Mon collègue Philippe Couture a répondu au questionnaire identitaire de Mani Soleymanlou. Le tout se fait dans un contexte théâtral intéressant que je vous laisserai lire dans le cadre de son billet de blogue. Étant moins mordu de théâtre, je laisse l’autorité locale sur la chose vous en parler. Entre temps, je fais appel à mon nombrilisme et je réponds à cet intéressant questionnaire de Mani Soleymanlou.
Quel est votre prénom ou votre surnom ?
Joseph. Je n’ai jamais vraiment eu de surnom, sinon un « Jojo » affûblé par ma mère et une collègue en journalisme, jadis.
Comment définissez-vous «l’identité» ? Ce mot a-t-il un sens pour vous?
Je vois l’identité comme un terme initialement personnel qui peut être monopolisé par des instances généralement malveillantes qui se cacheront sous le couvert du bien collectif. L’identité, c’est le résultat mouvant et flexible de multiples appartenances et de différents gestes qui finissent par nous forger. Il a un sens pour moi, ce mot, dans le sens que j’ai la profonde impression que l’identité est un buffet à volonté et non pas un plat qui nous est servi quand on naît.
Il y a un effet paradoxal intéressant, où, pour moi, quand je pense à mon identité, je vais trouver une caverne riche qui liera mes origines juives, marocaines, françaises, québécoises, mais qui dépassent également de loin les seules notions nationales. Dans la définition de mon identité, mon amour pour la série BD Preacher a autant d’importance que mon héritage marocain. Ma fascination littéraire pour Laferrière ou Beigbeder ou Roth est plus importante que mon attachement à l’Héxagone. Mon amour du web me définit davantage que mon attachement à la Belle Province, même si les deux sont intimement liés. Ça, c’est ma richesse. La grande ironie, c’est que, dans la conception limitée d’esprits appauvris par une trop grande proximité idéologique avec l’opportunisme politique vidé de tout coeur, tout ça disparaît: je suis une communauté culturelle bien spécifique, bien casée, bien rangée.
Quand je parle de mon identité, j’ai l’impression de regarder l’Univers. Quand on parle de mon identité, j’ai l’impression qu’on essaie de fixer un grain de sable.
Dites-vous que vous avez une certaine identité? Et alors, vous êtes quoi? Québécois? Moitié Chinoise-moitié Sénégalaise? Souverainiste? Musulmane? Pragmatiste de droite? etc…
Je suis un Montréalais de moins en moins attaché à une métropole complaisante et paresseuse, aux origines juives qui me rattachent surtout à un humour juif, à ce sentiment de culpabilité qui y règne souvent, à ses grands penseurs et comiques comme Philip Roth, Jerry Seinfeld et Woody Allen. Je suis français dans le sens que mes parents le sont, et je suis américain dans le sens que j’y suis né, et que j’ai été abreuvé de cette culture, autant la culture convenue de Disney à la contre-culture importante de la dissidence et du web. Et je suis un homme, I guess.
Qu’avez-vous à dire sur votre lieu de naissance en une phrase, une image ou tout un essai?
Je pense que nous allons assister, de notre vivant, à la fin d’un empire, qui à la différence des autres, aura été la chute la plus documentée de l’Histoire de l’humanité. J’ai l’impression que nos petits-enfants vivront dans un monde où même l’idée de l’Amérique n’est qu’un souvenir lointain et improbable.
Quel cliché sur votre lieu de naissance vous fait-il rire? Quel cliché sur votre lieu de naissance détestez-vous?
J’imagine que c’est le cliché du gros américain stupide et illettré. Bien que ce soit réel et répandu, et que le système médiatique, politique et économique mis en place a tendance à figer les gens dans une classe sociale définie en décourageant toute forme de pensée critique ou de solidarité maintenue, il est illusoire de croire que 300 millions d’individus peuvent être rassemblés dans le même panier identitaire et limité. Mais bon, l’Amérique est une promesse, et une promesse n’est généralement qu’une porte qui mène vers une chambre où dorment le mensonge et la déception. À mon avis, la porte est désormais grande ouverte.
Quel est votre souhait le plus cher pour la société québécoise ? Quel avenir collectif vous souhaitez-vous ?
Je souhaiterai la fin d’un système en apparence démocratique qui ne favorise réellement que l’échange du pouvoir ponctuel entre deux partis habitués à se lancer la balle autoritaire. Je souhaiterai que la ligne de parti disparaisse, pusiqu’elle est une sérieuse entrave à la discussion politique dans un cadre démocratique. Je souhaiterai qu’on ne voit pas notre pays comme un compte en banque qu’il faut absolument stabiliser. Je souhaiterai qu’on arrête de viser toujours plus bas pour penser à nos slogans politiques, à nos initiatives, à nos compressions, à notre rapport avec l’autre. Je souhaiterai que l’Étranger ne soit plus perçu comme l’ambassadeur potentiel d’une culture mignonne qui souhaite à tout prix se faire intégrer dans une société parfaite et bienveillante qu’il ne faut pas trop perturber. Je souhaiterai que le Québec mette fin à son éternel selfie pour réaliser un énorme panoramique sur un monde qui peut l’inspirer et qu’il pourrait influencer. Aussi, je souhaite la mort de l’hiver.
Quelle est la question qui manque ici ? Celle à laquelle vous auriez vraiment aimé répondre ? Celle que l’on ne pose pas assez souvent ?
I don’t know, man.
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Les questions:
Quel est votre prénom ou votre surnom ?
Comment définissez-vous «l’identité» ? Ce mot a-t-il un sens pour vous?
Dites-vous que vous avez une certaine identité? Et alors, vous êtes quoi? Québécois? Moitié Chinoise-moitié Sénégalaise? Souverainiste? Musulmane? Pragmatiste de droite? etc…
Qu’avez-vous à dire sur votre lieu de naissance en une phrase, une image ou tout un essai?
Quel cliché sur votre lieu de naissance vous fait-il rire? Quel cliché sur votre lieu de naissance détestez-vous?
Quel est votre souhait le plus cher pour la société québécoise ? Quel avenir collectif vous souhaitez-vous ?
Quelle est la question qui manque ici ? Celle à laquelle vous auriez vraiment aimé répondre ? Celle que l’on ne pose pas assez souvent ?