Dans le dernier billet qu’elle m’offre en guise de réponse au Petit traité de mythologie canayienne sur le « bon parler français », Mélanie Robert ouvre la discussion en s’autoproclamant pamphlétaire. Soit, jouons le jeu. Mais rappelons d’abord que « pamphlet » porte une connotation (souvent) péjorative pour désigner un texte court et virulent qui s’en prend à l’ordre établi. Je ne suis pas certaine qu’elle s’en prenne à l’ordre établi autant qu’elle cherche à établir un ordre où des mots comme « bungalow » ne la feraient plus grincer des dents. Ceci dit, ce n’est pas parce qu’on bourre un texte d’inanités auxquelles quelques personnes décident de répondre, non pas tant pour livrer bataille que par altruisme, qu’il y a écrit pamphlétaire. Autrement dit, si Mme Robert entre en scène toute nue parce qu’elle a oublié d’enfiler son costume et que quelques personnes en arrière scène lui lancent des couvertes, il y a là, tout au plus, une provocation involontaire de sa part.
Commençons par le titre du billet de Mme Robert où elle évoque le franglais comme un « fétiche », comparaison qu’elle se garde bien de développer dans son texte. Qu’entend-elle exactement par « fétiche »? La langue n’est pas un objet auquel on voue un culte, elle n’est pas un objet tout court en fait. Elle est un rapport entre des personnes, une relation de partage qui établit un lien de communication entre les sujets parlant. La langue parlée n’est soumise à aucune règle, sinon celle de se faire comprendre par son interlocuteur. Parler, c’est s’adresser à quelqu’un, aller vers autrui et ça ne se fait pas avec une grammaire prise en travers de la gorge. Ce n’est que parce que Mme Robert réifie elle-même la langue dans une idéologie qu’elle peut en faire le support d’un culte imaginaire. D’ailleurs, il est à se demander si ce culte, faute d’être celui du « franglais », ne serait pas celui de son propre nationalisme résorbé dans un débat sur la langue.
L’écrivain est libre, bâillonnons les autres!
Non, mais! Quel drôle d’argument! Alors, selon Mme Robert, l’écrivain serait libre d’user de la langue comme bon lui semble, mais pas le reste du bon peuple dont on devrait encabaner l’expression courante dans un français correct. Une liberté dont les écrivains ne jouiraient d’ailleurs que dans les pays démocratiques. C’est une chance extraordinaire, dans ce cas, que Sony Labou-Tansi, écrivain congolais mort en 1995, (par exemple), ne se soit pas empêché de jouer avec la langue française parce qu’il écrivait dans la pas trop démocratique République du Congo. Ma collègue ne fait donc pas la différence entre la liberté de dire et la liberté du comment le dire. Elle cache que la liberté n’est pas un droit acquis des pays démocratiques, elle se prend et se préserve.
Il y a, bien sûr, une différence entre la langue parlée et la langue écrite. Mais ce n’est pas parce que nous écrivons la langue que le franglais ne nous concerne pas. Pourquoi chercher à écrire une parole, si cette parole était proscrite du langage parlé? Tout comme il n’y aurait eu aucun intérêt à écrire un joual qui n’aurait été la langue du quotidien de personne. Il n’y a rien de bizarre à ce qu’un écrivain réponde de sa posture d’écrivain dans un débat sur le français puisque la langue est son outil de travail et que ces questions le concernent. L’écrivain n’est pas plus libre que ne l’est le plombier, dans son utilisation de la langue, car il se doit de la maîtriser pour l’écrire. Exclure l’écrivain du débat sur le français, c’est non seulement le priver de s’exprimer sur son média, mais c’est aussi sous-entendre qu’il ne parle pas comme tout le monde et stigmatiser le fait qu’il est un des vecteurs de la conservation de la culture et de la langue.
Écrire est un combat contre l’insuffisance de la langue, contre ses lacunes et contre ses sangles. Écrire, c’est faire éclater les structures pour retrouver ce qui vibre au fond des mots, c’est tordre les contraintes pour faire résonner la musique de la syntaxe, c’est donner des coups de hache dans la ponctuation pour faire jaillir l’émotion sur une page. Et c’est de ce combat et de ces fractures que naissent de nouveaux mots, que des expressions se fixent dans la langue et qu’une culture se meut.
