur l’avenir de ses relations avec le reste du monde. Harper est en train de les transformer dangeureusement et pas pour le mieux.
Bien d’accord pour « comprendre les raisons profondes qui ont guidé les terroristes » mais on fait quoi entretemps parce que ça prendra des milliers d’années pour ça? On tend tout simplement et naïvement l’autre joue? Comme des cons?
Vous voulez négocier avec les terroristes? Good luck! Ils la feront sauter votre table de négociation. Leur objectif est d’abattre les occidentaux. De les faire disparaître de la surface de la terre. Kapiche?
Devant une menace sérieuse contre son intégrité, le rôle principal d’un gouvernement n’est pas de faire de la psychopop à deux balles mais de PROTÉGER sa population et de prendre tous les moyens pour se faire.
Z’appréciez pas ce que notre gouvernement fédéral accomplit pour vous protéger? Dites-vous que ce n’est rien en comparaison de ce que votre Obama (fétiche des pacifistes de salon…) fait « subir » à sa propre population…
Facile de jouer les gérants d’estrade pacifiques et de donner des leçons de politique étrangère lorsqu’on se sait protégé par les autres mais une fois cette protection fragilisée, on fait alors face à la réalité toute crue et on doit avoir un minimum de sens des responsabilités pour se protéger contre les agressions. ENSUITE on « négocie » avec l’adversaire, s’il y a place à négociation.
« Z’appréciez pas ce que notre gouvernement fédéral accomplit pour vous protéger? Dites-vous que ce n’est rien en comparaison de ce que votre Obama (fétiche des pacifistes de salon…) fait « subir » à sa propre population… »
Avoir un minimum de sens des responsabilités ne veut pas dire renoncer à des libertés essentielles. C’est exactement ce que le gouvernement Harper essaie sans cesse de faire : projet de loi C-30 sur l’accès à vos courriels sans mandat, augmentation des pouvoirs policiers par le projet de loi S-7 qui est maintenant une réalité, même si ces pouvoirs ont été inutiles pour arrêter les deux hurluberlus qui voulaient faire dérailler un train. Il a suffi d’une enquête tout à fait conventionnelle pour y arriver.
Benjamin Franklin disait : « Ceux qui renoncent à une liberté essentielle pour une sécurité minime et temporaire ne méritent ni l’une ni l’autre et finissent par perdre les deux. » Et c’est un Père fondateur des États-Unis qui le dit, pas un p’tit go-gauchiste comme vous vous plaisez à le dire…
Bien beau tout cela, mais c’est pas comme si personne ne s’était penché sérieusement sur les causes profondes de ces actes barbares depuis des décennies. Doit-on conclure à l’inutilité de ces analyses? Just asking…
L’inutilité de ces analyses ou simplement le fait que les gens qui sont au pouvoir y font la sourde oreille? Pensez aux exécutions sommaires effectuées par des drones au Pakistan. Des enfants figurent parmi les « dommages collatéraux ». Pas besoin d’une analyse sociologique poussée pour réaliser qu’en exécutant un terroriste, on en crée deux autres pour prendre sa place. C’est l’hydre de Lerne version 21e siècle.
Très juste M. Couture, mais cela revient à dire que le défi n’est pas forcément d’analyser davantage les causes profondes comme l’avance M. Jodoin, mais bien d’exercer davantage d’influence au niveau politique.
Tout à fait d’accord Monsieur Desrochers.
