Alarmée, l’ADISQ réclame 15 millions au gouvernement québécois
Après avoir lancé un cri d’alarme la semaine dernière, en lien avec les intenses chamboulements qu’occasionne le streaming à l’industrie musicale québécoise, l’ADISQ passe en mode solutions et demande au gouvernement provincial un soutien additionnel de 15 millions $ sur deux ans.
Réunis à la Société des arts technologiques (SAT) jeudi matin, Solange Drouin, vice-présidente aux affaires publiques et directrice générale de l’ADISQ, et Claude Larivée, président de l’ADISQ, ont été clairs : le modèle actuel du streaming, qui a été négocié entre les services de musique en ligne et les grands majors internationaux, ne considère pas la réalité des entreprises indépendantes et des artistes d’ici.
«Le streaming est une technologie fantastique et nous l’adoptons avec enthousiasme», a dit Claude Larivée. «Mais ce qu’il faut aussi comprendre, avec le streaming, c’est qu’il nous impose, encore une fois, un nouveau système de revenus qui ne répond à aucune logique pour nous et pour nos artistes.»
Face à cette situation, l’ADISQ demande donc au gouvernement provincial de la soutenir, à raison de 7,5 millions $ par année pendant deux ans. Avec cet argent, l’association veut amorcer une «transition entrepreneuriale» visant à développer des «expertises de gestion, d’analyse, de stratégie et de mise en marché» en lien avec les récentes avancées technologiques qui touchent l’industrie de la musique.
Bref, l’ADISQ veut relever le défi de «l’excellence numérique» en développant «une stratégie de visibilité numérique performante et durable» sur les plateformes de streaming. «Par exemple, nous ne contrôlons pas les algorithmes qui se cachent derrière une plateforme comme Spotify, mais nous devons mieux comprendre comment nous positionner dans un tel écosystème», a précisé la directrice générale, rappelant aussi l’importance de bien mettre en valeur les artistes d’ici sur les listes de lecture.
Plan détaillé
Subventionnées à raison de 16% de son financement total (84% proviennent des ventes commerciales), les entreprises québécoises de la musique ont donc besoin d’une aide accrue pour entamer un «redémarrage» complet, selon l’ADISQ. Des 7,5 millions demandés annuellement au ministre de la Culture et des Communications, Luc Fortin, quatre «serviront à accroître l’accès des entreprises à une main-d’œuvre de qualité» notamment destinée à augmenter la visibilité des contenus québécois sur toutes les plateformes de streaming.
Deux millions auront comme finalité l’augmentation de la présence des artistes sur tout le territoire du Québec, tandis qu’un autre million servira à augmenter la production de nouveaux outils afin de favoriser la visibilité des artistes sur l’ensemble des plateformes. Le reste de la subvention servira notamment à la promotion de contenus.
Autrement, l’ADISQ demande au gouvernement fédéral de mettre fin à l’exception règlementaire qui s’applique aux services de streaming et qui leur permet donc de diffuser de la musique sans contribuer à l’essor de l’industrie musicale canadienne. «Je rappelle qu’en radio, une station peut verser jusqu’à un peu plus de 6% de ses revenus au titre de droits d’auteur», a mis en relief Madame Drouin, militant pour que le niveau de contribution des services de musique en ligne comme Spotify ou Deezer reflète «l’effet de cannibalisation qu’ils ont sur les ventes d’enregistrements sonores».
Comme c’est le cas depuis les tout débuts du piratage musical, l’ADISQ demande également au gouvernement fédéral de légiférer afin que les fournisseurs d’accès internet se responsabilisent «face au contenu qu’ils distribuent» et contribuent financièrement au développement des entreprises culturelles et des artistes.
Moffatt enthousiaste
Présente à la conférence, Ariane Moffatt a semblé enthousiaste face aux différents positionnements de l’ADISQ. «Je trouve que la demande financière est très minime et temporaire, et que les demandes de modifications règlementaires sont tout à fait on point. Ça ouvre la porte à des solutions importantes et positives, si elles sont entendues», a-t-elle dit, avant de recevoir une vague d’applaudissements.
Lors de la période de questions, Solange Drouin a tenu à justifier la légitimité de la demande financière de l’ADISQ : «Au niveau financier, faut se rappeler que le gouvernement du Québec a mis en place une politique du livre l’an passé avec des montants costauds de cet ordre-là. Quand le gouvernement voit qu’il y a un impact particulier dans un secteur, il est prêt à y mettre les moyens.»