L’obligation de parler ou d’écrire un français correct en « situation minoritaire » n’a rien de « résistant » ou « d’altermondialiste », ce n’est qu’aplatir une idéologie à même une langue pour la faire agoniser de sa belle mort. C’est dans sa rigidité qu’une langue ne s’adapte plus au quotidien et qu’elle cesse d’être parlée. L’anglophobie est présente dans un certain discours nationaliste. Ce n’est pas « assommer la résistance » que de le souligner, ce n’est même pas de la résistance d’être anglophobe, c’est une inadéquation à la réalité de notre culture pour transformer en victime le colonisateur colonisé et c’est une incapacité à penser un projet de société qui inclut les multiples facettes de notre identité qui n’est pas « proprement » francophone. Ce qui fait de nous une culture dépasse la langue.
Langue & idéologie
Être résistant, c’est d’abord reconnaître un épouvantail avant de prendre peur et d’aller se cacher au panier. Les langues ne meurent pas en en côtoyant d’autres, elles évoluent. Même le latin ou le grec ancien se sont dérivés pour survivre, quelque part à la racine de nos mots.
Aussi, ce n’est pas en cessant de dire « latté » qu’on s’oppose au fascisme, parce que selon la logique de Mme Robert, si l’anglais est la langue du néolibéralisme, l’italien est sans doute la langue du fascisme. Je courtise le point de Godwin, mais non, ce que je veux dire, c’est qu’on ne peut pas définir une langue selon les idéologies qu’elle a vu naître. C’est absurde. L’anglais n’est pas plus la langue du néolibéralisme, que l’allemand n’est la langue du nazisme ou le russe la langue du communisme. Chomsky n’est pas un petit peu moins engagé parce qu’il est américain et Bukowski ne fait pas danser Ronald McDonald dans ses vers. Le français a été la langue de communication scientifique, intellectuelle, commerciale et diplomatique au XVIIe, XVIIIe et au début du XIXe siècle, faut-il pour autant le targuer d’être la langue du mercantilisme? Franchement…
Le français est loin d’être au bord du gouffre. Une langue est dite « morte » quand plus personne ne la parle. Le français est la quatrième langue la plus parlée dans le monde avec 520 millions d’utilisateurs, juste après le mandarin, l’anglais et le hindi. On m’objectera bien sûr que le contexte nord-américain nous isole et menace notre langue, mais nous sommes tous et toutes isolé-es dans nos tours de Babel. Nous pouvons, évidemment, mettre en place des structures pour protéger notre langue, cependant ce n’est pas en nous la coupant sous le tranchant des grammaires que nous la sauverons, mais plutôt en la rendant « sexy », en donnant envie de se la rouler en bouche, et ça, il n’y a rien comme la littérature pour apprendre à savourer une langue. Donc, encore une fois, en excluant l’écrivain du débat sur la langue, sous prétexte de sa soi-disant liberté, c’est toute cette richesse du français, cette beauté et cette sensualité, que Mme Robert exclut du débat. Pour une ancienne étudiante en études littéraires, c’est une vision bien restrictive de la littérature que la sienne.
Ensuite, Mme Robert mélange les notions de mondialisation et de locution, et prêche par la peur des goulags-réserves où nous réhabiliterons les insoumis, et le franglais devient le bilinguisme, et le bilinguisme devient idéologie. Je ne sais pas trop par quel tour de magie paranoïaque tout ça s’entremêle… et merde! Je parle quatre langues. À quel genre d’idéologies puissance quatre suis-je soumise dans mon français acculturé, mondialisé, mon dialecte de polyglottisme?
Je ne sais pas trop comment, non plus, Mme Robert en vient à agiter le monstre Jean Charest, sorti de nulle part pour effrayer nos plaies encore fraiches du printemps, tout en reléguant le provincialisme à une langue barbare. Or, c’est un intéressant oxymore en soi. « Provincialisme » désigne une façon de parler particulière à une province ainsi qu’un sentiment d’appartenance à celle-ci. « Barbare », quant à lui, est d’origine indo-européenne : du latin barbarus — lui-même dérivé du grec ancien βάρϐαρος (bárbaros) — et du sanskrit बर्बराह (barbarāha), pour déterminer les peuples non-aryens. On le rapproche du français « borborygme », car il qualifierait le langage incompréhensible des étrangers. Si c’est l’idée péjorative que Mme Robert se fait du français de la Belle Province, elle ferait peut-être mieux de déménager en France.