Nous ne sommes pas partis pour y arriver…avec les structures du pouvoir telles qu’on les connaît et sachant le type d’individus que le pouvoir attire…
Monsieur Jodoin nous innonde de son savoir géopolitique infini:
« On en connaît les grandes lignes: Vous me faites chier et je veux vous faire peur, voire vous anéantir. »
Entre Richard Martineau et François Brousseau, Monsieur Jodoin nous fait une superbe analyse sociologique sur les « complotistes »
« Des amateurs à la petite semaine, qui n’ont que leur ordinateur branché au web comme outil d’observation, se confortent dans des analyses rocambolesques. Pas de doute, selon eux, on nous ment et les efforts combinés des détectives 2.0 analysant des «preuves» devraient pallier cet obscurantisme »
…puisque ceux-ci sont soupçonnés d’être à l’origine d’une immense machination qu’il faudrait décrypter — la théorie du complot etc,,,
LA théorie du complot. C’est de ça qu’il s’agit.Il y a donc UNE théorie du complot (sous-entendue délirante) mais surtout pas DES théories du complot qui s’affrontent. Parecque la théorie du complot qui nous est servi par les services secrets américains, elle, est irréfutable.. dans un système « démocratique » sous Patriot act ou désormais, l’habeas corpus datant du 12 ème siècle a disparu. Ou l’on peut incarcérer, et torturer sans procès des « coupables » même si ces coupables sont souvent pour la plupart, financés, armés, entrainés quand ce n’est pas carrément « déprogrammés » par les service secrets occidentaux.
Essayer de chercher à comprendre comment fonctionne le terrorisme islamique sauce Al Quaida, financé depuis les années 80 par les USA et l’arabie Saoudite….nos alliés officiels en Syrie, désormais…Tout ça, ça n’est que de LA théorie du complot….Que Tamerlan soit suivi par le FBI depuis 5 ans, et qu’il ait « échappé » à la vigilence du FBI…ça ne sonne pas une cloche à aucun de ne représentants médiatiques pour poser quelques questions… Maintenant….la grande activité des intellectuels sera de faire la chasse aux complotistes, pour les renvoyer, « dos à dos », « comme en miroir » au cheerleaders de la guerre au terrorisme tout azimut ». Renvoyons dos à dos, donc, les compte-rendus du FBI et ces gens qui « n’ont que leur ordinateur branché au web comme outil d’observation ». Parceque j’imagine que Monsieur Jodoin lui, il se rend régulièrement en Arabie Saoudite ou au Dagestan et discute avec les cellules d’Al Quaida ou les agents de la CIA pour connaitre leur opinion.
Moi quand je lis des articles d’une telle insipidité, je comprends pourquoi une grande partie de la population tourne le dos à la gauche intellectuelle collabos. Ecore plus néfaste pour comprendre le terrorisme que les analyses de l’extrême-droite. Tant qu’à rester dans le noir absolu aussi bien se conforter avec l’Islamophobie ouverte de Richard Martineau et de Benoit Dutrizac.
@ Pierre Couture:
Ça fait 50 ans que les gauchistes nous enlèvent nos « libertés essentielles » et je ne me souviens pas vous avoir lu à ce sujet.
On en est rendu à donner plus de 50% de NOS revenus (donc de notre LIBERTÉ de choix!!!) à l’État qui le dilapide et le gaspille allègrement. On donne plus d’argent, donc de liberté, à l’État socialisant, collectiviste tentaculaire et inefficace que nous n’en gardons pour nous nourrir (essentiel non?), nous loger (essentiel non?), nous vêtir (essentiel non?) et tutti quanti et vous vous inquiétez que vos courriels soient lus par une agence de sécurité?
Et je ne parle pas des sociétés d’État comme la SAQ qui nous vole tout rond!
Ça en est rendu qu’on doive d’abord faire vivre l’État AVANT de subvenir à nos besoins essentiels ainsi qu’à ceux de nos proches et vous me parlez de liberté restreinte à cause de quelques courriels?
Les deux terroristes tchéchènes ont accompli leur sinistre tâche malgré les multiples mesures de sécurité soit; mais combien d’autres attentats ont été évités justement à cause de ces mesures dont celui des ressortissants canadiens est le dernier exemple en lice?
@ André Desrochers:
Excellente question.
