Islamisme et créationnisme, même combat.
Dans son numéro de juillet-aout 2014, Québec Science publie une très intéressante entrevue avec la physicienne Faouzia Charfi, professeure à l’université de Tunis, qui explique comment le fondamentalisme islamiste entrave la formation scientifique en Tunisie.
Dans cette entrevue signée Dominique Forget (dont on peut lire une partie sur le site de Québec Science [1]), Faouzia Charfi reprend la problématique exposée dans son ouvrage La science voilée. Elle déplore que certains étudiants universitaires, aveuglés par la pensée religieuse dogmatique, en arrivent à rejeter les théories scientifiques lorsqu’elles leur paraissent contraires à ce qui est écrit dans le Coran. Exemple: la lumière étant une manifestation de la présence divine, elle ne peut avoir de vitesse! Si une théorie paraît bien établie, comme celle du bigbang, ils soutiennent qu’elle avait déjà été prédite par le Coran. Bref, du Nostradamus à la sauce coranique.
Les Américains ne peuvent être allés sur la lune puise qu’il est écrit dans le Coran que la lune est à 500 années de marche en chameau, rapporte pour sa part Loïc Tassé. Quant aux tremblements de terre, ils sont provoqués par l’immodestie des femmes, explique le savant ayatollah iranien Kazem Sedighi.
On pourrait se contenter d’en rire, mais cet obscurantisme digne des Talibans (qui interdisaient les illustrations anatomiques dans les manuels d’enseignement de la médecine!!!) est révélateur du degré de pénétration de l’islamisme politique dans toutes les couches sociales des pays arabes. Révélateur également des ravages que peut faire l’idéologie non guidée par la raison et l’humanisme.
Le fondamentalisme créationniste
Cet obscurantisme n’est pas unique aux pays arabes ni aux musulmans. Faouzia Charfi souligne la présence du créationniste au sein de l’islamisme, un emprunt au fondamentalisme religieux occidental (alors que ces mêmes islamistes combattent tout ce qui vient de l’Occident!).
Cette communauté d’esprit entre les fondamentalistes de toutes les religions doit nous faire réaliser que ceux d’ici ne sont pas moins obscurantistes ni moins dangereux que ceux d’ailleurs (charia en moins évidemment…). Le créationnisme fait des progrès inquiétants tant en Amérique qu’en Europe. C’est d’ailleurs le thème d’un livre remarquable, Enquête sur les créationnismes de Cyrille Baudouin et Olivier Brosseau, respectivement ingénieur en physique et docteur en biologie (2).
On y apprend, entre autres, qu’un rapport de la Commission de la culture, de la science et de l’éducation du Conseil de l’Europe ‑ Les dangers du créationnisme dans l’éducation (2007) – sonne l’alarme sur la montée de dogmes religieux qui s’attaquent aux connaissances accumulées sur la nature, l’évolution, nos origines et l’univers. Ce constat concerne la Suisse, la Suède, les Pays-Bas, la Pologne, l’Italie, la Serbie, la Russie, la Grèce, le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France.
Des musées créationnistes, à l’image du Holy Land Experience d’Orlando, voient le jour en Suède, en Belgique, en Espagne, en Allemagne et aux Pays-Bas. Dans ce dernier pays, un millionnaire a reconstruit l’arche de Noé « grandeur réelle ». Rien de moins!
En Italie, l’ex-ministre de l’Instruction, de l’Université et de la Recherche, Letizia Morati (sous le gouvernement de Berlusconi), a émis un décret proscrivant l’enseignement de la théorie de l’évolution dans les cours de biologie au collège, avant que les réactions du public l’aient forcée à faire marche arrière.
Au Royaume-Uni, l’imprégnation du créationnisme serait devenue, en 15 ans, comparable à celle des États-Unis. En Russie, des associations créationnistes protestantes traduisent en russe des documents de l’Institute for Creation Research (ICR). En Turquie, un rapport du ministre de l’Éducation se sert lui aussi des documents de l’ICR pour justifier l’enseignement du créationnisme dans les cours de biologie.
