Premier acte présente jusqu’au 22 avril une pièce au sujet audacieux et intrigant. Avec [MAL]Heureuses, on explore la vie de trois femmes de dictateurs: Margherita Sarfatti (amante juive du dictateur italien Mussolini), Elena Ceausescu (épouse du dictateur roumain Nicolae Ceausescu) et Asma El Assad (femme du dictateur syrien Bachar El Assad).
Avec cette pièce, Élodie Cuenot expliquait à Catherine Genest, dans un article que vous pouvez lire ici, vouloir gratter cette idée que la femme en politique amènerait de l’humanité. En creusant le parcours de ces femmes de dictateurs, on se rend compte qu’elles les soutiennent, les encouragent et parfois même leur a permis d’asseoir leur dictature.
Afin de nous plonger dans l’univers de ces trois femmes, Élodie Cuenot, qui signe le texte et la mise en scène, nous présente un professeur d’histoire qui écrit sur ces trois femmes. Au fil de ses recherches, ces femmes se mêlent tour à tour avec trois femmes de sa vie: sa mère, son amante et sa femme. Une façon, aussi, d’explorer les relations qu’avaient ces femmes avec leur peuple ou leur tyran.
Le sujet est donc vraiment intéressant et permet d’aborder plusieurs sujets. La soif du pouvoir, l’égarement dans le bien (sauver sa patrie, mais à quel prix?), l’égo qui prend le dessus, l’amour envers des hommes vils, la place de la femme en politique, le destin tragique de la plupart des dictatures, etc.
La pièce en elle-même a aussi un grand potentiel. Les actrices et l’acteur (Sophie Dion, Marie-Ginette Guay, Marie-Hélène Lalande et Gabriel Fournier) livrent une bonne interprétation, la mise en scène bifrontale avec ses nombreuses projections est efficace et permet de jouer avec les nuances et les niveaux de lecture.
Il manque toutefois un petit quelque chose pour que le tout prenne sa réelle puissance. Je trouve qu’on prend du temps avant de bien plonger dans la vie de ces femmes, j’aurais aimé qu’on creuse davantage ce qu’elles ont fait, ce qu’elles ont été (ou sont pour celle encore vivante). Bien que la vie de l’auteur qui se mélange à ces destins permette de comprendre leurs vies et des perspectives, les transitions ne sont pas toujours fluides et ce côté prend légèrement trop de place.
Personnellement, j’aime quand le théâtre me brasse l’esprit ou les émotions. Ici, il manque justement ce quelque chose pour nous émouvoir ou nous bousculer complètement. Surtout qu’il y a plusieurs scènes fortes, qui créent ces moments, mais cette intensité n’est pas soutenue.
Mais il ne manque pas grand-chose, on sent qu’on est sur le seuil d’une pièce qui pourrait vraiment marquer l’esprit. Les idées sont là, reste à resserrer le tissage, peut-être.
Le sujet demeure intrigant et le sujet me trotte quand même dans la tête depuis. J’espère vraiment que [MAL]Heureuses n’en est pas à sa dernière version.