The Planet Smashers : éviter de se prendre au sérieux
De passage à 77 Montréal la fin de semaine dernière, les légendes du ska montréalais The Planet Smashers souligneront sous peu leurs 25 ans de carrière. Un anniversaire qui tombe à point pour un groupe qui a, depuis longtemps, cessé de se prendre au sérieux.
Quand on le rencontre vendredi dernier en fin d’après-midi, Matt Collyer semble sur un nuage. Tout juste sorti de scène, le chanteur, guitariste et fondateur de Stomp Records arbore son sourire le plus contagieux et son chapeau Borsalino beige des grandes occasions. «C’était incroyable. Il y avait vraiment beaucoup de monde, et tout le monde dansait», nous résume-t-il dans un français cassé hautement sympathique.
Il y avait quelque chose de rafraîchissant à voir une bande aussi joyeuse sur scène en plein festival punk. Avec ses cuivres chaleureux et ses rythmes entraînants, le ska fait depuis toujours figure d’exception dans ce milieu aux guitares hurlantes et aux rythmes incisifs.
Encore aujourd’hui, le groupe doit d’ailleurs se produire devant des foules plus ou moins réceptives à cette dose d’enthousiasme. «On voit souvent beaucoup de gens avec les bras croisés devant nous. They just don’t like ska! Je me souviens d’un spectacle en 2001 lors d’une tournée avec Sick of it All, Death By Stereo et AFI. On jouait en plein milieu de la journée et, avant même qu’on commence, j’ai reçu un gros crachat sur mon pied de micro qui a commencé à grossir as it spins toward me. I was like : ‘’WOW!’’», dit-il, en riant. «Mais bon, aujourd’hui, on est plus acceptés. Parfois, certaines personnes nous huent quand on commence, mais après un certain temps, ils commencent à trouver ça chill. Ils comprennent qu’on est là pour faire le party.»
Officiellement formé en 1994, soit deux ans après une première version embryonnaire davantage garage que ska, The Planet Smashers a su gagner l’intérêt et le respect du public punk avec les années. L’an prochain, le 25e anniversaire du sextuor concordera avec le 20e anniversaire de son troisième album Life of the Party, un vénérable classique de notre scène locale. «On va également sortir un nouveau disque au printemps. Everything will happen!» s’exclame Collyer, fébrile.
Impressionnante dans un Québec où les groupes qui perdurent au-delà de deux décennies sont un fait rare, cette longévité est attribuable à la chimie entre Collyer et ses acolytes : le batteur Scott Russell, le saxophoniste Alexandre Fecteau, le claviériste Patrizio McLelland, le tromboniste Patrick Taylor et, surtout, le bassiste Dave Cooper, seul autre membre originel de la formation. «La clé, c’est d’aimer jouer avec ses amis et de constater la chance qu’on a de pouvoir continuer de le faire», résume-t-il. «Mais, ça n’a pas toujours été aussi évident. En 2001-2002, il y avait des membres un peu trop intenses, vraiment sérieux. On venait de connaître un beau succès avec Life of the Party et, là, on était obsédés par l’idée de make it. Ça nous amenait beaucoup de stress, et c’est vraiment quand ces gars-là sont partis du band qu’on est revenus dans la zone chill. Depuis, on est tous sur la même longueur d’ondes. La philosophie, c’est : ‘’Don’t take yourself too seriously!’’ Notre batteur Scott est la voix de la raison. Il est so cool!»
Le groupe connait également bien ses limites. L’époque des 150 spectacles par année est maintenant révolue, et les six amis mettent maintenant la musique en second plan dans leur vie, même si ce «passe-temps» occupe la majeure partie de leurs fins de semaine. «Entre 2002 et 2007, on faisait vraiment beaucoup de tournées, et c’était vraiment intense. Moi, maintenant, j’ai des enfants, et les gars ont tous des jobs. On doit être à 30 ou 40 shows par année. Autrement, c’est toujours assez difficile de trouver du temps pour se réunir.»
Cette nouvelle réalité influe évidemment la production du groupe. Après avoir habitué ses fans à des sorties d’album aux deux ans entre 1995 et 2005, les Planet Smashers ont ralenti la cadence depuis une dizaine d’années, ne faisant paraître que Descent Into the Valley en 2011 et Mixed Messages en 2014.
Déjà bien entamé, le neuvième album de la formation a été écrit et composé dans la collégialité. «Tout le monde apporte ses idées, et c’est vraiment cool. La plupart du temps, Dave et moi, on amène les premières ébauches, et les autres, they make it good! En ce moment, on a 18 chansons, mais on va seulement en faire 11, et on va se permettre de mélanger le hardcore, le worldbeat, le jazz et, même, le new wave… ce qui est plutôt drôle car on détestait ce genre à l’époque», dit Collyer, en riant. «Reste que le résultat va être un album de ska très typique des Planet Smashers. Après plus de 20 ans, on ne se casse plus la tête à se réinventer. On a mis les hard feelings de côté et on se laisse aller.»