J’invite tout le monde à aller voir MARS ET AVRIL, de Martin Villeneuve. Il faut voir ce film sur grand écran! C’est un film unique et absolument magnifique tiré de ses photo-romans.
« Mars et Avril » sera à l’affiche au moins une semaine de plus !
Voici le nouvel horaire du 26 octobre au 1er novembre :
-Quartier Latin à 21h15
-Cinéma Beaubien à 13h00 et 21h30
Le film sera également présenté au Cinéma Fleur de Lys de Trois-Rivières à compter du 2 novembre !
Voyez la bande-annonce : https://vimeo.com/52035800
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Avec le lancement du long métrage Mars et Avril de Martin Villeneuve, je conclue un cycle martien qui a commencé il y a 35 ans. C’est que Martin Villeneuve m’a permis de réaliser un rêve : devenir un photographe martien!
Depuis aussi longtemps que je me souvienne, la planète Mars a eu un effet sur moi. Au début, c’était le simple fait d’être né au mois de mars, mais pour un gamin de 5 ans c’était assez pour considérer qu’il y avait un lien entre la planète rouge et moi. Les images prises en orbite de la planète rouge me fascinaient, ainsi que toute la mythologie qui l’entourait.
En janvier 1977, le magazine National Geographic a publié les premières photos de la surface de Mars prise par Viking ; c’était la première fois que je voyais la surface d’une autre planète. Bien que j’avais découvert les images de la lune des missions Apollo – des images qui me fascinent encore – jamais je n’avais senti une aussi forte impression d’y être. Alors que je n’avais pas encore 9 ans, je désirais aller sur la planète Mars plus que tout au monde. J’y pense encore.
Au début des années 90, mon meilleur ami est déménagé à Québec. Nous n’avions pas encore accès à internet, alors entre nos rares rencontres en personne nous utilisions la poste pour entretenir une correspondance délirante : lui, perdu sur la planète Mars, en proie aux assauts de la radiation, pourchassé par je ne sais plus qui, moi sur la Terre, qui tentait tant bien que mal de lui venir en aide, coincé dans un monde totalitaire où la papier était rationné. Parfois nous échangions des cassettes audio. Je conserve ces lettres précieusement, c’était une autre facette de la planète Mars : l’imaginaire.
En 1997, la Nasa a envoyé la mission Pathfinder sur Mars et comme des millions d’internautes, j’ai pu découvrir de plus belles images encore ; mon rêve d’enfant était intact malgré mes 29 ans. Alors que je travaillais à MusiquePlus, pour moi la chose la plus cool au monde c’était de voir la surface de Mars.
Je ne me souviens plus de quand, mais avant ou après 1997, j’ai fait un rêve terrible et beau. Je m’étais porté volontaire pour une mission habitée sur Mars et je savais que je ne reviendrais jamais. Dans mon sommeil, à la fois lucide et endormi, j’ai été confronté par l’impression de ma propre mort : partir loin de tout, sans possibilité de revenir, avançant à jamais dans le noir et le froid. Je n’avais pas peur, mais je comprenais que rien ni personne ne resterait après mon départ, qu’il n’y aurait que moi dans le vide de l’espace. Dans mon rêve, je ne me suis pas rendu à la surface de Mars ; je me suis réveillé, tétanisé de longues minutes par cette prise de conscience.
Début 2005, j’ai pris la décision de quitter le cinéma et la télévision. Je m’étais alors engagé à partir au Congo Est pour une ONG française. Mon meilleur ami, qui travaillais dans l’humanitaire, était en ville pour les fêtes et nous avons passé le jour de l’an à fêter dans le chalet d’un ami. Le lendemain matin, dégrisé de la veille, nous sommes sortis pour aider un ami dont la voiture était coincée dans la neige. En voulant contourner mon ami sur la route de sable et de glace, mon pied gauche a glissé et je suis tombé de tout mon poids sur ma cheville droite, le pied complètement retournée – l’os a voulu sortir de sa place, mais la botte de cuir l’en a empêché. Résultat, une entorse magistrale qui reporta mon départ pour l’Afrique de quelques semaines. Mon contrat n’était pas encore signé. Un matin, alors que je travaillais à la traduction d’un long métrage, le pied convalescent sur une chaise, le téléphone sonna pour changer le cour de mon existence. On m’offrait de prendre la production déléguée d’une grande série documentaire pour raconter comment se ferait une mission habitée sur Mars. J’avais le choix entre l’Afrique ou Mars. La planète rouge me ramena dans le giron tv-cinéma.
Pendant deux ans et demi, tout mon univers était baigné de la science et des images de la planète Mars. Alors que le tournage tirait à sa fin, nous avons organisé une « dramatisation » dans le désert du Mojave en Californie : des hommes en combinaisons spatiales marcheraient dans le désert, il ne nous resterait qu’à ajuster les couleurs et nous serions sur Mars! Deux jours plus tard, nous rencontrions Buzz Aldrin pour une grande entrevue sur l’exploration spatiale. Alors que j’étais enfant, fasciné par les images de Apollo 11, j’ignorais qu’un jour je serrerais la main du 2e homme ayant marché sur la lune. Après le départ de mon équipe pour le Canada, je repartis dans le même désert où nous avions tourné pour y être seul, pour expérimenter le silence et la chaleur, mais aussi pour prendre des photos. Pour ce faire, j’avais loué un appareil argentique Hasselblad panoramique.(Quelques photos de ce voyage.) Je capturai alors le désert sans artifice ni acteur, de grandes étendues sèches, sans traces d’humanité, une « désolation magnifique » comme avait dit Buzz lors de ses premiers pas sur la Lune. La plupart de ces images sont encore dans mes cartables de négatifs, comme beaucoup de mes photos, de petits diamants de mémoire prisonniers dans une voute de l’oubli.
Quelques années plus tard, je repris contact avec Martin Villeneuve. Notre première rencontre était loin derrière, mais essentiellement liée à son projet de photo-romans Mars et Avril. Martin m’avait alors contacté au cours de la préparation de son premier photo-roman, et au fil des ans, il a partagé avec moi certains moments forts de cette aventure ; quand le projet de film a mûri il m’est apparu évident qu’il aurait besoin d’images de la surface de Mars. Ça tombait bien, j’en avais! J’offrai donc à Martin de numériser les négatifs des paysages du désert du Mojave que j’avais capturé en panoramique. La résolution des négatifs était telle qu’il y avait largement de quoi les utiliser pour y ajouter des images de synthèse. Après des années de travail acharné, son film a enfin été lancé à Montréal après un passage remarqué dans les festivals étrangers. C’est avec un plaisir certain que j’ai assisté à cette projection. Après ce voyage unique dans son imaginaire, je pris le temps de littéralement revenir sur terre en lisant le générique. Tous ces gens ont été inoculés par la passion contagieuse de Martin et ils ont embarqué dans cet extraordinaire voyage pour y apporter un peu de leur talent. Bravo!
Votre humble serviteur y est mentionné comme photographe de Mars, une bien belle récompense après 35 ans à rêver de la planète rouge. C’est ainsi que se conclue l’histoire de Mars et moi. Je souhaite donc longue vie à Mars et Avril.
Merci Martin!