Rap local : Taktika, High Klassified, Coresap et DJ Brace
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Rap local : Taktika, High Klassified, Coresap et DJ Brace

Chaque semaine, cette chronique vise à mettre en lumière les plus récentes sorties rap québécoises et à faire un étalage non-exhaustif des prochains shows hip-hop à ne pas manquer.  

Taktika, deux décennies plus tard //

Pionnier du rap de la capitale, le duo Taktika fait le point sur 20 ans de carrière, à l’aube d’un spectacle-bilan présenté dans le cadre du Festival d’été de Québec.

C’est sur une scène hip-hop en pleine gestation que Taktika a pris forme dans la deuxième moitié des années 1990. «Quand on a commencé, on avait pas vraiment de modèles, mis à part des groupes comme La Constellation, Rainmen et Dubmatique», explique T-Mo, rejoint par téléphone. «Pour nous, l’accomplissement ultime, c’était de sortir un album… On était pas vraiment capables de s’imaginer ce qu’il pouvait y avoir après.»

Quelques années après avoir fait ses premières armes sur les scènes de la Rive-Sud de Québec, le trio original (formé par T-Mo, B-Ice et Ben, qui a quitté hâtivement) poursuit alors son rêve et entreprend la création d’un premier album. Paru au printemps 2001, Mon mic, mon forty et mon blunt marque les esprits. «C’était le recap de notre jeunesse sur le party», se souvient T-Mo. «On parlait essentiellement de boisson, de rap et de drogue.»

À peine quelques semaines après, le trio prend part à l’aventure 83, collectif maintenant mythique qui a obtenu, avec son premier single homonyme, un succès à tout casser sur les ondes de MusiquePlus. Crus et sans détour, les textes du groupe sont écrits en joual, marquant ainsi une scission franche avec le rap franchouillard de la garde précédente du hip-hop québécois.

«À l’époque, c’était la norme de rapper avec un accent français», raconte T-Mo. «C’est Pagai (NDLR : défunt rappeur et membre fondateur du 83) qui nous a réunis en 1999 pour faire une chanson avec les meilleurs rappeurs de Québec. Il nous a tous convaincus de délaisser notre accent et nos influences françaises pour proposer quelque chose de plus authentique, sans personnage. Avant même qu’on envoie le clip à MusiquePlus, on a eu un buzz sur la Rive-Sud de Québec avec cette chanson-là. Ça a visiblement lancé notre carrière parce qu’en plus d’avoir du succès, ça nous a permis d’apprendre plein de choses, autant la réalisation d’albums et de clips que la production, le graphisme et les façons d’entertainer une foule. »

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Taktika obtient ensuite un engouement considérable avec son deuxième album L’affaire Taktika en 2005. Porté par le succès radio d’Un été chez nous, le duo enchaîne les spectacles partout au Québec, en plus d’obtenir, pour une seconde fois, une nomination dans la catégorie album hip-hop de l’année au Gala de l’ADISQ.

En 2007, les choses changent toutefois drastiquement dans la vie de T-Mo et de B-Ice. «Cette année-là, mon partner est allé en désintox, et moi je suis devenu père de famille. On a eu deux choix : soit on arrête de faire de la musique, soit on change notre façon de la faire», relate T-Mo. «Notre vie avait trop évolué pour qu’on continue à parler de party et de boisson. On pouvait pu dire les mêmes choses qu’avant. C’était une question d’intégrité… Un rappeur, ça doit absolument parler ce qu’il vit, sinon il devient un fake, et ça, c’est pas bien vu.»

«Ça nous a amenés à avoir des réflexions sur ce qu’on a vécu et sur ce qu’on vit», poursuit-il. «On a été dans les premiers rappeurs d’ici à aborder des sujets lourds comme le cancer, le suicide et la désintox.»

Plus «matures» et «authentiques», les albums Le cœur et la raison (2008), À bout portant (2011) et Résilient (2015) permettent ainsi au groupe de consolider son noyau de fans, tout en s’assurant de le renouveler grâce à «des productions actuelles, dans l’ère du temps».

Vingt ans après ses débuts, le duo reconnait que les choses ont beaucoup changé pour le hip-hop de la province. «C’est vraiment le jour et la nuit», dit T-Mo, en comparant les deux époques. «À nos débuts, la scène reposait sur certains artistes signés sur des majors. Il y avait même pas vraiment de fanbase! Depuis, la scène s’est développée et s’est solidifiée. On a plus de crédibilité aux yeux des médias.»

«De notre côté, c’est certain qu’on n’est pas  les artistes les plus en vue de la scène, mais on a su prendre les bons risques pour devenir des hommes d’affaires», ajoute celui qui est copropriétaire de l’étiquette et marque de vêtements Explicit Productions. «La seule affaire que je vois qui a pas vraiment changé, c’est que l’industrie musicale québécoise est toujours pas prête à nous mettre sur le même pied d’égalité que les autres styles. Tout ce qu’on entend à la radio ou presque, ce sont des copies conformes de Vincent Vallières et de Kaïn. Nous, on se compte chanceux parce qu’on a eu droit à un succès radio, mais bon ça fait déjà 10 ans de ça…»

Loin d’être amer, Taktika s’apprête à prendre d’assaut la scène principale du FEQ, le temps d’un spectacle rétrospectif de grande envergure. «En une heure, on va partir de nos nouvelles chansons pour aller vers nos vieux hits du début», explique T-Mo. «On a invité les gars du 83 parce que c’est certain que c’est une grosse partie de notre carrière. Reste juste à convaincre 2 Faces

Taktika – Scène Loto-Québec du Festival d’été de Québec – 16 juillet (20h)

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Nouveautés d’envergure //

High Klassified propose un clip saisissant pour 1250, chanson qui ouvre habituellement ses DJ sets. Les basses lourdes se conjuguent habilement aux rythmes intenses et à la mélodie déréglée.

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Le producteur hip-hop expérimental Coresap cultive son univers étrange avec audace sur Imposter.

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En vedette dans cette même chronique la semaine dernière, Charlie Shulz envoie la dose intense Headrush.

Le producteur/rappeur/chanteur joliettois Yen Dough présente le premier single de son prochain EP Dolphin.

Le champion manitobain des tables tournantes (montréalais et brooklynois à ses heures) DJ Brace se fait plaisir sur SMH, nouvel extrait du dernier tome de sa trilogie instrumentale.

Le maître français des End of the Weak Res Turner se joint à plusieurs complices (notamment notre champion québécois Monk.E) sur Caractère animal 3.

[youtube]oPJC4Rh9wXs[/youtube]

Top 3 shows //

3 : 5@7 pour 24,99

Après un lancement au Cercle la semaine dernière, le convoité vinyle du classique 4,99 d’Alaclair Ensemble sera officiellement lancé à Montréal lors d’un 5 à 7 qui s’annonce sympathique ce vendredi.

Aux 33 Tours (Montréal), 8 juillet (17h)

2 : Heartstreets

Le duo féminin R&B/rap Heartstreets sera en vedette au Festival international de jazz de Montréal ce soir.

Scène Turkish Airlines, Quartier des spectacles (Montréal), 7 juillet (22h)

1  : Rymz et Dead Obies

En attendant Mac Miller mercredi prochain au FEQ, les nouveaux héros rap locaux Rymz et Dead Obies réchaufferont la foule.

Scène Loto-Québec, Parc de la francophonie (Québec), 13 juillet (19h)

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