Quant à moi, j’affirme la force de notre dialecte, un français tout à fait français, pas barbare du tout, mais aussi singulier que l’est notre culture. Si je dis « ça fait du sens ce que tu dis » (de it makes sens) à un anglophone qui ne parle pas français, il n’entendra que du français. Tout comme ce « définitivement » qui se glisse partout, à tort et à travers, n’est pas « definitely ». L’autre matin, Fiston me dis : « Maman! J’ai levelupé. » Ça ne veut rien dire pour un anglophone. Ce qu’il a fait, Fiston, c’est un verbe français à partir du mot anglais qui lui est apparu à l’écran de ses jeux en ligne. Intuitivement, il a avalé l’anglais pour en faire un mot français, il a donc soumis la langue étrangère à la sienne et, en cela, il est résistant. Il fait preuve de créativité pour parler dans sa langue, même si les signes qui lui apparaissent ne sont pas les siens, il s’affranchit en les remodelant.
Une identité bâtie à la négative du type « je suis francophone donc je n’utilise pas de mot anglais » est une identité fondée sur l’exclusion. Or, une société ne se consolide pas sur l’exclusion.
La langue de la pensée
Pendant un temps, il était de bon ton de réduire la pensée à la langue. C’est excessivement pratique, dans le discours idéologique, de dire qu’une « langue façonne la pensée ». Pratique pour hiérarchiser une société et faire la morale. Pratique pour s’ériger en autorité et porter un jugement visant à « minoriser une minorité ». Cette façon de penser est non seulement discutable, mais carrément dangereuse. C’est une définition qui prend pour acquis que l’intelligence d’une personne se résume au vocabulaire qu’elle maîtrise, ce qui est méprisant et peut donner lieu à toutes sortes de dérapages.
La pensée ne se mesure pas. Jean-Luc Godard disait, dans je ne me souviens plus quel film : « La pensée, on ne saura jamais en quoi exactement elle consiste. » Chose certaine, elle ne se mesure pas, quantitativement, au nombre de mots français qu’on utilise, ni aux autres langues qui viennent la courtiser. La pensée est tissée d’affects, de réflexes, de sentiments, de pulsions, d’images, d’indicible, de souvenirs, d’imagination, de rêves, de délires, etc. Le langage n’est que sa surface, sa part d’inter-dit et d’interdits.
Pour le reste, ce serait une tâche titanesque que d’essayer de répondre à toutes les contradictions, tautologies d’évidences évidentes, de préjugés, de raisonnements fallacieux, d’inepties et de logiques frauduleuses qui circulent dans le texte de ma collègue comme dans un cercle vicieux. Il suffit de comprendre qu’elle joue sur le code d’une pureté illusoirement nuancée pour faire de la langue le véhicule d’une idéologie nationaliste. Pour démanteler ses arguments, il s’agit plus de faire la preuve par l’absurde que d’amorcer une réelle réflexion.
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Merci Ianik Marcil, mon chaton-licorne en sucre d’orge. S’il reste des fautes, c’est de la sienne! 😉
Bonjour,
j’aimerais réagir brièvement à la polémique. Vous répondrez si vous voulez. Comme je ne suis pas linguiste, c’est bien possible que j’utilise des termes inappropriés. Soyez charitable. C’est aussi probable que je caricature un brin votre position… Désolé, c’est un sujet qui me touche.
Un truc que je trouve agaçant dans vos propos, c’est que vous ne faites jamais la distinction entre une personne éduquée, qui maîtrise différentes variantes du français (international, québécois, joual, etc.), et une personne peu instruite, ayant peu de vocabulaire, parlant franglais. Bien sûr que la première peut trouver son plaisir à frotter ensemble différents niveaux de langue, et même à en mélanger certaines, mais elle est aussi capable de communiquer avec un Français, un Suisse, un Sénégalais. Il y a par contre une grosse tranche de la population, au Québec, qui parle juste le joual anglicisé. Et qui éprouve une RÉELLE difficulté à se faire comprendre par un francophone non-Québécois. Je le sais parce que j’en viens, et y a aucun mépris dans le fait de le constater. Et c’est ça qui est si pénible dans la célébration du franglais. On ne tient pas compte de ce problème. Et on explique à ces gens que c’est une richesse de parler, d’écrire et de penser franglais. L’ennui, c’est que c’est pas une richesse… En t’exprimant ainsi, tu te coupes de millions de francos qui ne te comprennent pas. Et comme vous le mentionnez vous-mêmes: « La langue parlée n’est soumise à aucune règle, sinon celle de se faire comprendre ». Or, c’est préférable, je pense, d’être compris par deux cents millions de locuteurs plutôt que par sept millions. C’est pour ça que « le bon parler français » que d’horribles nationalistes tentent de nous imposer, a quand même ses vertus. Ben oui, quand t’es élevé en sous-Michel Tremblay, c’est parfois bien d’avoir des profs pourvus d’un bon vocabulaire. Sans complaisance envers ton dialecte. Quand vous expliquez que votre fiston vous dit parfois « Maman! J’ai levelupé », et qu’un anglo ne peux le comprendre, vous avez raison. L’ennui c’est qu’un Français non plus ne le peut pas. Ni un Suisse. Ni un Sénégalais. Et pour tout vous dire, moi-même je le comprends pas…
Mais bon, je suis un brin réactionnaire! Et mon commentaire, sûrement injuste. Désolé. Je suis pas sûr d’avoir saisis toutes les nuances de votre texte. Mais j’avoue un malaise. Quand j’entends une universitaire faire l’éloge du franglais, en moquant ceux qui se soucient de la langue, j’ai toujours l’impression d’entendre un hipster, qui s’habille en pauvre pour faire chic, expliquer à un vrai pauvre que c’est cool de l’être…
Ben non, c’est pas cool d’être pauvre!
