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Entre autres: brasser ses faiblesses

Se confronter. C’est un peu ça, la pièce Entre autres.

Se confronter sur ses paradoxes, sur son héritage, sur son confort, sur ses préjugés, sur ses idéaux, sur le «je» dans le «nous», sur le «nous» dans le «je». Calfeutrer ses failles, comme dirait Tire le coyote, mais les gratter, aussi, parce que tout le monde a ses faiblesses, ses coins d’ombre, ses mystères, comme individu, mais aussi comme société.

Des enquêtes croisées, qui peuvent se répondre (au public de faire les liens). L’une sur les groupes identitaires, et donc sur notre rapport à notre identité, à l’immigration, à la peur, à l’inclusion. Une autre sur la masculinité qui nous amène vers le féminisme et la construction du genre. Une autre sur la crise environnementale, sur l’espoir et le fatalisme, sur les petits gestes et la politique. Puis une quête sur l’église, sur la culture et la révolte, sur le déni et l’invisible.

Portée par six acteurs/actrices, la pièce passe donc d’une histoire à une autre, littéralement au coeur du public, la scène se jouant à 360 degrés. Toutes et tous, ou presque, racontent leurs péripéties, où se mêlent les autres interprètes en appui, afin de camper les personnes rencontrées.

Dans cette gang, on y retrouve des gens de Storm Alliance, mais aussi des professeur.e.s, des politiciens ou des militantes, des citoyens et des citoyennes, aussi. Il aurait été facile, j’imagine, de ridiculiser certains points de vue, d’en transformer en bouc émissaire, mais non, les points de vue sont mis en contexte et présentés avec humilité, avec honnêteté. Entre autres ne cherche pas à dire ce qui est bien ou ce qui est mal, on peut les soupçonner de sûrement plus vouloir semer des questions que proposer des réponses. Néanmoins, des pistes sont offertes, aux gens de les essayer ou non.

Cette honnêteté est probablement l’une des forces de cette pièce, où l’on sent que les questions ont réellement habité les interprètes. C’est peut-être aussi ce qui, selon moi, rend un peu plus faible la fausse interruption d’une histoire qui n’aboutira pas. Si elle permet d’introduire certaines notions, son manque de naturel m’a semblé clasher avec tout le reste, rien pour nuire, puisque c’est qu’un petit segment sur cette longue pièce, mais cet interlude ne fait que ressortir l’authenticité de tout le reste.

Trois heures de théâtre, trois heures de cheminement. Si à un moment j’ai eu envie de me dégourdir les jambes, je n’ai jamais eu envie de regarder l’heure. La pièce n’a pas la force de certains docuthéâtres phares, dont le NoShow du même metteur en scène (Alexandre Fecteau), peut-être que ça aurait pu être resserré à quelques endroits, mais bien franchement, le tout passe vite. Les nuances et les qualités d’interprétation aident, sans aucun doute, à la fluidité et au plaisir de ces trois heures.

Entre autres est présentée au Périscope jusqu’au 11 mai. Une production du Collectif Nous sommes ici et du Collectif Wolfe. Avec Laura Amar, Étienne D’Anjou, Blanche Gionet-Lavigne, Vincent Legault, Vincent Massé-Gagné et Marianne Tremblay-Bluteau. Une mise en scène d’Alexandre Fecteau.