BloguesJulien Day

Sommet, panda et randonnée urbaine

Je le dis d’emblée, je ne comprends absolument pas que l’on puisse croire, ne serait-ce qu’une fraction de seconde, que le Sommet de l’Éducation ne soit autre chose qu’un exercice de relations publiques. De la poudre aux yeux, voilà tout. On assoira autour de la table les mêmes acteurs, qui tiendront les mêmes discours, les mêmes pseudos-débats (de sourds) que ceux de 2012 auront lieu, et les mêmes chroniqueurs écriront les mêmes conneries qu’on a déjà entendues milles fois.

Franchement, je ne vois vraiment pas comment les recteurs, le conseil du patronat, l’ASSÉ, la FEUQ et le gouvernement provincial pourraient en venir à un « consensus », tel que défini par Pierre Duchesne, connaissant l’énorme fossé idéologique et économique les séparant. On sait déjà qui demandera quoi, et on peut se faire une bonne idée du « consensus » qui s’en dégagera, surtout avec les indices laissés dans les derniers jours où le mot indexation a été prononcé plus souvent qu’à son tour.

Cela dit, le PQ et Pauline Marois, qui étaient au bord du gouffre à la même date l’an dernier, sont ressuscités et se sont emparés du pouvoir grâce à leur appui aux étudiants pendant le printemps, carrés rouges ou pas, et il est permis de croire qu’en se mettant à dos une bonne partie de ceux qui leur ont évité la débandade aux élections, la peau du PQ minoritaire ne vaudra pas grand chose lors des prochaines. Voilà un possible rapport de force que les étudiants n’avaient pas face au PLQ, qui lui semblait gagner des points au fur et à mesure que Jean Charest serrait la vis et durcissait le ton dans le dossier.

Bref, bien que je ne comprenais pas du tout l’utilité de s’asseoir avec les bonzes du PLQ au printemps, trouvant même que l’exercice ne faisait qu’affaiblir au bout du compte un rapport de force que les étudiants contre la hausse avaient méticuleusement construit, il est difficile de taxer de facto le ministre Duchesne de la même mauvaise foi que les ministres du PLQ. On ne pourrait blâmer ceux qui suivent le dossier du coin de l’oeil de voir un refus de l’ASSÉ d’y participer comme de la mauvaise foi, justement.

Surtout, on oublie souvent de le rappeler, l’ASSÉ et leurs membres avaient délibérément choisi de miser sur les élections et le cirque entourant celles-ci pour régler le conflit, les associations étudiantes en grève votant massivement pour un retour en classe au mois d’août. Rappelons-nous aussi les affiches claironnant que « nous avons bloqué la hausse » à l’élection du PQ.

Selon moi, le problème il est là. En légitimant les élections et en se fiant sur leur résultat, l’ASSÉ a décidé de mettre de côté « la rue » et l’approche combative au profit de la politique électorale, et il devient contradictoire et enfantin aux yeux de plusieurs de jouer sur les deux tableaux. À force de crier à l’illégitimité des institutions d’un bord, et de crier le contraire de l’autre, l’ASSÉ s’est brûlée et doit maintenant composer avec un sommet aux apparences de cirque, qu’elle a elle-même endossé.

En écoutant les appels au calme pour les élections, entre autres de Québec Solidaire, dont l’exécutif de l’ASSÉ semble être le club-école, l’association étudiante s’est retrouvée avec la situation la plus « gagnante » qu’il aurait été permis d’imaginer, et pour bien des gens, il serait mal vu de cracher dessus rendu là.

Randonnée urbaine et panda indigné

La dernière chronique de Simon Jodoin, dans le Voir de jeudi, a fait couler beaucoup d’encre. Bien qu’il rejoigne à certains égards quelques point mentionnés plus haut, je ne partage évidemment pas son point de vue par rapport au sommet. Ses boutades concernant les « randonnées urbaines » et « l’indignation permanente » de l’ASSÉ ont été bien mal reçues, et il n’en fallait pas plus pour qu’on le taxe de paternalisme condescendant.

Cela a d’ailleurs donné lieu à un échange un peu surréaliste sur les médias sociaux, avec le grandiloquent Anarchopanda Pour la Gratuité Scolaire. Je n’enlève rien à ce dernier, qui a reproché à Simon ce que bien des gens lui ont reproché après lecture de sa chronique, mais le côté burlesque de l’échange m’a frappé. Se faire taxer de paternalisme et de condescendance, c’est une chose, se faire reprocher de ne pas prendre des gens au sérieux par un représentant (qu’il le veuille ou non) de ceux-ci, déguisé en panda et empruntant un ton à la Passe-Partout en parlant de lui à la 3e personne, c’en est une autre.

Je me rappelle, à l’annonce du non-respect de la très sérieuse loi 78 par l’ASSÉ, j’étais avec mon père et on suivait le tout à la télé. Il m’avait demandé pourquoi il y avait un panda géant qui faisait des tatas derrière les portes-parole. J’ai dû rougir parce que je n’avais aucune idée quoi lui répondre, une loi brimant des droits fondamentaux nous étaient tombée dessus, et il y avait une mascotte panda à la télé pour contester la chose.

Je n’enlève rien à l’intelligence du monsieur en dessous du masque, mais un moment donné, il y a une limite à s’étonner du peu de sérieux que l’on nous accorde quand on est déguisé en toutou. Et franchement, une simple rétrospective des très médiatisées caricatures de YGreck sont suffisantes pour se convaincre qu’on se fait peut-être plus de tort que de bien, niveau crédibilité.

Mais, bon. Faut dire que moi aussi, je suis un peu grincheux.