Ni d’être un castré linguistique!
C’est bien drôle tout ça. D’abord, on me reproche de parler à partir de ma posture d’auteure, et maintenant, de parler de ma posture d’universitaire. Je tâcherai de répondre brièvement, mais il s’agit, selon moi, d’une personnalisation du débat qui n’a pas lieu d’être.
Je ne fais pas de différence entre l’universitaire et le reste des classes sociales, parce que cette différence n’existe pas réellement. Être éduquée ne fait pas de moi une petite princesse isolée dans la tour d’Ivoire de son savoir. Je suis issue d’un milieu ouvrier, j’habite un quartier ouvrier et je ne travaille pas pour les hautes sphères de l’élite intellectuelle. Par ailleurs, nous maîtrisons tous plusieurs niveaux de langage. Nous avons appris le bon parler français sur les bancs de la petite école tout en échangeant des expressions et des mots d’un tout autre registre dans la cours de récréation. Nous savons que nous ne parlerons pas le même français au moment d’un entretien d’embauche qu’à la pause-repas sur le chantier. Si nous n’étions pas capable de tous maîtriser un français, disons « officiel », nous ne serions pas capable de comprendre le téléjournal, ni les lettres gouvernementales, par exemple.
Par conséquent, il n’y a aucune raison pour laquelle on ne serait pas capable de se faire comprendre d’un francophone étranger. Qui plus est, la relation de communication n’est pas unilatérale. L’émetteur envoie un message au récepteur qui le décode et lui renvoie la balle. En admettant qu’un mot ou une expression incompréhensible pour le récepteur transige dans le message de l’émetteur, c’est la responsabilité du récepteur que de demander des éclaircissements. Aussi m’arrive-t-il de glisser des « québécismes » dans une conversation avec un étranger. Habituellement, si celui-ci n’est pas familier avec l’expression, il me demandera sa signification et se fera un plaisir de l’utiliser une fois qu’il l’aura comprise. Je ne me coupe de personne, même que je me fais un plaisir de faire déteindre mon français sur eux.
C’est étrange que vous citiez Michel Tremblay qui, je le rappelle, écrit en joual et dont les pièces sont jouées partout dans le monde. Preuve que le parler québécois n’est pas si dur de comprenure à l’étranger.
Quant à « leveluper », puisque vous me posez la question. Bien sûr que tout le monde peut le comprendre et je soupçonne un tantinet de mauvaise foi ici. Fiston a simplement formé un verbe francophone à partir de « level up », « leveluper » signifie donc « passer à un niveau supérieur ».
Ce qui tue une langue ou vous castre, ce n’est pas le franglais, c’est quand on ne la parle plus. On ne parle plus en vieux français, même que le vieux français vous serait probablement incompréhensible. Pourtant, le vieux français est probablement plus français que notre français puisque plus proche de l’origine. Par conséquent, même le français le plus international soit-il est un dérivé d’un français qu’on ne parle plus. Personne ne pleure pourtant sur le sort du vieux français et on continue de parler français, non? Bref, la langue évolue.
On peut la préserver en favorisant son apprentissage. Mais la cloîtrer dans des structures rigides, sous des prétextes réactionnaires, serait un suicide.
bravo marie-christine.
j’aime les démolitions systématiques de textes débraillés.
je m’abonne à ton blogue, tiens.
