J’ai vu à retardement «Les affamés» de Robin Aubert. Je ne suis sans doute pas objectif puisque j’aime Robin d’amour, mais ce film est à voir et à revoir. À mijoter.
Les médias de masse ont sans doute insisté sur la dimension gore ou zombie du film… Mais il s’agit plutôt d’une fable philosophique, une sorte de dystopie comme Zamiatine et Orwell en ont produit… Ou plus précisément encore, une version cinématographique du chef d’oeuvre de Cormack McCarthy, The road.
Car qui sont les zombies du film de Robin? Ils sont affamés, ils n’ont plus aucune loyauté, aucune fidélité envers leurs proches. Et dans leurs transitions vers l’inhumanité, ils sont capables de manipulations, voire de sensibilité et même d’altruisme. Puis, lorsque devenus zombies, ils et elles deviennent des animaux, dans le sens primitif et violent du terme…
Mais il semble demeurer une part d’humanité en ces bêtes: ils et elles se prosternent et construisent des sculptures composées d’objets du quotidien… Qu’est-ce que ces amas, ces salmigondis de choses agglomérées représentent selon vous? J’y ai vu une sorte de critique du consumérisme et de la passivité morbide des masses devant l’avoir qui supplante l’être. Devant l’échec du Matériel pour parler comme Daniel Bélanger…
La déshumanisation nous guette. Elle nous gruge dans notre quotidien. Du chauffeur de la STM qui frôle volontairement les cyclistes aux big shot qui pratiquent l’évasion fiscale en votant Justin Trudeau; de Philippe Couillard qui revient d’Arabie saoudite millionnaire en plaçant sa richesse à Jersey et Guernesey pour éviter de payer sa «juste part» pour ensuite affaiblir le réseau public qui l’a constitué en neurochirurgien… jusqu’à celui qui s’achète un bébé par gestation par autrui (GPA) en payant une pauvre femme qui loue son corps pour survivre…
Il y a plusieurs scènes immortelles dans Les affamés: celle de la comédienne Brigitte Poupart qui, au son de Marjo, s’arrête dans une rue principale de village pour achever un des zombies qui partout, gagnent du terrain… Il y a ces plans de collines inclinées, ces insectes qui marquent le temps, ces chevaux lâchés fous dans un monde transformé en abyme, ces œuvres collectives construites par les zombies… Et il y a aussi cette familiarité, ces scènes où l’on comprend que le basculement vers la barbarie se fera par à-coup, en reconnaissant que ces nouveaux zombies furent la semaine dernière ou l’autre avant nos voisins, nos amis, nos enfants, nos parents… nos proches!
Alors? Qui sont les Affamés de Robin Aubert?
je te lis et tu as le style pour pondre un roman préfacé par Robin Aubert.