Alaclair Ensemble : Atterrissage de la navette
Musique

Alaclair Ensemble : Atterrissage de la navette

Habituellement animé par l’exploration ondoyante sans limites prédéfinies, le vaisseau galactique Alaclair Ensemble se pose sur un astre davantage circonscrit avec Les Frères cueilleurs.

«C’est l’album le plus rap d’Alaclair», admet Ogden, rejoint dans un mini-parc du Plateau avec ses collègues KNLO et Maybe Watson. «Pour nos deux derniers albums, on se permettait d’emprunter plein de directions. Là, on a voulu switch up la dynamique.»

Initiatrice de l’étiquette post-rigodon, qui lui a servi de terrain de jeu et de rempart pour expérimenter moult alliages musicaux depuis ses tout débuts, la troupe qui regroupe également Vlooper, Claude Bégin et Eman assume davantage ses racines hip-hop sur ce quatrième album.

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Bref, plus que jamais, Alaclair Ensemble s’impose comme un groupe plutôt qu’un collectif étoile. «Quand tu regardes le overall picture et que t’écoutes nos projets solos, c’est facile de penser qu’Alaclair, c’est juste le croisement de nos univers complètement différents», explique Watson. «Mais on est vraiment un groupe de musique, une unité. Le dernier disque, c’est entièrement Vlooper qui l’a réalisé.»

«Ça a été lui, le capitaine de l’équipe de basketball», image Ogden. «Dans une game, y a souvent un des gars qui la feel plus et qui est partout à la fois sur le terrain. Cette fois, Vlooper avait envie de tout niquer.»

«C’est probablement l’œuvre du Saint-Esprit», blague KNLO.

En vase clos

Fruit de deux sessions d’enregistrement dans un chalet, l’une en juillet 2015 et l’autre en janvier 2016, Les Frères cueilleurs a profité d’une intense période de création en vase clos. Depuis la création des Maigres blancs d’Amérique du Noir en 2013, cette méthode de travail sert plutôt bien les membres d’Alaclair Ensemble, autrement impliqués dans une horde de projets.

«Là-bas, t’as rien d’autre à faire que ça», relate Ogden. «T’as pas de rendez-vous de prévu, t’as pas d’Internet, t’as pas de blonde à aller voir…»

«La productivité est exponentielle», confirme KNLO.

Ainsi imposée, la bulle créative donne lieu à de multiples «brainstorms spontanés», souvent initiés par des anecdotes intestines. Fondateur de la ligue de street impro Le Punch Club, Ogden compare ces moments à la célèbre catégorie «fantasme de joueur», qui donne l’occasion à un improvisateur de réaliser «un vieux rêve de joueur» sur scène.

La conclusion de l’album, DWUWWYL (acronyme signifiant Do What U Want With Your Life), en est un bon exemple. «On était dans un club relativement vide, pis il y avait un gros beat uptempo qui jouait dans la place», se rappelle KNLO. «Wats pis moi, on a commencé à délirer en chantant à répétition le refrain de la track. C’est ça qu’on a voulu reproduire.»

Exilé en Ontario, le producteur Mash (omniprésent sur le classique premier album du groupe 4,99) a lui aussi laissé sa trace sur Les Frères cueilleurs, même s’il n’a pas pris part aux retraites de création dans les chalets. Son expression fétiche a inspiré ses six acolytes à créer une chanson en son hommage. «Mash vit dans le anglo side, et il répète toujours qu’il fait ses choses comme un humble French Canadien» raconte KNLO, sourire en coin. «On a adapté son expression à notre sauce. Quand tu veux un bon repas et une bonne bière, t’es juste un humble French Canadien

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Photo : Jerry Pigeon

Structure plus organisée

Le groupe poursuit ainsi sa relecture loufoque et conceptuelle de l’histoire canadienne, notamment par l’entremise du titre qui teinte l’ensemble de l’album.

«C’est un hommage aux Frères chasseurs», explique Ogden, à propos de cette organisation paramilitaire fondée par son alter ego Robert Nelson en 1838. «C’est ça qui a permis aux patriotes de faire une vraie tentative de révolution. Avant ça, leur structure était trop désorganisée. Près de 200 ans plus tard, nous, on reprend ça parce que, comme eux, on recherche la bonne fibre alimentaire et monétaire. Par contre, on sait assurément qu’en 2016, les Frères chasseurs seraient devenus des vegans… et donc des Frères cueilleurs!»

Le titre témoigne également de la structure maintenant plus organisée du Alaclair High. Signé sous l’étiquette 7e Ciel, le supergroupe fait paraître pour la première fois un album en magasin.

«Il y a des notions très pratiques qui ont expliqué notre fonctionnement dans le passé», explique Ogden. «Sortir 4,99 gratuitement sur Bandcamp, c’était une décision très spontanée. Pour les autres albums, on a fait la même chose parce que c’était juste plus simple comme ça. Mais après plus de cinq ans d’existence, la dynamique change. Comme un couple, on a passé la pure excitation du début, et fallait faire des ajustements pour être heureux. On a donc mis à jour l’infrastructure bas-canadienne.»

Plus fixe et ordonné, le vaisseau des Frères cueilleurs a désormais tout en son pouvoir pour mener la révolution qu’il a en partie instaurée sur la scène hip-hop québécoise, au tout début de la décennie.

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Les Frères cueilleurs
Disponible le 2 septembre

Lancement le 9 septembre au Cercle (Québec)
Lancement le 16 septembre au Club Soda (Montréal)