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Climat: l’urgence d’agir

Nous n’avons pas ce luxe d’attendre que l’individu moyen accepte le danger imminent, tangible et catastrophique qui nous guette dans cette ère de surproduction et de surconsommation, qui mène à des quantités de pollution qui pourraient effectivement décimer la planète ou des parties entières de celle-ci.

Tout d’abord, pour qu’un quelconque représentant du peuple, décideur ou élite politique puisse attire mon attention et être considéré crédible, il faut que celui ou celle-ci considère comme première priorité l’urgence de réagir rapidement à la situation environnementale qu’on pourrait qualifier, selon un consensus scientifique mondial, de catastrophique.

Cette urgence est particulièrement flagrante lorsqu’on réalise la lenteur de la réaction humaine générale concernant des évidences qu’on pourrait qualifier de crasses. Prenons la situation des femmes dans le monde : il  aura fallu plusieurs millénaires (des millénaires) de coexistence pour que, dans certains endroits bien spécifiques et bien rares du globe, la femme soit considérée comme l’égale de l’homme, via des combats lents, douloureux, dans lesquels des femmes brillantes ont dû passer des vies entières à convaincre des hommes imbéciles mais puissants ou satisfaits de leur situation qu’elles étaient leur égale. On retrouve une situation similaire avec les Noirs, par exemple, où, aux États-Unis, cela a pris plusieurs siècles avant que les Noirs aient pu convaincre leurs concitoyens qu’ils n’avaient pas vraiment le droit de les traiter comme des bibelots ou des charriots ou un balai.

Si je me permets cette parenthèse d’inégalités sociales c’est pour montrer que le temps de réaction face à une aberration morale est particulièrement lente, mais que dans les deux cas mentionnés précédemment, il ne s’agissait pas de danger existentiel à proprement parler : c’est-à-dire qu’une société pouvait continuer à fonctionner en traitant les femmes comme des ovaires à couvrir et les minorités ethniques comme des esclaves ponctuels sans valeur. Bien que ce soit immoral, et horrible, et abject, ça ne mettait pas en péril l’ensemble de l’humanité.

Nous n’avons pas ce luxe d’attendre que l’individu moyen accepte le danger imminent, tangible et catastrophique qui nous guette dans cette ère de surproduction et de surconsommation, qui mène à des quantités de pollution qui pourraient effectivement décimer la planète ou des parties entières de celle-ci. Nous ne parlons pas d’une centaine d’années d’adaptation à une idée, mais bien d’une quinzaine d’années pendant lesquelles il nous faut agir plutôt que convaincre. Nos élites politiques sont très préoccupées par l’identité et le développement économique, mais la vérité est que s’ils n’agissent pas aujourd’hui, nous sommes condamnés demain. Nous sommes déjà en retard.

Pour pallier à ce retard, je suggère qu’on fasse fi de certains principes démocratiques et qu’on exclut systématiquement les discours des climato-sceptiques dans les médias et l’arène politique. C’est aberrant, me direz-vous, tout le monde à le droit à son opinion, censurer les climatoscetpiques créerait une forme de tyrannie discursive, non? Eh bien, c’est qu’on y est déjà. Sans que j’adhère à leurs principes, les marxistes sont systématiquement exclus de toute conversation économique dite sérieuse sur des plateaux de télévision ou dans les hautes sphères des débats politiques, ou le même mot « Marx » évoque une impertinence naïve de celui qui le prononce et le place au rang des impertinents dont on peut rire sans gêne.

L’exemple ne se limite évidemment pas au marxisme mais se présente dans de nombreuses autres sphères, ou certains discours considérés comme « radicaux » ou « passés » sont tout simplement balayés du revers de la main. Le même sort doit être réservé aux climato-sceptiques et nous devons mettre de la pression systématique sur n’importe quel prétendant au pouvoir de se prononcer clairement et sans équivoque là-dessus. De la même manière que, pendant une époque, il fallait absolument savoir si un politicien québécois étaient souverainiste ou fédéraliste, il faut absolument connaître les intentions écologistes des politiciens à tous les palliers du gouvernement, et ridiculiser ceux qui n’en ont pas une conscience et une connaissance développée. Ils sont impertinents. Pire, ils nuisent. Nous ne parlons pas d’une vision de société mais de la survie de notre espèce.

Il faudra aussi considérer le végétarisme comme option viable ou instauter des politiques protectionnistes locales concernant la viande: si l’aspect éthiquement injustifiable des conditions d’élevage atroces et des morts douloureuses d’animaux capables d’intelligence et de douleur ne suffit pas à une population pour qu’elle agisse par compassion, les méfaits de la suproduction animale mondiale devraient nous inquiéter et nous inciter soit à cesser complètement de manger de la viande, soit de recommencer à la produire et à la consommer localement, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui: les paquets de viande qu’on achète aux supermarchés, ne laissant aucune trace du processus horrible qui a mené à leur disponibilité sur leurs tablettes, sont composés de dizaines d’animaux venant de dizaines de villes différentes. L’engrais nécessaire à la malnutrition efficace des animaux ainsi que leur transport causent un tort énorme à la planète entière, et l’élimination de la viande produite en masse dans notre régime améliorerait considérablement la situation écologique actuelle qui est, rappelons-le, particulièrement catastrophique. Encore une fois il ne s’agit même pas de principes moraux qui accepteraient le droit à ces animaux de vivre dans des conditions « acceptables », ce qui est loin d’être le cas, mais de constater que le rythme effrené actuel de production animale est en train de mener à notre perte collective.

L’heure est grave: il faut changer radicalement nos attitudes collectives et individuelles et noyer dans la honte les adversaires politiques et commerciaux qui veulent ralentir le changement drastique nécessaire à notre survie collective.