Pandaléon : retour à la petite école
Musique

Pandaléon : retour à la petite école

Profitant d’un engouement de plus en plus prononcé depuis la sortie de son premier EP en 2014, le trio post-rock Pandaléon offre maintenant Atone, un album entièrement enregistré dans une ancienne école primaire.

Adeptes d’enregistrement studio anticonformiste, les deux frères Frédéric Levac (chant, claviers) et Jean-Philippe Levac (batterie), ainsi que Marc-André Labelle (guitares), ont délaissé la grange où ils s’étaient réunis pour enregistrer À chacun son gibier il y a deux ans.

Prêts à relever de nouveaux défis, les trois musiciens franco-ontariens ont plutôt choisi de s’installer dans une école primaire abandonnée de St-Bernardin, leur village d’origine situé dans l’est de l’Ontario.

«On est des freaks de son, de technique et d’équipement en général. On se souvenait que dans cette vieille école-là, qui date des années 1950, il y avait des rooms intéressantes. Chaque fois qu’on passait devant, on était intrigués», explique Frédéric Levac, qui y a étudié au primaire. «En plus, les tounes que j’avais commencé à écrire avaient des références à l’enfance et à la petite école. On a donc fait les démarches pour louer l’école en approchant le conseil scolaire. On savait pas encore ce qu’on allait faire, mais on savait qu’artistiquement, ça fittait.»

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Crédit : Julien Lavoie

En arrivant sur place, le défi a été de taille. Fermée depuis plusieurs années, en raison d’un manque d’élèves, l’école avait un criant besoin de revitalisation. «Y’a eu une semaine complète de ménage», se rappelle le chanteur. «Ensuite, on a dû faire des tests de son et de traitement acoustique. Dans les classes, y’avait plein de pupitres et ça sonnait vraiment cool, mais quand on les a tassés pour pouvoir y entrer nos instruments, ça sonnait trop vide. Y’a fallu mettre des panneaux dans les coins et faire pas mal d’essais.»

Ambiance de studio parfaite

Une fois bien installés, les musiciens ont toutefois pu profiter d’une ambiance de studio idéale. «Vu qu’on était nos propres boss, y’avait pas d’heures pour composer ou pour expérimenter. On n’était pas obligés d’arrêter à midi pour faire plaisir au soundman», indique Marc-André Labelle.

Agrémenté de bruits de pas, de claquements de portes et de sons inusités divers, notamment celui d’une mouche passée proche d’un micro au sous-sol (qu’on peut entendre sur Lecture), ce premier album officiel témoigne d’un travail minutieux au niveau du mixage et, plus généralement, des arrangements.

Cette fois, le trio a assuré la direction de l’album uniquement avec son «quatrième membre» Nicolas Séguin, plutôt que de s’en remettre à un réalisateur, comme il l’avait fait sur son EP avec Philippe Brault. «Au début, on avait pensé à le réengager, mais plus on avançait dans l’enregistrement, plus on s’imaginait son opinion, et on ne voyait pas vraiment ce que ça pourrait changer vu que tout était pratiquement fait», explique Frédéric Levac.

«Nous, on veut faire des disques. On n’a pas envie d’engager du monde pour faire nos disques», renchérit Jean-Philippe Levac, sans détour. «On n’est pas trop du genre à engager un réalisateur juste parce qu’il est cool.»

Au-delà de l’étiquette franco-ontarienne

Ce désir d’autonomie paraît sur l’ensemble d’Atone, un album somme toute moins calqué sur ses influences (Karkwa et Radiohead en tête) que le précédent EP. En trame de fond: les souvenirs d’enfance, la nostalgie et, donc, une chronique implicite sur St-Bernardin, là où réside toujours le groupe.

Fidèle à ses racines, il ne désire pas, pour l’instant, s’expatrier au Québec même si la reconnaissance s’y fait plus vive qu’ailleurs au Canada. «Je suis un gars de campagne avant tout. La ville, ça me rend malin», confie Frédéric Levac. «Et y’a quand même un marché francophone en Ontario et dans tout l’ouest aussi. Si l’on venait habiter à Montréal, par exemple, on serait moins direct avec Ottawa, et ça nous enlèverait probablement de belles opportunités.»

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Crédit : Julien Lavoie

Paradoxalement, le groupe désire s’affranchir de l’étiquette franco-ontarienne, qu’il juge parfois lourde à porter en raison de ce qu’elle implique. «Il y a une façon de penser qu’on déteste des Franco-Ontariens», affirme le batteur, flou, avant d’y aller plus directement. «Y’en a beaucoup qui n’aiment pas les Québécois, ni les Anglais, donc ils restent dans leur coin. Ils ne veulent pas sortir de là parce qu’ils ont peur de traverser les frontières.»

«Nous, on a grandi dans un village franco-ontarien, mais on ne juge pas important de le mentionner dans nos chansons, comme beaucoup d’autres artistes le font», poursuit-il. «Faut dire qu’à la base, on est loin d’avoir vécu les mêmes batailles linguistiques que les francophones du sud ou du nord de l’Ontario.»

Atone, disponible le 29 janvier. Lancement : le 2 février à la Cinémathèque québécoise (Montréal) et le 4 février au Arts Court (Ottawa).