En France, l’Université interdisciplinaire de Paris, financée par la Fondation Templeton, diffuse une approche scientifique totalement imprégnée d’une vision spiritualiste présentant la religion comme complémentaire à la science. Une perspective spiritualiste serait par ailleurs bien présente chez plusieurs Français qui disent adhérer à la théorie de l’évolution et qui partagent néanmoins des notions s’apparentant au créationnisme — tel le finalisme, l’anthropocentrisme et l’essentialisme — et contraires à l’évolution darwinienne. Aucun doute qu’on observerait la même chose ici.
Et n’oublions pas que Stephen Harper a déjà nommé un créationniste, Gary Goodyear, comme ministre d’État aux Sciences et à la Technologie!
À l’instar de ce qu’observe Faouzia Charfi dans l’islamisme, Cyrille Baudouin et Olivier Brosseau mettent en lumière le mode de pensée des créationnistes qui dénature l’approche scientifique pour mieux la rejeter avec comme objectif d’imposer leur vision du monde à l’ensemble de la société. L’un des remèdes est évidemment le raffermissement de la formation scientifique et de la pensée critique (un sujet abordé dans ce même volume par Normand Baillargeon). La laïcité est également présentée comme un moyen de freiner le fondamentalisme. Et pas n’importe quelle forme de laïcité: la laïcité républicaine que nous aurions aimé voir adoptée au Québec. La confusion alimentée par le concept de «laïcité ouverte» rappelle celle qui est entretenue par les partisans d’un dialogue entre science et religion, écrivent-ils en substance.
Une autre raison de rechercher une réelle indépendance de l’État face au religieux. Souhaitons que ce ne soit que partie remise, car les fondamentalistes ne désarmeront pas.
——
(1) Un bémol sur l’article de Québec Science: il est mal titré. Il aurait fallu écrire «L’idéologie contre la science» plutôt que «La science contre l’idéologie».
Dans ce même numéro de QS, je signe une recension critique du dernier ouvrage du primatologue Frans de Wall, Le bonobo, Dieu et nous. Sur ce même sujet, on peut aussi lire une entrevue que m’accordait De Waal pour l’Actualité du 1er mai, «Les animaux ont-ils une morale ?»
2. Je présenterai un analyse plus exhaustive de ce volume dans le numéro d’été 2014 du Québec Sceptique.
« Et pas n’importe quelle forme de laïcité: la laïcité républicaine comme nous aurions aimé voir adoptée au Québec. »
M. Baril, laissez vous guider par la raison et le raisonnable.
Demandez l’impossible, soyez réaliste ! Acceptez la décision de l’élection.
Moi aussi je trouve que des décisions ne me représente pas et pourtant j’accepte le verdict. Il faut être bon perdant.
Reprenez vous cet automne quand le premier minister va deposer son projet de Charte.
Désolé M. Brassard, mais le résultat de l’élection ne peut aucunement être interprété comme un refus de la laïcité désirée par plus de 60% de la population: http://voir.ca/daniel-baril/2014/04/17/la-charte-de-la-laicite-na-pas-nui-au-parti-quebecois/
Vous avez le droit d’être aveugle sur les résultats de l’élection d’avril dernier. C’est votre droit le plus strict.
J’ai une joie à vous confier et à vos lecteurs. Je suis heureux de vivre dans une société libre qui permet à des gens comme vous (et comme Dalila Awada) de s’exprimer dans le journal Voir.
Vous êtes deux citoyens sur le même pied d’égalité ! Vous valez ensemble la même chose !
Sans malice.
Je suis heureux moi aussi de cette liberté d’expression, mais je constate que certains et certaines l’apprécient moins…
Quant aux résultats de l’élection, il faudrait nous expliquer sur quoi repose votre opinion et en quoi les analyses des experts de la question sont erronées. Sinon, il faudra reconnaître que vous faites ce que vous me reprochez, c’est-à-dire prendre vos désirs pour des réalités.
Il y a dans le Coran de nombreux versets scientifiquement absurdes, (sans parler des versets contradictoires). Quelques-uns sont inspirés de versets de l’Ancien-Testament. J’ai compilé tout ceux que j’ai pu trouver. Cliquer sur « Minona » pour accéder à la liste.
