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Embellie péquiste

 

 

Ce matin, un sondage CROP-La Presse confirmait, à quelques points près, les résultats d’un Léger Marketing-QMIdatant du 16 février dernier: la CAQ continue de perdre des appuis; le PQ en gagne; le PLQ fait de la bicyclette politique stationnaire…

Dans le CROP, le PQ est à 30% (+ 9 points en un mois), le PLQ à 29% (idem) et la CAQ à 26% (- 5 points). (Dans le Léger Marketing, les chiffres étaient respectivement de 29%, 29% et 28%.)

Chez les francophones, par contre, le PQ est à 36%, la CAQ à 31% et le PLQ à 18%. (Le Léger Marketing plaçait le PQ à 35% et le CAQ à 32%).

Notons que pour le PLQ, ces résultats faiblards auprès des francophones est une tendance lourde depuis plusieurs, plusieurs mois.

Constat: à l’instar de la situation politique au Québec depuis l’arrivée sur scène de la CAQ, l’électorat se fait changeant. Hormis les noyaux durs respectifs du PQ et du PLQ, l’électorat demeure volatil. De toute évidence, il magasine.

Mais ça magasine surtout chez les électeurs traditionnellement péquistes. À son apogée l’an dernier – et, en fait, dès la mise sur pied de la coalition il y a plus d’un an par François Legault et Charles Sirois -, la CAQ grugeait nettement plus d’appuis dans les talles péquistes que libérales.

On peut donc avancer cette hypothèse: les appuis perdus par la CAQ retournent lentement au bercail du Parti québécois. Du moins, pour le moment. Puisque, encore une fois, la situation est volatile.

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La CAQ perd des plumes

 

 

Les facteurs de ce mouvement à la baisse sont sûrement nombreux et variables – l’électorat, par définition, n’étant pas monolithique.

Au-delà de la fin des «chicanes» publiques au Parti québécois et du syndrome «béton» de Pauline Marois, il importe de regarder du côté du parti qui perd des plumes pour le moment. Soit la CAQ.

On parle beaucoup du «facteur» François Rebello – l’ex-député péquiste passé à la CAQ et qui, depuis, enligne les déclarations contraires aux positions de son nouveau chef. Or, le facteur Rebello est plutôt un reflet de la confusion et de la cacophonie qui s’est installée au sein de la CAQ depuis quelques semaines.

Sans oublier toute cette histoire de financement de la CAQ. Dans une seule firme d’avocats, 46 de ses membres ont donné généreusement à la Coalition Avenir Québec. Le problème étant la concentration prononcée des dons dans une seule firme. Et pas n’importe laquelle: celle dont le patron est également responsable du financement de la CAQ. Dans une ère où bien des citoyens en ont soupé de cette «vieille» manière de faire de la politique, l’étiquette «frais et nouveau» de la CAQ en a souffert. C’est certain.

La CAQ a également échoué dans sa tentative d’être reconnue comme groupe parlementaire à l’Assemblée nationale.

Quant à son discours populiste appelant à la confrontation avec les syndicats,  il est peut-être populaire auprès de l’ancienne base adéquiste. Mais dans une population où le taux de syndicalisation des travailleurs frôle les 40%, ça commence à faire pas mal de monde à indisposer.

Sans compter qu’à mesure que le temps passe, les positions de la CAQ sont mieux connues de l’électorat. Et, pour le moment, certaines semblent commencer à avoir de la difficulté à passer.

Maintenant, cette difficulté est-elle ou non passagère? Comme dirait le chef caquiste: «on verra». Les prochaines semaines et les prochains mois le diront. D’autant que les 20 et 21 avril, la CAQ tiendra son congrès de fondation et sa plateforme électorale sera éventuellement peaufinée.

Quant aux candidats à venir, eh bien, si la CAQ devait perdre quelques plumes supplémentaires dans les prochains sondages – un «si» pour le moment -, il est évident que le recrutement de candidats dits «vedettes» deviendrait d’autant plus difficile pour François Legault.

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L’avertissement de Justin Trudeau

 

 

Il y a également un nouveau joueur qui s’est invité dans la dynamique politique québécoise.

Son nom est Stephen Harper. Plus précisément, le Stephen Harper majoritaire. Celui qui vire de plus en plus à droite tout en ignorant de plus en plus le Québec.

Au point où récemment, nul autre que Justin Trudeau déclarait en entrevue que si le Canada devenait celui de Stephen Harper – «fermé, anti-intellectuel et mesquin» -, il songerait même «peut-être à faire du Québec un pays».

Évidemment, aussi étonnante fut sa déclaration, elle ne faisait aucunement un souverainiste du fils de Pierre Trudeau et aussi, député du Parti libéral du Canada!

Dans les faits, Justin Trudeau lançait plutôt un avertissement au Canada anglais et aux fédéralistes.

