Rap local : Naya Ali, l’importance de croire en soi
Chaque semaine, cette chronique met en lumière l’oeuvre des rappeurs et des producteurs québécois les plus intéressants du moment. Au programme : entrevue, revue non-exhaustive des nouveautés de la semaine et aperçu des prochains spectacles à voir.
Entrevue //
Avec Higher Self, Naya Ali dévoile une confiance inébranlable, celle d’une rappeuse prête à tout pour atteindre ses objectifs.
Le titre de ce premier EP en carrière (qu’on pourrait librement traduire par «une version améliorée de soi-même») incarne l’attitude de Naya Ali. «Cet EP, c’est le voyage qui m’a permis de me retrouver après avoir vécu différents évènements malheureux. Pour plein de raisons, je sentais que je n’avais pas le contrôle sur ma réalité et je ne pouvais pas accepter ça. J’ai donc fait appel à mon higher self pour changer le cours des choses. Là, j’en suis à la première étape.»
Née en Éthiopie et élevée dans le quartier Notre-Dame-de-Grâce à Montréal, la rappeuse est une mélomane aguerrie depuis l’enfance. Après avoir écrit ses premiers poèmes à l’adolescence, elle a commencé à rapper à 19 ans, sans toutefois ressentir qu’elle était à sa place. «Je commençais à obtenir un peu de reconnaissance dans la ville, à faire des shows ici et là avec des amis, mais la musique que je faisais n’était pas 100% moi, car je ne savais pas encore qui j’étais vraiment. À 23 ans, j’ai donc complètement arrêté le rap pour me concentrer sur mes études à Concordia, là où j’ai fait un bac en affaires publiques, une mineure en espagnol et un programme de deuxième cycle en relations publiques. Quand je suis arrivée sur le marché du travail, j’ai commencé différents projets, mais peu à peu, j’ai perdu espoir en ce que je faisais. Le retour vers la musique a été une forme de thérapie.»
Parue en septembre 2017, la chanson Ra Ra a donné à Ali un élan de confiance insoupçonné. «C’est le premier single que j’ai sorti, et ça a été un mini-buzz instantané. Ça m’a fait comprendre que tout ce qu’on veut avoir dans la vie est possible. La plupart des gens déploient beaucoup d’énergie à travailler pour quelqu’un d’autre, à tout mettre en place pour que cette personne réalise son rêve. Pourquoi ne pas prendre ce même investissement d’énergie et le mettre dans nos propres projets? C’est ce que j’ai compris et c’est ce qui est devenu mon mantra. Il faut prendre possession de sa réalité.»
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Avec cette pièce comme carte de visite, l’artiste de 30 ans n’a pas mis de temps à capter l’attention de plusieurs joueurs de l’industrie hip-hop québécoise, notamment de Rafael Perez, président de l’étiquette Coyote Records. «C’est mon gérant qui avait un meeting avec Rafael pour parler d’un autre artiste que moi. À un certain moment, elle a mentionné mon nom et, quand Raf a entendu ce que je faisais, il a tout de suite accroché. Personnellement, je ne cherchais pas absolument à signer avec une étiquette, mais là, je sentais que j’avais trouvé les bonnes personnes.»
Dans la dernière année, la rappeuse a construit les chansons de Higher Self en étroite collaboration avec le producteur Kevin Dave. Inspirée par des rappeurs américains ingénieux comme J. Cole, 6lack et Kendrick Lamar, qui ont tous la particularité de s’intéresser aux nouvelles tendances du hip-hop tout en ayant une attirance pour le soul, le R&B et autres musiques fondatrices du genre, Ali a à d’abord cherché à créer une musique simple, sans trop de fioriture. «J’aime l’approche minimaliste d’un J. Cole, tout comme j’aime le caractère très fort de Kendrick, et les ambiances texturées et mélancoliques de 6lack. Avec Kevin, on a échafaudé un son avec tout notre bagage musical en tête. Ça donne un résultat assez trap, mais c’est pas ce qu’on recherchait absolument comme ligne directrice. C’est juste là-dessus que mes textes résonnaient le plus.»
À l’image du titre, les textes de ce mini-album traduisent la philosophie de Naya Ali. Alors que Ra Ra s’impose comme une dose d’empowerment percutante dans laquelle elle fustige les personnes qui tentent de la décourager ou de la distraire dans sa quête vers le succès, Ali rappelle l’importance de croire en soi et Out The Dirt, l’importance d’aimer ce qu’on fait. Sur Piece of Mine, la rappeuse se fait plus vulnérable et se confie sur une relation amoureuse. «C’est un récit plus personnel, une réflexion sur le don de soi. Quand tu vis une relation comme celle que j’ai vécue, tu donnes une partie de toi à l’autre et, une fois que c’est fait, tu ne peux plus jamais la retrouver, cette partie-là.»