J’ai peine à imaginer la force de la manipulation mentale nécessaire pour obtenir que des adultes continuent à croire dur comme fer que ce livre provient d’un dieu omniscient et qu’il n’a jamais été altéré depuis la soi-disant révélation de ses sourates.
La Charte des valeurs républicaines (à tonalité laïciste) du Parti Québécois n’a pas été appliqué. L’ensemble des « communautés culturelles » n’ont pas suffisamment appuyer cette Charte du PQ pour renverser la situation de manière notable en terme de suffrage.
Le Parti Québécois se cherche un nouveau chef et une nouvelle posture pour séduire et se donner en appétit pour une élection générale…dans 4 ans si la tendance se maintient.
Le Parti Libéral du Québec va « parlotter » de laïcité (pour séduire et tenter de neutraliser son aile « progressiste ») et déposer bientôt un projet de Charte avec des balises sur les « accommodements religieux » mais…non-républicain.
La Charte des droits et libertés du Canada et du Québec n’est pas modifier actuellement dans ces dispositions juridiques.
« Je suis heureux moi aussi de cette liberté d’expression, mais je constate que certains et certaines l’apprécient moins… »
Il y a des personnes qui veulent salir la réputation d’autres personnes. C’est pourquoi la diffamation est un motif raisonnable pour qu’un citoyen ou une citoyenne puissent utiliser les tribunaux pour défendre sa réputation. Nous sommes dans un État de droit. C’est heureusement écrit dans nos codes de lois. Il faut l’utiliser quand l’on juge que c’est nécessaire. Le citoyen Pierre Karl Péladeau l’a déjà utiliser contre un autre citoyen. Je ne vois pas pourquoi d’autres personnes ne pourrait pas le faire.
Pourquoi y a-t-il tant de personnes, de par le vaste monde et depuis la Nuit des Temps, qui insistent pour se mêler de ce qui ne les regardent absolument pas? De ce que préfèrent manger leurs voisins, ou de comment ceux-ci désirent occuper leur temps, ou peu importe quoi?
Ces impertinents trouvent-ils cela agréable et correct lorsqu’il arrive que d’autres cherchent à se fourrer le nez dans leurs petites affaires personnelles?
Les fondamentalistes de tout acabit (qu’il s’agisse de religion, de nutrition, d’éducation, et de tout ce qu’on voudra) sont des nuisances sociales. Et dans certains cas de sévères dangers publics. Ne pourrait-on pas simplement Vivre et laisser Vivre?
Une hypothèse scientifique voudrait qu’il existe des mondes parallèles, en sus du monde dans lequel nous évoluons et qui constitue notre réalité. Si de tels mondes parallèles existent réellement, et qu’il soit éventuellement possible d’y accéder depuis le nôtre, ce serait une grande et bienvenue avancée scientifique si l’on parvenait un jour à expédier tous les fondamentalistes dans le monde parallèle qui correspond à leur obsession donnée. Et qu’ici l’on puisse enfin vaquer à nos intérêts comme bon nous semble, bien loin de tout fanatisme.
Un rêve…
Le plus grand danger n’est pas le créationnisme, qui reste anecdotique et a peu d’influence réel sur nos vies.
Que mes voisins ne « croient » pas à l’évolution ne change, au fond, par grand-chose. D’autant plus que l’immense majorité des gens qui se disent en faveur de la théorie de l’évolution ne connaissent pas vraiment cette théorie, qui a passablement évolué (sans jeu de mot) et n’a plus grand chose à voir avec Darwin (dont la théorie elle-même est mal connue du grand public), ses mécanismes Étant beaucoup mieux connus (et diversifiés) que de son temps (lui-même ne connaissait pas la géntique, les travaux de Mendel n’ayant été publiés que 4 ans après de « L’origine des espèces » et restés longtemps méconnus (incluant par Mendel lui-même)).