Ça fait des milliers d’années que le terrorisme existe sous plusieurs formes et certains illuminés croient pouvoir l’endiguer comme ça… en un claquement de doigt et démontrant de la « compréhension altruiste » envers ces meurtriers sanguinaires. Comme si ça n’avait pas été testé avant…
Ils sont du même gisement que ceux qui croyaient pouvoir arrêter Hitler la fleur au fusil et leurs théories vaseuses ont depuis longtemps démontré leur inutilité au cours de l’Histoire.
Certains terroristes pourraient peut-être être amadoués temporairement mais il existe des milliers de fanatiques contre lesquels le seul moyen de défense est l’attaque et nous avons besoin de moyens pour se faire.
Parlant d’islamophobie…
« Tous les musulmans ne sont pas terroristes, me direz-vous. Ce qui est vrai. Mais, de nos jours, tous les terroristes sont musulmans. Et ils veulent détruire l’Occident. »
Suis-je le seul à trouver que cet éditorial de Jacques Brassard est à la limite de l’incitation à la haine envers les musulmans ?
http://blogjacquesbrassard.blogspot.ca/2013/04/la-repentance-gauchiste.html?
(Cf. Journal de Québec, 26 avril)
Excusez ma façon de l’écrire mais « Host.. que j’ai aimé ce qu’a écrit Brassard ici sur ce sujet »:
http://blogjacquesbrassard.blogspot.ca/2013/04/la-repentance-gauchiste.html
Extrait:
« Chez certains, c’est l’angélisme dégoulinant de bons sentiments qui prime. Et ça prend la forme d’une psychologie de bar branché du Plateau. Justin Trudeau l’a exprimé de façon exemplaire : il convient de coucher sur le divan les tueurs de civils innocents pour décortiquer les méandres de leur égo humilié. Soyons empathiques, que diable!
Chez les intellos, c’est autre chose. Ils sont d’abord dépités que les auteurs de l’attentat de Boston ne soient pas des salopards-blancs-racistes-d’extrême-droite. Des tea parties poseurs de bombes, comme ce serait merveilleux!
Mais une fois la déception passée, ils se rabattent sur la bonne vieille grille de lecture marxiste-léniniste : ces attentats, comme tous les autres, sont le fruit terrible de la lutte planétaire entre les musulmans opprimés, dépouillés, ostracisés et les occidentaux (Américains et Juifs surtout) oppresseurs, brigands et tortionnaires. »
Eh bien j’ai justement lu Brassard cette semaine, ce qui n’est pas une habitude et ost…que je l’ai trouvé con, une fois de plus.
Parce qu’évidemment, ses mots, ça suit la « logique » dominante, n’analysons surtout pas quelles sont les causes des évènements et que ne se remettent pas en question ceux (et leurs actions) qui dominent la donne à l’international. Que chacun reste dans son coin et qu’on continue de vivre ainsi…
Pourtant il faudra bien un jour qu’Orient et Occident, chrétiens et musulmans, pour ne nommer que ceux là, mettent en place autre chose que les « stratégies » actuelles parce que vu le shisme, nous ne sommes pas sortis du bois et pour y arriver, il faut la philosophie-théologie comparée. Ouf, ces gros mots vont heurter bien des gens…
Brassard écrit:
« Tous les musulmans ne sont pas terroristes, me direz-vous. Ce qui est vrai. Mais, de nos jours, tous les terroristes sont musulmans. Et ils veulent détruire l’Occident. »
Outre qu’il ait oublié une couple de terroristes non musulmans (Breivik en premier lieu), de tels propos islamophobes ne font rien pour améliorer la situation.
Bien d’accord Samuel, mais Brassard oublie surtout que la grande majorité des actes terroristes aux États-Unis ne sont pas commis par des musulmans. Évidemment, quand un jeune se pointe avec une arme de destruction massive, un semi automatique, dans un cinéma ou une école, on appelle pas ça du terrorisme…
S’il fallait relever tous les sophismes et les propos démagogiques à chaque chronique qu’il publie, on en finirait plus. Comme si on était pas assez gâtés avec Martineau et Duhaime…