Bref, Naya Ali se livre avec humilité sur Higher Self. Très proactive ces jours-ci, elle planche sur la conception d’un premier album complet, qui devrait paraître au printemps prochain.
Nouveautés d’envergure //
Loud met un terme à son «année record» avec un clip percutant et unique pour TTTTT, chanson la plus introspective de son premier album solo.
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Entourée de FouKi, Eman et KNLO, la Brown Family (fka Brown) revient avec Nervous, premier extrait de bon augure de son deuxième album officiel, prévu pour 2019. Au passage, le trio familial dévoile un b-side, la chanson Plus de sauce en collaboration avec Karma.
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Le label Ghost Club Records et le promoteur Multiply MTL tâte habilement le pouls de la scène rap montréalaise avec We Don’t Die We Multiply, une compilation qui rassemble notamment Mori$$ Regal, ST, Kevin Na$h et nul autre que le légendaire Imposs.
Mené par un flow posé et une production vaporeuse aux influences jazz, le duo THe LYONZ livre 2nd U (Pt. I), l’une des belles surprises de cette fin d’année très chargée.
Cumulant plusieurs spectacles en Asie et en Europe, le rappeur montréalais L.Teez se lance officiellement avec un premier EP : The Half Full.
Épaulé par le producteur VNCE CARTER, Mike Shabb présente une toute nouvelle facette de lui, délaissant sa voix rugueuse et basse au profit d’un flow plus accrocheur.
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Flawless Gretzky se fait plus intimiste et doux que jamais sur On My Own, chanson hip-hop R&B bien construite.
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Yung Duce fait preuve d’une évolution notable avec ce deuxième vidéoclip en carrière.
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Kris The $pirit se renouvelle sur Lemonade, chanson qui annonce la sortie de sa mixtape The Prana.
Révélation de premier plan de la scène hip-hop instrumentale montréalaise, Major lance la lourde et puissante 2057.
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Les producteurs Nimbus2k et Buvard (associés au collectif XXI) poursuivent leurs expérimentations trap lo-fi saturées avec Ю.
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Avec sa proposition emo-trap incisive, Lord Gasp marche dans les pas des maîtres américains du genre.
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Le Montréalais Young Mic prépare la sortie de son premier EP Trillgod avec Up In There, un premier extrait qui met en valeur son flow mélodieux.
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Après s’être révélé aux côtés de Rowjay sur Rolls Royce, 8Ruki s’affiche avec Karyke sur MATRIX.
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Ross lance son troisième projet solo à la propension trap, Jimmy Rozay.
Un peu plus d’un an après Bleen World, le Montréalais GNino reprend du service avec Pullin’ Up.
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Armé de son trap créole brut et trivial, Pakouri se joint à Big Pills sur Pull Up.
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Signé sous BBT Wreck-Hurdz, Bullet Ghost y va lui aussi d’un trap créole incisif sur Bit la cho.
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Le Français Ness s’allie au rappeur québécois White-B.
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Gaza propose le troisième clip de sa série Bienvenue à Montréal, cette fois en collaboration avec Dix.
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Waahli met un peu de soleil dans notre automne avec le clip de Kulenge, une dose d’énergie imparable.
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L’infatigable Nicholas Craven se joint à Pay$o sur la soul psychédélique Last Round.
Nicholas Craven fait aussi équipe avec Mach-Hommy d’Atlanta sur Lapriyè.
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Lascko, beatmaker de Québec, y va d’un troisième EP instrumental.
Un clip sympathique pour la douce Bon débarras, tirée du plus récent EP de Baggies.
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3 shows à voir //
Signé sous l’étiquette locale Secret City Records, le Torontois Shad s’amène au Québec pour présenter les chansons de son excellent album A Short Story About a War. Il sera accompagné du Montréalais Maky Lavender en première partie.
Le Ministère (Montréal), 23 novembre (20h)
Alaclair Ensemble / Lancement à Québec
Alaclair Ensemble vient défendre son cinquième album, Le sens des paroles, avec un lancement très attendu dans son patelin.
Impérial Bell (Québec), 23 novembre (21h)
Souldia – Lancement à Montréal
Après avoir chauffé ses fans de la capitale la semaine dernière, Souldia s’amène à Montréal pour un spectacle au Club Soda qui s’annonce pour être présenté à guichets fermés.
Club Soda (Montréal), 24 novembre (21h)
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