Kid Koala : l'importance de l'inconfort
Cinéma

Kid Koala : l’importance de l’inconfort

Après New York, Toronto, Adélaïde et une dizaine d’autres villes, le DJ montréalais Kid Koala s’apprête à présenter chez lui Nufonia Must Fall Live.

Des caméras, des marionnettistes, un DJ, un quatuor classique, une projection… La dernière œuvre d’Eric San (alias Kid Koala) est la définition même d’un spectacle multidisciplinaire.

Inspiré d’une bande dessinée audio qu’il avait fait paraître en 2003, Nufonia Must Fall Live est, d’abord et avant tout, un film animé en direct sur scène. Parcourant les maquettes, les marionnettistes et les caméramans donnent vie au monde imaginé par Koala treize ans plus tôt. Loin de se tourner les pouces, le créateur accompagne musicalement le film, au même titre que l’Afiara Quartet.

«Avec la description, c’est certain que ça n’a pas l’air très amusant», admet en riant San, rejoint dans son atelier/studio du quartier Rosemont. «Je décrirais plutôt ça comme du Charlie Chaplin postmoderne. Oui, on utilise la technologie actuelle, mais avant tout, on raconte une histoire avec sensibilité.»

S’ancrant à Montréal, l’œuvre raconte «l’histoire d’un robot quasi désuet et solitaire», obsédé par la musique, qui tombe amoureux d’une employée de bureau. «Les spectateurs viennent voir le spectacle et ne savent pas trop à quoi s’attendre, mais habituellement, ils sont submergés par l’histoire après quelques minutes», poursuit-il. «Quelques-uns pensent même que c’est un spectacle pour enfants! Je n’irais pas jusqu’à dire qu’ils ont raison, mais ce n’est pas déplacé de le penser, vu qu’il n’y a pas de nudité, ni de violence.»

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Koala insiste tout particulièrement sur le caractère universel de son histoire. «Je crois que tout le monde peut y trouver son compte», dit-il. «Les adultes vont aimer l’histoire romantique, les grands-parents vont aimer les références à Charlie Chaplin, tandis que les enfants vont aimer le côté slapstick et les étudiants, la dimension technique.»

S’en tenir à l’émotion

La direction artistique du spectacle est assurée par K.K. Barrett, qui a notamment travaillé sur les films Her, Lost in Translation et Being John Malkovich. La rencontre avec le chef décorateur a eu lieu en 2013. «Je faisais un show à Los Angeles, et il était sur place», se souvient le DJ. «Il a vraiment aimé le spectacle, et nous avons commencé à penser à une éventuelle collaboration. Durant le même mois, j’ai également rencontré l’Afiara Quartet et les marionnettistes du spectacle. Au lieu de m’investir dans trois projets différents, j’ai trouvé une façon de les unir.»

C’est à ce moment que Koala a replongé dans Nufonia Must Fall.

Animé par l’inventivité du projet, K.K. Barrett a tout de suite été emballé par l’idée. «Il a choisi les moments forts du livre. Si la scène n’avait pas le potentiel d’émouvoir le public, il l’enlevait tout simplement», raconte le Montréalais. «Pour ma part, j’ai créé 45 minutes de musique de plus, vu que la trame accompagnant le livre n’en durait que 16 au préalable.»

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Le terrain de jeu de Kid Koala

Présenté à guichets fermés depuis deux ans dans plusieurs villes à l’international, Nufonia Must Fall Live a reçu des échos favorables. Eric San se souvient d’un spectacle très particulier donné dans une école secondaire de New York. «C’est l’accueil le plus intense que je n’ai jamais reçu», dit Koala. «Quand les marionnettistes sont montés sur scène après, on les a applaudis comme si c’était les Beatles.»

Les 14 artistes qui travaillent à l’élaboration du spectacle arrivent donc à Montréal avec un enthousiasme débordant. Interrogé à savoir les raisons qui ont motivé cette arrivée tardive au bercail, le gérant de scène Olivier Gaudet Savard évoque des raisons techniques : «L’idéal, c’était d’avoir une scène plus basse que le public, vu que l’écran est vraiment haut. On voulait aussi une salle pas trop grosse. À 2000 places, par exemple, la personne en arrière ne voit souvent rien. Fallait aussi que le timing soit bon…»

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Olivier Gaudet Savard

Présenté à la Cinquième Salle de la Place des Arts, le spectacle n’a «plus rien avoir avec la première version».

«On ajoute sans cesse des nouveaux éléments techniques et décoratifs. La première fois, on avait quatre gros coffres en métal, et maintenant, on en a 13!» dit Eric San.

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Projet d’art vivant, Nufonia Must Fall Live n’aura probablement jamais de finalité. «Avec Eric, on ne pourra jamais s’asseoir et dire : ‘’Ok là le show est fini… On peut commencer à chiller et prendre ça plus relax’’» dit Olivier Gaudet Savard, sourire en coin. «En fait, on est constamment sur le edge. On est toujours en train de répéter et d’essayer de s’améliorer.»

«Je déteste la simplicité et le confort», poursuit Eric San, amusé. «La seconde où je suis confortable dans quelque chose, il faut absolument que j’essaie de quoi de nouveau.»

Nufonia Must Fall Live – Du 2 au 5 septembre à la Cinquième Salle de la Place des Arts

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Photos par Antoine Bordeleau