Avec son plus récent album, Dany Placard continue de nous parler de lui. Au lieu de nous toucher et de nous émouvoir, comme il l’a fait sur Démon vert, il nous montre davantage son côté bouffon, le tripeux de musique nous démontre à nouveau qu’il n’aime pas se répéter.
J’ai profité de son passage dans la Vieille Capitale pour présenter Santa Maria pour l’inviter dans les studios de CKIA afin de faire une longue jasette avec lui. L’entrevue dure environ trois quarts d’heure, je vous en ai gardé quelques bouts ici.
«À ta place, je ferais autre chose de mes dix doigts»
Visiblement fait pour jammer sur scène, Santa Maria est plus rock, plus rythmé. Dany Placard n’aime pas se répéter et il n’était pas question de refaire Démon vert, malgré son succès, populaire et critique.
«C’était un virage voulu. Démon vert, ça a bien été, on a eu quand même un bon nombre d’albums vendus… Je pouvais pas écrire quelque chose de sombre. Chu pas à côté de la track, je checke dans le monde pis [je sais que] ça va crissement pas ben, mais je voulais que les gens passent à autre chose, qu’on tripe pendant 38 minutes.»
Refusant de devenir un perroquet, Dany et sa maison de disque se sont dit qu’il fallait une oreille externe, un réalisateur pour mener les chansons ailleurs. Malgré le risque, il a tout de même fait appel à son vieux complice de Plywood ¾, Eric Villeneuve, pour réaliser ce nouvel album.
«Ça été mis au clair dès le début en parlant avec Eric. Lui aussi était rendu ailleurs. Il n’était plus dans le bric-à-brac fabriqué. Pis je me connais, je ne peux pas prendre les commentaires de tout le monde. Ça me prenait quelqu’un que je connaissais et en qui j’avais confiance.»
«Ça nous est venu de ressortir des percussions. J’ai tout gardé les instruments bizarres qu’ont avait. Mat Vezio, le drummer, avait repris certaines des cannes, mais Eric a dit non.»
Verra-t-on un jour un retour du Plywood ¾? «On va peut-être le refaire, mais ça va peut-être aller ailleurs aussi. Fred Fortin a refait du Gros Mené, mais c’est complètement différent.»
«Quand j’tais p’tit, j’rêvais d’être une star»
Un besoin de reconnaissance, ou une désillusion sur l’industrie musicale, planait sur Démon vert. Depuis, l’artiste affiche une autre attitude, plus lucide, plus sereine. «Je prends rien pour acquis. J’suis pas mal pris, je suis ébéniste aussi dans la vie. Je pense pas faire de la musique toute ma vie, en fait oui, mais gagner ma vie avec ça, non. Je pense pas qu’à 55 ans j’aie encore le goût de jouer du Placard… Mais je prends rien pour acquis…»
«J’ai toujours eu un genre de frustration, j’aurais aimé que mes affaires marchent un peu plus. Peut-être que j’étais pas assez confiant, quand je me retrouvais dans des places avec des gens connus de l’industrie de la musique, je virais l’air bête tout le temps. On aurait dit que je voulais pas être associé au succès. Fallait que ça aille mal mes affaires. C’était comme un genre de personnage que je m’étais donné. Je voulais pas être associé aux gens de la musique pop et aux gens qui ont un succès. Un m’ment donné je me suis dit « pourquoi je fais ça? Fuck it!» À partir de ce moment, ça s’est mis à marcher.»
«Là ça va bien, j’aurais peut-être pas continué sinon. J’essaie de ramener ça à une job de travailleur autonome. On travaille à facture. Ça arrive qu’on ait moins d’ouvrage, comme un graphiste. C’est pas facile, mais comme pour n’importe quelle job. Le gars qui parle sur Santa Maria, c’est un gars qui est bien avec son art. Je gagne ma vie, je nourris ma famille, je paie ma maison, avec la job que j’aime.»
Placard le boss
De plus en plus demandé comme réalisateur, Dany Placard a dû apprendre ce travail sur le tas.
«J’ai déjà été dictateur! Asteure, c’est plus de la collaboration. Je m’organise pour que l’artiste soit content en fait, c’est ce qui faut. La plupart du temps, ils arrivent avec des petites idées. Le travail de réal, souvent, faut tu prennes des petits détours. Souvent, tu trouves que ça marche pas l’idée de la personne, mais tu l’essaies pareil, pour finir par y montrer que ça marche pas.»
Dany Placard se met parfois à accompagner les artistes après avoir réalisé leur album, mais parfois, il doit aussi laisser aller ce bébé auquel il a participé à la conception. Une job ingrate, la réalisation?
«L’album sort, après toi t’es plus dans le décor. Mes premières réalisations, je trouvais ça plate d’avoir une reconnaissance qui dure le temps d’une soirée pis quelques critiques. Je trouvais ça ingrat, mais tu finis par t’y faire. Tu veux juste que l’album soit apprécié. Tu peux pas être remercié à tous les shows! Donc si l’artiste est content, la job est faite.»
«Dans tous les festivals, j’aurais chanté du western et du country»
Le country est très présent dans la musique de Dany Placard, même lorsqu’il se fait plus rock comme sur Santa Maria. Mais contrairement à ce qu’il chante sur la pièce Western Country, sur Hudon-Placard, il n’a pas toujours rêvé d’être une star du country.
«J’ai comme eu un dégoût du country un moment donné. Mon père écoutait du country de mauvais goût, comme Kenny Rogers, il a eu un gros buzz là-dessus pis ça m’a écoeuré. Au cégep j’ai plus écouté du blues et du jazz, fak le country a pris le bord, mais il est revenu.»
Si vous écoutez l’entrevue au complet, vous découvrirez même qu’il a aimé le fameux jazz fusion des années 90 et qu’il chantait de l’opéra au cégep. Vous saurez même qui est Julie Gagné! Pour écouter toute l’entrevue, suivez ce lien, ça commence vers la 29e minute!