Slipknot au FEQ : brutal à souhait
Musique

Slipknot au FEQ : brutal à souhait

Slipknot a mis le feu aux Plaines d’Abraham lundi soir dans le cadre du Festival d’été de Québec. Récit d’un spectacle brutal à souhait.

Dès la fin de la prestation convenable de Killswitch Engage, les dizaines de milliers de festivaliers rassemblés sur les Plaines brandissent les poings dans les airs en guise d’agitation. Dans la foule, l’excitation est palpable, même si plusieurs spectateurs ne savent pas vraiment à quoi s’attendre.

«Connais-tu les tounes du band?» demande un festivalier à son ami.

«Je connais le nom des tounes, mais pas les tounes», lui répond-il, d’une sincérité désarmante.

Au même moment ou presque, un gars de la sécurité nous enjoint à nous tasser au plus vite. Son vif sifflement laisse s’échapper un flux involontaire de gouttes de bave sur nos visages. Sans doute un hommage bien subtil à la chanson Spit It Out, l’une des plus mythiques de la formation.

À vingt minutes du spectacle, une immense banderole à l’effigie du groupe se hisse pour cacher la scène, histoire de garder intacte la surprise scénographique. Malheureusement, quelques minutes après, la bannière s’effrite, et la menace d’un retard commence à planer. 

Mais à 21:48 bien précises, juste après la salutaire/prophétique For Those About to Rock d’AC/DC, les neuf merveilles masquées de l’Iowa embarquent sur scène avec, en toile de fond, un rectangle illuminé rouge sang. Rythmes indistincts, distorsion, cris inaudibles, la formation entame sa prestation dans un chaos disparate et trépidant. Le terrain est fertile pour une mutation bien rodée vers la légendaire People = Shit, scandée à bout de bras par pas mal tout le monde, même le gars qui connaît juste le nom des tounes.

«Are you motherfuckers ready?» demande Corey Taylor à ses disciples, avant de virer complètement maboul sur (sic). À ses côtés, ses sbires expulsent leur colère dans leur jeu tapageur, précis et tumultueux. La cohésion entre les neuf acolytes est évidente, même si on sent parfois qu’ils sont sur le pilote automatique. En témoigne leur setlist stationnaire, calqué (ou presque) d’un soir à l’autre.

Après l’acerbe Get This, Corey Taylor s’adresse à ses adeptes en français. «Merci, merci beaucoup! Bonsoir mes amis! Ça va, ça va, ça va, ça va, ça va??? Hahahaha!» lance-t-il, presque jovial derrière son masque affolant. «It’s so fuckin’ good to be back here in Quebec, one of the greatest place in the world (…) We got a lot of good shit tonight (…) Écoutez!»

L’éclairage vire au bleu pour Unsainted, l’un des plus récents singles de la formation. Avec son refrain doucereux à l’impulsion emo pop, la pièce calme le jeu, sans nécessairement soulever l’intérêt. Beaucoup plus grinçante, Disasterpiece met la table pour l’un des hymnes les plus fédérateurs du groupe, Before I Forget, accompagné de quelques élans pyrotechniques.

«Let’s go to hell together!» implore Taylor, entonnant la démoniaque The Heretic Anthem, au plus grand bonheur des diablotins qui n’attendaient rien de moins de ce périple agité. L’éclairage revire au rouge un instant, mais la puissante tension s’épuise au profit de Psychosocial, autre chanson au refrain emo sans réelle saveur. Heureusement qu’à point nommé, les musiciens savent redonner de l’ardeur à leur offre, en coordonnant avec une impressionnante minutie les frappes de batterie et les mouvements de basse. C’est tout particulièrement le cas sur The Devil in I, Prosthetics et Vermilion, livrées l’une à la suite de l’autre.

Custer, Sulfur et All Out Life suivent, sans réellement connaître un engouement aussi relevé. C’est le «calme» avant la tempête. Une tempête du nom de Duality qui s’abat sur la foule, juste après que Taylor ait brandi un drapeau du Québec. Déchaînés comme jamais, les spectateurs forment des dizaines de cercles de moshpit un peu partout sur les Plaines.

À l’avant, c’est le branle-bas de combat, mais si un frère tombe, on le relève. Même dans un show de Slipknot, il y a encore des lois qui tiennent. Par contre, pour les chaussures, les casquettes, les lunettes, c’est une autre histoire. Surtout au rappel. 

Sans surprise, Spit It Out décuple les probabilités qu’on revienne avec un soulier en moins. On s’accroche comme on peut au dos d’un bonhomme bien charpenté, en espérant qu’il ne nous renvoie pas son coude dans la face. Puis, après l’abrupte Surfacing, on revient à la surface, le souffle court, bien suintant.

«What we got here is family», nous envoie Taylor en guise de conclusion amicale.

C’est important de rester serein dans la violence.

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