J’en suis très flattée calinours! En plus, j’ai entendu que tu étais un excellent modérateur. Je sens déjà l’effet de ta bienveillance ensoleiller mon modeste espace virtuel. Merci.
@marie-christine
dans ta réplique tu fais allusion quelques fois au nationalisme de la robert.
ce n’est pas explicite, mais tu me donne l’impression que tu le lui reproches.
question: est-ce mauvais selon toi d’être nationaliste?
ou autrement, est-ce nécessaire de le combattre pour la seule raison qu’il est un des multiples ingrédients essentiels du fascisme et autres dérives du même genre?
Je dirais d’abord qu’il y a une différence entre « nationalisme », « indépendantisme », « souverainisme » et « séparatisme ».
On a tendance à utiliser tous ces mots comme des synonymes, mais ils n’en sont pas et il faudrait savoir faire la nuance.
Le « nationalisme » — contrairement aux autres termes évoqués — porte effectivement des germes de fascisme, ce à quoi je m’oppose. Le nationalisme est aussi basé sur un sentiment, ce qui permet de manipuler les masses de façon populiste sans renvoyer à une réalité objective (si réalité objective il y a). Autrement dit, on va utiliser la peur pour contrôler l’opinion publique, par exemple.
Ceci dit, loin de moi l’idée de me prendre pour la Morale guidant le peuple.
donc le nationalisme n’est pas mauvais à priori, mais il se prête malheureusement à des détournements vers le coté obscur.
je suis d’accord.
par contre je ne vois pas trop les nuances à faire entre souverainisme, séparatisme et indépendantisme…??
Je réfèrerai simplement au définition des mots. Je te laisse en tirer les conclusions que tu en voudras.
Indépendantisme : Revendication d’indépendance politique. (De la part d’une province, région ou colonie.)
Séparatisme : Mouvement qui réclame une séparation d’ordre politique, l’autonomie par rapport à un État, à une fédération. (Plus utilisé par les fédéralistes pour qualifier le mouvement souverainiste au Québec).
Souverainisme : Partisan d’un État ou d’un organe qui n’est soumis à aucun autre État ou organe.
Nationalisme : Doctrine fondée sur l’exaltation du sentiment national — attachement passionnée à la nation à laquelle on appartient, accompagnée parfois de xénophobie et d’une volonté d’isolement — subordonnant toute la politique intérieure au développement de la puissance nationale et revendiquant le droit d’affirmer à l’extérieur cette puissance sans limitation de souveraineté.
Ne pas avoir sa langue dans sa poche, au Québec, c’est notre manière à nous autres de montrer qu’on a les couilles qui vont avec. Faut lire, entendre les cris d’indignation qui fusent dans les médias sociaux ou branchés pour voir dans quel bourbier ça s’enfonce, tout « ça ».La langue, la si mal parlée ou la trop bien écrite. Le grand écart, « la split », entre nous les canayens françâs et les Uropes, la mare d’incompréhension, la mère de toute la marde qui cherche à enterrer la parlure, la parole, la nôtre, en premier lieu.
En France, désormais , la langue de Molière est totalement pasteurisée par la pure pensance des autorités politiques, culturelles, médiatiques. Voyez comment on parle, aujourd’hui, dans la patrie de Céline. Il n’y a pas de ghettos en France, seulement des « quartiers sensibles », des « banlieues ». Et un notable qui est accusé de crime contre la société civile est maintenant « mis en examen », comme à l’université, tiens!
Et voyez comme on est respectueux en hommages rendus à leurs grands banquiers qui vont dans des hôtels se dévouer en « parties fines », et non pas en vulgaires orgies et autres gangbangs…
Notre courriel barbare nord américain ne fait pas le poids devant le email anglo sophistiqué de France.
On nous reproche notre langue toute mélangée de mots impurs venus du yab’ sait où et garrochée dans des musiques qui n’ont rien à voir avec la France du vermoulu De Gaulle, mais beaucoup avec l’Irlande déconcrissée de Joyce et des Acadiens de Radio Radio!