Pas plus que le fait que plus de 99% de la population ne « croit » pas en la mécanique quantique et, en fait, ignore complètement son existence (à part peut-être le terme lui-même, chez une minorité). Mécanique quantique qui va à contresens total du « gros bon sens » habituel.
Idem pour la théorie de la relativité (restreinte comme générale) qui se limite chez la majorité à répéter (sans vraiment comprendre) E = mc2 (qui n’a pas en fait de lien direct avec la relativité).
En fait, le niveau de connaissance scientifique est suffisant bas qu’on peut dire que l’immense majorité des gens vit dans un monde « non scientifique »: non-Einsteinien, en fait même non-Newtonien.
Ayant moi-même une maîtrise en physique, j’ai longtemps constaté ce fait que le monde dans lequel je vit est radicalement différent (au niveau conceptuel) de celui de l’immense majorité des gens.
En soit, ce n’est pas si grave.
Ce qui est plus grave, c’est le niveau terriblement faible de connaissances historiques. Aussi bien notre histoire que celle de l’humanité. Ce qui conduit à une méconnaissance complète de la « réalité » et à la ,multiplication des « images d’Épinal » prises comme des vérités totales et complètes. Et des affirmations, complètement aberrantes, comme « le projet Drainville est un projet de laïcité républicaine ».
Presque aussi inquiétant est la totale méconnaissance de la démarche scientifique.
Si on s’inquiète du mouvement « anti-scientifique » qui anime certains courants, celui qui m’inquiète est le « climato-scepticisme » qui conduit à défendre les pétrolières et les gazières et à refuser d’agir pour freiner les changements climatiques alors que ceux-ci commencent déjà à se faire sentir et qu’ils vont aller en s’accélérant, provoquant des coûts majeurs et des bouleversements économiques, sociaux et politiques pour les siècles à venir. C’est cet anti-scientisme qui, présentement, est le plus dangereux.
Parce qu’il concerne des politiques ayant un impact réel sur nos vies et non pas une simple « croyance » qui ne concerne que les spécialistes.
On ne peut qu’être pleinement d’accord avec votre conclusion que l’éducation, et plus particulièrement l’éducation à la pensée critique, soient essentiels pour lutter contre l’obscurantisme religieux.
Par contre, lorsque vous dites «Et pas n’importe quelle forme de laïcité: la laïcité républicaine que nous aurions aimé voir adoptée au Québec.», réapparaissent encore plusieurs raccourcis malheureux. D’une part, l’opposition entre une laïcité qui serait «la» laïcité, à une laïcité dite ouverte. Or il n’y a jamais eu de définition unique de la laïcité, même en France. Le terme «laïcité ouverte» a dû être créé suite à l’appropriation du mot pour ne représenter qu’une conception de la laïcité. Ensuite, vous semblez à nouveau promouvoir ce que vous appelez la laïcité républicaine (qu’on pourrait appeler plus exactement laïcité jacobine), comme étant un concept transcendant et absolu plutôt qu’un phénomène né d’un contexte, et plus précisément d’un contexte de crise politique, où il répondait à un objectif politique précis. Dans le contexte de la guerre de la Première coalition, où la survie même de l’Etat révolutionnaire français était en jeu, il était vital de créer un culte de l’Etat et de le substituer au culte catholique. Il y a lieu de croire que ce traumatisme historique est à l’origine de la perpétuation du culte dogmatique de la République, dont on peut se demander s’il favorise vraiment l’esprit critique et la liberté de pensée, plutôt qu’une mentalité de troupeau dont il est même difficile de démontrer qu’il soit beaucoup moins dommageable que l’islamisme (qu’on pense à la façon dont il a été instrumentalisé pour justifier la barbarie de la France dans ses colonies, au nom de son action civilisatrice). Sous Sarkozy, cette même laïcité jacobine était encore au service d’un objectif politique (de droite, lié au culte de la Patrie), faisant partie intégrante de sa politique d’Identité nationale. Il est navrant de constater qu’il y ait maintenant un mouvement pour importer ce culte au Québec, sans le recul critique nécessaire.
l’évolution appartient à la science………la création appartient à la CON-SCIENCE (la conscience) la connaissance de la science……voie spirituelle