Je connais Simon-Pierre Beaudet depuis quelques années. On n’est pas des amis intimes, on ne se téléphone pas pour aller prendre une bière, mais en plus de l’avoir interviewé quelques fois, on a quelques ami.e.s en commun et on se croise ici et là à Québec.
Vous le connaissez peut-être aussi. C’est lui qui était derrière le blogue (devenu livre) Fuck le monde. «Personne d’autre [que lui] n’écrit au lance-flammes avec autant de grâce» soulignait Dominic Tardif du Devoir.
Comme je disais, on n’est pas intime, mais je le connais assez pour savoir que ce «lance-flammes» n’est pas juste pour donner un show, mais pour brasser la cage. Ou, comme il m’a dit, pour que «la marde pogne».
Le fameux «how dare you» de Greta Thunberg à l’ONU lundi, il est là depuis des années dans les textes de Simon-Pierre. Il ne tolère pas la bullshit.
Il s’est déjà présenté pour le NPD, avant la vague orange. Mais dans son texte d’ouverture de campagne publié sur Facebook, il rappelle aussi que la politique, ça ne se fait pas seulement au parlement ou dans les partis, mais aussi dans la rue, dans les comités, dans les syndicats, dans les organismes et dans notre quotidien, comme citoyen.
En même temps, ses textes dans Fuck le monde sont de sévères critiques sociales. On ne l’imagine pas tant jouer au politicien. Sauter dans ce système qu’il dénonce, ça vaut le coup? «On ne peut pas ne rien faire», répond-il. Même si on est contre ce système, on ne peut pas se permettre de bouder la politique parlementaire, ajoute-t-il.
C’est une des leçons de 2012, selon lui, que Gabriel Nadeau-Dubois et sa gang ont bien comprise. Ils ont investi Québec solidaire avec le résultat qu’on connaît.
Parlant de Québec solidaire, où sont toutes ces personnes mobilisées qui ont voté pour le parti de gauche aux dernières élections provinciales? Elles sont là, selon le candidat néo-démocrate, mais elles ne voient pas le fédéral comme un terrain mobilisateur.
«Il faut faire connaître le NPD et ses valeurs», me dira Simon-Pierre. Son chef aussi doit se faire connaître, comme Jack Layton a pris le temps de se faire connaître – ce qui ne s’est pas fait en une seule élection.
En même temps, le Limoulois rappelle que le parti ne part pas de zéro non plus. Peu importe ce qu’on pense de la vague orange de 2011, «les gens ont déjà voté pour nous», la glace a été brisée. «Les gens disent qu’ils sont pognés avec les conservateurs ou les libéraux, c’est pas vrai», insiste-t-il.
«Il faut lier les enjeux environnementaux à la justice sociale», ajoute le candidat. C’est-à-dire faire comprendre que les impacts environnementaux créent des injustices sociales, mais aussi que le système derrière la crise environnementale est le même derrière les inégalités sociales.
C’est d’ailleurs l’environnement qui le motive le plus – ou l’indigne le plus. «J’ai pété un plomb en 2018», explique-t-il. Selon lui, l’urgence climatique a atteint «un point de rupture».
Il souligne que depuis la fin des années 1970, «on n’a pas avancé et reculé comme sur d’autres dossiers, on a juste rien fait.» Il cite le livre Losing Earth de Nathaniel Rich, qui raconte comment l’humanité aurait pu sauver la planète il y a 30 ans. Depuis, l’humanité s’enligne que sur les pires prédictions, encore et encore. «On ne peut plus remettre l’environnement à plus tard.»
Sa circonscription, Beauport-Limoilou, est un beau concentré d’enjeux environnementaux. Plusieurs des grandes sources de pollution dans la région de Québec s’y trouvent, avec l’incinérateur de la ville, la papetière White Birch ou le Port de Québec. En plus du projet du troisième lien que le gouvernement provincial veut y construire.
Pendant les soixante minutes de discussion, jamais Simon-Pierre n’a lancé une pointe envers ses adversaires. Il ne les a même pas nommés. Lorsque je les mentionne, il me dira que ce n’est pas sa job de planter les autres. Sa lutte est à un autre niveau. Je pense qu’il cherche plus à planter le système.