La langue, ici, c’est bien plus qu’un véhicule de la pensée,d’un esprit rebelle depuis son arrivée ici en 1534, c’est aujourd’hui le TGV de la gauche connectée sur les rails d’une France qui n’a plus le courage, et peut-être la lucidité ( la force nécessaire?) pour se nommer clairement, une France institutionnelle qui fait honte à ses dictionnaires. Obertone n’y changera rien, allez…
Et voilà nos artistes en campagne frénétique de financement qui se mettent de la partie (money! money!), faudrait s’enfermer dedans , notre langue,qu’ils nous chantent, se l’étouffer jusque dans nos gorges profondes, nos gorges de schiste, d’eau claire, d’électricité (très) statique, en attendant que des moulins à vent providentiels péquistes viennent nous monter dans l’air libre québécois de leur pur sang rêvé, l’imbécile peureux qui farme sa yeule en regardant TV5 et en lisant la prose parfaite du quotidien parisien « Le Devoir »….
Vous êtes poétique, Jean-Claude.
tenez, je viens d’avoir un autre exmple de cette stérilisation de la langue…chez-nous, en plus…pour Météo Média, une tempête de neige, celle qui passe sur ma ville maintenant, c’est désormais « du temps actif » que ça s’appelle…Du temps actif sur un pays désactivé…comme notre compte depuis des siècles, dans la France des Lumières…
Le dossier de la francisation au Québec est depuis trop longtemps otage des partisaneries souverainistes et fédéralistes. Ce n’est pas un hasard si les fédéralistes, une fois au pouvoir, se montrent plus laxistes à l’égard des programmes de francisation et la langue d’affichage. Ils sont incapables de dissocier la protection du français du projet souverainiste.
Ce n’est pas un hasard si les souverainistes, une fois au pouvoir, affichent leurs préoccupations du recul du français à Montréal. Ils savent pertinemment que le projet souverainiste est intimement lié à la protection du français.
Le défaut des fédéralistes est leur incapacité de concevoir la protection du français comme importante en soi. Le défaut des souverainistes (depuis une dizaine d’années) est leur incapacité de débarrasser leurs discours sur la protection de la langue d’une certaine crispation identitaire.
http://voir.ca/mohammed-lotfi/2012/11/24/ioioioioioioioioioioioio/
Il est vrai qu’il n’est pas nécessaire de répondre à la question nationale pour défendre le français et qu’y répondre peut nuire à sa défense en la limitant à des questions idéologiques.
Pour avoir enseigné français langue seconde au secondaire, j’ai vite réalisé que, dans certains quartiers, les enfants grandissent dans plusieurs langues, dont le français ne fait pas partie, et ils ne savent même pas que le français est parlé par une majorité au Québec. Alors, ils ne comprennent pas pourquoi le français est obligatoire à l’école. Mais il suffit de le leur expliquer et de transmettre l’envie de l’apprendre pour que le déclic se fasse. Le jeu et la littérature ont été pour moi les meilleurs outils pour leur transmettre ce désir d’apprendre.
Bonjour,
Je ne suis pas tout à fait en accord avec tout ce texte, autant que de longs pans m’enchantent complètement. En ayant terminé la lecture, je me suis dit: voilà le plus beau plaidoyer qui soit pour favoriser, ici comme ailleurs, l’utilisation respectueuse de sa langue, puisque tout ça est magnifiquement écrit.
Ceci dit, je vous propose un axiome important en art visuel —qui peut s’appliquer aux différentes utilisations des langues aussi, je crois, et qui ne contredit pas obligatoirement votre position, y ajoute peut-être: avant de déconstruire une réalité, il faut apprendre à la bien construire (si on espère éviter de tomber dans l’infâme n’importe quoi).
Bonne continuation, Mademoiselle Lemieux-Couture, et au plaisir.
Bonjour M. Roy,
En effet, en littérature (ou du moins à l’écrit), il faut maîtriser la langue pour pouvoir la déconstruire. Et ce que je me permets de faire dans le roman, je ne me le permettrai pas nécessaire dans un billet. Mais quand on en vient à se préoccuper du français écrit et lu, je trouve que le taux d’analphabétisme est beaucoup plus préoccupant qu’un anglicisme glissé par mégarde dans une phrase…
Au plaisir!
Est-ce que les langues, comme les humains, ne seraient pas avant tout un phénomène migratoire ? Depuis toujours, depuis les premiers chasseurs-cueilleurs, les humains bougent et vont à la recherche de la nourriture et du confort. Et les langues ?
60 % des mots anglais sont d’origine française, combien de mots français adoptés de l’anglais, de l’arabe, de l’italien, du russe, du breton, de l’occitan, du..?
Henri Meschonnic disait : « L’ennemi du français n’est nullement l’anglais, mais l’inculture, à tous les niveaux, du langage et des langues, y compris le français. »