BloguesCyber-boom!

Jour 5 du débranchement… Mario Beaulieu, la navette spatiale et le pneu canadien

Un seul lien, aujourd’hui, dans l’actualité. Un article trouvé sur le site de La Presse à propos de Mario Beaulieu, président de la SSJB et du Mouvement Québec Français dont je vous parlais la semaine dernière.

Je vous laisse aller le lire… Ça vaut le détour.

http://www.lapresse.ca/actualites/quebec-canada/national/201209/12/01-4573408-plaidoyer-pour-un-renforcement-rapide-de-la-charte-de-la-langue-francaise.php

J’en retiens quelques extraits…

«Le président de l’organisme, Mario Beaulieu, estime que la charte (communément appelée loi 101) a subi trop de modifications qui l’ont affaiblie, ce qui a permis l’anglicisation croissante de l’environnement québécois jusqu’en dehors de l’île de Montréal, ce qui démontre l’urgence d’agir, selon lui.

(…)

Toutes les plaintes qui ont été montrées aux journalistes, photos à l’appui, visaient cependant des raisons sociales ou des églises anglophones.

Or, les organismes religieux ont toujours bénéficié d’une exemption, notamment pour les panneaux qui annoncent la dénomination d’une église, comme «United Church».

M. Beaulieu s’est quand même aventuré sur ce terrain glissant, indiquant que rien n’empêche une église anglophone d’afficher aussi en français

Quant aux plaintes touchant des raisons sociales, les photos montraient non seulement les habituels Canadian Tire et autres Pizza Hut, mais aussi plusieurs IGA, Bentley et Reitmans, qui ne sont pas des mots anglais mais bien des noms propres ou des initiales sans signification particulière.»

 

Euh… Bon… Allons-y calmement si vous le voulez bien.

J’ai un peu sursauté en lisant l’exemple de IGA… En effet, IGA signifie Independent Grocers Alliance. Un acronyme anglophone passé dans les usages.

Voilà une urgence. Il faut agir rapidement! Vivement des lois et des débats afin que nous ne puissions plus dire que nous allons chez IGA. J’ai d’ailleurs une suggestion. Pourquoi ne pas parler des Grossistes Alliés et Indépendants?

– Chérie, peux-tu passer chez GAI acheter un pain tranché en revenant du boulot?

N’allez pas croire que je suis contre surtout! Mais je m’étonne qu’il puisse s’agir d’une urgence.

Et n’allez pas dire que je suis nul en anglais. Je le sais!

Pour Reitman, Bentley et tous les noms propres, j’avoue que je n’y avais pas pensé non plus!

Pour la culture de Mario Beaulieu, Sarah Reitman et son mari Herman Reitman, fondateurs des magasins Reitmans, étaient des Montréalais d’origine… Roumaine. Ils ont sans doute peu à voir avec le complot canadien qu’il qualifie, avec d’autres, de « génocide culturel » depuis quelques années…

Mais pourquoi s’arrêter en si bon chemin? Les noms comme Ford, Suzuki, Honda et tous les autres devraient aussi être vites francisés! Il y a péril en la demeure! Je veux une voiture Tremblay, un moteur de bateau Gauthier et une moto Lefebvre!

J’aimerais dire à Mario Beaulieu que dans le fin fond de mon ADN culturel, dans ma québécitude ancrée profondément dans mes souvenirs d’enfance et dans ceux de mon père, il y a l’argent Canadian Tire.

Je ne suis pas du tout prêt à renier mon patrimoine culturel pour obtenir, dans l’avenir, de l’argent du «Pneu Canadien»!

M’enfin! Vous rigolez là, hein?

J’imagine déjà les scouts qui cognent à ma porte au printemps.

– Bonjour Monsieur, on ramasse de l’argent pour notre camp d’été. On accepte même l’argent du pneu canadien.

– Le pneu canadien, c’est sur la navette spatiale ça?

Si je peux me permettre, vous allez où là? Vous avez convoqué une conférence de presse pour ce genre de sornettes? Et vous avez pris part à l’actualité en parlant d’urgence?

Et vous êtes sérieux?

Vous me sciez.

/

Je vous ai vu venir. Vous allez me dire que La Presse est tendancieuse, faisant elle-même partie d’un vaste complot. Possible. Mais ce que qui est certain, c’est que si c’est vrai, votre stratégie de communication est encore plus nulle qu’elle n’en a l’air. Quand on sait qu’un adversaire nous attend avec une masse, on porte un casque, et des gants.

/

Défenseurs de la langue française, francophiles, amis et collègues qui défendez et faites rayonner la culture québécoise, sachez-le: Alors que vous vous tuez au quotidien pour exposer au grand jour toute l’intelligence dont nous sommes capables, quelques drôles reviendront sans cesse pour faire la promotion d’une profonde connerie. Vertige garanti!

Il est peut-être là, au fond, l’essentiel du combat pour la langue française. Il consiste à arracher des mains de ces joyeux drilles le monopole du nous dont ils se font les gardiens autoproclamés. S’il y a quelque chose d’urgent dans ce dossier, c’est bien ça! Affirmer que nous ne sommes pas tous cons.

/

Comprenons-nous bien. Est-ce que la promotion du français et l’instauration de politiques linguistiques sont légitimes et nécessaires? Oui. Faut-il prendre part collectivement à l’essor de la culture québécoise? Je le crois. Est-ce que la francisation des marques de commerce, qui plus est lorsqu’il s’agit de noms propres -notamment ceux de concitoyens depuis des générations- est une priorité? Non. Et ce ne le sera pas dans 100 ans ni dans 500 ans. Jamais.

L’enjeu fondamental relié à la langue est de partager un trésor collectif afin de créer un lien social, pas d’inventer des divisions à partir de pacotilles esthétiques fondées sur des caprices. Lorsqu’il s’agit de converser entre nous, au plus vite, les mots sur les pancartes ne sont pas une priorité.

Or, l’urgence en ce moment est justement de créer des lieux de rencontre et des conversations avec nos concitoyens anglophones et allophones. Se balader avec un ruban à mesurer dans l’ouest de Montréal ou militer pour ajouter «pizzeria» avant ou après «Pizza Hut» est une perte de temps absolue! C’est de la comédie pure et simple. J’ai même peine à croire que des gens sains d’esprit puissent y avoir pensé par les temps qui courent!

Mais qui, au monde, a envie d’aller faire une balade et discuter tranquillement avec un drôle de type qui mesure la grosseur des lettres sur les panneaux? Il pourrait bien parler plutonien, le problème ne serait pas là… Ce serait un con quand même.

Il faudra dire un jour à Mario Beaulieu et ses acolytes qu’une fourchette et un couteau à steak ne sont pas les bons outils pour cueillir les fleurs.