Ces jours-ci, je suis à New York, non pas tant pour l’Armory Show, ni pour les autres foires d’art comme Volta ou Scope… Il y a bien sûr de très bonnes galeries et de bonnes œuvres dans ces événements, dont plusieurs québécoises (je vous en reparle), mais bon, je n’ai pas cette fascination pour les liens entre l’art et l’argent comme plusieurs de mes contemporains. Je suis en premier lieu à New York pour y voir des expos dans les musées et dans les galeries. Et dans Chelsea, deux présentations volent totalement la vedette.
À la Galerie Luhring Augustine (jusqu’au 16 mars), l’installation vidéo The Visitors, de l’artiste islandais Ragnar Kjartansson, est d’une grande intensité. Durant 64 minutes, sur neuf écrans est projetée une performance musicale. En fait, chaque écran montre un musicien dans une pièce de la Rokeby Farm (dans la vallée de l’Hudson) jouant d’un instrument (piano, accordéon, contrebasse, guitares, batterie) et chantant. J’ai vu des gens émus jusqu’aux larmes devant cette installation (dont certains de mes étudiants que j’avais emmenés en week-end culturel). Il s’agit d’une pièce qui parle de l’amitié, de la fragilité de la vie, de la possibilité de bâtir des choses ensemble, de la création collective… C’est beau et intelligent. Une oeuvre majeure.
À la Galerie 303 (jusqu’au 23 mars), Doug Aitken, présente 100 YRS. Il s’agit d’une installation multiforme qui transforme cette galerie en une sorte de grotte. Certains murs ont été comme troués, le plancher a été excavé pour laisser place à une nappe d’eau opaque et blanche où une sorte de fontaine s’écoule du plafond selon une rythmique contrôlée, parfois au compte-goutte, parfois en flots plus forts. Le son est amplifié par des haut-parleurs est nous donne vraiment le sentiment d’être projeté dans les tréfonds de la terre. La galerie d’art semble en ruine comme projetée dans un futur où l’art du présent serait déjà dépassé ou tout au moins classé. À moins que Aitken mette en scène l’après Sandy, ouragan qui avait touché avec force les galeries de ce quartier… Une fascination pour le désastre et la ruine qui nous dit comment le romantisme n »est pas très loin.