Si le jeudi a été un peu trop festif pour notre pauvre carcasse, ce n’est rien à côté de ce que nous réservait le vendredi…
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La journée commence sur les chapeaux de roue avec une course contre la montre pour accrocher Milk & Bone qui jouent au Cabaret du Café des Artiste. 140 places. C’est clair qu’il ne faut pas manquer ça et le ton de la journée est donné. FOMO quand tu nous tiens.
La Cabaret aux allures de vieux pub est situé dans un sous-sol. Il n’y a aucune fenêtre, donc aucune lumière du jour ni repère de temps. Dans un tel lieu, le duo nous souhaite «bonsoir» par erreur et nous enveloppe rapidement dans leur folk-electro doux comme un verre de lait chaud. On est p’us dans un cabaret, mais dans un cocon tout fluffy. Juste un peu imparfait pour être cute. On interrompt d’ailleurs une pièce…parce que l’une des demoiselles n’avait pas fermé son cell!
À la sortie de la salle, on plisse les yeux et on se dirige vers un dépanneur. Pas pour s’acheter un Gatorade à l’orange ni un p’tit sac de fromage salé, mais dans l’espoir de voir jouer Fred Fortin dans un entrepôt à bières. Eh oui, le gars est en ville avec Galaxie et on a annoncé via l’application mobile du Festif un show surprise. Évidemment, tous accourent, mais seuls quelques rares chanceux ont le privilège d’assister à l’événement. Face à la porte fermée, c’est à ce moment qu’on devient tous un peu freak avec notre cell. Aussitôt qu’il vibre, on se demande si on annonce pas Gros Mené dans un pit de garage ou quelque chose du genre…
Enfin, ceux qui manquent Fortin peuvent se rendre à la scène gratuite pour voir Mara Tremblay (pas pire backup, vous en conviendrez). Soulagée de voir une foule nombreuse, même en milieu d’après-midi, la dame frappe droit au coeur. Elle se livre toute entière, aborde l’amour et sa bipolarité, avec une honnêteté qui font oublier les nuages et les 10 degrés. Fait intéressant, le spectacle prend les allures d’un party de famille: Le fils de Mara joue de la batterie, son amoureux, Sunny Duval, est à la guitare, sa cousine est la roadie et sa bru s’occupe de la merch.
Après Mara, j’ai le coeur ben plein de tendresse. mais y’a encore de la place pour du gros fun. Car s’il y a un moment qu’on attend cette année, c’est cette fameuse soirée ska avec Planet Smashers et Reel Big Fish. Pas que le style soit particulièrement en vogue ces temps-ci, ni qu’il était particulièrement apprécié à Baie-Saint-Paul au plus fort de sa popularité il y a une quinzaine d’années (dans mes souvenirs, il y avait genre 4 fans de ska et on les écoeurait pas mal). Mais ces deux groupes sont dans une classe à part. Comme Alpha Blondy l’an passé qui avait donné le goût à tout le monde de virer rastafaris.
Dès la première chanson, le chanteur des Planet Smashers et son éternelle énergie de gamin réussit sans aucun problème à embarquer le public dans le trip. C’est comme si tous les fans de ska refoulés au plus profond de nous ressortaient en même temps pour s’amuser. On croise même un type déguisé en licorne. Tsé, le spectacle a lieu dans la cour d’une école primaire!
Pendant Surfing in Tofino, le groupe parvient à faire asseoir tous les festivaliers, à l’exception de quelques rabat-joie probablement rongés par la haine (ou p’tête l’arthrite). Tout ça pour mieux les faire sauter dans les airs (et faire revoler les verres de bière). Un maudit beau moment!
1000 personnes assises, une debout.
Juste avant Reel Big Fish, l’attention est attirée vers les escaliers de secours de l’école primaire où, tiens donc, une fanfare du Rhode Islands se fait aller gaiement. La vingtaine de musiciens du What Cheer Brigade se retrouvent vite au milieu de la foule, devant la scène. Du ska, une fanfare, celui qui ne sourit pas ce soir est mort par en-dedans.
Les californiens Reel Big Fish poursuivent le party là où les Planet Smashers ont laissé. L’éxécution est sans faille et la soirée culmine avec trois bombes en finale (Sell Out, Beer (entrecoupée d’un bout de Self Esteem d’Offspring!) et l’incontournable reprise Take On Me.
Chapeau au Festif d’avoir programmé ce flashback ska. C’était risqué, un peu décallé, mais direct dans le mille!
On skank ensuite jusqu’au sous-sol de l’église pour voir Galaxie. Un autre moment fort attendu du festival. Si je me souviens bien, la dernière fois que le groupe avait joué à Baie Saint-Paul, c’était en 2002, en ouverture d’un petit festival punk. Depuis, Galaxie est devenu une putain de force de frappe. Un monstre qui a ouvert pour les Stones devant 90 000 personnes et qui joue deux semaines plus tard ici, devant 250 personnes. Le Festif, tu l’as l’affaire!
En plus du power trio (Langevin à la guitare, Fortin-le-gars-qui-a-joué-dans-un-entrepôt-de-bières-trop-petit à la basse et l’autre Fortin à la batterie), Galaxie aligne un claviériste, un percussionniste et une choriste à maracas. Maracas? Ouep. Depuis les deux derniers albums, Galaxie a raffiné son gros rock du Lac pour le métisser de blues, d’électro et quasiment de musique tribale, mais jamais au détriment de l’impact (un tour de force).
Galaxie, carburant au cognac à même la bouteille, donne une incroyable leçon de rock ce soir, partant souvent sur des longs jams totalement fous. Pour couronner le tout, on a droit à Crocodile, une reprise des Dales Hawerchuk (avec l’un des frères Séguin à la voix, de passage en ville). Regard rapide sur mon cell. Ok, je n’ai pas manqué un show surprise des Dales dans la parking de l’aréna.
Après 1h15 de décibels, on sort de la salle secoué…et la soirée n’est pas terminée. On tombe nez à nez avec une fille qui crache du feu. Au loin, des échos de cuivres. L’infatigable fanfare se dirige vers l’église! Le Festif, que ça s’appelle.
On rassemble ce qui nous reste de forces pour accrocher Mononc’ Serge qui s’époumone au centre communautaire. Il est près de 2 heures du matin, mais 150 personnes chantent Saskatchewan et Coupe Couillard à tue-tête.
Pendant ce temps, la fanfare est installée sur les marches de l’église devant un autre 150 personnes. On l’entend dans toute la ville. Les résidents qui ne trippent pas sur le festival (ou ceux qui veulent faire fermer l’un des seuls bars de la ville pour cause de bruit) doivent a-do-rer ça. Mais outre les pouets de tubas, il n’y a rien pour irriter personne. Parce que une chose surprend au Festif: les festivaliers, qui ont déjà été qualifiés de «clientèle indésirable» par des commerçants pas ben smats, savent vivre. Malgré tous ces gens éméchés, je n’ai vu aucune bouteille cassée dans la rue et très peu de déchets par-terre. On utilise même les toilettes chimiques plutôt que de pisser dans les très invitantes haies de cèdres du presbitère. Ça s’en va tout au ciel, ce monde-là!
Bon, ben, c’pas tout. Une autre journée de festivités très festives m’attendent!
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Comptes rendus des autres journées du Festif!
- Jour 1: Robert Charlebois, Bernard Adamus, Sweet Grass
- Jour 3: Mara Tremblay, Dany Placard, Les Trois Accords, Dylan Perron, Franklin Electric, We Are Wolves
- Jour 4: P’tit bilan