Visite libre

Les secrets de la Citadelle de Québec

Notre petite caméra a été admise au Mess des Officiers, ce club archi sélect, et dans les ateliers de fabrication des uniformes du Royal 22e Régiment. Un privilège immense. 

Ce n’est pas un plateau de cinéma ni une reconstitution historique. La Citadelle est, oui, un lieu touristique, mais c’est aussi une base militaire fonctionnelle et bien réelle. Les façades de pierre sobres y côtoient les véhicules utilitaires sport de l’année, un clash anachronique des plus improbables. Les modes de combat ont drastiquement changé, mais la forteresse du XIXe siècle sert encore aux représentants locaux des Forces Armées Canadiennes. Un terrain immense qui constitue, précisons-le, 20% de la cité intra-muros.

Après une saucette au musée, un tour d’horizon des dernières grandes guerres avec un angle identitaire et de véritables soldats d’ici qui rappellent les personnages des Plouffe ou de Bonheur d’occasion de par leurs correspondances, on m’a ouvert la porte du Mess des officiers. Là où aucun civil, à moins d’entretenir une amitié avec un(e) haut(e) gradé(e) de l’armée, d’être un(e) élu(e) ou un évêque, n’est normalement admis. Pour vous donner une idée de l’exclusivité : mon accompagnatrice, une employée du département des communications de La Citadelle, n’y était elle-même jamais allée.

Actuellement, le groupe compte une quarantaine de membres et la liste d’attente ne cesse d’allonger.

Hall d'entrée, Mess des officiers (Crédit: C. Genest)
Hall d’entrée, Mess des officiers (Crédit: C. Genest)

Le Mess des officiers a été construit en 1831 et son décor, à l’exception de petits détails comme les fleurs de lys qui ornent les vitres du vestibule, est pratiquement resté intact. Si bien qu’on a l’impression de faire un saut dans la télésérie netflixienne The Crown en entrant dans la salle à manger du rez-de-chaussée. Une tablée comme dans les films, enjolivée d’argenterie inestimable et surplombée, vous l’aurez compris, d’un portrait de la jeune Elizabeth à dos de cheval.

Salle à manger du rez-de-chaussé, Mess des officiers (Crédit: C. Genest)
Salle à manger du rez-de-chaussé, Mess des officiers (Crédit: C. Genest)

Le bâtiment compte aussi six chambres, auxquelles tous les officiers des FAC ont par ailleurs accès, ainsi qu’un restaurant et un bar au sous-sol. La famille du commandant Philippe Bourque, un clan de quatre enfants, y réside aussi et dans une section encore plus jalousement cachée aux rares visiteurs.

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Nos hôtes m’ont ensuite guidée vers un autre bâtiment normalement fermé au public : les ateliers de confections pour les uniformes. J’y ai d’abord rencontré le caporal Desrochers, responsable des accessoires et des bonnets en poil d’ours qu’il fabrique avec les mêmes techniques complexes que les fourreurs que j’ai récemment rencontrés au Magasin Laliberté. Un travail de moine, un matériau qui requiert une semaine de brossage avant d’être assemblé puis agrémenté de son iconique bouquet de plumes bourgogne.

Caporal Desrochers (Crédit: C. Genest)
Caporal Desrochers (Crédit: C. Genest)

De l’autre côté du mur, Mme St-Pierre (une civile, d’où le préfixe) trime dur et toute seule au département des habits de la garde en rouge. C’est elle qui, depuis 12 ans, habille notamment les soldats des parades et les musiciens. Des femmes et des hommes enveloppés dans des tuniques de doeskin rouge nuance Canada, c’est l’appellation officielle, des tissus de grande qualité importés du Royaume-Uni qui viennent partiellement recouvrir les pantalons marine qu’elle fabrique aussi.

Uniformes des officiers (Crédit: C. Genest)
Uniformes des officiers (Crédit: C. Genest)

Ma tournée se termine à la résidence secondaire du gouverneur général, pied-à-terre québécois de David Lloyd Johnston, une maison qui sert d’écrin pour une collection d’art moderne à faire pâlir bien des institutions muséales d’envie.

Des Lemieux en veux-tu en v’là, un lustre monumental signé Madeleine Arbour, un Molinari, une toile de Paul Béliveau dans la salle à manger, des Riopelle. Même le foyer est une installation, et en céramique s’il-vous plaît, une l’oeuvre du duo d’artistes Satoshi Saito et Louise Doucet Saito autour de laquelle danse le feu.

Portrait d'Elizabeth II et du Prince Philip, 1977, Jean Paul Lemieux (Crédit: C. Genest)
Portrait d’Elizabeth II et du Prince Philip, 1977, Jean Paul Lemieux (Crédit: C. Genest)

Vous voulez y aller? Bonne nouvelle : l’édifice est accessible au grand public, mais de mai à octobre, de façon totalement gratuite.