Rap local : CeasRock, Cannonhead, LK Tha Goon et Small Talk
Chaque semaine, cette chronique vise à mettre en lumière les prochains shows et les plus récentes sorties des scènes rap et hip-hop instrumental québécoises.
CeasRock, gagner et perdre //
Sur son nouveau projet W/L produit par le polyvalent Prince Club, le rappeur CeasRock réfléchit aux contrastes qui habitent sa vie.
Écrit en deux moments forts distincts, ce troisième effort a une portée plus intimiste que ses prédécesseurs. «Au début de l’écriture, j’avais un mode de vie bien spécial, où je faisais des trucs plus ou moins legit. Ça allait somme toute bien, j’avais de l’argent dans les poches et j’étais heureux. Ça a donné des chansons au contenu léger, vraiment l’fun. Puis, à un moment, j’ai vécu un évènement très négatif. En une couple d’heures, je suis passé du top of the world au rock bottom», dit-il, sans donner plus de détails.
Sans le sou, le Montréalais de 30 ans a voulu abandonner les sessions d’enregistrement de cet album en chantier : «Prince Club m’a fait comprendre que c’est exactement à ce moment-là que j’avais besoin d’écrire. Il m’a dit qu’on allait régler les affaires de cash plus tard et qu’on allait se concentrer sur la musique. Le contenu de mes paroles a changé, et j’ai adopté un ton plus sérieux, qui a donné naissance au concept du projet.»
Loin de la dépression, CeasRock a plutôt cherché à se sortir rapidement de sa malencontreuse situation, ce qu’on peut déceler à travers les messages somme toute optimistes de W/L, abréviation pour Wins/Losses. «J’étais pas prêt à rester en bas très longtemps. J’en ai profité pour prendre mes premières vacances à Tamarindo au Costa Rica et j’en ai écrit une chanson. Même dans ces moments pas faciles, il y avait des instants lumineux. Le contraire aussi est vrai : dans mes premières chansons écrites pour l’album, je me suis rendu compte que je prophétisais ce qui s’en venait. C’est là que j’ai réalisé l’énorme pouvoir des pensées et des paroles.»
Plus qu’une franche captation de ses derniers mois en dents de scie, W/L renvoie aussi au parcours sinueux du rappeur. Actif sur la scène rap montréalaise depuis une douzaine d’années, l’artiste a trimé dur pour faire valoir sa place.
Archétype du rappeur DIY aux moyens limités mais à l’ambition certaine, il a d’abord enregistré une multitude de mixtapes qu’il a lui-même vendues dans la rue. Satisfait de la réponse de son fidèle public, alors partiellement composé d’étudiants du collège Dawson qu’il fréquentait, CeasRock a ensuite mis les bouchées doubles pour la création d’un premier projet officiel.
Entièrement produit par 514 IndoRecordz (duo de beatmakers maintenant reconnu pour sa collaboration avec Les Anticipateurs), Zero Gravity marquait un renouveau pour le rappeur. «Ça m’a coûté cher à faire et j’ai pas fait de cash dessus. Ça m’a pris un certain moment avant de bounce back, car j’étais un peu déçu», confie-t-il. «À ce moment-là, ça faisait presque 10 ans que je faisais du rap et j’attendais toujours ce fameux moment où ça allait pop. En plus, j’avais tout mis en place pour que ça marche : j’avais un manager, un gars de PR, j’avais payé un blogueur…»
Après une courte période d’abattement, le rappeur a centré son énergie ailleurs, dans un programme de design graphique. «Ça m’a permis d’avoir un nouvel outlet créatif. C’est souvent dans les moments de découragement qu’on peut découvrir un nouveau côté de soi-même», analyse celui qui présente actuellement sa première exposition.
C’est donc avec un état d’esprit renouvelé que le Montréalais a enregistré DSGNRZ : ThePatternTape , une mixtape à l’esthétique plus brute et old school parue à l’été 2015. «D’emblée, je me suis dit que j’allais faire aucun bread avec ça. J’ai tout enregistré chez nous, j’ai fait le cover-moi-même, j’ai pas mis de cash dans le PR… Bref, j’ai rien investi. Paradoxalement, j’ai eu de meilleures réactions avec ce projet qu’avec Zero Gravity, car les gens ont cette perception de moi que je suis un gars de boom bap. L’affaire, c’est que j’ai grandi sur la musique pop des Backstreet Boys et de *NSYNC. Oui, j’ai apprécié les Cypress Hill, Soul Assassins et cie, mais à la base, je suis pas quelqu’un de super underground.»
