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Être gros, c’est pas gentil

Le petit gars devait avoir 5 ans. Il était blond. Un brin timide.

«Regarde maman, il est gros le monsieur», dit-il en tirant sur la robe de sa mère.

«On dit pas ça, c’est méchant» lui lance alors sa mère, gênée que son gars ait dit ça devant moi.

La mère a une bonne intention, mais elle est dans les patates. Son garçon n’a rien dit de méchant en soi. Il m’a simplement décrit. C’est comme s’il disait à sa mère que tel monsieur est grand ou que telle madame est rousse. Il décrit simplement son univers, ce qu’il voit.

Me décrire comme un gros n’est ni méchant, ni gentil. C’est une simple observation.

Toutefois, en voyant l’air peiné de la maman, on voit ce qu’elle pense des grosses personnes. C’est mal.

C’est une manie que je remarque souvent. La transposition de ses propres valeurs, transformant un propos anodin en propos incisif.

Si elle trouve que c’est méchant, peut-être que pour elle, être gros, est automatiquement un problème, un défaut, une tare. En voulant lui apprendre que dire qu’une personne est grosse est méchant, c’est lui transmettre sa vision, c’est aussi lui apprendre que c’est pas bien. C’est en plus montrer au gamin à être hypocrite avec la différence. Ne la nomme pas, ne la pointe pas et fait semblant de l’accepter.

Maintenant, je m’en fais moins avec ça. Mais il y a quelques années, ça me blessait. Pas quand un gamin me disait ça, mais quand le parent lui disait qu’il était méchant. C’est le parent qui me blessait. C’est lui qui est méchant, pas son gamin.

Des fois, ça me revient en tête, que je suis une sorte de paria aux yeux de bien des gens, un monstre visuel qui devrait se cacher. Je ne peux m’empêcher de me demander s’ils font ça pour tous ceux qui sont différents.

La maman va-t-elle trouver son gamin méchant s’il souligne l’handicap d’une personne? Ou son bégaiement? Ou son maquillage extravagant? Pourtant, tout ça ne devrait pas déranger ou surprendre un adulte. Un adulte devrait juste trouver ça normal, ces différences. Et c’est ça qu’un parent devrait apprendre à son enfant.

L’idée n’est pas de faire comme si tout le monde était pareil, c’est au contraire d’apprendre à embrasser les différences. Les gens auraient peut-être moins peur de l’inconnu si on apprenait à accepter la différence plutôt que de la trouver méchante.

Être gros ne devrait pas être insultant. Aucune différence ne devrait l’être.