Son avertissement, décodé, allait comme ceci: faites attention, ce qui se passe au fédéral avec le gouvernement conservateur pourrait, à terme, alimenter le mouvement souverainiste.

(Voir aussi ma chronique «What does Canada want?»).

Mais comme le Québec est en année électorale et que le PQ, de toute manière, ne s’engage pas à faire la souveraineté s’il prend le pouvoir, l’attitude générale du gouvernement Harper semble alimenter le PQ en premier lieu.

Pourquoi? Parce que le PLQ et la CAQ ne disent mot sur le sujet. Ou si peu.

Ce n’est donc pas un hasard si depuis quelques semaines, Pauline Marois joue directement sur ce terrain – celui de la critique du gouvernement Harper. Un terrain laissé vacant par le PLQ et la CAQ.

Dans le cas des libéraux, c’est que, hormis le dossier du registre des armes d’épaule, les libéraux fédéralistes craignent toujours de trop monter l’électorat contre Ottawa.

Quant aux caquistes, François Legault et Charles Sirois – son dorénavant «silent partner», si vous me passez l’expression anglaise – ont carrément choisi d’enterrer une question nationale réduite dans leurs discours à des «chicanes» inutiles. Confirmant ainsi que la CAQ, dans les faits, est un parti fédéraliste prônant le statu quo… comme le PLQ de Jean Charest.

Comme je l’écrivais ici, si Mme Marois s’en prend autant à Stephen Harper, c’est essentiellement pour tenter de positionner le PQ comme le parti apte à porter un discours nationaliste classique pendant que ses deux principaux adversaires refusent de le faire.

Bref, Mme Marois s’adapte aux nouvelles circonstances face au virage à droite de plus en plus en plus marqué du gouvernement Harper. Ce faisant, pour le moment, elle profite du silence libéral et caquiste sur le sujet.

Un silence qui, par ailleurs, s’étend jusqu’au dossier linguistique. Et ce, malgré l’inquiétude croissante chez les francophones quant au recul du français comme langue de travail, du commerce, d’accueil, de l’affichage, etc.

 

Rien n’est joué…

Pour le moment, si l’on prend les résultats du dernier Léger Marketing et le dernier CROP, on obtiendrait quelque chose comme un gouvernement péquiste minoritaire.

Or, si M. Charest voulait avoir les deux mains sur le volant, dans un parlement où le PLQ et la CAQ seraient à l’opposition (un à l’opposition officielle, et l’autre comme second, mais qui sait lequel?), un gouvernement péquiste minoritaire aurait à toute fin pratique les deux mains attachées derrière le dos. Attachées par le refus prévisible des libéraux et des caquistes de voter pour la plupart des politiques proposées par le PQ. Dont le renforcement de la Loi 101, l’application de celle-ci aux cégeps, l’adoption d’une constitution québécoise, d’une charte de la laïcité, etc., etc., etc.

Mais attention.

En cette fin février, rien n’est joué. La situation est volatile.

Les plaques tectoniques de la politique québécoise bougent. Mais elles ne semblent pas savoir encore tout à fait dans quelle direction elles entendent aller…

Pour le moment, la seule certitude est que si la CAQ continue de perdre des appuis, ces derniers iront en bonne partie, ou retourneront, au PQ…

Mais si la CAQ remonte….

Bref, comme on le voit, la lecture de la boule de crystal est un sport risqué. Surtout par les temps qui courent…

Et il l’est en tout premier lieu pour le premier ministre Jean Charest, lequel n’est pas sans savoir qu’à cause de la commission Charbonneau, il devra de toute manière déclencher des élections avant ses audiences les plus potentiellement coûteuses, politiquement, pour son gouvernement.

Ce qui, on dirait bien, laisse ce printemps ou le début de l’automne…

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La diaspora péquiste rentrera-t-elle au bercail?

 

 

Pour Mme Marois, la question n’est pas simplement cosmétique.

Le départ l’an dernier des Lisette Lapointe, Pierre Curzi, Louise Beaudoin et Jean-Martin Aussant a fait très mal. Tous de grosses pointures dans le mouvement souverainiste, pas seulement au PQ. D’autant plus que Jacques Parizeau fait aussi partie de ceux qui s’opposent farouchement à l’approche Marois sur la souveraineté.

Or, on dit que M. Curzi réfléchit à son avenir. Mme Beaudoin ne se représentera pas. M. Aussant a formé un nouveau parti indépendantiste – Option nationale – et semble peu impressionné par le nouveau «comité» du PQ sur la souveraineté tant que le parti ne prendra pas une position plus claire sur son option.

Quant à Mme Lapointe devrait annoncer d’ici deux semaines ce qu’elle fera à la prochaine élection.

À suivre…