De pair avec le producteur au background électronique Prince Club, qui a récemment travaillé avec la chanteuse pop Aaricia et le rappeur GrandBuda, CeasRock a donc renouvelé sa signature musicale pour W/L. «Prince a voulu m’amener en 2017 avec des sonorités up-to-date», explique le principal intéressé, qui dit avoir autant utilisé des échantillons de jazz japonais que de rock progressif. «Pour un gars d’EDM comme lui, c’est le vibe qui est important, alors on a vraiment mis l’accent là-dessus. Y’a donc fallu que je sacrifie un peu les lyrics pour vraiment miser sur mon énergie et mon delivery au moment présent. C’est pas la dernière fois de ma vie que je fais de la musique, alors j’aurai d’autres occasions de montrer mon côté lyrical.»
W/L – disponible dès vendredi
Nouveautés d’envergure //
Mélangeant indie R&B et hip-hop psychédélique, le duo Cannonhead propose un deuxième EP en quatre mois.
Sur une belle ascension en ce moment, LK Tha Goon se joint à Precise et Push Cake pour livrer l’un des hits de l’été de la scène rap locale.
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Le jeune collectif Susiety explore des horizons cloud rap sur cette nouvelle pièce.
Attendu pour ce vendredi, le premier projet du groupe Save Yours, PHOENIX, s’annonce comme l’une des belles sorties de l’année, à en juger par cette chanson aux teintes blues italiennes.
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Sur une production trap minimaliste lumineuse, YB vante les bonheurs de la vie.
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Le rappeur montréalais LoLo Boy s’allie avec son frangin sur cette pièce trap prometteuse.
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Bénéficiant d’une production puissante du jeune génie QuietMike, le rappeur Kevin Na$h brise tout sur Go Up.
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Prolifique ces jours-ci, Lowpocus rapplique avec Mask of Phonk.
Trois mois après avoir établi les bases d’une signature screamo-rap avec amideluxe, le producteur c r y p t ✞ ✞ ✞ (du collectif 9 9 9) expérimente des ambiances aussi sombres sur cette nouvelle compilation.
Également du collectif 9 9 9, Jei Bandit présente une série de beats à vendre.
Improvisateur de haut calibre, D-Track détruit tout sur son passage avec cet excellent freestyle.
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Le producteur et rappeur Nur Konnect propose Higher Vibes, un album aux influences boom bap marquées.
Asma y va d’un autre mix de qualité tiré de sa série Multiply, mettant notamment en vedette les récentes bombes de Kevin Na$h, Rowjay, Enima et Karyke.
Difficile à suivre avec ses nombreux alter-ego, Sikh Knowledge prépare un nouvel EP, thas sikh bro, qui contiendra notamment cet extrait accrocheur.
Le duo Small Talk livre un premier album homonyme aux influences world métissées.
NoKliché présente un nouveau clip tiré de son excellent projet MBOKA, lancé le mois dernier.
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Membre des collectifs La Fac et Team XXI, le musicien et producteur i c t dévoile toute son ingéniosité sur le complexe Sections cosmiques.
3 shows à voir //
Le festival en forêt de Béthanie revient pour une quatrième édition. Un peu moins axée sur le hip-hop local que lors des dernières années, la programmation mettra toutefois de l’avant quelques incontournables comme Walla P, GrandBuda, KNLO, Poirier et Dead Obies.
Béthanie, 28 au 30 juillet
Pour souligner les anniversaires des producteurs Tibe, Kendra and brtrnd., le collectif/promoteur Jus Pop présente une soirée avec Taima, Foliage, J Polo et fruits.
Blue Dog Motel (Montréal), 28 juillet (22h)
Point culminant du festival La Grosse Semaine, ce programme double présenté au Belmont mettra de l’avant les univers distincts mais compatibles de Lary Kidd et KNLO.
Le Belmont (Montréal), 28 juillet (22h)
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