Face-T: Nouveau départ
Figure emblématique du reggae local, Face-T amorce une troisième décennie de musique sur les planches montréalaises avec EP1, un premier mini-album indépendant.
La décision n’a pas été facile à prendre, mais Face-T a dû prendre les choses en main. Douze ans après avoir signé un contrat avec Subsonik Records, alors qu’il venait de remporter les Francouvertes aux côtés de son groupe Kulcha Connection, le chanteur a annoncé à son bon ami Scorpio B, gérant de l’étiquette montréalaise, qu’il désirait, dès lors, «faire les choses d’une autre façon».
«Je sentais qu’en 12 ans, j’avais fait un beau chemin et que, maintenant, fallait que j’en essaie un autre pour voir où il mène», explique Face-T, précisant qu’il est resté «en très bons termes» avec Scorpio B – d’ailleurs producteur d’une des quatre pièces d’EP1.
Pour l’épauler à travers ce processus, le chanteur québécois élevé en Jamaïque a demandé de l’aide à un autre très bon ami: un certain Poirier, avec qui il collabore occasionnellement depuis plusieurs années. «Ça faisait un bout qu’on avait un désir de faire plus de musique ensemble. C’est drôle parce qu’on est assez différents. Moi, j’aime bien la pop et, avec Poirier, c’est vraiment pas ça… Pour lui, quand ça peak dans le mix en studio, c’est pas nécessairement mauvais», dit-il, amusé. «Il m’a réellement fait découvrir une autre facette de la musique.»
»» Écoutez EP1 en entier jusqu’au 27 mars
Une route «plus difficile»
En plus de notre Poirier national, qui a produit le dancehall contagieux de Ready For, Face-T peut compter sur les riddims accrocheurs du collectif écossais Mungo’s Hi Fi et de l’emblème du reggae polonais Dreadsquad.
Ainsi, EP1 s’avère fort diversifié dans ses teintes musicales. «Je voulais pas quelque chose de reggae, de dancehall ou de rock steady… Je voulais un EP de Face-T!» envoie sans détour le chanteur trentenaire. «J’ai pas l’intention de me mettre dans une boîte, ni de me confiner à juste un style. C’est certain que la route est plus difficile quand tu fais ce genre de choix parce que les gens se demandent ce que tu fais.»
Partie intégrante de la scène reggae montréalaise depuis 1995, année où il a fait paraître sa première cassette qui l’a notamment amené à se produire au Quai des brumes quelques mois après, Face-T sait de quoi il s’agit quand il parle de route «plus difficile».
Deux décennies plus tard, il tire des leçons constructives de toute son évolution. «Par-dessus tout, il faut suivre sa passion et, surtout, ne pas avoir d’attentes concrètes. Quand tu fais de la création et que t’as trop d’attentes qui ne se matérialisent pas, t’es souvent déçu et, souvent, ça provoque de l’amertume. Or, l’amertume et la musique, ça ne va pas ensemble», explique-t-il, avant d’y aller d’un récit plus personnel.
«Avec Kulcha Connection, on a eu énormément de succès. J’étais très jeune et pas du tout préparé mentalement pour ça… Quand ça a droppé un peu, je comprenais pas ce qui se passait et je savais pas quoi faire. Ça m’a pris une couple d’années pour me relever», confie-t-il, avec une belle humilité.
«Maintenant, le plus important, c’est de continuer à faire la musique que j’aime. On s’entend que si je faisais du reggae dans le but de gagner ma vie avec ça… j’en ferais pas de reggae!»